Suite à l'annonce par le président américain Donald Trump en février de la «politique d'investissement America First», désignant la Chine comme un adversaire étranger menaçant la «sécurité nationale» des États-Unis, le président Lai Ching- te de la République de Chine (ROC), également appelée Taïwan, lui a immédiatement emboîté le pas, qualifiant la Chine de «force étrangère hostile» le 13 mars. Lai a présenté 17 mesures visant à garantir la «sécurité nationale» de Taïwan. La plupart de ces mesures sont déjà mises en œuvre depuis des années.
Trois de ces mesures ont été récemment mises en place, avec des implications de grande portée pour Taiwan, la Chine et le monde.
La première est le rétablissement du procès militaire pour ceux qui sont en service militaire actif, en temps de paix comme en temps de guerre. Cela implique que les jeunes et les hommes en âge de porter les armes peuvent être rappelés au drapeau. Les déserteurs seraient condamnés à mort.
Deuxièmement, les citoyens chinois favorables à l'unification de Taïwan avec la Chine se verraient interdire l'entrée à Taïwan. L'écrasante majorité des Chinois soutient la réunification de l'île avec la Chine. Cela implique que les échanges culturels et universitaires futurs seraient difficiles, voire impossibles.
De plus, les résidents chinois à Taiwan doivent renoncer à leur enregistrement de résidence chinoise et à leur passeport chinois avant de demander la résidence permanente à Taiwan.
La réunification nationale est inscrite dans la Constitution de Taiwan, qui désigne Taïwan et la Chine continentale comme ses territoires. La République de Chine (Taiwan) considère la République populaire de Chine (RPC) comme une entité politique et non comme un pays étranger.
L’obligation de renoncer à la citoyenneté chinoise et l’interdiction des discours en faveur de l’unification impliquent que le gouvernement dirigé par le Parti démocrate progressiste (DPP) a transformé la constitution en lettre morte en l’absence d’une proclamation formelle de l’indépendance de Taïwan.
L’administration Trump n’a pas critiqué ces 17 mesures, indiquant que Washington a donné son accord à cette démarche.
Un exemple illustre la mise en œuvre des nouvelles politiques annoncées. En mars, le ministère de l'Intérieur taïwanais a ordonné à Zhenya Liu, une mère chinoise, de quitter le pays «volontairement» avant le 25 mars, sous peine d'expulsion.
Cette ordonnance a été formulée sur la base de pseudo-arguments juridiques selon lesquels ses publications sur les réseaux sociaux en faveur de l’unification constituaient une menace pour la «sécurité nationale» et la «stabilité sociale» et ne constituaient donc pas une forme de liberté d’expression.
Liu a épousé un Taïwanais et a élevé ses trois enfants à Taïwan. Elle n'a jamais commis de crime ni été inculpée. Son appel a été rejeté d’emblée par la Haute Cour administrative de Taipei, qui n'a accordé aucune attention au regroupement familial.
Des agitateurs d'extrême droite des réseaux sociaux ont fomenté des campagnes virales de mise à l’index et lancé des menaces de mort sur ses enfants.
Depuis mars, trois Chinoises, dont Liu, ont été contraintes de quitter le pays ou expulsées. Elles laissent leurs enfants à Taïwan et se voient interdire l'entrée sur le territoire pendant cinq ans.
On compte environ 380 000 Chinois mariés à des Taïwanais. Les résidents chinois qui refusent de suivre la ligne officielle qui est de considérer la Chine comme une «force étrangère hostile» subiraient le même sort.
Début avril, l'Agence nationale de l'immigration de Taïwan a adressé une notification à plus de 10 000 résidents chinois, leur demandant de soumettre, dans un délai de trois mois, les documents légaux attestant de leur renonciation à l'enregistrement de leur domicile chinois. Tout manquement à cette obligation entraînerait la révocation de leur enregistrement de domicile à Taïwan.
