wsws : Nouvelles et analyses : Histoire et culture
Quatrième partie
Par Peter Symonds
Le 14 juillet 2005
VVoici la quatrième et dernière partie d'une série de quatre sur les découvertes scientifiques d'Einstein. La première partie a été publiée le 7 octobre, la deuxième partie, et la troisième le 20 octobre.
Toute analyse de la carrière scientifique subséquente d'Einstein demande que l'on examine, si ce n'est que brièvement, l'autre pilier de la physique moderne qu'il a contribué à créer : la mécanique quantique. Ce n'est pas par hasard que le comité d'attribution du prix Nobel s'est concentré sur l'effet photoélectrique plutôt que sur la théorie quantique de la lumière qu'Einstein avait décrit comme «réellement révolutionnaire». Plusieurs scientifiques ont eu de la difficulté à admettre que la lumière pouvait se comporter à la fois comme une onde et comme une particule. Comment, après tout, est-il possible que quoique ce soit puisse être continu et se propager comme une onde et en même temps être discontinu et localisé comme une particule ?
Le commentaire du physicien expérimentateur Robert Millikan sur ces propres expériences de 1914 dont les résultats venaient confirmer les prédictions d'Einstein sur l'effet photoélectrique, résume l'attitude qui prévalait dans le milieu scientifique : «Nous devons confrontés la situation étonnante que ces faits furent correctement et exactement prédits il y a neuf années par une forme de mécanique quantique qui est aujourd'hui à peu près abandonnée.» [18] À mesure que de nouvelles expériences sur les atomes étaient effectuées, on trouvait que la dualité onde-particule envahissait tous les recoins de la nature. Tout comme la lumière pouvait aussi être considérée comme une particule, les particules subatomiques devaient être considérées comme des ondes si on voulait expliquer leur comportement.
J.J. Thompson a proposé le «modèle du plum-pudding» pour expliquer l'atome, en vertu duquel un atome est constitué d'un nombre égal d'électrons chargés négativement et de particules chargées positivement distribués de façon homogène dans une petite région de l'espace. La physique élémentaire nous informe que les charges positives et les charges négatives s'attirent. Selon Thomson, le nombre égal de charges positives et négatives entraînait que l'atome était électriquement neutre. En 1912, toutefois, Ernest Rutherford a fait la découverte intrigante que les atomes était principalement constitué de vide, que les électrons se déplaçaient sur des orbites autour d'un très petit noyau massif chargé positivement.
Ce modèle de l'atome d'électrons en orbite autour d'un noyau compact est si généralement admis aujourd'hui qu'il est immédiatement identifiable. Mais au début du vingtième siècle, il soulevait des questions troublantes. Si les électrons orbitaient autour d'un noyau positif, qu'est-ce qui les empêchaient de se rapprocher du noyau lentement et graduellement selon une trajectoire en spirale jusqu'à tomber dessus? Et s'ils avaient une trajectoire en spirale, alors les électrons auraient dû émettre une radiation électromagnétique, y compris de la lumière, sur un spectre continu de fréquences. Mais les atomes énergisés n'émettaient de lumière qu'à des fréquences bien spécifiées, c'est-à-dire que leur spectre d'émission n'était pas constitué de toutes les couleurs de l'arc-en-ciel mais seulement d'une série de raies très fines et distinctes.
L'existence d'un noyau soulevait un dilemme. S'il était constitué de particules chargées positivement, les protons, alors qu'est-ce qui pouvait bien les garder ensembles? Après tout, comme on l'apprend dans les cours de science de base, les charges semblables se repoussent. La gravité était beaucoup trop faible pour offrir une explication satisfaisante. Il devait y avoir d'autres forces en jeu, mais qui étaient alors inconnues. En fait, on sait maintenant qu'il y a en deux, les forces nucléaires forte et faible, en plus de tout un zoo d'autres particules nucléaires. James Chadwick identifia la première particule nucléaire en 1932. Il s'agissait du neutron, une particule électriquement neutre et légèrement plus massive que le proton.
