Human Rights Watch a déclaré jeudi qu'Israël menait une politique «délibérée» de «nettoyage ethnique» à travers le déplacement de force et de façon permanente de la quasi-totalité de la population de Gaza.
Sur une population de 2,2 millions d'habitants avant la guerre, 1,9 million de personnes ont été déplacées de force par la guerre d'extermination d'Israël, soutenue par les États-Unis et d'autres puissances impérialistes. Les déplacements systématiques et délibérés de personnes se sont accompagnés de la destruction systématique de habitations civiles à Gaza, dans le but de rendre le territoire inhabitable.
Dans son rapport de 154 pages, intitulé «Sans espoir, affamé et assiégé: le déplacement forcé des Palestiniens à Gaza par Israël», Human Rights Watch documente le fait que l'expulsion du peuple palestinien n'est pas fondée sur une «nécessité militaire» mais sur le désir délibéré et publiquement déclaré des autorités israéliennes de déplacer la population arabe de Gaza en préparation de son annexion et de sa colonisation.
Le rapport conclut que «de multiples actes de déplacement forcé ont été perpétrés intentionnellement, ce qui constitue des crimes de guerre». Il révèle: «Les déclarations de hauts responsables ayant une responsabilité de commandement montrent que le déplacement forcé est intentionnel et fait partie de la politique de l'État israélien et constitue donc un crime contre l'humanité.» Il conclut encore que «les actions d'Israël semblent également répondre à la définition du nettoyage ethnique».
Résumant les conclusions du rapport, Human Rights Watch écrit :
Dès les premiers jours des hostilités, de hauts responsables du gouvernement israélien et du cabinet de guerre ont déclaré leur intention de déplacer la population palestinienne de Gaza, les ministres du gouvernement déclarant que son territoire allait diminuer, que faire exploser et raser Gaza était «magnifique» et que les terres allaient être remises aux colons. En novembre 2023, le ministre israélien de l'agriculture et de la sécurité alimentaire, Avi Dichter, a déclaré: «Nous sommes en train de mettre en place la Nakba de Gaza».
Le rapport s'appuie sur des entretiens avec 39 Palestiniens déplacés à Gaza, ainsi que sur un examen approfondi de 184 ordres d'évacuation israéliens distincts.
«Le gouvernement israélien ne peut pas prétendre assurer la sécurité des Palestiniens lorsqu'il les tue le long des voies d'évacuation, bombarde des zones dites sûres et coupe la nourriture, l'eau et l'assainissement», a déclaré Nadia Hardman, chercheuse sur les droits des réfugiés et des migrants à Human Rights Watch.
«Israël a violé de manière flagrante son obligation de veiller à ce que les Palestiniens puissent rentrer chez eux, en rasant pratiquement tout dans de vastes zones», a-t-elle poursuivi.
Le rapport démontre que non seulement Israël a déplacé la grande majorité de la population de l’enclave, mais qu'il a également détruit la quasi-totalité des infrastructures capables de soutenir une vie civilisée et qu'il cherche à affamer les Palestiniens encore en vie:
... Israël a endommagé et détruit des ressources vitales pour la réalisation des droits de l'homme, notamment les hôpitaux, les écoles, les infrastructures d'eau et d'énergie, les boulangeries et les terres agricoles, et n'a autorisé qu'un accès humanitaire limité, qui reste tout à fait insuffisant pour répondre aux besoins essentiels de la population. En conséquence, Gaza connaît une crise humanitaire. Des enfants sont morts de malnutrition et de déshydratation et, en octobre 2024, environ 1,95 million des 2,2 millions d'habitants de Gaza devraient souffrir d'un niveau d'insécurité alimentaire «catastrophique», «d'urgence» ou «de crise», selon la Classification intégrée des phases de la sécurité alimentaire (un outil destiné à améliorer l'analyse de la sécurité alimentaire et la prise de décision). Le rapport indique en outre que «le risque de famine entre novembre 2024 et avril 2025 persiste tant que le conflit se poursuit et que l'accès humanitaire est restreint».
Le rapport de Human Rights Watch réfute systématiquement les affirmations du gouvernement Netanyahou que la population de Gaza a été évacuée à plusieurs reprises pour sa propre sécurité et par nécessité militaire. Le rapport démontre «que les responsables israéliens commettent au contraire le crime de guerre du transfert forcé, une violation grave des Conventions de Genève et un crime en vertu du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI)».
Il conclut: «Il est évident qu'Israël n'a pas évacué les civils palestiniens à Gaza pour leur sécurité, car ils n'ont pas été en sécurité lors des évacuations ou à leur arrivée dans les zones de sécurité désignées.» En effet, «l'armée israélienne est également en train d'établir ce qui semble être des zones tampons permanentes – des zones de terre sécurisées et vidées entre la frontière israélienne et Gaza où les Palestiniens ne seront probablement pas autorisés à entrer.»
Aussi horribles que soient les allégations de ce rapport, elles sont en fait dépassées. Au début du mois dernier, Israël a lancé une nouvelle offensive contre le nord de Gaza dont l'objectif est le dépeuplement total de toute la zone. Dans le cadre de ce que l'on appelle le «plan des généraux», les responsables israéliens ont déclaré leur intention d'empêcher l'entrée de nourriture dans l'ensemble du nord de la bande de Gaza et de traiter en combattants ennemis tous ceux qui y restent, nombre aujourd'hui estimé à environ 75 000 personnes.
Cette politique de déplacements massifs forcés ne peut que s'intensifier avec l'arrivée de l'administration Trump, qui a promis de soutenir le gouvernement Netanyahou de manière encore plus agressive que Biden. Trump a annoncé son intention de nommer ambassadeur en Israël l'ancien gouverneur de l'Arkansas, Mike Huckabee, un chrétien évangélique sioniste, qui a ouvertement prôné l'annexion du territoire palestinien.
«La Cisjordanie ça n'existe pas, c'est la Judée et la Samarie», a déclaré Huckabee en utilisant les noms bibliques du territoire. «Les colonies ça n'existe pas: ce sont des communautés, des quartiers, des villes. L'occupation ça n'existe pas».
Dans un rapport distinct publié le 14 novembre, un comité des Nations unies a conclu que «les politiques et les pratiques d'Israël [...] sont conformes aux caractéristiques du génocide».
(Article paru en anglais le 15 novembre 2024)