Les protestations de masse contre les
installations militaires des Etats-Unis et de l’OTAN tout au long de la
semaine passée partout en Afghanistan après l’incinération d’exemplaires du
Coran sur la base aérienne de Bagram témoignent de la haine profonde
ressentie par la population afghane contre l’occupation menée par les
Etats-Unis et qui est maintenant dans sa onzième année.
Après que des travailleurs aient assisté à la
profanation d’exemplaires du Coran, la nouvelle s’est rapidement répandue à
travers le pays. Les bases américaines et les installations de l’ONU furent
attaquées même dans des villes comme Kunduz, situées loin des centres des
opérations talibanes dans le Sud de l’Afghanistan. Les articles de presse
attestent de la prodigieuse hostilité populaire vis-à-vis des forces
d’occupation même parmi la police et les soldats du régime fantoche du
président Hamid Karzaï.
Le Washington Post a cité ainsi deux
policiers afghans à un point de contrôle à Kaboul : « Les Afghans et le
monde musulman doivent se soulever contre les étrangers. Notre patience est
à bout, » a dit l’un d’entre eux tandis que son partenaire a ajouté, « Tous
les deux, nous attaquerons les forces militaires étrangères. »
Un incident particulièrement révélateur fut le
meurtre par un officier afghan d’un colonel et d’un commandant américains à
l’intérieur du centre de commandement et de contrôle du ministère de
l’Intérieur afghan – qui était censé être l’installation la plus sécurisée à
Kaboul. Les deux officiers américains s’étaient moqués du Coran en se
disputant avec l’officier afghan, identifié comme étant Abdul Saboor, 25
ans. Saboor tira alors huit fois sur eux en les tuant tous les deux.
Saboor serait ressorti sans entrave du ministère
fortement protégé, ce qui laisse supposer que son action a suscité beaucoup
de sympathie.
Les protestations populaires de masse contre
l’occupation de l’Afghanistan ont donné des sueurs froides aux puissances
occupantes. Tous les conseillers militaires américains furent brusquement
retirés des ministères afghans ; l’Allemagne et la France firent de même. La
stratégie du gouvernement Obama – prévoyant de transférer au régime fantoche
de Karzaï le soin de jouer le principal rôle dans la guerre contre les
Taliban – se trouve en ruines.
Quant à Karzaï lui-même, mis en place par
l’invasion de 2001 menée par les Etats-Unis et considéré comme le « maire de
Kaboul », il se retrouve démasqué comme l’instrument d’une occupation
étrangère haïe et méprisé même par ses propres policiers.
La profanation des exemplaires du Coran à Bagram
découle inexorablement du caractère réactionnaire de l’occupation menée par
les Etats-Unis en Afghanistan – une guerre d’agression lancée contre le
peuple afghan à l’encontre d’une vaste opposition de la part de la classe
ouvrière en Amérique et en Europe.
Les pays de l’OTAN n’avaient pu présenter une
telle guerre à la population et aux soldats qui y participent que sur la
base de mensonges. On avait raconté aux soldats américains que la guerre
contre une insurrection populaire en Afghanistan faisait partie de la
« guerre contre la terreur » et donc, en attaquant les Afghans qui
combattent l’occupation, ils combattaient les terroristes responsables des
attentats du 11 septembre.
Une telle guerre néocoloniale criminelle mène
inévitablement à des actes de barbarie tels la récente vidéo montrant des
marines américains en train d’uriner sur les cadavres d’Afghans qu’ils
venaient tout juste de tuer ou bien le cas des soldats de la brigade Stryker
qui avaient assassinés des civils afghans, leur avaient coupé les doigts et
autres parties de leur corps pour les conserver en guise de trophées.
De tels événements font partie des atrocités et
des crimes quotidiens par lesquels l’occupation impérialiste de
l’Afghanistan est maintenue. Les frappes aériennes de l’OTAN carbonisent
régulièrement des dizaines de civils innocents, les forces spéciales
américaines s’introduisent par effraction dans les maisons et terrorisent
des familles entières lors de raids nocturnes, les forces de l’OTAN
supervisent les arrestations, les détentions et la torture de milliers de
personnes.
Une grande part de la responsabilité de ces crimes
incombe aux forces politiques qui ont désorienté le sentiment de masse
anti-guerre en le canalisant derrière le Parti démocrate. Barack Obama
s’était présenté à l’élection présidentielle en 2008 en tant que prétendu
adversaire à la guerre en Irak, tout en promettant de poursuivre la guerre
en Afghanistan. Depuis, il a triplé le nombre des troupes américaines
déployées en Afghanistan et le nombre de civils afghans morts n’a cessé
d’augmenter d’année en année depuis son arrivée à la Maison Blanche.
La guerre en Afghanistan montre que le Parti
démocrate est tout autant un parti de la guerre et de l’agression
impérialiste que le Parti républicain. La guerre est un réquisitoire non
seulement contre le gouvernement Obama mais contre toutes les organisations
de la « gauche » libérale et pseudo socialiste qui ont présenté Obama comme
une alternative « anti-guerre » à Bush et aux Républicains et qui se
rallient à présent derrière la campagne de réélection d’Obama en 2012.
La base sociale de l’opposition à la guerre ne se
trouve pas dans une quelconque partie de l’establishment politique
mais dans la classe ouvrière internationale – la force dont les luttes
l’année dernière ont renversé les dictateurs soutenus par les Etats-Unis en
Egypte et en Tunisie.
Les travailleurs aux Etats-Unis et partout dans le
monde doivent exiger le retrait immédiat et inconditionnel des forces
américaines et de l’OTAN, ils doivent exiger la poursuite pour crimes de
guerre des responsables de l’invasion et de l’occupation de l’Afghanistan et
demander des réparations massives pour le peuple afghan.
(Article original paru le 27 février 2012)