Mais il y avait un autre problème avec les électrons en orbite qui mena directement à la mécanique quantique. Dans une série d'articles qu'il publia en 1913, Niels Bohr a proposé que les électrons n'étaient pas libre d'adopter n'importe quelle trajectoire autour du noyau, mais qu'ils ne pouvaient prendre que des orbites déterminées. Ils n'adoptaient de trajectoire en spirale, mais «sautaient» instantanément d'une orbite à l'autre. Pour passer à une orbite correspondant à une énergie plus élevée, l'électron devait absorber un grumeau d'énergie, ce qu'on nomme quantum, qui correspond à une quantité fixée d'énergie. Pour passer à une orbite d'énergie moindre, l'électron devait émettre un quantum d'énergie. L'énergie d'un quantum était, selon les travaux de Planck et d'Einstein, directement relié à sa fréquence. C'est ainsi que cette théorie arrivait à expliquer le spectre que l'on observait : l'électron «sautait» d'une orbite à l'autre ne produisant que des fréquences bien précises de lumière, c'est-à-dire des raies spectrales très fines.
La théorie de Bohr était plutôt rafistolée et limitée. Elle ne s'appliquait qu'aux atomes ayant un proton et un électron, les atomes d'hydrogène, et encore, ne rendait pas compte de l'ensemble de ses propriétés. Louis de Broglie fit en 1924 une proposition radicalement différente incorporant les idées de Bohr. Il suggéra que les différents niveaux d'énergie pouvaient s'expliquer si l'on considérait l'électron non comme une particule discrète, mais comme une onde qui, pour utiliser une image, s'étendait autour de l'orbite. Au lieu d'être une hypothèse arbitraire comme dans la théorie de Bohr, les niveaux d'énergie électroniques pouvaient être dérivés de la longueur d'onde de de Broglie. Einstein a alors indiqué que si tel était le cas, alors les électrons devraient avoir des propriétés associées à la propagation des ondes, comme la diffraction, ce qui fut prouver en 1927 par Clinton Davisson et Lester Germer.
La proposition de de Broglie, toutefois, soulevait une question évidente: de quoi étaient faites ses ondes? Erwin Schrödinger fit tout d'abord l'hypothèse que ces ondes étaient des électrons «fractionnés» mais il n'existe aucune preuve expérimentale que l'électron puisse exister sous cette forme. En 1926, Max Born a avancé l'idée radicale qui forme encore à ce jour la base de la mécanique quantique: les «ondes électroniques» peuvent être comprises comme des «ondes de probabilité». Les «pics» de l'onde correspondent aux lieux où il existe une forte probabilité de trouver un électron alors que les «creux» correspondent aux régions où la probabilité de trouver un électron est faible.
En 1926, Schrödinger et Heisenberg ont de façon indépendante formulée une théorie complète de la mécanique quantique qui incorporait l'idée de Bohr de façon centrale. L'année suivante, Heisenberg a formulé son «principe d'incertitude» qu'il a développé à partir du paradoxe de la dualité onde-particule de la matière: il existe une limite absolue dans la possibilité de connaître au même instant certaines propriétés. Par exemple, il n'est pas possible de déterminer exactement la position instantanée et la vitesse instantanée d'un électron. Comme Heisenberg l'a expliqué : «Nous ne pouvons connaître, et c'est une question de principe, le présent dans tous ces détails.»[19]
Les probabilités et l'univers
Le physicien Brian Greene a écrit «C'est une idée réellement étrange. Qu'est-ce que les probabilités ont à voir avec les formulations de la physique fondamentale? Nous sommes habitués à trouver des probabilités dans les courses de chevaux, dans les lancers de pièces et à la roulette, mais dans tous ces cas, elles ne font que donner expression au fait que nous avons une connaissance insuffisante.» Dans le cas de la roulette, continue Greene, il est concevable qu'avec suffisamment d'informations et des ordinateurs suffisamment puissants, on puisse utiliser la mécanique newtonienne pour calculer exactement sur quel numéro la balle tombera. «Nous voyons que les probabilités tel que nous les rencontrons à la roulette ne reflètent rien de particulièrement fondamental sur la façon dont le monde fonctionne. La mécanique quantique, au contraire, injecte le concept de probabilité dans l'univers à un niveau beaucoup plus profond. Selon Born et plus d'un demi-siècle d'expériences, la nature ondulatoire de la matière implique que la matière elle-même doit être décrite fondamentalement d'une façon probabiliste.»[20]
Dans le cas d'objets macroscopiques, comme la platine et la balle d'un jeu de roulette, leur caractère ondulatoire est insignifiant et la mécanique newtonienne offre une approximation très précise. Mais au niveau subatomique, la mécanique quantique a fait la preuve qu'elle est un outil indispensable pour prédire des résultats souvent très étranges. Les hypothèses sur lesquelles elle est basée sont, comme Greene l'a souligné, profondément troublantes. Einstein, s'il en est un, était concerné que la mécanique quantique minait la causalité : la physique ne pouvait plus déterminer de résultats précis mais seulement la probabilité de différents résultats.
