Dans le pire massacre depuis qu'Israël a lancé sa campagne de nettoyage ethnique dans le nord de Gaza ce mois-ci, les Forces de défense israéliennes (FDI) ont bombardé mardi un immeuble résidentiel de cinq étages dans la ville de Beit Lahia, tuant 93 personnes, dont 25 enfants.
Ce jour-là, au moins 143 personnes ont été tuées dans des frappes aériennes israéliennes à travers Gaza, la grande majorité (132) dans le nord de Gaza, a rapporté Al Jazeera.
La défense civile palestinienne étant presque entièrement hors service, car ciblée par les troupes israéliennes, des dizaines de personnes sont restées ensevelies sous les décombres, où elles mourront très probablement en attendant d'être secourues.
«Un certain nombre de victimes sont toujours sous les décombres et sur les routes, et les ambulanciers et les équipes de la défense civile ne peuvent pas les atteindre», a déclaré le ministère de la Santé de Gaza dans un communiqué.
Mahmoud Basal, un porte-parole de l'agence de défense civile palestinienne, a déclaré: «Il y a des appels d’urgence pour que les équipes de la défense civile sauvent les blessés», mais les forces de la défense civile ont été soit arrêtées par les troupes israéliennes, soit «déplacées de force en raison de l'agression israélienne dans le nord de Gaza».
Le témoin Ismaïl Ouaida a déclaré dans une vidéo vérifiée par Reuter: «Il y a des dizaines de martyrs (morts), des dizaines de personnes déplacées qui vivaient dans cette maison. La maison a été bombardée sans avertissement préalable. Comme vous pouvez le voir, les martyrs sont ici et là, avec des morceaux de corps accrochés aux murs.»
Une autre survivante, une mère palestinienne, a déclaré à Al Jazeera: «Mes deux fils et toute leur famille ont été tués. Ma fille célibataire a également été tuée. Et mon autre fille avec ses cinq enfants. Tous tués. Quel mal ont-ils fait? Qu'ont fait ces innocents pour être massacrés comme ça?
Le ministère de la Santé a déclaré mardi dans un communiqué que les blessés ne recevront pas de soins médicaux, les médecins à proximité ayant été forcés par les troupes israéliennes d'évacuer sous la menace d'une arme. «Les cas critiques sans intervention succomberont à leur destin et mourront», a déclaré le ministère dans un communiqué.
Avec une hypocrisie sans bornes, le porte-parole du département d'État américain, Matthew Miller, a qualifié l'attentat d'«incident horrible avec un résultat horrible». En réalité, le massacre est tout à fait conforme à la politique américaine. Le gouvernement Biden a fourni à Israël plus de 14.000 bombes de 2.000 livres, qui ont été utilisées pour cibler systématiquement des zones peuplées dans le but délibéré de tuer autant de personnes que possible.
La semaine dernière, le secrétaire d'État américain Antony Blinken a rencontré le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu pour discuter du soi-disant «plan général» de nettoyage ethnique du nord de Gaza. Malgré le refus de Netanyahu de désavouer publiquement le plan, Blinken est sorti de la réunion pour faire une déclaration générale de soutien au «droit d'Israël à se défendre».
Le bilan officiel du génocide de Gaza s'élève maintenant à plus de 43.000 morts, et des dizaines de milliers d'autres sont toujours portés disparus et probablement enterrés sous les décombres. Un article publié dans The Lancet plus tôt cette année a estimé que le nombre réel de morts, y compris des effets de la famine et de la maladie, dépassait 186.000.
Le massacre de Beit Lahia fait partie d'un effort systématique d'Israël pour nettoyer ethniquement le nord de Gaza par les bombardements et la famine et pour tuer tous ceux qui restent. Au cours des trois dernières semaines, au moins 700 personnes ont été tuées dans le nord de Gaza dans le cadre de cette campagne. Au début de ce mois, il restait 400.000 personnes dans le nord de Gaza. Aujourd'hui, ce chiffre est estimé à environ 100.000 personnes, et ceux qui restent sont sans nourriture, carburant ou fournitures médicales.