La demande a été formulée conformément à l'amendement de 2004 à l'ordonnance régissant les relations entre les Taïwanais et les Chinois du continent. Les articles modifiés furent interprétés et promulgués différemment à l'époque. Cette récente évolution risque d'annuler le statut de citoyen de la République de Chine (Taiwan) et l'enregistrement résidentiels des conjoints chinois à Taïwan.
Les résidents chinois vivent dans la crainte d'être expulsés. Quelques-uns ont parlé à la presse sous couvert d'anonymat. Face à la panique générale, l'agence a proclamé le 10 avril que les conjoints chinois qui «respectent les lois» et «s'identifient à la République de Chine» n'avaient rien à craindre.
Fin mars, un groupe de professeurs, sociaux-démocrates ou staliniens, lança une pétition en ligne comparant implicitement ce qui se passé à Taiwan à la montée d’Hitler et mettant en garde contre le danger d’une dictature imminente.
La pétition a déclaré à juste titre que ces mesures illégales et inconstitutionnelles visent à la fois à cibler les citoyens chinois et à réprimer la dissidence politique dans le pays.
Leur argument est le suivant :
Suite à la levée de la loi martiale en République de Chine, Taïwan et la Chine ont bénéficié des dividendes de la paix et du commerce bilatéral.
En 2015, le président Ma Ying-jeou du gouvernement du Kuomintang (KMT de Taiwan) et le président de la RPC Xi Jinping se sont rencontrés à Singapour. Ce sommet, le premier depuis la fin de la guerre civile en 1949, a offert une occasion unique de renforcer les relations entre les deux rives du détroit.
Une telle évolution est toutefois préjudiciable aux intérêts du DPP, qui est «le saboteur le plus flagrant de l’État de droit et une menace pour la sécurité de Taïwan».
Depuis février 2022, le gouvernement DPP prône le slogan «L'Ukraine aujourd'hui, Taïwan demain» en soutien à la guerre soutenue par les États-Unis et l'OTAN. Il ignore qu'une nouvelle phase de la stratégie américaine est marquée par le changement de politique de Trump envers l'Ukraine et «une reconfiguration de l'ordre politico-économique mondial». Cela fait craindre que «Taïwan soit traité bien plus durement que l'Ukraine».
La présence militaire américaine en Asie de l'Est a peu de chances de défendre efficacement Taïwan, et le coût des conflits avec la Chine est prohibitif. Par conséquent, les États-Unis sont plus ou moins prêts à «abandonner Taïwan et à la retirer de la première chaîne d'îles».
Pour éviter une guerre avec la Chine, le DPP doit renoncer à son approche conflictuelle envers elle. Ce faisant, Taïwan peut jouer un rôle important dans l'apaisement des tensions entre les deux rives du détroit et contribuer à la «paix mondiale».
On ne peut pas revenir en arrière dans l’histoire
Cette pétition exprime un fort désir de paix et un sentiment anti-guerre parmi les universitaires. Cependant, l'idée qu'un accord entre les élites dirigeantes chinoises et taïwanaises puisse apporter la paix relève du vœu pieux.
Il est de règle que les candidats du KMT et du DPP à la présidence doivent obtenir l'approbation de la bourgeoisie impérialiste américaine. Il n'y a aucune exception. Les factions rivales de la classe dirigeante se disputent les faveurs des États-Unis et ne rendent des comptes qu’à l'impérialisme américain.
Avant l'élection présidentielle de 2012 à Taïwan, l'ancien directeur de l'Institut américain de Taïwan (l'ambassade américaine de facto), Douglas Paal, a publiquement soutenu la politique chinoise du candidat du Kuomintang Ma Ying-jeou à la présidence, déclarant: «Elle est bénéfique pour les intérêts américains. C'est notre priorité absolue.»
