Le gouvernement et l’armée israéliens ont commis des «crimes contre l’humanité» systématiques, dont des actes d’extermination, au cours de l’assaut qu’ils ont mené pendant huit mois contre Gaza, a constaté une commission clé des Nations unies dans un rapport publié mercredi 12 juin
Ce rapport est la première enquête approfondie des Nations Unies sur les événements qui se sont déroulés depuis le 7 octobre et se base sur des entretiens détaillés avec des victimes et des témoins. La commission, composée de trois personnes, est dirigée par Navi Pillay, ancienne responsable des droits de l’homme aux Nations unies.
La commission d’enquête conclut que l’armée et le gouvernement israéliens, avaient «commis les crimes de guerre suivants: la famine comme méthode de guerre; le meurtre ou l’homicide volontaire; le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des civils et des biens à caractère civil; le transfert forcé; la violence sexuelle; l’atteinte à la dignité de la personne; et [la violence sexuelle et sexiste] assimilable à la torture ou à un traitement inhumain et cruel».
Elle estime qu’Israël est responsable de crimes contre l’humanité. Selon son rapport, «l’extermination; le meurtre; la persécution sexiste visant les hommes et les garçons palestiniens; le transfert forcé; et la torture et les traitements inhumains et cruels ont été commis».
Ce rapport donne un poids supplémentaire aux accusations de Karim Khan, procureur principal de la Cour pénale internationale, selon lesquelles le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, et le ministre de la Défense Yoav Gallant, sont coupables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.
Si le génocide de 2023-2024 à Gaza partage des éléments avec les précédentes attaques israéliennes contre Gaza, il est d’une ampleur et d’une intensité totalement différentes. Le rapport d’enquête affirme que «l’opération militaire et l’attaque d’Israël sur Gaza ont été les plus longues, les plus importantes et les plus sanglantes depuis 1948. Elle a causé d’immenses dégâts et pertes en vies humaines».
Il observe que «les hostilités entre 2005 et 2023 ont fait moins d’un dixième des morts depuis le 7 octobre». La Commission a également observé une tendance à l’augmentation du nombre de femmes et d’enfants tués par rapport aux hostilités précédentes».
Le nombre massif de victimes civiles était dû au fait que, selon les termes de la commission, «le gouvernement israélien a donné [à l’armée israélienne] l’autorisation générale de viser largement et sans discernement des lieux civils de la bande de Gaza».
Les bombardements massifs et systématiques de civils palestiniens s’accompagnaient d’un effort délibéré pour affamer la population de Gaza et la soumettre à une forme de punition collective.
Le rapport constate qu’«Israël a utilisé la famine comme méthode de guerre, affectant l’ensemble de la population de la bande de Gaza pour les décennies à venir, avec des conséquences particulièrement négatives pour les enfants». Il s’agissait d’un crime de guerre.
Il conclut: «Au moment de la rédaction de ce rapport, des enfants sont déjà morts de malnutrition aiguë et de déshydratation. Par le siège qu’il a imposé, Israël a fait de la privation de produits de première nécessité une arme, coupant l’approvisionnement en eau, nourriture, électricité, carburant et autres produits essentiels, y compris l’aide humanitaire. Cela constitue une punition collective et des représailles contre la population civile, deux violations évidentes du droit international humanitaire ».
Il documente le blocage systématique de l’entrée de nourriture, d’eau et d’électricité dans la bande de Gaza, justifié par la proclamation du ministre la Défense Yoav Gallant, d’un «siège complet… pas d’électricité, pas d’eau, pas de nourriture, pas de carburant. Nous combattons des animaux humains et nous agissons en conséquence».
La commission a pris note des déclarations des autorités israéliennes en vue de «prendre en otage la population de la bande de Gaza pour atteindre des objectifs politiques et militaires», des actes visant à infliger «une punition collective à l'ensemble de la population pour les actes de quelques-uns, ce qui constitue une violation flagrante du droit humanitaire international».
Si les médias américains et israéliens ont affirmé maintes fois que les forces du Hamas ayant participé à l’attaque du 7 octobre contre Israël avaient commis des viols collectifs, l’enquête elle, conclut que la commission «n’a pas été en mesure de vérifier de manière indépendante ces allégations» et qu’elle «a trouvé certaines allégations spécifiques fausses, inexactes ou contredites par d’autres preuves ou déclarations et les a écartées de son évaluation».
De manière critique, le rapport a également documenté la mise en retrait de l’armée israélienne pendant le 7 octobre et le fait que l’armée israélienne ait délibérément visé des civils israéliens ce jour-là.
La commission a constaté que la réaction de l’armée israélienne à l’attaque du 7 octobre avait été «considérablement retardée et, en de nombreux endroits, totalement inadéquate». Et ce, malgré qu’elle eût été en possession des plans de bataille détaillés du Hamas pour l’attaque. Le jour de l’attaque, les forces israéliennes avaient été délibérément retirées de la frontière.
Une fois arrivées, les forces israéliennes avaient commencé à attaquer les otages israéliens et d’autres civils. «La Commission a recueilli une déclaration d’un équipage de char des FSI [forces de sécurité israéliennes] confirmant que l’équipage avait appliqué la directive Hannibal en tirant sur un véhicule qu’il soupçonnait de transporter des soldats des FSI ayant été enlevés ».
La directive Hannibal vise à empêcher la capture d’Israéliens par les forces ennemies, même au prix de leur vie, et implique que les FDI [Forces de défense israéliennes] devraient tuer des Israéliens plutôt que de les laisser tomber aux mains du Hamas.
Le rapport poursuit ainsi: «La Commission a également vérifié des informations indiquant que, dans au moins deux autres cas, les FSI avaient vraisemblablement appliqué la directive Hannibal, ce qui a entraîné le meurtre de 14 civils israéliens. Un tir d’hélicoptère des FSI a tué une femme alors qu’elle était enlevée à Gaza par des militants de Nir Oz. Dans un autre cas, la Commission a constaté que les tirs de chars israéliens ont tué une partie ou la totalité des 13 otages civils détenus dans une maison à Be'eri».
L’enquête conclut que «les autorités israéliennes n’ont pas réussi à protéger les civils dans le sud d’Israël sur presque tous les fronts. Elles n’ont notamment pas déployé rapidement des forces de sécurité suffisantes pour protéger les civils et les évacuer des lieux où ils se trouvaient le 7 octobre. En plusieurs endroits, les FSI ont appliqué la «directive Hannibal» et tué au moins 14 civils israéliens.
Son rapport mentionne encore que «les déclarations des responsables israéliens reflètent la politique et la pratique consistant à infliger des destructions massives, à tuer un grand nombre de civils et à procéder à des transferts forcés».
Il montre clairement qu’en dépit d’une campagne de calomnie systématique menée par l’ensemble de l’establishment politique et des médias américains sous l’égide de la Maison-Blanche de Biden, les manifestations de masse en cours contre le génocide de Gaza ne sont pas motivées par l’antisémitisme, mais par l’opposition à des violations massives du droit international.
Les auteurs de ce crime de guerre massif ne sont pas simplement en Israël, ils sont à Washington. Le gouvernement Biden a systématiquement financé, armé et soutenu politiquement le génocide. Il a fourni plus de 100 livraisons d’armes distinctes à Israël et défendu chacun des massacres délibérés de civils perpétrés par Israël, y compris le massacre de Nuseirat qui a fait 274 morts le week-end dernier.
(Article paru en anglais le 13 juin 2024)