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Le WSWS parle avec des immigrés et réfugiés tamouls en France

Par Athiyan Silva à Paris
1er mai 2012

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Avant le second tour de l'élection présidentielle, des campagnes anti-immigrants et anti-islam arrivent sur le devant de la scène.  Les deux candidats, le président sortant Nicolas Sarkozy et le candidat du Parti socialiste (PS) François Hollande s'en prennent de plus en plus aux travailleurs immigrés qu'ils utilisent comme boucs émissaires. C'est dans ce contexte que des reporters du WSWS ont interviewé des travailleurs immigrés et des réfugiés tamouls dans Paris.

Plus de 100 000 Tamouls vivent en France, la plupart étant arrivés en France comme réfugiés politiques après que la guerre civile a éclaté en 1983. La plupart travaillent dans des restaurants, le bâtiment, font le ménage et des petits boulots. Un grand nombre font des journées de plus de 11 heures dans les restaurants.

Un travailleur immigré, père de quatre jeunes enfants, qui vit dans un petit appartement à Drancy a dit, « Je travaille dans un restaurant de 5 heures de l'après-midi à 2 heures du matin. Je n'ai qu'un salaire de base, même si je travaille le dimanche. Ce salaire ne suffit pas pour vivre. Ma femme travaille à mi-temps, elle fait des ménages.. Elle gagne 350 euros par mois. Aujourd'hui, tout est très cher, cela devient très difficile de vivre. »

Quand on lui a demandé son avis sur l'élection présidentielle, il a ajouté, « Les programmes de Sarkozy et de Hollande sont les mêmes. Ils représentent les banques et le patronat. Ils n'ont rien à proposer au travailleurs français ou immigrés. Ils vont nous attaquer de plus en plus avec l'austérité. »

Le WSWS a rencontré de nombreux réfugiés tamouls sans-papiers. La plupart sont des jeunes touchés par la guerre civile au Sri Lanka. La plupart dépendent du soutien de membres de leur famille ou d'amis ou travaillent au noir. Leur situation est très critique; incapables d'obtenir un récépissé de titre de séjour visa ou un permis de travail, ils ne peuvent travailler dans la légalité ou obtenir de l'aide du gouvernement et sont donc confrontés à d'énormes difficultés n'ayant ni emploi, ni revenus ni logement correct.

Beaucoup font de longues journées de travail, jusque dix heures ou plus, pour souvent ne gagner que 25 ou 30 euros par jour. Parfois leur patron ne leur donnent pas ce qu'ils leur doivent sachant très bien que des travailleurs sans papiers ne vont pas les poursuivre en justice.

Un réfugié qui travaille deux jours par semaine dans un restaurant au nord de Paris a dit, « Je suis de Kilinochchi, province au nord du Sri Lanka. Je suis venu en France en 2005 comme réfugié politique. Dix jours plus tard, j'étais arrêté par la police et placé en camp de rétention près de l'aéroport puis déporté à Colombo sous la garde de trois policiers français. Arrivés au Sri Lanka, ils m'ont remis aux autorités de la sécurité. Ensuite la police d'investigation criminelle m'a emmené dans leur quartier général à Colombo, qui est renommé pour la torture et les assassinats qui s'y pratiquent. Après l'enquête, ils m'ont jeté en prison pour six mois selon la « Loi de prévention du terrorisme », dans la prison de Negombo. »

Il a ajouté, « En avril 2009 au dernier stade de la guerre, j'étais coincé dans la zone de guerre. J'ai perdu mes deux frères et finalement j'ai réussi à aller dans la zone de contrôle militaire du Sri Lanka avec ma mère. Ils m'ont arrêté à nouveau et m'ont fait passer par quatre différents camps secrets de 'réhabilitation'. J'ai été torturé de nombreuses fois. Des groupes paramilitaires [les groupes Karuna et l'EPDP] m'ont menacé de mort. Finalement j'ai tenté de me suicider. Maintenant pour la deuxième fois, en 2012, je suis venu en France pour avoir la vie sauve. J'ai fait appel à l'OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides) mais je n'ai toujours pas reçu de réponse. »