Il critiqua la candidate du DPP à la présidentielle, Tsai Ing-wen, affirmant que sa position sur la Chine accentuerait les tensions entre les États-Unis et la Chine lors de la prochaine élection présidentielle américaine et de la succession au pouvoir en Chine.
Pour le dire franchement, le régime du KMT obtint le statut «digne» d'«allié» et conclut la «paix» avec la Chine avec l'approbation des États-Unis. En 2015, le gouvernement du KMT sous Ma était un chien d'attaque en laisse.
Les États-Unis n'accepteraient tout simplement pas le déclin de leur économie face à celle de leur rival chinois. Si le KMT avait remporté les élections présidentielles, les États-Unis l'auraient opposé à la Chine. Le KMT n'est pas une alternative au DPP au pouvoir. C'est une autre voie vers la ruine, à savoir une guerre ouverte entre la Chine et les États-Unis.
En outre, l’expression «reconfiguration de l’ordre mondial» fait implicitement référence à la montée rapide du fascisme aux États-Unis et en Europe, ainsi qu’au réarmement européen, sans les identifier.
La dictature de Trump a imposé un règne de terreur sur les campus universitaires américains, enlevant et détenant des étudiants opposés au génocide [des palestiniens]. Son programme de surveillance «Catch and Revoke» (attraper et révoquer), basé sur l'IA, est déployé pour suivre les publications des étudiants internationaux sur les réseaux sociaux, révoquer leurs visas et les expulser.
Les attaques contre les réfugiés, les travailleurs migrants, les étudiants et les résidents permanents, ainsi que l'interdiction de toute forme de dissidence politique, sont une tendance mondiale alimentée par les partis d'extrême droite et soutenue par les États bourgeois. Il s'agit d'une attaque contre la classe ouvrière internationale dans son ensemble.
Suite à la rencontre de Trump avec le président russe Vladimir Poutine, les puissances européennes craignent que la politique «America First» de Trump ne les prive du butin de la guerre des États-Unis et l'OTAN, et elles sont prêtes à obtenir leur «juste part» par des moyens militaires, y compris des confrontations directes avec la Russie et l'impérialisme américain.
Le président Emmanuel Macron a proposé d'augmenter les dépenses militaires annuelles de la France à 5 pour cent du PIB. Selon le Premier ministre britannique Sir Keir Starmer, il est prêt à déployer des troupes au sol et des avions en Ukraine aux côtés de la France. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a dévoilé en mars un plan de défense de 800 milliards d'euros.
En bref, les puissances européennes ont répondu à l'impérialisme américain en s'armant et en se réarmant aux dépens de la classe ouvrière internationale. Les masses laborieuses du monde entier se retrouvent toutes proches d’un affrontement entre puissances nucléaires.
Le virage rapide vers l’extrême droite du gouvernement DPP ne fait pas exception et est inextricablement lié à la crise toujours plus profonde du capitalisme mondial, en particulier aux États-Unis.
La pétition n'aborde pas les questions fondamentales qui sous-tendent l'expulsion des résidents chinois, l'intensification de la campagne américaine de guerre contre la Chine et la nécessaire défense des droits sociaux et démocratiques de la classe ouvrière. Elle apaise plutôt l'opposition populaire à la guerre déjà existante et la canalise derrière une autre faction de la bourgeoisie taïwanaise.
Il ne fait aucun doute que le régime du DPP est composé de fanatiques dérangés qui cherchent à asseoir l'hégémonie mondiale des États-Unis. Mais pour comprendre pourquoi le KMT n'est pas un moindre mal comparé au DPP, et pourquoi la tâche d'une paix démocratique et durable ne peut être confiée au KMT et au Parti communiste chinois (PCC), nous devons examiner les questions suivantes.
Comment le DPP est-il devenu «l'opposition» à la fin des années 1980? Quel rôle le KMT et l'impérialisme américain ont-ils joué dans cette évolution? Que veulent dire les sociaux-démocrates et les staliniens lorsqu'ils parlent de «paix»?