Au cours de la fin des 1920 et des 1930, Einstein et Bohr ont débattu de la signification de l'interprétation de Copenhague de la mécanique quantique développée par Bohr et alors largement admise comme la plus exacte. Au cur de l'interprétation de Copenhague, on trouve le principe d'incertitude de Heisenberg et une notion qui en découle introduite par Bohr, celle de complémentarité. Essentiellement, Bohr soutenait qu'il fallait accepter que la nature contradictoire onde-particule de la matière est fondamentale. Il insistait qu'il était impossible de séparer un phénomène de l'appareil qui sert à l'observer ou à le mesurer. L'interprétation de Bohr allait dans une direction où l'on pouvait se dispenser de la réalité objective et a certainement été utilisée par plusieurs idéalistes philosophiques comme preuve de leur point de vue.
Au cours du débat, Schrödinger, qui s'était rangé du côté d'Einstein, a développé une «expérience en pensée» qui a sorti les questions soulevées hors du monde plutôt obscur des particules subatomiques pour les poser dans le monde des objets macroscopiques du quotidien. Supposons que nous ayons, a expliqué Schrödinger, un chat dans une boîte qui contient une fiole de poison ainsi qu'un système pour libérer le poison dans la boîte et que ce système soit actionné s'il survient une désintégration radioactive. Au bout d'un certain temps, la mécanique quantique nous informe qu'il y a une chance sur deux pour que cette désintégration se soit produite. Si l'expérimentateur ouvre la boîte à ce moment précis, il pourra observer si le chat est mort ou vivant. Mais qu'en est-il au moment juste avant l'ouverture de la boîte? Selon l'interprétation de Copenhague, la fonction d'onde du chat existe comme une superposition de deux états. Dans le premier état, le chat est mort, dans l'autre, le chat est vivant, ce qu'Einstein et Schrödinger considérait comme absurde.
Einstein n'a pas nié que la mécanique quantique puisse prédire les résultats expérimentaux, mais il était profondément convaincu qu'elle ne consistait qu'en une explication partielle et qu'elle se révélerait n'être, en bout de ligne, qu'une partie d'une théorie plus complète. Dans une lettre à Max Born en 1926, Einstein a résumé sa position : «La mécanique quantique est certainement impressionnante. Mais une voix intérieure me dit que ce n'est pas encore le mot de la fin. La théorie a beaucoup à offrir, mais elle ne nous rapproche guère des secrets de l'Ancien. En tout cas, je suis convaincu qu'Il ne joue pas aux dés.» [21]
Les objections d'Einstein découlaient de la conviction profonde que la matière existait indépendamment de l'observateur, qu'elle est gouvernée par des lois et connaissable. Ses références à «Dieu» ne signifiait pas un retour à la religion mais exprimait une «admiration sans limite pour la structure du monde». Comme il l'a expliqué à de multiples occasions, il a utilisé ce terme à la manière de Benedict Spinoza, cet extraordinaire philosophe du début des Lumières. Pour Spinoza, en tout un athée sauf en nom, «Dieu» et «nature» sont deux termes interchangeables, les lois de Dieu étaient les lois de la nature et il n'y a pas de place pour l'intervention divine. Il était inconcevable pour Einstein que les lois de la nature, à quelque niveau que ce soit, soient le résultat de la chance aveugle et qu'il ne puisse être possible d'en trouver une explication plus profonde.
Qui a vu juste? Le verdict non déclaré de plusieurs était que Bohr avait gagné le débat. Ce qui fait la preuve d'un pudding, c'est qu'il est mangé, et sur le plan pratique, la mécanique quantique fonctionne. Plusieurs générations de physiciens ont appris à utiliser l'équation de Schrödinger pour résoudre plusieurs problèmes de différents horizons sans trop poser de questions sur ce qu'elle signifiait. Jusqu'à tout récemment, le débat entre Einstein et Bohr était largement oublié. Après sa grande percée dans la théorie de la relativité, disait-on, Einstein s'était consacré, sans succès, au travail à la Don Quichotte de développer une théorie des champs unifiée qui comprendrait toutes les forces connues.
