Le WSWS a interviewé des étudiants à Jussieu et à la Sorbonne à Paris sur les luttes en cours contre Macron, et sur le mot d’ordre du Parti de l’égalité socialiste (PES) de faire chuter Macron par la grève générale.
Bastien, étudiant en physique a dit : «Pour moi, c'est nécessaire de le faire tomber parce qu'il n'écoute pas le peuple. Il est tout seul. Ce n'est pas possible dans une démocratie, dans un pays qui se revendique démocratique, d'avoir un président qui méprise autant le peuple qui l'a élu. Il a lui-même dit que la majorité de ses électeurs ne l'avait pas élu pour son programme, mais pour faire barrage à l'extrême droite française. Donc, il n’avait pas de mandat. Pour moi, c'est une nécessité absolue de le faire tomber. »
Il a ajouté : « Il faut qu'il y ait un appel à la grève et en soutien aux grévistes. Tout le monde va perdre dans cette réforme, sauf ceux qui essaient de magouiller derrière le dos de tout le monde. On voit qu’il y a de plus en plus d'étudiants qui se mobilisent. … Je pense que ça peut être généralisé. Il y a plein de monde qui commencent à s'y mettre. Il faut continuer à appeler à la grève, il faut appeler à la démission de ce gouvernement. »
« Je pense que Macron est un ennemi du peuple français », a dit Osmane, un étudiant turc, qui a ajouté: «Pour moi, Macron est un petit Erdogan.» Osmane a ajouté que la question de faire chuter Macron soulèverait la question du rôle corrompu de politiciens de pseudo gauche comme Jean-Luc Mélenchon.
Il a dit : « Pour enlever Macron du pouvoir, il faut changer tout le système. On ne peut pas faire une élection demain pour changer Macron. Si je regarde le plus grand acteur de politique français, Mélenchon, ce n'est pas une option pour remplacer Macron. Il a dit qu'il serait son premier ministre. Les travailleurs ne peuvent pas se fier à Mélenchon. Pour changer Macron, il faut changer le système. Avec ce système, on aura un deuxième Macron et un troisième Macron. »
« Macron profite de ce que lui permet la Constitution, pour imposer ses décisions », a dit Simon, un étudiant de première année. « Il veut absolument faire passer cette loi, cette décision-là, et donc il la force avec cet article qui lui permet de le faire. »
Il a ajouté : « Depuis le début de son mandat, Macron déconstruit complètement tout le service public, que ce soit l'hôpital, l'école, les universités. Ça indique bien qu'il y a une direction de politique qui n'est pas pour les travailleurs. … J’ai entendu que Macron voulait transformer l'université en une filière d'élite, une filière d'exception. Sauf que ce n'est pas possible de faire ça en faisant payer tout le monde, ça va encore réduire le nombre de personnes qui vont accéder à l'enseignement supérieur. »
Simon a dénoncé la suppression de l’Impôt sur la fortune alors qu’en même temps, il attaque les retraites : «Aujourd'hui, on entend parler de tout l'argent que ça pourrait rapporter à l'État de taxer sur les fortunes et sur les augmentations de patrimoine. Ça fait gueuler. Le gouvernement supprime une taxe comme celle là, et ensuite il veut faire passer une loi qui va impacter directement les travailleurs, les ouvriers, les personnes qui travaillent dans les métiers les plus complexes et les plus compliqués physiquement et mentalement.»
Simon a ajouté qu’il encourageait les étudiants autour de lui à s’intéresser à la lutte pour défendre les retraites.
Il a dit, « On fait partie de ceux qui vont être touchés par ça, puisque ça va nous toucher dans 40 ans. Et nos parents sont touchés directement par cette réforme puisqu'ils vont y arriver dans quelques années. Nous, dans 40 ans, qui sait à quel point ça aura encore plus bougé potentiellement ? Est ce qu'on aura peut-être à 64, 67 ans, ou comme 70, 75 ? On ne sait pas. En France, on a un système de retraite comparativement meilleur aux autres pays d'Europe. On s'est combattu pour cela là, et il faut continuer à le faire pour le garder. »
Simon a aussi dénoncé le mépris dictatorial de Macron pour les manifestations contre son gouvernement : « Ces manifestations ne sont pas du tout entendues, mais ils sont des mouvements énormes. Ça fait longtemps qu'on n'avait pas eu des mouvements sociaux aussi grands en France. … Le gouvernement décide complètement d'ignorer ces rassemblements. Macron a sorti plusieurs fois l'argument de ‘C'est le peuple qui m'a élu, alors j'ai le droit de faire passer cette réforme puisque vous m'avez élu pour mon programme.’ »
Il a averti : « Ce qui se passe fait penser à une certaine forme de royauté. … Ce qui s’est passé il y a cinq ans en Italie, c'est ce qui risque de se passer aujourd'hui en France. Il y a eu des grosses manifestations, il y a eu des gros mouvements. Il y a eu de la répression policière et peu de temps après, il y a le parti actuel d'extrême droite qui s'est installé au pouvoir. »
Le WSWS a aussi interviewé Kerdraon, un étudiant de la philosophie à la Sorbonne, sur le recours dictatorial au 49.3 pour imposer la réforme : «J'espère que ça va redoubler les mobilisations dans la rue et ça va forcer premièrement le gouvernement Borne à démissionner et que ça va complètement empêcher Macron.»
Kendraon a aussi critiqué l'illégitimité de l'Assemblée nationale, qui n'a rien entrepris pour faire chuter le gouvernement : « Je pense que c'est une erreur de trop miser sur le Parlement. On a bien vu que dans tous les cas, quel que soit le moyen qu'on utilise, ils n'écouteront pas et ils ne lâcheront rien. Pour moi, le premier moyen de faire reculer le gouvernement, c'est le blocage complet de l'économie. C'est l'union des travailleurs. C'est là que tout commence. »
Kendraon a critiqué le rôle des bureaucraties syndicales dans la lutte contre Macron. 60 pour cent des Français voudraient bloquer l'économie pour stopper la réforme, mais les syndicats isolent les grèves et les limitent à des mobilisations d'un jour. Kendron a dit : « Les syndicats sont institutionnalisés. Ils ont des enjeux à maîtriser le mouvement. C'est absolument indispensable que des travailleurs s'organisent et que ça ne se résume pas aux directions institutionnelles et classiques. Il faut que le mouvement vive. »
Le PES appelle les travailleurs et les jeunes à former leurs propres comités d'action en opposition aux institutions traditionnelles du régime capitaliste en France, y compris les partis de pseudo-gauche et les appareils syndicaux.
Interrogé sur le fait que des millions de travailleurs à travers l'Europe – au Portugal, en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Espagne et en Grèce – lancent des grèves de masse, Kendraon a répondu : «On ne peut que se réjouir. Entreil faut absolument entretenir le lien entre les mouvements nationaux, c'est vraiment la question délicate. La plupart des mobilisations se jouent à l'échelle nationale. La domination de la bourgeoisie se joue à l'échelle internationale. »
Il a ajouté : «S'il y a des mouvements contre la bourgeoisie, ça ne pourra se faire que par le lien entre les mouvements des travailleurs à l'international. La révolution, ça ne se fait pas en un seul pays. »