Le DPP, un rejeton du KMT
Nori Shih, ancien président du DPP (mai 1994-mars 1996), a souligné la pertinence politique de l'incident de Kaohsiung pour les deux premières questions. Il fut emprisonné pour insurrection en 1962. Le régime d'extrême droite du KMT lui a ensuite arraché toutes ses dents sous la torture. À 22 ans, ce ne fut qu'une partie de son calvaire.
L'incident de Kaohsiung fut une répression d'une manifestation pro-démocratie à Kaohsiung, à Taïwan, le 10 décembre 1979, pendant la période de la loi martiale (1949-1987).
En 1979, Shih, alors directeur général du mensuel Formosa Magazine, et ses collègues organisèrent une manifestation pour exiger la fin de la loi martiale et l'interdiction des partis politiques. Des voyous du KMT attaquèrent des manifestants pacifiques. Les organisateurs furent qualifiés de «gangsters» et furent par la suite arrêtés, inculpés et traduits en cour martiale.
À la suite de l'incident de Kaohsiung, Shih a été condamné à la réclusion à perpétuité lors du procès militaire qui a suivi.
Selon Shih, 15 avocats de la défense, qui n'avaient aucune implication préalable dans des activités démocratiques clandestines ou des cercles dissidents, sont apparus de nulle part et ont proposé de servir d’avocats de la défense.
De plus, «aucun d'entre eux n'a défendu la campagne démocratique lors du procès militaire». Ils ont simplement demandé la «clémence», à l'instar des avocats de la défense pénale. Par conséquent, plutôt que de constituer une véritable équipe de défense, ils ont consciencieusement participé à un simulacre de procès visant à dissimuler les crimes perpétrés par la dictature du KMT, a souligné Shih.
Selon les archives des journaux des porte-parole du KMT, ce sont les accusés qui ont défendu leurs principes démocratiques avec «intransigeance» et «sans complexe». Ils ont plaidé non coupable.
La participation aux équipes de la défense a cependant servi à fournir à ces avocats des références «démocratiques» pendant la prétendue transition de Taiwan vers la démocratie.
Il est à noter que la quasi-totalité des membres dirigeants du DPP (créé en 1986) ont été impliqués dans l'incident de Kaohsiung, soit comme accusés, soit comme avocats de la défense. Sous le régime du DPP, ces avocats ont occupé des postes de haute autorité dans l'État.
Chen Shui-bian, avocat de la défense dans l'incident de Kaohsiung, a été élu président de la République de Chine en 2000 et 2004. L'ancien président de la République de Chine et président du KMT (1988-2000), Lee Teng-hui, et Chen étaient connus pour leurs relations père-fils.
En 1986, un an avant que la loi martiale ne soit levée par le KMT, le DPP a tenu sa réunion fondatrice et son premier rassemblement public au Grand Hôtel de Taipei, le même lieu désigné par le régime d'extrême droite pour accueillir les chefs d'État étrangers, les diplomates et les proches du KMT.
Selon Shih, Chiang Peng-chien, membre fondateur du DPP, son premier président et avocat de la défense dans l'incident de Kaohsiung, lui a avoué en 1999 qu'il avait auparavant agi en tant qu'agent du KMT pour espionner le frère aîné de Shih.
Un épisode survenu lors d'une élection présidentielle illustre parfaitement les tensions internes entre deux camps d'une même équipe. En 2008, le candidat du DPP à la présidentielle, Frank Hsieh, a accusé le candidat du KMT, Ma Ying-jeou, titulaire d'une carte verte, de déloyauté envers Taïwan et son peuple.
Ma a travaillé comme agent du KMT entre 1974 et 1981, tout en obtenant une maîtrise à l'Université de New York, puis un doctorat à l'Université Harvard. Non seulement il a espionné les étudiants taïwanais à l'étranger, mais il a également été rédacteur en chef et directeur de la publication en anglais Free Chinese Monthly , dirigée par le KMT, sous divers pseudonymes.