Considérer qu'après 1915 ou qu'après son débat avec Bohr, Einstein est devenu quelque chose approchant du has been scientifique serait faire preuve de grande myopie. En plus du flot continuel d'articles scientifiques sur toute une variété de sujet, les objections d'Einstein quant à la mécanique quantique n'étaient pas l'expression d'un conservatisme intrinsèque, mais plutôt l'expression de sa recherche pour une explication plus profonde de l'univers. Bohr, sans aucun doute, considérait Einstein comme un formidable adversaire intellectuel qui l'a forcé à raffiner ses propres idées. Et Einstein est demeuré profondément engagé dans la continuation des discussions sur la mécanique quantique jusqu'à sa mort en 1955.
Abraham Pais, un collègue d'Einstein qui fut aussi un des ses biographes, a observé : «Il est devenu clair pour moi en écoutant les deux [Einstein et Bohr] que l'émergence de la mécanique quantique en 1925 représentait une cassure beaucoup plus grande avec le passé que celle qu'a représenté la relativité restreinte de 1905 ou la relativité générale de 1915. Je n'avais jamais réalisé cela avant puisque j'appartenais à la génération des physiciens qui fut exposée à une mécanique quantique «prête à emporter». J'en suis venu à comprendre combien je m'étais trompé en acceptant la croyance généralement répandue qu'Einstein ne s'intéressait plus à la mécanique quantique. Bien au contraire, il ne voulait rien de plus que de trouver une théorie des champs unifiée qui non seulement unifierait la gravité et les forces électromagnétiques mais qui offrirait aussi la base pour une nouvelle interprétation des phénomènes quantiques. S'il parlait de la relativité avec détachement, la théorie quantique soulevait chez lui la passion. Le quantum était son démon.»[22]
Le chat de Schrödinger fut le sujet d'un débat prolongé. L'interprétation de Copenhague n'est pas le seul cadre pour comprendre la mécanique quantique et des décennies de travail ont raffiné la discussion. Néanmoins, les préoccupations d'Einstein sur l'interprétation de la mécanique quantique demeurent encore à ce jour. De plus, même dans les cas où il a été montré qu'Einstein s'était trompé, ces «erreurs» se sont montrées remarquablement fertiles. Comme exemple de ceci, prenons l'article qu'il a écrit conjointement avec Boris Pololsky et Nathan Rosen en 1935. Le plus souvent nommé l'article d'EPR, il contient une des «expériences en pensée» d'Einstein qui ont pour but de montrer que l'interprétation de Copenhague ne pouvait tout expliquer.
Selon le principe d'incertitude de Heisenberg, il est impossible de connaître simultanément la position et la vitesse au-delà d'une certaine précision. Supposons, raisonnait Einstein, que deux particules atomiques, après avoir interagi, s'éloignent l'une de l'autre dans des sens opposés. Il sera toujours possible de mesurer leurs impulsions (l'impulsion est le produit de la masse avec la vitesse) juste avant le moment de l'interaction entre les deux particules et, plus tard, la position de la particule A et l'impulsion de B. L'information ainsi obtenue pourrait être utilisée pour calculer l'impulsion et la position des deux particules sans contraintes sur la précision de ces deux quantités. La seule façon de sauvegarder le principe d'incertitude est d'admettre qu'en effectuant une mesure sur la particule A, alors on affectait instantanément la particule B, et vice-versa. Einstein rejeta cette possibilité comme étant de «l'étrange action à distance»
Selon un compte rendu, l'article d'EPR a été pour Bohr comme «un coup de foudre dans un ciel bleu» et il a passé six semaines a développé sa réplique au défi qui lui était posé. La discussion était pratiquement oubliée lorsque le physicien John Bell qui partageait les préoccupations d'Einstein sur la mécanique quantique a développé en 1966 une façon de mettre à l'épreuve l'«expérience en pensée» d'EPR. Ce n'est que dans les 1980 que la technologie pour permettre de mener à bien une version de l'expérience proposée par Bell est devenue disponible. Une équipe expérimentale dirigée par Alain Aspect, en étudiant le comportement de paires de photons, a vérifié les prédictions de la mécanique quantique. «L'étrange action à distance», aujourd'hui connu sous le nom d'intrication quantique, est l'objet d'intenses études.
