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Dissimulation et conspiration: l'administration Bush et le 11 septembrePar le comité de rédaction L'administration Bush vit une crise politique majeure, après que la presse a rapporté que, plus d'un mois avant le 11 septembre, l'on avait renseigné Bush sur les dangers d'un attentat terroriste détournant des avions américains. Malgré l'avertissement, fourni par les services de renseignement en août 2001, la Maison Blanche n'a rien fait pour empêcher l'acte terroriste le plus meurtrier de l'histoire américaine, ou pour prévenir la population. Ces révélations montrent, pour le moins, que l'administration Bush a dissimulé des informations pendant huit mois sur les circonstances des attentats terroristes qui ont tué 3.000 personnes à New York et à Washington. Dans les jours après le 11 septembre, des portes-parole de Bush ont maintes fois décrit les détournements suicidaires comme une attaque secrète dont il n'y avait eu « aucun avertissement ». On a à présent révélé que ces déclarations étaient des mensonges, et on est ensuite forcé à se demander pourquoi la Maison Blanche a essayé de cacher les avertissements qu'elle avait reçus. Cet édifice de mensonges a commencé à s'effondrer lorsque CBS News a annoncé que le 6 août, soit cinq semaines avant l'attentat contre le World Trade Center, la Central Intelligence Agency (CIA) avait expliqué à Bush qu'un détournement d'avions par des terroristes liés à Osama bin Laden était une possibilité imminente. Il y a eu une explosion de reportages et de commentaires dans les médias jeudi et vendredi ; les chefs démocrates de la Chambre et du Sénat (rejoints par certaines sections du parti républicain) insistaient sur une investigation en règle par le Congrès. Certains membres du Congrès ont particulièrement remarqué la coïncidence du reportage du 6 août par la CIA et de deux rapports du Federal Bureau of Investigation (FBI), un du bureau de Phoenix le 10 juillet, et l'autre de Minneapolis le 13 août, qui soulignaient des soupçons que des agents al-Qaeda utilisaient des écoles d'aviation aux Etats-Unis pour obtenir l'expertise requise pour détourner des avions. Le rapport du 10 juillet recommendait une investigation nationale des écoles d'aviation et mentionnait des liens possibles avec Osama bin Laden. Les agents du FBI à Minneapolis décrivaient la détention de Zaccarias Moussaoui, l'immigré franco-marocain qui voulait apprendre comment naviguer un Boeing 747, mais pas décoller ou aterrir. Un email d'un agent du FBI à Minneapolis décrivait Moussaoui comme quelqu'un qui pourrait percuter le World Trade Center avec un Boeing. Les directeurs du FBI n'ont rien fait avec ces rapports. Plusieurs sénateurs, républicains et démocrates, ont dit que ces révélations posaient la question de savoir si l'on aurait pu empêcher les attentats du 11 septembre, et sauver des milliers de vies. Le sénateur John McCain, républicain d'Arizona et ancien candidat à la nomination présidentielle républicaine, a dit : « Il y avait deux rapports différents du FBI et un avertissement de la CIA, aucun desquels n'a été coordonné. On se demande : si l'on avait mis les trois ensemble, aurait-ce poussé une activité plus vigoureuse » ? McCain a dit que lui et le sénateur Joseph Lieberman, candidat démocrate à la vice-présidence en 2000, proposeraient des lois pour créer une comission rassemblant démocrates et républicains pour investiguer ce que le gouvernement savait et ne savait pas pendant la période aboutissant au 11 septembre. L'administration Bush s'est bruyamment opposée à une telle investigation, disant qu'elle dérangerait la guerre en Afghanistan et la prochaine étape de la « guerre contre le terrorisme ». La réponse de l'administration Bush aux dernières révélations est conforme au style qu'elle cultive depuis le 11 septembre : une combinaison de mensonges et d'intimidation. Les mensonges venaient de la conseillière de Sécurité Nationale Condoleezza Rice, le porte-parole Ari Fleischer, et d'autres représentants de la Maison Blanche. L'intimidation provenait des républicains au Congrès qui ont, comme d'habitude, pratiquement accusé les critiques de Bush de haute trahison, et surtout du vice-président Richard Cheney. A un dîner organisé pour collecter des fonds à New York, Cheney a donné un avertissement extraordinaire à ses « amis démocrates au Congrès ». Il a dit : « Ils doivent être très soucieux de ne pas chercher des avantages politiques en faisant des suggestions incendiaires, comme certains l'ont fait aujourd'hui, que la Maison Blanche avait des avertissements en avance qui auraient pu empêcher les attentats tragiques du 11 