Le magazine critiquait la République populaire de Chine, la gauche et l'indépendance de Taïwan depuis l'extrême droite. Ma était très fier d'avoir écrit l'article «Mythe et réalité des émeutes de Kaohsiung», largement diffusé au Congrès américain.
Hsieh ne vaut pas mieux Il était avocat de la défense lors de l'incident de Kaohsiung, puis président du DPP et Premier ministre sous la présidence de Chen Shui-bian. Ma accusait Hsieh d'être un agent du KMT.
Les gouvernements successifs de Taïwan pourraient facilement dissiper les accusations portées par Shih et Ma en déclassifiant les dossiers relatifs aux agents infiltrés et à la chaîne de commandement de l'État policier. Ces dossiers restent cependant fermés, une situation qui profite aux factions rivales de l'élite dirigeante taïwanaise.
Le KMT a attribué la fin de la loi martiale à la bienveillance et aux réformes du président de la République de Chine, Chiang Ching-kuo. Le DPP s'est fait passer comme opposant au KMT d'extrême droite, tout en laissant de côté le rôle joué par l'impérialisme américain dans le maintien de la dictature d'extrême droite pendant quatre décennies et dans la création du DPP.
Le DPP, copie conforme du KMT
Les interdictions du DPP sur les propos en faveur de l'unification sont analogues à la criminalisation des discours sur l'indépendance de Taïwan par le KMT dans les années 1980. Tous deux ont affiché leur mépris pour les droits démocratiques.
En 1989, Cheng Nam- yung, fondateur du magazine d'information Freedom Era, fut cité à comparaître pour rébellion pour avoir prôné l'indépendance de Taïwan. Pour éviter d'être arrêté, il s'enferma dans les bureaux du magazine.
Cheng, intellectuel de gauche, n'éprouvait aucune hostilité envers les masses laborieuses chinoises. Le terme «indépendance» désignait l'indépendance politique et l'opposition à la dictature barbare du KMT, qui prétendait être le seul gouvernement légitime représentant l'ensemble de la Chine. C'est contre cette Chine illégitime et ses gangsters que Cheng s'est opposé. Il ignorait tout du continent et de sa population. [1]
Il a expliqué que ce qu’il avait fait était une expression de la liberté d’expression garantie par la Constitution de la République de Chine et a insisté sur le fait de «se battre pour une liberté d’expression à 100 pour cent».
Au petit matin du 7 avril 1989, le chef de la police Hou Yu- ih exclut toute négociation avec Cheng, puis ordonna et supervisa une violente descente dans son bureau. Cheng s'immola par le feu pour protester contre la répression d'État. Il jura, dans son dernier souffle: «Le KMT ne peut pas m'arrêter; il ne peut que s’emparer de mon cadavre.»
Après sa prise du pouvoir, le DPP transforma Cheng, homme de principes, en martyr luttant pour l'indépendance de Taïwan vis-à-vis de la RPC. La falsification de l'histoire ne s'arrête pas là.
Hou Yu- ih fut promu chef de l'Agence nationale de police par le président Chen Shui-bian (DPP) et nommé chancelier de l'Université centrale de police par le président Ma Ying-jeou (KMT).
Le conflit entre les factions rivales de la bourgeoisie taïwanaise s'est à nouveau enflammé lorsque Hou s'est présenté aux élections comme candidat du KMT à la mairie de New Taipei.
En 2018, Chang Tien-chin, vice-président de la Commission de justice de transition, a été enregistré en train de se vanter du rôle joué par la commission en tant que «bureau de l’Est», un organe de police secrète et d’espionnage géré par des eunuques pendant la dynastie Ming pour criminaliser et éradiquer les opposants au pouvoir.