Le massacre de mardi fait suite à l'adoption par le Parlement israélien d'une loi interdisant à l'agence de secours des Nations Unies UNRWA d'opérer à l'intérieur de Gaza, démantelant ainsi toutes les opérations humanitaires restantes dans la région. Le chef de l'UNRWA, Philippe Lazzarini, a qualifié cette décision de «rien de moins qu'une punition collective», déclarant qu'elle viole la Charte des Nations Unies et viole les obligations de l'État d'Israël en vertu du droit international.
Dans une lettre adressée au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, le chef de l'ONU, Antonio Guterres, a déclaré que cette décision aurait des «conséquences dévastatrices» pour les Palestiniens. «Israël, en tant que puissance occupante, continue d'être tenu de veiller à ce que les besoins de la population soient satisfaits».
Stéphane Dujarric, porte-parole de Guterres, a déclaré que «l'UNRWA est le principal moyen par lequel une aide essentielle est fournie aux réfugiés palestiniens dans le territoire palestinien occupé, et il n'y a pas d'alternative à l'UNRWA», ajoutant que «l'UNRWA est indispensable».
James Elder, porte-parole du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), a averti: «Si l'UNRWA n'est pas en mesure d'opérer, vous assisterez probablement à l'effondrement du système humanitaire à Gaza. … Une telle décision signifie donc soudainement qu'une nouvelle façon a été trouvée pour tuer des enfants.»
Le montant de l'aide entrant dans la bande de Gaza est tombé à son plus bas niveau depuis le début du génocide, a déclaré l'ONU. Seuls 704 camions d'aide humanitaire sont entrés à Gaza entre le 1er et le 22 octobre, comparé au niveau déjà très bas de 3.000 camions en septembre. «Les zones qui sont en train d'être dépeuplées en ce moment n'ont rien reçu», a déclaré Scott Paul, directeur d'Oxfam America pour la paix et la sécurité.
Selon l'IPC, une initiative mondiale visant à mesurer la sécurité alimentaire, près de 800.000 personnes à Gaza sont confrontées à une faim «urgente» ou «catastrophique». Le Programme alimentaire mondial de l'ONU a averti que «d'ici novembre, plus de 90% de la population de Gaza sera confrontée à une grave insécurité alimentaire». Dans un communiqué, le Programme alimentaire mondial de l'ONU a déclaré que seulement 5.000 tonnes de nourriture étaient entrées à Gaza ce mois-ci.
Les hôpitaux sont confrontés à une panne totale. Hussam Abu Safia, directeur de l'hôpital Kamal Adwan dans le nord de Gaza, a déclaré à Al Jazeera que «l'hôpital se retrouve sans ressources: il n’y a pas de fournitures médicales ni de personnel médical». Il a poursuivi en disant: «C'est parce que beaucoup de nos médecins et chirurgiens spécialisés ont été détenus. Il ne reste à l'intérieur de l'hôpital que moi et un seul pédiatre (qui ne peut pas opérer les blessés). Par-dessus tout, les patients et les blessés sont éparpillés sur le sol de l'hôpital.»
Pendant ce temps, les forces israéliennes ont continué à avancer vers le nord au Liban, faisant 77 morts dans des frappes dans tout le pays. Dans un reportage de première main, Al Jazeera a écrit: «Lundi, l'armée israélienne a commencé à bombarder de manière maniaque la ville côtière de Tyr, dans le sud du Liban, frappant des bâtiments résidentiels et transformant la scène en un paysage d'horreur comme elle sait le faire. Israël fait de son mieux pour enterrer Tyr sous les bombes.» La ville est l'une des plus anciennes zones urbaines habitées en permanence de l'humanité et est un site du patrimoine mondial de l'UNESCO.
Mardi, des responsables israéliens ont menacé de nouvelles frappes contre l'Iran après leur bombardement d'installations militaires au cours du week-end. «Nous saurons une fois de plus comment atteindre l'Iran, avec des capacités que nous n'avons même pas utilisées cette fois-ci», a déclaré Herzi Halevi, chef de l'état-major général de l'armée israélienne.
(Article paru en anglais le 30 octobre 2024)