Trump lance une campagne pour renverser les résultats de l'élection de 2024

L'ancien président Donald Trump prend la parole lors d'un rassemblement à l'aéroport international d'Albuquerque, le jeudi 31 octobre 2024, à Albuquerque, au Nouveau-Mexique. [AP Photo/Julia Demaree Nikhinson]

Le candidat républicain fasciste à la présidence, Donald Trump, concentre la dernière semaine de sa campagne sur les efforts visant à saper et à discréditer le vote du 5 novembre, afin de préparer le terrain pour un effort anticonstitutionnel et antidémocratique visant à renverser le résultat en cas de défaite.

Trump a signalé le début de cet effort lors de ses remarques à un rassemblement au Madison Square Garden dimanche. Il s'est adressé directement au président de la Chambre, Mike Johnson, qui était à son côté sur l'estrade: «Je pense qu'avec notre petit secret, nous allons très bien nous en sortir avec la Chambre, n'est-ce pas ?» et a ajouté: «Notre petit secret a un grand impact. Lui et moi avons un petit secret: nous vous dirons ce que c'est quand la course sera finie».

Dans une déclaration au New York Times, Johnson a déclaré: «Par définition, un secret ne doit pas être partagé – et je n'ai pas l'intention de partager celui-ci».

Le président de la Chambre des représentants de Louisiane, Mike Johnson, s'exprime devant l'ancien président Donald Trump, candidat républicain à la présidence, lors d'un rassemblement fasciste au Madison Square Garden, le dimanche 27 octobre 2024, à New York. [AP Photo/Alex Brandon]

Le rôle probable de la Chambre des représentants serait d'intervenir au cours de la période suivant l'élection. Il y a trois dates clés: le 17 décembre, date à laquelle les membres du collège électoral doivent se réunir dans chaque État pour voter; le 25 décembre, date à laquelle les votes du collège électoral doivent être soumis au Congrès; et le 6 janvier 2025, date à laquelle le Congrès se réunit en session conjointe pour certifier les résultats.

Les deux premières dates tombent pendant la période de transition où les républicains contrôleraient toujours la Chambre, et Johnson serait toujours président de la Chambre, quel que soit le résultat des élections législatives du 5 novembre. Si un État ne parvient pas à certifier ses électeurs d'ici le 25 décembre, Johnson pourrait tenter d'invalider entièrement ses votes électoraux, bien que le pouvoir d'un président de la Chambre de le faire n'ait jamais été invoqué jusqu’ici.

Trump a déjà cherché à jeter le doute sur la validité de l'élection dans plusieurs des États dits «pivots», ceux qui sont les plus disputés selon les sondages préélectoraux.

En Pennsylvanie, l'État le plus peuplé des sept États pivots, avec 19 voix électorales, Trump a publié une série de messages sur son site de médias sociaux, Truth Social, affirmant mercredi: «La Pennsylvanie triche et se fait prendre, à une échelle rarement vue auparavant». Il a poursuivi jeudi: «Nous les avons pris en flagrant délit de GRANDE tricherie en Pennsylvanie. Il faut l'annoncer et engager des poursuites, MAINTENANT ! ... Qui aurait jamais pensé que notre pays était si corrompu?»

Trump faisait référence à des épisodes au cours desquels des fonctionnaires électoraux ont identifié des fautes et des erreurs dans des affaires administratives de routine, et il les a transformés en scandales de grande ampleur. En réalité, il s'agissait d'actions anodines menées dans deux comtés contrôlés par les républicains (York et Lancaster) et dans un comté étroitement contrôlé par les démocrates (Bucks), dont aucune n'avait la moindre importance sur le plan électoral.

Le secrétaire du Commonwealth, Al Schmidt – un républicain nommé par le gouverneur démocrate Josh Shapiro parce qu'il avait rejeté les allégations de fraude électorale de Trump à Philadelphie en 2020 – a déclaré qu'il y avait eu un flot de fausses informations diffusées sur les médias sociaux. «Partager des messages sociaux remplis de demi-vérités ou même de mensonges purs et simples est préjudiciable à notre démocratie représentative», a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse, avertissant que de tels rapports étaient «susceptibles de continuer dans les jours et les semaines à venir».

Le New York Times a rapporté que «Donald Trump est en train de transformer la Pennsylvanie en tremplin pour des accusations anticipées d'élection truquée», déclarant que le but de ses revendications n'était pas d'affecter réellement l'administration électorale, mais de donner une couverture politique pour des contestations juridiques de la décision des électeurs s'il perdait l'État critique.

Dans le cadre d'une campagne visant à retarder la publication des résultats des élections et à créer des possibilités de recours en justice, le corps législatif de l'État, contrôlé par les républicains, a interdit aux responsables électoraux locaux de compter les bulletins de vote par correspondance avant le jour du scrutin, une interdiction qui n'a pas été annulée depuis que les démocrates ont pris le contrôle partiel de l'État en 2022. En conséquence, les résultats de l'élection qui viendront le mardi 5 novembre de la Pennsylvanie tiendront surtout compte des votes en personne le jour même, ce qui devrait favoriser M. Trump, tandis que les bulletins de vote par correspondance, plus fortement démocrates, ne seront pas dépouillés avant mercredi, voire plus tard.

On s'attend à ce que Trump proclame sa victoire sur la base de ces résultats précoces et incomplets, afin de galvaniser ses partisans et d’inciter à la violence contre les fonctionnaires électoraux si un résultat différent est annoncé par la suite.

