Près de 3000 manifestants arrêtés aux États-Unis tandis que se poursuit la répression contre les campements anti-génocide à travers le monde

En réponse aux manifestations menées par les étudiants contre le génocide israélien soutenu par les États-Unis à Gaza, les services de police de toute l'Amérique du Nord ont effectué des assauts violents et, dans de nombreux cas, à l'aide de gaz lacrymogènes contre les campements anti-génocide jeudi soir et vendredi.

En plus d'être arrêtés, de nombreux étudiants risquent d'être suspendus de leur université pour avoir participé à des manifestations appelant à la fin des massacres de Palestiniens et au désinvestissement de leur université des profiteurs de guerre.

Une passante, à droite, filme une barrière recouverte des pancartes dans un campement de tentes anti-génocide sur le campus du Massachusetts Institute of Technology, mardi 7 mai 2024, à Cambridge, Massachusetts. [AP Photo/Steven Senne]

Depuis l'arrestation initiale de 108 étudiants du campement de solidarité avec Gaza à l'université Columbia le 18 avril, la police américaine a arrêté plus de 2800 personnes, selon l'AP, et plus de 2900, selon une base de données tenue par The Appeal.

Les violentes descentes de police dans les campements pacifiques ne se limitent toutefois pas aux États-Unis. Jeudi soir, plusieurs personnes ont été arrêtées au campement de Gaza de l'université de Calgary, dans l'Alberta, au Canada, après que la police anti-émeute a déployé des «munitions non létales» et des gaz lacrymogènes sur une foule de moins de 200 personnes.

Loading Tweet ...
Tweet not loading? See it directly on Twitter

Justifiant les actions de la police lors d'une conférence de presse vendredi, Danielle Smith, Première ministre de l'Alberta, a déclaré : «Nous avons des lois dans la province, et vous ne pouvez pas bloquer les infrastructures critiques, et dans ce cas, il s'agit d'une propriété privée.»

Utilisant la même technique de diffamation que celle employée par le président Joe Biden et d'autres criminels de guerre complices de génocide, la démagogue d'extrême droite Smith a sifflé :

Je ne veux pas spéculer, mais j'ai vu certains des slogans qui ont été brandis, et il ne devrait pas y avoir de place pour l'antisémitisme ni pour les crimes de haine.

Vers 4h du matin, vendredi, la police a investi le campement anti-génocide du Massachusetts Institute of Technology (MIT) à Cambridge. La police du campus du MIT, assistée par la police d'État du Massachusetts, a arrêté au moins 10 personnes, selon le New York Times. Au moins neuf autres personnes avaient été arrêtées la nuit précédente alors qu'elles manifestaient à l'intérieur d'un parking du campus.

À l'instar d'autres universités, un nombre indéterminé d'étudiants du MIT ont été suspendus pour avoir participé à des manifestations contre le génocide à Gaza. Prahlad Iyengar, étudiant diplômé du MIT, a déclaré avoir perdu son logement et ses revenus après avoir été suspendu de l'université.

«Je ne sais pas ce qui va suivre», a déclaré Iyengar au Times. «J'ai des amis et une communauté, et je peux trouver un endroit, mais il y a des personnes touchées par l'insécurité en matière de logement et d'alimentation, certaines avec des enfants.»

Sally Kornbluth, présidente du MIT, ainsi que Claudine Gay de Harvard et Elizabeth Magill de l'université de Pennsylvanie, ont témoigné devant le Congrès sur la prétendue montée de l'«antisémitisme» dans les universités à la suite de l'attaque du Hamas, le 7 octobre. Alors que Gay et Magill ont démissionné à la suite de leur témoignage, Kornbluth est restée présidente. Avant la descente de police, Kornbluth a écrit le 6 mai qu'elle «doit maintenant prendre des mesures pour mettre fin à une situation qui perturbe notre campus depuis plus de deux semaines».

Après le passage de la police, Baltasar Dinis, étudiant diplômé du MIT, a déclaré à 7NEWS :

Les habitants de Gaza [...] sont en train d’être exterminés par le régime israélien [...] Et nous voulons mettre fin à la complicité du MIT avec ce régime. Il est honteux que le MIT s’en prenne, dans l'obscurité, à ses étudiants avec une force de police très militarisée complètement disproportionnée par rapport à l'action, au nombre d'étudiants qui sont ici.

Bien qu'il n'ait pas encore été démantelé à l'heure où nous écrivons ces lignes, le seul autre campement qui subsiste actuellement à Cambridge et dans l'agglomération de Boston est celui de Harvard. Afin de faire pression sur les organisateurs du campement pour qu'ils le démantèlent, l'université a commencé vendredi à suspendre les étudiants participant à la manifestation.