septembre ». Il a décrit de telles critiques comme « complètements irresponsables en temps de guerre ». Cheney a aussi insisté que toute investigation par le Congrès du 11 septembre devrait être secrète. « Elle doit protéger des sources et des méthodes sensibles, ne doit rien révéler de secret à la presse, et doit éviter tout commentaire sensationnel ou choquant », a-t-il dit. Répétant la déclaration de la Maison Blanche que toute investigation sérieuse des évènements du 11 septembre donnerait essentiellement une « aide et un soutien » à l'ennemi, il a ensuite déclaré que : « Le fait le plus important est peut-être qu'une investigation ne doit pas nuire aux efforts actuels d'empêcher le prochain attentat, car, sans aucun doute, il existe encore une menace sérieuse d'un autre attentat qui pourrait être même plus dévastateur ». La position officielle de la Maison Blanche est qu'elle coopèrera avec une investigation des comités de la Chambre et du Sénat. La presse rapporte cependant que le Congrès se plaint d'un manque de coopération de l'administration ; la Maison Blanche a jusqu'ici refusé de livrer le texte du document de la séance de renseignement du 6 août, ou les mémos des bureaux du FBI à Phoenix ou Minneapolis. Les tentatives des conseillers du président de défendre Bush n'ont qu'empiré les choses. Ils s'enlisent dans les contradictions ; ils fournissent de plus en plus de raisons pour se poser la question : qu'est-ce que l'administration essaie de cacher ? Bush lui-même n'a rien aidé lors de sa conférence avec un groupe de républicains au Congrès, déclarant que s'il avait connu les projets des terroristes, il aurait utilisé « toute la force et la furie des services armés américains pour les arrêter ». La grandiloquence de Bush n'a pas expliqué pourquoi, malgré des avertissements d'un détournement possible, personne n'a mobilisé l'armée de l'air dans la période après le 6 août. Aucuns chasseurs n'étaient en état d'alerte le 11 septembre, selon l'Armée de l'Air, et ceux qui ont répondu aux attentats sont arrivés à New York et à Washington après que les avions détournés avaient atteint leurs cibles. À une conférence de presse, Condoleeza Rice avait évidemment du mal à expliquer le rapport du 6 août et les actions de l'administration Bush pendant la période avant le 11 septembre. La conseillière à la sécurité nationale a dit que l'on avait prévu un détournement qui prendrait des otages, mais pas un détournement qui utiliserait l'avion comme kamikaze. Elle a dit, « Je ne pense pas qu'il y ait eu qui que ce soit qui aurait pu prédire que ces personnes prendraient un avion et l'écraseraient contre le World Trade Center, en prendraient un autre et l'écraseraient contre le Pentagone, qu'ils essaieraient d'utiliser un avion comme un missile ». Ceci n'est pas croyable, pour de nombreuses raisons. D'abord, le bureau du FBI à Minneapolis a précisément mentionné les dangers d'un tel attentat. En plus, il y a une longue histoire, d'une demi-douzaine d'années, d'efforts par des terroristes liés à al-Qaeda de détourner des avions à des fins d'attentat-suicide. Il y a eu un tel détournement en France en 1994, et la police des Philippines a déjoué une tentative semblable en 1995, quand l'organisateur s'est présenté aux Etats-Unis pour des interrogatoires. Il y a l'exemple de la conférence du G8 à Gênes, du 20-22 juillet, 2001. Après des avertissements de plusieurs sources, y compris le président égyptien Hosni Mubarak, un allié des Etats-Unis, qu'un avion détourné rempli d'explosifs pourrait percuter un des bâtiments de la conférence, les autorités italiennes ont installé des batteries anti-aériennes autour du site et ont interdit tous les vols locaux. Pendant la conférence, Bush a passé ses nuits à bord d'un vaisseau de la marine américaine dans le port, pour des raisons de sécurité. Rice prétend ensuite que deux semaines plus tard, quand les renseignements du président contenaient un avertissement qu'al-Qaeda pourrait tenter de détourner des avions américains, personne n'a considéré la possibilité que l'on pourrait les utiliser pour des attentats-suicides. Les histoires de Rice n'ont rien à voir avec les méthodes d'al-Qaeda. Michael O'Hanlon, analyste de la Brookings Institution, a dit au Boston Globe que « L'idée qu'al-Qaeda utiliserait une tactique conventionnelle de détournement, comme le prétend la Maison Blanche, n'a jamais eu de sens. C'est une organisation qui a essayé de tuer beaucoup de gens pendant une décennie Qui que ce soit qui pensait qu'al-Qaeda détournerait des avions aurait dû immédiatement déduire qu'ils essayeraient de tuer tout le monde à bord, ce qui veut dire que l'on reconnaîtrait