Les reporters du WSWS sont allés à
l'usine PSA d'Aulnay-sous-Bois, au Nord de Paris, pour interviewer des
travailleurs de l'automobile sur les résultats du premier tour des élections
présidentielles françaises. L'usine d'Aulnay fait partie des quelques usines en
Europe menacées de fermeture dans le contexte des projets de fusion avec
General Motors.
La plupart des travailleurs à Aulnay qui
ont parlé avec le WSWS ne voient que peu de différence entre les deux candidats
qui s'affronteront au second tour le 6 mai, le candidat du Parti socialiste
(PS), François Hollande et le candidat conservateur sortant, le président
Nicolas Sarkozy.
Nourdine
Juste avant d'entrer dans l'usine,
Nourdine s'est arrêté pour parler au WSWS: « C'est pareil, deux candidats
[Hollande et Sarkozy] de la bourgeoisie. Mélenchon, il était ministre au PS, il
a mangé à la gamelle. »
Au sujet du candidat du Nouveau Parti
anticapitaliste, Philippe Poutou, Nourdine a précisé : « Poutou est
venu [à l'usine d'Aulnay], mais les candidats viennent et ça ne change rien du
tout. S'il n'y a pas la masse, les salariés ne peuvent rien faire. »
Les travailleurs d'Aulnay sont hostiles
à la candidate néofasciste, Marine Le Pen, et ils sont divisés quant à savoir
si la campagne du candidat du Front de Gauche, Jean-Luc Mélenchon, a une
quelconque valeur symbolique pour la la défense de l'emploi en France.
Toutefois, aucun d'entre eux ne pense qu'il serait en mesure d'appliquer son
programme de campagne électorale.
Messaoudi a dit au WSWS, « Que ce
soit Hollande ou Sarkozy, l'usine, les politiques n'y feront pas trop
attention. » Faisant remarquer que « les délégués ici sont allés voir
Sarkozy, » il a haussé les épaules en ajoutant : « Si ça va
changer quelque chose par rapport à l'usine, je ne sais pas. »
Il a souligné que Jean-Luc Mélenchon
« défend[ait] les emplois, mais il n'est pas allé trop loin. » Il a
dit qu'il s'attendait à ce que la situation de la France s'aggrave avec la
crise économique. A la question de savoir s'il croyait au slogan de
Mélenchon concernant une révolution « par les urnes, » il a
répondu : « Je ne m'attends pas à ça, les choses ne se passent pas du
tout comme ça, »
Ace
Le WSWS a aussi parlé à Ace, jeune
travailleur intérimaire employé en sous-traitance pour PSA à l'usine d'Aulnay.
Au sujet des élections il a dit, « Ils ne changeront rien du tout, pas un
candidat plus que les autres. »
Il a expliqué qu'il gagnait entre 600 et
700 euros (791à 923 dollars américains) par mois en tant que technicien de
contrôle qualité en électronique. Il a précisé toutefois que certains
travailleurs intérimaires pouvaient gagner le salaire minimum d'un travailleur
à temps complet (1.398 euros) dans la mesure où ils pouvaient travailler
suffisamment d'heures. Ace a dit qu'on venait juste de lui dire qu'il n'y avait
pas de travail et qu'il rentrait chez lui.
A la question de savoir comment un
travailleur pouvait survivre à Paris avec 700 euros par mois, il a dit :
« Pour ceux qui ont un loyer à payer, bien sûr c'est impossible. Je vis
avec mon oncle. Il y a beaucoup de jeunes dans ma situation, ceux de mon âge
restent souvent avec leur famille. La crise touche beaucoup de monde. Les gens
recherchent des emplois, ils ne les trouvent pas forcément. »
Il a dit que les travailleurs qu'ils
connaissaient n'aimaient pas Le Pen : « Elle est comme son père
[l'ancien candidat présidentiel et négationniste de l'Holocauste, Jean-Marie Le
Pen]. Elle ne sert à rien. »
Interrogé sur l'appel de Mélenchon de
porter le smic à 1700 euros par mois, il a dit qu'il n'était pas pour :
« Après le pouvoir d'achat des travailleurs aurait augmenté, et les
sociétés auraient des ennuis. » Il a ajouté, « Ce serait bien, mais
il faudrait une révolution, » ce pour quoi, a renchéri Ace, Mélenchon ne
luttait pas.
Il a dit qu'il ne croyait pas aux appels
de Mélenchon en faveur d'une révolution : « Ça ne se fera
pas comme ça. Les travailleurs, je ne les connais pas tous. Mais bien sûr, il
faut une lutte collective, dans toutes les usines. »
Lionel et un groupe de travailleurs de
l'automobile ont parlé aux reporters du WSWS sur les élections et les luttes
des travailleurs dans l'industrie automobile internationale. Ils étaient
intéressés d'être informés sur les conditions auxquelles sont confrontés les
travailleurs à Detroit et sur leurs luttes.
Lionel s'est dit préoccupé par
l'augmentation du vote pour Le Pen: « Il y a de plus en plus de racisme,
elle a presque 20 pour cent, c'est trop. Ils sont sur le thème de l'insécurité,
c'est les étrangers qu'on leur met en tête. »
Lionel a dit que Mélenchon était
« plus pour les ouvriers, pour la population. C'est dommage qu'il ne passe
pas. »Toutefois, il a dit qu'il ne croyait pas à la « révolution
citoyenne » de Mélenchon : « Tout le monde sera à bas salaire et
le peuple se réveillera. Ça fera des dégâts. Quand on ne mange
rien, c'est comme ça. Moi, je connais des personnes en difficulté, mais ils
essaient de ne pas le montrer. »
Un autre travailleur a dit,
« L'usine, ça va fermer. Il y avait deux équipes sur deux montages, il
reste un seul montage ; bientôt, l'étape suivante sera une seule équipe.
La fermeture est déjà préparée. On est contre la fermeture, on veut du boulot
pour tous. »
Il a dit n'être pas d'accord avec
l'exigence de PSA de troquer des avantages fiscaux contre le maintien de
l'usine jusqu'en 2016 : « Chaque fois, ils veulent plus. » Il a
ajouté, « Leur but est que les travailleurs soient traités comme des
animaux. si on était des chauffeurs de bus, on roulerait jour et nuit. »