Campement de solidarité avec Gaza à Harvard, Cambridge, Massachusetts, 3 mai 2024 [Photo: Sent in by a reader]

Le comité de solidarité avec la Palestine de Harvard a indiqué vendredi que les suspensions étaient «effectives immédiatement». Le comité a ajouté : «Les étudiants risquent maintenant de se voir retirer leur diplôme, d'être expulsés, de souffrir d'insécurité alimentaire et d'être déportés.»

Elizabeth Ross, étudiante en cinquième année de doctorat à Harvard, a déclaré à WGBH qu'elle avait été placée en «congé involontaire» vendredi matin en raison de son rôle dans le campement. Interrogée par WGBH pour savoir si elle craignait une répression policière sur le campus, Elizabeth Ross a répondu : «Toute notre attention est fixée sur le génocide.»

Vendredi, des dizaines de policiers anti-émeutes ont arrêté 33 manifestants anti-génocide à l'université de Pennsylvanie peu avant 6h du matin. Dans une interview accordée à WHYY, Zoe Sturges, une ancienne élève de l'université de Pennsylvanie qui se trouvait dans le campement vendredi matin, a déclaré que l'arrestation des étudiants était «dégoûtante».

«Voir des flics en tenue anti-émeute avec des matraques sur un campus universitaire. C'est un spectacle troublant à voir», a-t-elle déclaré.

Au moins six étudiants de l'UPenn ont été placés en «congé obligatoire» de l'université pour avoir participé au campement.

Jeudi soir, au moins deux professeurs ont été arrêtés par la police lors du campement de Gaza à l'Université de l'Arizona. Le campement de Tucson, organisé par les étudiants contre l'apartheid, était le deuxième établi à l'université, après que le premier ait été violemment démantelé par les policiers le 1er mai.

Comme la semaine dernière, bien qu'elle n'ait rencontré aucune violence de la part des manifestants, la police a pris d'assaut le campement et a généreusement déployé des munitions «moins létales». Des journalistes de l'Arizona Daily Star ont documenté l'utilisation par la police de gaz lacrymogènes et de balles en caoutchouc contre une foule de plus de 100 personnes, principalement des étudiants, dont certains portaient des masques à gaz et utilisaient leurs pancartes en contreplaqué pour se protéger. Sur les pancartes portées par les manifestants, on pouvait lire

«Ne quittez pas Rafah des yeux»,

«Police de Tucson, KKK, FDI, vous êtes tous les mêmes»,

«Gaza libre», et

«Palestine libre».

On ignore combien de personnes, parmi lesquelles des étudiants et des professeurs, ont été arrêtées au cours de l'intervention de la police. Néanmoins, l'université de l'Arizona a publié vendredi une déclaration soutenant pleinement la police:

Le président de l'université, Robert C. Robbins, a mis en place une approche de tolérance zéro pour l'application de sa politique sur le campus [...]

Les arrestations massives et les attaques contre les étudiants n'ont pas empêché la formation de campements anti-génocide et de manifestations anti-guerre. Une analyse du Armed Conflict Location & Event Data Project (ACLED) a révélé que «les manifestations pro-palestiniennes impliquant des étudiants aux États-Unis [...] ont presque triplé» en avril par rapport au mois de mars.

Les manifestations étudiantes depuis octobre, a observé l'ACLED, sont restées pacifiques 99 % du temps, la seule exception notable étant l'assaut sioniste/fasciste sur le campement de l'UCLA du 30 avril au 1er mai. Sur les 700 manifestations étudiantes recensées par l'ACLED, «plus de 90 % ont manifesté leur soutien à la Palestine».

Malgré les violences policières, les manifestations appelant à la fin de la guerre à Gaza, y compris en Israël, se sont poursuivies cette semaine. En solidarité avec d'autres campements, des étudiants et des professeurs de l'université de Haïfa, en Israël, ont organisé jeudi une manifestation en faveur d'un cessez-le-feu et de la fin de la guerre. Un manifestant tenait une pancarte sur laquelle on pouvait lire «Arrêtez le génocide.»

Loading Tweet ...
Tweet not loading? See it directly on Twitter

Des dizaines d'étudiants de l'université de New York ont organisé une manifestation contre le génocide à la bibliothèque Bobst vendredi. À l'heure où nous écrivons ces lignes, les étudiants continuaient à manifester à l'intérieur et à l'extérieur de la bibliothèque.

Loading Tweet ...
Tweet not loading? See it directly on Twitter

(Article paru en anglais le 11 mai 2024)

Loading