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Côte d'Ivoire: le président Gbagbo attise le conflit ethnique

Par Chris Talbot
15 décembre 2000

Laurent Gbagbo, devenu président de Côte d'Ivoire en octobre avec le soutien de la France et après avoir évincé le dictateur militaire Guéï, a fait tenir, le 10 décembre dernier, des élections législatives controversées.

Ces élections eurent lieu en dépit de l'état d'urgence et du couvre-feu décrétés dans l'ensemble du pays suite à des heurts entre la police et les manifestants du principal parti d'opposition, le Rassemblement des républicains (RDR). Plus d'une vingtaine de personnes furent tuées lors de ces affrontements. Les membres du RDR protestèrent contre la décision de la Cour suprême excluant leur dirigeant, Alassane Ouattara, de participer aux élections sous prétexte qu'il n'est pas de nationalité ivoirienne. Les Nations unies et l'Union européenne retirèrent leurs observateurs et condamnèrent les élections.

Ouattara déclarait en France qu'il revendiquait l'organisation de nouvelles élections. Cet ancien fonctionnaire du Fonds monétaire international (FMI) avait déjà été empêché par la même instance de prendre part à l'élection présidentielle d'octobre. Ouattara, un musulman originaire du nord du pays - le sud étant surtout chrétien - est accusé de ne pas être d'ascendance ivoirienne et d'être originaire du pays voisin, le Burkina Faso.

La question de la nationalité ivoirienne avait été gonflée par Gbagbo et, avant lui, par Guéï au détriment des nombreux immigrants vivant dans le pays. Il existe des rapports selon lesquels des gangs armés de machettes auraient attaqué les manifestants du RDR dans la capitale Abidjan et ce avec le consentement tacite de la police. Ces heurts faisaient suite à un rapport selon lequel la police paramilitaire aurait, la semaine précédente, battu à mort le secrétaire personnel d'Ouattara. Le RDR a protesté contre le fait que plusieurs de ces dirigeants aient été sévèrement battus alors qu'ils étaient détenus par la police. Durant la période qui a suivi les élections, 171 personnes ont été tuées, en grande partie suite à des attaques de la police contre des partisans du RDR.

Après qu'Ouattara ait été empêché d'être candidat aux élections, le RDR avait boycotté les élections législatives. Dans 29 circonscriptions sur 32 dans la région du nord de la Côte d'Ivoire - une place forte du RDR - aucun scrutin n'eut lieu, les partisans du RDR ayant détruit le matériel électoral et chassé les fonctionnaires. Des dirigeants du nord ont émis la menace que le nord ferait sécession et, dans Kong la ville natale d'Ouattara, des fonctionnaires ainsi que des gendarmes furent forcés de partir après que des jeunes de la région se soient armés et aient brûlé leurs maisons. Le Patriote, un quotidien pro-RDR, publiait en première page une carte de Côte d'Ivoire où l'on voyait le nord séparé et dont la légende disait « La Côte d'Ivoire au bord de la sécession. »

Le danger ne réside cependant pas seulement dans la séparation du nord musulman. La question de la nationalité menace à présent de plonger le pays dans la guerre civile. Jusqu'à 50 pour cent de la population de Côte d'Ivoire sont des immigrants. Attirés par des possibilités d'emploi et par un développement économique plus important, il étaient venus, au cours de plusieurs décennies, du Burkina Faso et d'autres pays voisins.

Au fur et à mesure que les cours du cacao continuaient de chuter - la Côte d'Ivoire est le principal producteur de cette récolte destinée à la vente - la pauvreté et le chômage connurent en raison du programme d'ajustement structurel imposé par le FMI une montée vertigineuse. Au sud du pays, l'élite dirigeante d'Abidjan s'est de plus en plus portée à encourager les divisions ethniques et religieuses. Le parti de Gbagbo, le Front populaire ivoirien (FPI), a remporté 91 sièges parlementaires sur un total de 225, le Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI) en remporta 70. Le PDCI, dirigé par Konan Bédié, avait été au pouvoir durant des décennies jusqu'au moment où, en décembre dernier, le général Guéï organisa un coup d'Etat militaire. Ce parti souscrit également au programme du nationalisme ivoirien.

Gbagbo semble déterminé à rester au pouvoir malgré le fait de s'être attiré à présent le courroux des gouvernements occidentaux, y compris ceux de la France et des États -Unis, pour avoir exclu Ouattara des élections. Les États-Unis et les banques occidentales soutiennent Ouattara en tant qu'économiste du libre marché et il avait été prévu de l'installer dans le gouvernement de Gbagbo.

Contrairement aux États-Unis, la France n'a pas demandé le renouvellement des élections. Le parti (FPI) de Gbagbo a des liens avec le Parti socialiste du premier ministre français Lionel Jospin. La France a également fait pression pour que soit octroyé à la Côte d'Ivoire un crédit d'urgence de l'Union européenne. Comme l'explique le magazine Africa Confidential, « Si Gbagbo progresse de manière convaincante à stabiliser le pays et à encourager la réconciliation avec le RDR d'Ouattara, il pourra compter sur un important soutien diplomatique et économique de Paris. »

Selon le Washington Post, Gbagbo avait convenu avec le RDR de reporter d'une semaine les élections législatives. Cela leur aurait permis de faire appel auprès de la Cour suprême afin de lever l'interdiction de la candidature d'Ouattara, étant donné que des documents prouvant sa nationalité ivoirienne auraient pu être produits. Au lieu d'annoncer l'accord à la télévision comme prévu, Gbagbo envoya son ministre de l'Intérieur pour annoncer que les élections auraient lieu comme initialement projetées.

Il a été rapporté que les diplomates français qui avaient traité l'affaire entre Gbabgo et le RDR étaient « furieux » et qu'ils « s'engageaient à supprimer la majorité de l'aide ». Les diplomates américains étaient également en colère et « les États-Unis envisageaient de bloquer la reconduction de toute aide ». Il pourrait bien en résulter que, non seulement le pays soit entraîné dans une guerre civile mais que l'ensemble de l'Afrique occidentale et dont la Côte d'Ivoire était autrefois le centre économique, soit également déstabilisé.

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