que la tactique classique pour faire face à un détournement ne marcherait pas ». Même si l'on accepte de croire, comme le veut la Maison Blanche, qu'elle n'aurait pas pu imaginer un détournement qui tournerait en attentat-suicide, le fait qu'elle admet avoir reçu des avertissements soulève déjà des questions avec de graves implications. Si l'administration Bush avait pris des mesures sérieuses pour empêcher un détournement typique, ces mesures auraient aussi empêché l'attentat-suicide. Malgré l'avertissement du 6 août, les compagnies d'aviation n'ont pas renforcé leur dispositif de sécurité. Les 19 terroristes ont pris place dans les avions sans ennuis le 11 septembre, plusieurs d'entre eux ayant payé en liquide des billets aller-simple de première-classe, et ce, malgré le fait que plusieurs des terroristes étaient sous surveillance gouvernementale ou recherchés par le FBI, y compris Mohammed Atta, que l'on pense avoir été le chef de l'opération, et Hani Hanjour, que l'on pense avoir été un des pilotes des avions détournés. Rice a prétendu que l'avertissement d'un détournement possible était très vague, et se basait sur un seul rapport, des renseignements britanniques, de 1998. Comme l'a observé la démocrate Nancy Pelosi, membre du Comité de Renseignements de la Chambre, « Les questions sont : Quel était le changement de circonstances du 7 [sic] août qui a poussé les services de renseignement à notifier le président de trois anciens rapports sur d'éventuelles activités terroristes ? Et, après avoir fait parvenir ces renseignements à un rang si élevé, quelles actions ont été considérées comme justifiées à partir de ces informations ? » Les médias, avec certains républicains et démocrates du Congrès, ont commencé à poser des questions sur le comportement de l'administration, et particulièrement des services de renseignement américains, dans les mois avant le 11 septembre. C'est un changement remarquable après huit mois d'un soutien inconditionnel porté à la « guerre contre le terrorisme » et de louanges serviles de la personnalité de Bush. Le barrage soudain de critiques publiques reste cependant à l'intérieur d'étroites limites. On accuse les services de renseignement et l'administration Bush d'avoir répondu lentement, avec incompétence, ou même avec indifférence à la menace d'attentats terroristes aux Etats-Unis. Mais personne n'a mis en question la politique d'intervention militaire de Bush en Asie Centrale, au Moyen-Orient, ou ailleurs. Et aucun des critiques de Bush, au gouvernement ou dans les médias, n'a soulevé la question fondamentale : que l'inertie avant le 11 septembre était calculée, que le gouvernement américain voulait utiliser l'attentat terroriste comme un heureux prétexte pour lancer une campagne d'agression militaire américaine que l'on préparait depuis longtemps. De ce point de vue-là, la révélation la plus importante a été un reportage de NBC News qui disait que, le 9 septembre (deux jours avant les attentats sur le World Trade Center et le Pentagone), Bush avait sur son bureau une Directive Présidentielle de Sécurité Nationale planifiant en détail une campagne mondiale militaire, diplomatique, et d'espionnage visant Osama bin Laden et son organisation al-Qaeda, y compris la transmission d'un ultimatum au régime taliban en Afghanistan soutenu par une menace de guerre. Cette directive, selon NBC, « détaillait essentiellement le même scénario de guerre que la Maison Blanche, la CIA, et le Pentagone ont mis en place après le 11 septembre ». Elle s'était composée via un processus de consultation durant plusieurs mois, auquel ont participé le Pentagone, la CIA, le Département d'Etat, et d'autres organisations de sécurité ou de renseigment. Bref, bien avant les attentats terroristes, l'administration Bush se préparait à lancer l'action militaire qu'elle a ensuite décrit comme étant seulement une réponse à l'atrocité du 11 septembre. Il y a une contradiction fondamentale dans le récit de l'administration Bush. Rice et les autres porte-paroles ont présenté l'image d'un gouvernement de plus en plus préoccupé par un grand attentat terroriste à l'intérieur des Etats-Unis. Cependant, comme l'indique le rapport NBC, l'administration se préparait à lancer un assaut militaire contre al-Qaeda et les états qui, selon l'administration Bush, la soutenaient, une campagne qui provoquerait certainement des ripostes sous formes d'attentat. Cependant, on n'a rien fait pour renforcer les défenses des villes américaines, de l'aviation civile, des bâtiments publics, ou de cibles évidentes tels le World Trade Center, déjà visé en 1993 par des terroristes intégristes musulmans. Les révélations