Le vice-président ajouta: «Il serait regrettable que nous ne manipulions pas l'opinion publique contre Hou» en raison de son ancien poste de chef de la police. La commission était une agence indépendante créée par le gouvernement du DPP sous la présidence de Tsai Ing-wen.
Lee Teng-hui, qui avait auparavant soutenu le DPP et Chen Shui-bian, était bien connu pour son lien père-fille avec Tsai.
La commission était une mascarade, conçue pour donner au DPP un vernis de « justice de transition» et une terminologie à consonance de droits de l’homme après qu’il ait été nourri, formé et élevé pour devenir la section dominante de la classe dirigeante sous la direction de l’impérialisme américain.
La fraude politique de la transition vers la «démocratie» a servi d'instrument à l'impérialisme américain, tout comme la dictature du KMT. Toutes deux ont contribué à consolider la domination américaine sur l'île et l'Asie de l'Est. Les deux factions sont irréconciliablement hostiles à la classe ouvrière, tant sur le plan national qu'international. (article en anglais).
Hou était candidat du KMT à la présidentielle de 2024. Son élévation au poste de chef de l'Agence nationale de police, puis de candidat à la présidentielle, témoigne du fait que les représentants du KMT et du DPP sont des camarades en tout sauf en nom.
Qu'y a-t-il dans un nom ? Ce que nous appelons « paix »
Il est intéressant d'explorer pourquoi les sociaux-démocrates et les staliniens considèrent Ma Ying-jeou comme un artisan de la paix. Le mot «paix» signifie «aucune invasion chinoise de Taïwan». Selon cette définition, Taïwan contribue à la «paix régionale» et à la «stabilité» en renforçant sa «position» d'«État légitime». Soutenir l'impérialisme américain revient à promouvoir la «stabilité» et la «paix mondiale». De même, le DPP, «saboteur le plus flagrant de l'État de droit et menace pour la sécurité de Taïwan», doit embrasser la «paix» en engageant le dialogue avec la Chine.
Il n'y a aucune contradiction entre soutenir la barbarie impérialiste et œuvrer pour la «paix». Par exemple, Ma Ying-jeou (KMT) et Tsai Ing-wen (DPP) ont décerné à l'ancien secrétaire américain à la Défense Donald Rumsfeld et à l'ancien secrétaire d'État américain Mike Pompeo l'Ordre de l'Étoile brillante avec Grand Cordon, respectivement en 2011 et 2022.
Le KMT et le DPP se sont tous deux enthousiasmés pour le génocide de Gaza et les massacres criminels contre les masses laborieuses du Liban, du Yémen et de la Syrie. Leurs divergences sur l'Ukraine et la Chine sont purement tactiques.
Tout comme Ma, les inquiétudes exprimées par les professeurs à propos de la «paix» ou du «halte aux interventions des États-Unis à Taïwan» ou concernant le retrait de la première chaîne d'îles, illustrent leur soutien à l'impérialisme américain comme garant ultime de la sécurité de Taïwan. Il est pour le moins naïf de prétendre que l'on peut soutenir l'impérialisme américain tout en s'opposant au nationalisme taïwanais et à la campagne de guerre américaine contre la Chine.
La «paix» fragile instaurée par le KMT et le Parti communiste chinois a disparu depuis longtemps. Le monde est désormais dominé par les plans de guerre américains et européens visant la Chine et la Russie.
Le régime stalinien n'a aucune réponse progressiste aux provocations militaires américaines incessantes, à la guerre économique et au bellicisme de la bourgeoisie taïwanaise, alimenté par les États-Unis. Sa seule réponse est de mener des exercices militaires répétés et de grande envergure autour de Taïwan.
La réponse socialiste nécessaire
Alors que l'impérialisme américain a lâché ses chiens d'attaque, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays, en réponse à l'aggravation des crises sociales, la désignation des résidents chinois comme boucs émissaires et le fait que le régime du DPP les ait qualifiés d'«étrangers» dangereux doivent être perçus comme une attaque frontale contre la classe ouvrière internationale dans son ensemble et comme une composante du projet fasciste «America First». La classe ouvrière doit y répondre.
