Le gouvernement d’extrême droite de Netanyahou poursuit son programme dictatorial pour consolider sa politique du Grand Israël

Le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahou accélère ses efforts pour établir un État autoritaire parallèlement à sa guerre visant à anéantir les Palestiniens à Gaza.

Incapable d’atteindre son double objectif d’instaurer la suprématie juive dans tout le «Grand Israël» et d’empêcher toute possibilité d’un mini-État palestinien aux côtés d’Israël par des moyens démocratiques, l’État sioniste doit prendre des mesures répressives contre ses propres citoyens, y compris contre les Juifs.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, à droite, s'entretient avec le ministre des Finances Bezalel Smotrich lors de la réunion hebdomadaire du cabinet au ministère de la Défense à Tel Aviv, en Israël, le dimanche 7 janvier 2024. [AP Photo/Ronen Zvulun]

La Knesset (le Parlement) a défié une opposition massive à la «refonte judiciaire» du gouvernement et a adopté l’an dernier un élément clé du programme législatif visant à limiter le pouvoir que possède la Cour suprême d’annuler les lois contraires à la Loi fondamentale d’Israël, le plus proche équivalent d’une constitution pour l’État sioniste. Mais cette mesure a été par la suite invalidée par la Cour suprême.

Sans se laisser dissuader, le ministre de la Justice Yariv Lewin a refusé de soumettre à l’approbation du Comité de sélection des juges la nomination d’un nouveau président de la Cour suprême et de deux nouveaux juges pour remplacer plusieurs retraités. Le gouvernement n’y dispose en effet pas de la majorité nécessaire pour faire passer ses nominations. Ce contournement lui assure désormais à la Haute Cour la majorité de droite nécessaire pour poursuivre son programme dictatorial.

Le gouvernement a introduit une série de nouvelles lois antidémocratiques, renforçant la surveillance des Palestiniens et des citoyens israéliens et restreignant la liberté d’expression.

De nouvelles lois donnent aux Forces de défense israéliennes (FDI) et au Shin Bet, l’agence de renseignement intérieure israélienne (qui dépend du cabinet du Premier ministre) des pouvoirs accrus pour pirater les systèmes informatiques privés utilisés pour faire fonctionner les caméras de vidéosurveillance, et pour effacer, modifier ou perturber leurs données, sans que le propriétaire de l’ordinateur ne le sache ou sans autorisation d’un tribunal. Cela est censé être autorisé dans les cas de mise en danger de «la sécurité de l’État ou la continuité du fonctionnement opérationnel des FDI dans le cadre d’opérations militaires menées dans le cadre de la guerre», lorsque l’urgence le rend nécessaire et lorsqu’il est impossible d’obtenir un accès «par un autre moyen portant atteinte aux droits à un degré moindre».

Le gouvernement a déposé un autre projet de loi autorisant le Shin Bet à fouiller les ordinateurs et les téléphones portables à l’insu de leurs propriétaires. Cela permettrait aux espions israéliens – avec l’autorisation du Premier ministre et l’avis juridique du procureur général – d’accéder aux bases de données des autorités publiques, notamment des ministères, de la police et de l’Institut national d’assurance, et d’utiliser un logiciel espion de type Pegasus pour fouiller les ordinateurs et les téléphones contenant de la correspondance privée.

En permettant la surveillance des journalistes par le Shin Bet, le gouvernement cherche à restreindre encore davantage la liberté de la presse. Le ministre des Communications Shlomo Karhi tente de prendre le contrôle des médias israéliens, notamment de la chaîne publique Kan. Il y a deux mois, le gouvernement a fermé les activités d’Al Jazeera en Israël/Palestine, la qualifiant de «porte-parole du Hamas» et de «menace pour la sécurité nationale d’Israël» et l’accusant d’incitation à la violence contre les soldats israéliens ». Il a confisqué le matériel de diffusion d’Al Jazeera et bloqué ses sites Internet. La chaîne avait couvert en détail la guerre génocidaire d’Israël contre Gaza, assurant une couverture 24 heures sur 24 dans la bande de Gaza alors même que la campagne criminelle d’Israël tuait et blessait des membres de son personnel.

Le ministre de la Sécurité nationale issu du parti Force juive, Itamar Ben-Gvir, a cherché à mobiliser des bandes de justiciers pour traquer les Palestiniens et les chasser de leurs maisons et de leurs terres en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Il a distribué environ 30.000 fusils automatiques à toute personne considérée comme membre des «gardes de sécurité communautaire», non seulement dans les villes et villages frontaliers mais aussi dans les villes de tout le pays ; il a approuvé des demandes venant de milliers de personnes sans autorisation ni formation. Il est désormais courant de voir des gens se promener dans les centres-villes avec une arme en bandoulière. Ben-Gvir a cherché à assouplir la réglementation sur l’ouverture du feu.

Il a tenté de contenir les manifestations antigouvernementales qui réclamaient un accord sur la prise d’otages et un cessez-le-feu, en demandant à la police de mettre fin aux manifestations, souvent en utilisant violemment des gaz lacrymogènes et des canons à eau. La répression des manifestations a principalement visé les citoyens palestiniens d’Israël, le commissaire de police Kobi Shabtai ayant déclaré: «Tous ceux qui veulent s’identifier à Gaza sont invités à prendre un bus pour s’y rendre.»