À l'échelle nationale, Trump a émis des menaces répétées contre les responsables électoraux, culminant avec un ordre de «CESSER ET S'ABSTENIR» (CEASE & DESIST) qu'il a publié sur Truth Social le 25 octobre, menaçant de «longues peines de prison» les «responsables électoraux corrompus» et toute personne qui tenterait les supposées «tricheries» de 2020. «DÈS QUE JE GAGNE, les personnes qui auront triché seront poursuivies avec toute la rigueur de la loi», a-t-il écrit.

Comme c'est le cas depuis la tentative de coup d'État de Trump du 6 janvier 2021, lorsque plusieurs milliers de ses partisans ont pris d'assaut le Capitole dans le but de bloquer la certification de l'élection de 2020 par le Congrès, la réponse démocrate à ses menaces et à son incitation à la violence a été de semer la complaisance à l'égard du danger de la dictature.

Le sénateur démocrate de Pennsylvanie, John Fetterman, a affirmé que l'élection était «sécurisée», déclarant à Politico: «C'est juste un geste d’exaspération, et c'est pathétique. S'ils pensaient qu'ils allaient gagner et qu'ils étaient confiants, ils ne feraient pas ce genre de choses». Il a ajouté que Trump n’était plus à la Maison-Blanche et qu'il ne pouvait donc pas utiliser le pouvoir du gouvernement fédéral pour interférer avec l’élection.

Dans un long commentaire publié dans The Nation, Elie Mystal a esquissé une série de scénarios sur ce que pourrait signifier le «petit secret» entre Trump et le président de la Chambre des représentants, Johnson.

L’un de ces scénarios consisterait en une «élection contingente», où la Chambre des représentants choisirait le président en cas d’égalité des voix au sein du collège électoral (269-269). Le vote de la Chambre ne se ferait pas à la majorité des membres, mais à la majorité des délégations d'États, ce qui donnerait aux petits États un pouvoir disproportionné pour déterminer le résultat, tout comme c'est le cas pour le Sénat américain. Les républicains contrôlent actuellement 26 délégations, les démocrates en contrôlent 23, et une est à égalité. Il est peu probable que cette répartition change le 5 novembre.

Une option plus réalisable pour les républicains consisterait à retarder la certification des votes des grands électeurs dans les États remportés par Harris, mais dont le gouvernement est contrôlé en totalité ou en partie par les républicains (cela pourrait inclure tous les États pivots, à l'exception du Michigan). Le sabotage par les républicains au niveau de l'État pourrait empêcher la présentation des résultats certifiés au Congrès avant la date limite du 25 décembre; Trump et Johnson demanderaient à la Cour suprême des États-Unis, dominée par les républicains, de rejeter les votes électoraux de ces États et de réduire le total requis pour obtenir la majorité.

Si, par exemple, Trump ne remportait que les 219 votes électoraux dans les États où il est actuellement en tête dans les sondages en dehors de la marge d'erreur, il pourrait l'emporter au collège électoral en réduisant le nombre total de votes électoraux de 538 à 436. Cela nécessiterait de retarder la certification des États remportés par les démocrates, représentant un total de 102 votes électoraux (par exemple, les 93 voix combinées des États pivots plus au moins un autre grand État).

S'il ne parvient pas à réunir suffisamment d'États dotés de gouverneurs ou parlements républicains, Trump pourrait faire appel aux tribunaux, en déposant des recours même dans des États fortement démocrates comme la Californie et New York, en prétendant que des millions de votes d'immigrés clandestins ont été exprimés. La Cour suprême n'aurait pas à confirmer une telle accusation, mais simplement à faire traîner la procédure pour que Trump puisse revendiquer la victoire.

Que Trump se prépare à faire une telle déclaration n’est pas une hypothèse farfelue. Lors d’un récent événement de campagne, l’ancien conseiller à la sécurité nationale de Trump, Michael Flynn, a affirmé que Trump remporterait de manière écrasante les 50 États si l’on excluait les votes «illégaux».

Les négationnistes électoraux représentent une faction beaucoup plus importante des élus républicains qu'en 2020, lorsqu'une grande majorité des républicains de la Chambre des représentants ont voté pour ne pas certifier la victoire de Biden. Les négationnistes électoraux occupent des postes élevés au sein des assemblées législatives et des partis républicains des États dans la plupart des États pivots.

Autre signe du rejet catégorique par Trump des conventions de la démocratie capitaliste américaine, même décrépie, sa campagne n'a pas accepté de participer au processus officiel de transition présidentielle prévu par une loi de 2022 soutenue par les deux partis au Congrès. Celle-ci interdit à l'Administration des services généraux (GSA - General Services Administration) de retarder la transition en refusant de «constater» le vainqueur de l'élection, comme elle l'a fait en 2020 sous la pression de la Maison-Blanche de Trump. La GSA est désormais tenue de commencer les efforts de transition dans les cinq jours suivant l'élection et de coopérer avec les deux partis si aucun des candidats n'a concédé la défaite.

Mais Trump n'a pas signé l'engagement éthique requis ni les accords sur la manière dont la transition serait financée, y compris le rôle des intérêts extérieurs. L'ensemble de son équipe de transition n'a pas non plus signé d'engagement éthique concernant d'éventuels conflits d'intérêts.

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