L'intrication quantique, toutefois, ne fait que souligner un problème plus fondamental. Si des paires de particules peuvent s'influencer instantanément à distance, alors la théorie de la relativité est violée, puisqu'elle stipule que rien ne va plus vite que la lumière. Ce n'est qu'une indication de ce qui est bien connu : les deux piliers de la physique moderne, la mécanique quantique et la relativité générale sont en conflit l'une avec l'autre au niveau le plus fondamental. Des décennies de tentatives pour combiner ces deux théories n'ont été récompensées que par des succès partiels.
Au début de son livre «L'univers élégant», Brian Greene a résumé ainsi le problème : «Après des années de recherche, les physiciens ont expérimentalement confirmé avec une précision presque inimaginable toutes les prédictions de chacune de ces théories. Mais les mêmes outils théoriques ont inéluctablement mené à une autre conclusion dérangeante: dans leur formulation actuelle, la relativité générale et la mécanique quantique ne peuvent être tous les deux exactes. Les deux théories qui sont à la base des progrès de la physique durant des cent dernières années, de l'explication de l'expansion de l'univers jusqu'à celle de la structure fondamentale de la matière, sont mutuellement incompatible.»[23]
Les recherches d'Einstein sur une théorie des champs unifiée découlaient de la conscience qu'il avait de cette contradiction. De plusieurs façons, l'état de la physique du début du vingt unième siècle ressemble étrangement à la situation avant 1905. Deux théories, la relativité générale et la mécanique quantique, toutes deux ayant un succès extraordinaire dans leur propre champ, présentent des difficultés théoriques fondamentales devant les tentatives de les unifier. La tâche devient de plus en plus pressante à mesure que les expériences scrutent l'atome de plus en plus profondément et que les observations astronomiques nous mettent au défi de développer une théorie complète de l'univers. Les nouveaux problèmes demandent plus que les précédentes tentatives ad hoc d'amalgamer les deux théories. Il faut une nouvelle synthèse.
Est-ce que cela est possible? Le livre de Greene est consacré à exposer de façon populaire la théorie des supercordes, présentement le prétendant le plus probable au titre de ce que l'on nomme parfois la TOE ou la «théorie de tout». On trouve un autre signe des temps dans un parallèle remarquable. La réaction au ferment actuel de la physique a produit un spectre d'opinion comparable à celui que l'on trouvait en 1905 qui va de ceux qui déclarent qu'une nouvelle synthèse est impossible et qui, dans certains cas, se tournent vers la religion pour trouver des réponses, jusqu'à ceux qui sont prêts à proclamer une crise majeure de la science. Il y a même un auteur qui déclare qu'il ne reste rien à faire.[24] En dernière analyse, il ne fait aucun doute que l'intuition de base d'Einstein sera éventuellement démontrée comme exacte: la réalité est gouvernée par des lois et il est possible de les pénétrer toujours plus.
On trouve toutefois une différence significative entre 1905 et 2005 dans l'atmosphère idéologique générale qui est conditionnée par le déclin social sous-jacent du capitalisme. Alors qu'en 1905 régnait un climat d'optimisme et d'intérêt enthousiaste pour les réalisations scientifiques, la science d'aujourd'hui est obligée de défendre ses concepts les plus fondamentaux face aux attaques de la superstition, du mysticisme et du non-sens anti-scientifique, tous promus à des fins politiquement réactionnaires. La couverture qu'ont accordée les médias à la mort du pape récemment ainsi qu'aux différents rituels moyenâgeux qui lui furent associés a dépassé de beaucoup en quantité, par exemple, tout examen de la contribution d'Einstein aux cent dernières années. C'est une raison supplémentaire pour les socialistes, et pour ceux qui sont préoccupés par les progrès futurs de l'humanité, de rendre hommage à ses réalisations étonnantes et de défendre ceux qui continuent là où il a laissé: repousser les frontières de notre connaissance de la nature et de l'univers.
Fin
Notes :
18. Cité dans Einstein 1905 The Standard of Greatness,
John S. Rigden, Harvard University Press, 2005, p.36
19. Cité dans Science: A History, John Gribbin,
Penguin, 2003, p.520
20. The Elegant Universe, Brian Greene, Vintage, 2000,
p.106
21. Cité dans Einstein: A Life in Science, Michael
White and John Gribbin, Simon & Schuster, 2005, p. 216
22. Subtle is the Lord: The Science and the Life of Albert
Einstein, Abraham Pais, Oxford University Press 1982, p.9
23. Greene, op cit. p.9
24. Plus dans "A Postmodernist attack on science", Chris
Talbot, World Socialist Web Site, 18 May 1999
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