La police a empêché à maintes reprises des manifestations dans les villes arabes, invoquant des lois sur l'incitation à la violence et la perturbation de l'ordre public. La Cour suprême a rejeté à l'unanimité une pétition s'opposant à l'interdiction des manifestations à Sakhnin et Umm al-Fahm. Des centaines de Palestiniens israéliens ont été arrêtés pour avoir exprimé leur solidarité avec les Palestiniens de Gaza, s'être opposés à la guerre ou avoir participé à des manifestations pacifiques. Les autorités ont arrêté quatre anciens députés qui prévoyaient une manifestation à Nazareth, dont le président du Haut Comité arabe de surveillance, Mohammed Barakeh.

De plus, les autorités restreignent la liberté d’expression, surveillant presque tous les commentaires sur les réseaux sociaux pour trouver des «incitation au terrorisme». Dans le cadre de la politique draconienne du ministère de la Justice en matière d’incitation au terrorisme sur Internet, la police a déposé plus de 130 actes d’accusation, la plupart contre des Palestiniens israéliens, depuis le 7 octobre, contre seulement 88 actes d’accusation de ce type au cours des quatre années allant de 2018 à 2022. Il n’est plus nécessaire de demander l’approbation du bureau du procureur de l’État pour enquêter sur une incitation présumée, les procédures contre toute personne soupçonnée d’avoir publié des commentaires soutenant le terrorisme étant accélérées, même pour une première infraction.

La loi modifiant la «loi sur la lutte contre le terrorisme» élargit la gamme des activités considérées comme soutenant ou incitant au terrorisme et rend pénalement passible d’un an de prison l’accès répété à des contenus produits par le Hamas ou l’EI. Les universités se sont empressées d’engager des procédures disciplinaires contre les étudiants qui ont fait l’éloge du Hamas ou se sont opposés à la guerre. Peu après le début de la guerre, 30 universités et facultés ont ouvert 120 procédures contre des étudiants, la plupart basées sur des informations relatives à des commentaires d’autres étudiants, sans tenir compte du contenu ou du contexte réel des messages ou des remarques.

Le traitement réservé par Israël aux Palestiniens du centre de détention de Sde Teiman, dans le désert du Néguev, et d’autres prisons israéliennes est comparable à celui réservé à la tristement célèbre base navale américaine de Guantanamo Bay, à Cuba, et à la prison d’Abou Ghraib, en Irak. Un reportage choquant de CNN en mai dernier révélait que les Gazaouis qui y étaient emprisonnés – détenus sans inculpation ni représentation légale pour des «raisons de sécurité nationale» – ont les yeux bandés, sont contraints de prendre des positions douloureuses, sont battus, insultés et empêchés de parler pendant de longues périodes. Certains prisonniers ont dû être amputés de leurs membres en raison de leurs blessures.

Les prisons sont tellement remplies de détenus gazaouis qu’Israël a libéré le directeur de l’hôpital Shifa après six mois, ainsi que 50 autres personnes, en raison du manque de place et de l’ordre de la Cour suprême de fermer le centre de détention de Sde Teiman.

Le rapport de la Commission d’enquête internationale indépendante des Nations Unies sur les prisons israéliennes cite de nombreux exemples de femmes palestiniennes publiquement dévêtues et dévoilées par les forces israéliennes et soumises à un harcèlement sexuel devant leurs familles lors d’opérations terrestres à Gaza, ainsi que de victimes masculines soumises à des violences sexuelles et à des humiliations à Gaza et en Cisjordanie. La Commission conclut que la fréquence et la gravité des violations sexuelles et sexistes sont telles qu’elles font probablement «partie des procédures opérationnelles [des forces de sécurité israéliennes]».

En Cisjordanie, le ministre israélien des Finances et sioniste religieux Bezalel Smotrich a légalisé cinq avant-postes de colons établis illégalement en vertu de la loi israélienne et a approuvé la construction d’un nombre record de 12.855 logements dans les colonies depuis janvier. Il a imposé des restrictions aux déplacements des hauts responsables de l’Autorité palestinienne (AP) et autorisé l’application de mesures israéliennes contre les constructions palestiniennes «illicites» dans la zone B, qui est sous administration conjointe de l’AP et de l’armée israélienne, en violation des accords d’Oslo. Pendant ce temps, l’armée monte la garde pour protéger les colons d’extrême droite qui terrorisent les Palestiniens.

Smotrich cherche à faire tomber l’AP, en ne transférant qu’une petite partie des centaines de millions de dollars de recettes fiscales qu’Israël collecte au nom de l’AP. Il a tenté, sans succès jusqu’à présent, de retirer aux banques palestiniennes la dérogation – en vigueur depuis 2016 et qui protège les banques israéliennes contre les poursuites judiciaires pour soutien au terrorisme – qui permet aux banques israéliennes de traiter avec elle. Cette dérogation est cruciale pour les importations de biens essentiels de l’AP, le paiement de ses services essentiels et de ses salaires et toutes les activités bancaires. Sans elle, l’AP et l’économie de la Cisjordanie sont confrontées à un effondrement financier qui pourrait déstabiliser la Cisjordanie et la région au sens large.

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