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Les États-Unis et l'OTAN préparent l'opinion publique à la guerre terrestre contre la SerbiePar le comité de rédaction Il y a moins d'une semaine, selon les dires mêmes du président Bill Clinton, la plupart des Américains n'avaient jamais entendu parler du Kosovo et n'auraient pu même le situer sur la carte du monde. Maintenant, après plusieurs jours de bombardement intense, la campagne d'escalade des médias sur le sort des Kosovars d'origine albanaise prépare la scène pour l'engagement des troupes américaines dans la guerre contre la Serbie et l'occupation militaire à long terme du Kosovo. Dans un article bien représentatif de ce qui apparaît dans les journaux et sur les chaînes de télévision américaines depuis ces derniers jours, Charles A. Kupchan, qui a servi au conseil de sécurité national pendant le premier mandat de Clinton, écrivait dans le Los Angeles Times : « Maintenant que la campagne aérienne est engagée, le président n'a d'autre choix que de préparer le pays et les forces armées des États-Unis à une guerre terrestre massive dans les Balkans... « Les attaques aériennes vont très certainement affaiblir les défenses yougoslaves et les unités stationnées au Kosovo et dans les environs. Mais l'engagement de troupes terrestres est essentiel pour les expulser du Kosovo et ainsi mettre fin aux massacres des Albanais. » Lors d'entrevues effectuées à la télévision nationale, deux sénateurs de premier plan Shelby de l'Alabama et McCain de l'Arizona ont déclaré que l'administration Clinton devait se préparer à déployer des troupes au sol au Kosovo. « Je n'ai jamais entendu parler d'une guerre, a déclaré Shelby, qui ait été entièrement gagnée que par des raids aériens. » Affirmant que le désir d'éviter les pertes humaines ne devrait pas déterminer les objectifs stratégiques des États-Unis, McCain a déclaré « nous sommes dedans, et nous devons gagner. Conséquemment, il faut utiliser tous les moyens pour cela. » Alors que l'administration Clinton continue de déclarer qu'elle n'a pas « l'intention » d'envoyer des troupes terrestres au combat, elle a également démontré des signes de changement imminent dans sa politique en se déclarant surprise de la violence des attaques perpétrées par l'armée serbe contre les Albanais du Kosovo. Si cela est vrai, cela voudrait dire que la politique poursuivie par l'administration Clinton en lançant sa campagne de bombardement était non seulement imprudente, mais aussi extraordinairement stupide. Mais il est toutefois impossible de croire que les événements tragiques qui ont été les premiers résultats de cette guerre n'ont pas été prévus par le gouvernement des États-Unis. La nature même des exigences américaines et de l'OTAN que la Serbie cède le contrôle du Kosovo, accepte l'expulsion de la minorité serbe de cette province, se soumette à l'occupation étrangère et à la destruction de sa souveraineté nationale et accepte une révision de ses frontières internationales ne pouvaient faire autrement que de provoquer une éruption de violence contre les Kosovars d'origine albanaise dès le déclenchement d'une guerre totale. C'est le comble du cynisme pour les États-Unis que de feindre l'horreur face au sort des Kosovars d'origine albanaise alors qu'ils ont appuyé politiquement et militairement les mêmes méthodes lorsqu'elles étaient employées par la Croatie dans son offensive de 1995 contre les Serbes de la province de Krajina. Comme le New York Times reconnaît, « l'Occident regardait de l'autre côté » alors que 200 000 Serbes subissaient la purification ethnique en Krajina et que des dizaines de milliers d'autres étaient expulsés de leur foyer en Bosnie du simple fait que les actions de la Croatie servaient les intérêts stratégiques des États-Unis. Il n'est pas difficile de prouver que l'invocation des « Droits de l'Homme » et de l' « autodétermination » par l'administration Clinton pour justifier son massacre en Serbie n'est que duplicité et hypocrisie. Ce qui nous préoccupe également ici, ce sont les conséquences de la rapide progression et de l'escalade de la violence militariste des États-Unis. La Serbie est en effet le quatrième pays bombardé par les États-Unis en moins de sept mois. Depuis août 1998, des bombes et des missiles de croisière américains ont également été lancés contre le Soudan, l'Afghanistan et bien entendu l'Iraq. La guerre contre la Serbie risque d'être l'intervention militaire la plus sanglante et la plus ambitieuse des quatre. Ce déploiement extraordinaire de puissance militaire par les États-Unis fait pressentir que l'impérialisme américain est arrivé à un point tournant important dans son histoire. Depuis l'effondrement de l'Union Soviétique, les groupes d'experts du gouvernement, des forces armées et des cercles universitaires aux États-Unis sont plongés dans un long débat sur l'étendue et le potentiel de l'hégémonie américaine. Pour eux, l'une des sources perpétuelles de frustration a été l'opposition persistante et répandue aux États-Unis, malgré la guerre du Golfe, à la question des engagements militaires à l'étranger. De plus en plus d'articles sont publiés dans les médias politiques américains où cette opposition est décrite comme une survivance malheureuse des traditions isolationnistes et de la débâcle du Vietnam, accompagnés de déclarations brutales selon lesquelles les États-Unis doivent être prêts à utiliser leur toute puissance pour sécuriser et défendre leurs intérêts dans le monde. Une tentative significative de justification populaire au militarisme impérialiste a récemment été publiée dans le Sunday Magazine du très influent New York Times. Le principal chroniqueur en politique étrangère du Times, Thomas Friedman, a en effet soutenu que l'utilisation agressive de la puissance militaire américaine est le corollaire naturel de la prédominance des États-Unis au sein de la nouvelle économie mondiale. « Pays ayant le plus profité de l'intégration économique mondiale, nous avons la responsabilité de nous assurer que ce nouveau système puisse survivre. Voilà qui est particulièrement important à une époque ou le monde a été et continuera d'être secoué par des crises économiques pouvant rapidement s'étendre d'un continent à l'autre... « Soutenir la mondialisation constitue la clef de voûte de notre intérêt national. La mondialisation est américaine. » Et dans ses remarques les plus provocantes, Friedman rajoute : « La main cachée du marché ne pourra jamais agir sans un poing caché McDonald ne peut en effet prospérer sans McDonnell Douglas, le constructeur du F-15. Et le poing caché qui maintient le monde sûr pour les technologies de Silicon Valley s'appelle l'armée, l'aviation, la marine et le corps des Marines des États-Unis... Sans l'Amérique à son poste (America on duty), il ne pourrait y avoir d'America Online. » Malgré sa suffisance, l'article de Friedman est significatif en ce sens qu'il met en relief le lien indissoluble actuel entre la mondialisation économique et la poussée hégémonique mondiale des États-Unis. Contrairement à toutes les grandes puissances capitalistes qui, du fait de leur expérience historique et dans les conditions actuelles sont obligées de fixer certaines limites à leurs ambitions, la bourgeoisie américaine n'interprète ses activités qu'en termes mondiaux. Pour elle, l'intégration du marché mondial est synonyme de domination des entreprises transnationales américaines. Elle perçoit le triomphe du capitalisme mondial comme celui des États-Unis. Il y a 65 ans, dans un brillant aperçu de la dynamique de l'impérialisme américain, Léon Trotsky écrivait : « Pour l'Allemagne, il s'agit d' « organiser » l'Europe. Les États-Unis doivent « organiser » le monde. L'histoire est en train de confronter l'humanité à l'éruption volcanique de l'impérialisme américain. » Ce jour est maintenant venu.
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