extraordinaires sur le traitement des rapports de Minneapolis et de Phoenix par le FBI ne permettent pas d'explication innocente. Les directeurs du FBI ont refusé des appels à des actions qui, même alors, auraient paru tout à fait normales. Comparé aux tentatives de plus en plus tirées par les cheveux d'expliquer l'inaction par une « incapacité de comprendre l'ensemble », il paraît bien plus probable que l'on avait pris la décision, à des niveaux élevés de l'état américain, de permettre un détournement par al-Qaeda, pour donner l'occasion de déclencher l'offensive militaire que l'on avait déjà bien préparée. S'il y a un élément de la vérité quand Rice dit qu'ils « n'avaient jamais imaginé » des terroristes utilisant des Boeings comme missiles, cette vérité pourrait être ceci : ceux qui, aux niveaux plus élevés de l'état, ont ordonné un relâchement sécuritaire pour donner un casus belli n'ont peut-être pas anticipé que le détournement finirait par la destruction d'un gratte-ciel new-yorkais. Celui qui considère qu'une telle action de la part du gouvernement américain est impensable sous-estime la cruauté de l'impérialisme américain et la criminalité de l'administration Bush. Ce ne serait pas la première fois qu'un gouvernement bourgeois, acculé par des contradictions et des crises à l'intérieur et à l'extérieur du pays, a tenté de s'extraire en créant un prétexte pour une campagne militaire, espérant obtenir des ressources et un avantage stratégique à l'extérieur et créer un consensus patriotique à l'intérieur. Certainement l'administration Bush était en crise pendant l'été 2001, ayant perdu le contrôle du Sénat en faveur des démocrates, faisant face à l'effondrement de la bulle spéculative bousière, au chômage en forte hausse, à la possibilité d'une crise fiscale, et à une opposition internationale grandissante à sa politique étrangère agressive et unilatérale. Depuis plus d'un siècle, chaque guerre menée par les Etats-Unis s'est accompagnée de provocations orchestrées par le gouvernement américain pour tromper l'opinion publique et donner un aspect « défensif » à ses actions militaires. La tendance est bien connue, depuis la campagne sur l'explosion du cuirassé Maine qui a mené à la guerre contre l'Espagne en 1898, à l'incident du Golfe de Tonkin et la guerre au Vietnam, jusqu'au massacre de Racak, le prétexte pour l'intervention américaine au Kosovo en 1999. La fraude et la provocation semblent naturelles à l'administration Bush. Elle s'est installée, après tout, par de tels moyens: le vol de l'élection 2000 et l'intervention anti-démocratique de la majorité de droite à la Cour Suprême. Bush doit sa montée politique à des élements carrément criminels de l'élite économique, tels Enron. Des documents internes de Enron ont à présent confirmé que le chef d'Enron, Kenneth Lay, le plus grand soutien financier de la carrière politique de Bush, a fabriqué une pénurie d'électricité quasi-catastrophique en Californie, qui aurait pu menacer des milliers de vies, pour accroître les profits d'Enron. La crise politique grandissante pourrait produire des révélations même plus surprenantes. Le Washington Post a rapporté vendredi, presque sans commentaires, qu'à un point pendant l'été 2001, l'administration Bush avait décidé que pour des raisons de sécurité le chef du département de la justice, John Ashcroft, ne devrait plus emprunter des vols commerciaux, ce qui suggère que les avertissements de détournements d'avions dans le proche avenir étaient loin d'être « généraux » et « vagues ». On ne peut se fier ni aux médias américains ni aux hommes politiques démocrates du Congrès pour mener à bien une investigation sérieuse de la tragédie du 11 septembre. Déjà les grands organes de la presse américaine, tels le New York Times et le Washington Post, ont publié des éditoriaux déclarant que les rapports sur les avertissements reçus par Bush avant le 11 septembre étaient « exagérés » (le Post) ou un exemple d'un « jeu pour désigner le coupable » typique de Washington. Le World Socialist Web Site s'est placé à l'avant-garde de l'analyse critique et de l'explication des attentats du 11 septembre, indiquant que l'administration Bush et les médias cachaient les vrais circonstances des actes terroristes et les objectifs impérialistes de la guerre américaine en Afghanistan. Il y a plus de quatre mois, nous avons publié une série en quatre parts, intitulé « Was the government alerted to September 11 attack ? » (« Le gouvernement américain a-t-il été alerté concernant les attentats du 11 septembre ? ») A présent, les évènements donnent raison à cette analyse. Voir aussi :
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