Une telle description réfute le rapport cynique de l'OFPRA sur le Sri Lanka, daté de 2011, «En l'espace de deux années, la situation du Nord de Sri Lanka s'est radicalement transformée. Zone de conflits armés et de violences pendant près de trente années, en partie occupée par un mouvement séparatiste, elle est désormais pacifiée ...Les groupes paramilitaires ne circulent plus ouvertement en armes, dont une partie a été confisquée par l'armée. Ils se sont transformés en partis politiques, et ont participé pacifiquement aux élections locales de mars et juillet 2011. »

Ce rapport est faux. En fait le nord et l'est du Sri Lanka sont toujours sous occupation militaire et les meurtres, les enlèvements et les viols se poursuivent dans ces régions.

Le WSWS s'est aussi rendu à la préfecture de Bobigny. Plus de 400 immigrants faisaient la queue devant le bâtiment pour obtenir des permis de séjour ou autres documents. Certaines femmes étaient là avec leurs enfants. La plupart faisaient la queue depuis minuit, certains depuis 8 heures du soir la veille.

A 8h30 du matin, les autorités ont commencé à donner des rendez-vous mais pas à tout le monde. De nombreux réfugiés ont donc attendu de longues heures pour rien. Les agents ont crié à la foule, « Il n'y a plus de tickets, si vous voulez rester, vous pouvez mais ça ne sert à rien, alors allez-vous en. »

Un des réfugiés a dit: « J'attends depuis 8 heures du soir pour avoir ce récépissé de titre de séjour. Je n'ai aucun papier à montrer à la police. S 'ils m'arrêtent, ils vont me mettre en prison. »

Le WSWS a parlé avec Thas, réfugié tamoul de 33 ans, marié, originaire de Kayts au Sri Lanka. Il est au chômage et a deux enfants. Il a été blessé durant la guerre civile, touché à la jambe par les coups de feu des forces nationalistes tamoules à Vavunia.

Thas vit en France depuis 11 ans mais ne parvient pas à trouver un travail n'ayant pas de papiers en règle. Actuellement il vit avec sa famille dans un foyer, avec l'aide de quelques amis et des organisations de service social en France.

Thas a dit: « L'OFPRA et la Commission des recours des réfugiés ont rejeté mon appel. Maintenant sans récépissé, toute ma famille et moi avons de grandes difficultés à vivre ici. J'ai été arrêté par la police française quatre fois. Chaque fois on m'a relâché avec l'aide d'un avocat. La guerre est finie au Sri Lanka, mais nos régions sont toujours occupées par l'armée et les forces paramilitaires. Dans ces conditions, qui peut donner de vraies garanties pour notre vie? Je ne m'imagine pas rentrer au Sri Lanka. Il y a quelques jours, quand je faisais la queue à minuit, des voyous m'ont attaqué. On peut voir que j'ai encore l'oeil gauche blessé. S 'ils me donnent un récépissé, est-ce qu'on sera confronté à une telle situation? »

Le WSWS a aussi parlé à Vasi, réfugié célibataire de 24 ans qui est au chômage et vit en France depuis quatre ans.

Il n'a qu'un récépissé temporaire de trois mois pour rester en France. Tous les trois mois, il vient à la préfecture pour essayer de le renouveler. Au Sri Lanka, il a été emprisonné pendant trois ans et torturé par les forces de sécurité. Il a été blessé aux dos et aux dents.

Quand on lui a parlé, il a dit, « J'attends ici depuis 22 heures pour obtenir un rendez-vous. J'ai tellement froid que j'en tremble. J'ai tout perdu dans ma vie. Je ne peux pas retourner au Sri Lanka; j'ai d'énormes problèmes avec la police et l'armée là bas. J'ai passé trois ans en prison et quand ils m'ont relâché j'ai réussi à m'enfuir du pays. Quand j'explique ça aux autorités de l'OFPRA, ils répondent absurdement que ce n'est pas vrai. »

Selon un rapport de la Cimade, plus de 35 000 étrangers ont été placés dans des centres de rétention en 2009 (32 268 en 2008), dont 318 enfants. Le nombre d'étrangers expulsés de France est en augmentation, 32 922 en 2011 avec  pour 2012, l'objectif de 35 000 expulsions.

 

(Article original publié le 28 avril 2012)

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