Il y a un siècle, Lénine posait la question essentielle:
Faut-il se demander s'il y avait, sur le terrain du capitalisme, un moyen autre que la guerre de remédier à la disproportion entre, d'une part, le développement des forces productives et l'accumulation des capitaux, et, d'autre part, le partage des colonies et des 'zones d'influence' pour le capital financier?
Il a incité la classe ouvrière internationale à renverser le capitalisme, principale cause de la guerre, de l'exploitation de classe et de l'oppression nationale, et à rejoindre la lutte pour le socialisme. Ses réflexions sont plus pertinentes que jamais.
Les droits sociaux et démocratiques pour certains ne sont des droits pour personne. La lutte pour ces droits et contre l'oligarchie, le fascisme et la guerre ne peut se limiter aux frontières nationales. Ce combat ne peut pas non plus être confié à une faction de la bourgeoisie, qu'il s'agisse du KMT, du PCC stalinien ou du Parti démocrate. Quelles que soient leurs divergences tactiques, ces forces réactionnaires partagent une haine viscérale de la classe ouvrière internationale et du socialisme. Elles considèrent que faire la guerre de classe, à l'intérieur comme à l'extérieur du pays, comme la seule issue à la catastrophe sociale et économique croissante du capitalisme.
La lutte contre l'oligarchie, le fascisme et la guerre, ainsi que pour l'unité de la classe ouvrière internationale, est une tâche révolutionnaire de notre temps. Notre combat doit être guidé par un programme politique clair et conscient, mobilisé politiquement et socialement, et coordonné à l'échelle internationale.
Le WSWS a écrit:
Le socialisme ne peut être atteint que par le développement de la lutte des classes. La révolution qui jettera les bases politiques du socialisme est préparée au cours d'innombrables luttes menées par la classe ouvrière, aux États-Unis et dans le monde, pour promouvoir ses intérêts et défendre ses droits.
L'Alliance ouvrière internationale des comités de base (IWA-RFC [acronyme en anglais]) œuvre au développement d'«organisations de base indépendantes, démocratiques et militantes de travailleurs d'usines, d'écoles et de lieux de travail à l'échelle internationale». L'IWA-RFC sert de «centre névralgique de coordination de l'opposition mondiale aux diktats de l'oligarchie capitaliste».
Mais la tâche essentielle à laquelle sont confrontés les travailleurs avancés, et surtout la jeune génération, est de se consacrer à la construction du Comité international de la Quatrième Internationale comme parti mondial de la révolution socialiste.
Une paix véritable est impossible sous le capitalisme. Les puissances capitalistes partent en guerre et tentent de nous duper pour anéantir nos frères et sœurs de classe sous le prétexte fallacieux des «intérêts nationaux» et de la «sécurité nationale».
Nous exhortons les travailleurs du monde entier à se joindre à la lutte pour le socialisme, c’est-à-dire pour une paix véritable entre les masses laborieuses de toutes les nations, en construisant la direction révolutionnaire nécessaire pour mettre fin à l’oligarchie, au fascisme et à la guerre.
(Article paru en anglais le 11 avril 2025)
[1] Après sa défaite lors de la guerre civile chinoise, le régime de Chiang Kai-shek se retira à Taïwan avec environ deux millions de «continentaux», terme désignant les civils et les troupes déployés à Taïwan sous l'autorité du KMT. Parmi eux se trouvaient de nombreux ouvriers et paysans pauvres enrôlés dans l'armée du KMT. Le régime du KMT imposa ensuite la loi martiale entre 1949 et 1987. Durant cette période, toute correspondance entre les continentaux, leurs parents et leurs frères et sœurs en Chine était considérée comme une trahison, passible de la peine de mort.