Dimanche
dernier, François Hollande a remporté la primaire du Parti socialiste (PS),
parti social démocrate, pour devenir le candidat du parti à l'élection
présidentielle de 2012. Il a obtenu 56,6 des voix contre 43,4 pour cent pour
Martine Aubry, ancienne numéro 2 du gouvernement de Gauche plurielle de Lionel
Jospin de 1997 à 2002. Un peu moins de 3 millions de personnes ont participé au
vote.
Hollande,
un terne bureaucrate haut placé du PS, est à présent largement surnommé
« M. Normal » après avoir fait remarquer qu'il serait un président
« normal. » Les sondages indiquent que si l'élection devait se tenir
aujourd'hui il battrait le très impopulaire président conservateur sortant
Nicolas Sarkozy.
La
politique de Hollande et celle d'Aubry étaient quasiment identiques et fondées
sur leur soutien aux mesures d'austérité poursuivies par Sarkozy et l'ensemble
de la classe dirigeante suite au déclenchement de la crise financière en
Europe. Tous deux ont promis de réduire le déficit budgétaire de 5,7 pour cent
à 3 pour cent du PIB d'ici 2013, pour respecter le traité de Maastricht, ce qui
signifie des coupes massives dans les dépenses de l'Etat. Ils sont d'une
servilité totale à l'égard des banques et du capital financier.
Hollande
a trompeusement cherché à donner à sa politique pro-austérité un vernis de
popularité en l'accompagnant d'appels creux et démagogiques à la colère
populaire contre les marchés financiers. Il a dit que « la dette est
l'ennemie de la gauche et de la France, » utilisant ceci à la manière de
tous les politiciens de droite pour inciter à faire des coupes impopulaires
dans les dépenses publiques: « Il faut rééquilibrer les comptes publics
d'ici 2013... pour que notre pays reprenne confiance en lui. »
Il a mis en avant que son principal objectif
seront les travailleurs. Dans son livre Parlons de la France, publié en
septembre dernier, Hollande fustigeait les conceptions de l'Etat providence et
la «la rigidité conceptuelle » de la gauche. Il appelait au
« réalisme et à la discipline budgétaire. » Autrement dit, le PS est
déterminé à piller l'argent public pour financer les banques et l'aristocratie
financière.
Les
trois principaux candidats bourgeois à l'élection de 2012 seront Sarkozy,
Hollande et la candidate néo-fasciste Marine Le Pen. Etant donné la politique
pro- establishment du PS et de ses satellites de « gauche », Le Pen
se retrouve en meilleure position pour se prétendre la représentante de
l'opposition populaire parmi les partis politiques existants.
La
classe ouvrière est déchue de toute représentativité par l'establishment
politique et les travailleurs ne peuvent rien en attendre en faisant pression
ou en espérant des réformes. L'unique voie pour aller de l'avant est la lutte
révolutionnaire contre le capitalisme et contre ceux, tels le Nouveau Parti
anticapitaliste (NPA) et le Front de Gauche conduit par l'ancien ministre PS
Jean-Luc Mélenchon, qui servent à le soutenir ou à promouvoir des illusions sur
le PS.
Le
PS a choisi avec Hollande un candidat qui reflète le long bilan droitier du
parti et sa profonde hostilité envers la classe ouvrière. Hollande, 57 ans, a
adhéré au PS en 1979 et a travaillé au sein d'une équipe d'économistes
bourgeois, conduits par Jacques Attali, qui ont conseillé François Mitterrand
lorsqu'il briguait la présidence. Une fois élu en 1981, Mitterrand a nommé
Hollande à un poste officiel au palais de l'Elysée, celui de conseiller
économique.
Hollande
est resté loyal envers le président lorsque en 1982-3 Mitterrand a abandonné
son programme électoral réformiste et a imposé des mesures d'austérité et fermé
de nombreuses usines.
En
1999, Hollande est devenu vice président de l'Internationale socialiste,
organisation sociale- démocrate. Il y a rencontré non seulement des politiciens
impérialistes européens comme lui, mais des dictateurs du Tiers monde qui cette
année ont été renversés par les luttes révolutionnaires de la classe ouvrière,
Zine el-Abidine Ben Ali de Tunisie et Hosni Mubarak d'Egypte. Ces deux derniers
ont été expulsés en toute hâte de l'organisation après avoir été renversés.
En
2004, il a organisé la campagne au sein du PS en faveur de la constitution
européenne libérale lors du referendum et, en tant que premier secrétaire du
PS, il a travaillé en étroite collaboration avec le gouvernement gaulliste de
Jacques Chirac pour le oui à la constitution. La classe ouvrière avait
massivement rejeté la constitution.
Il a soutenu les guerres impérialistes de la
France, y compris sa participation à l'occupation par l'OTAN, de
l'Afghanistan qui a débuté sous Jospin en 2001 ainsi que le viol néo-colonial
toujours en cours de la Libye.
Si Hollande remporte la présidence, il cherchera
à mener une guerre sociale sans répit contre les travailleurs. L'un de ses
modèles sera George Papandreou, premier ministre social-démocrate de Grèce, qui
a été élu en 2009 sur de vagues promesses de réformes sociales mineures et qui
est à présent en train de paupériser les masses grecques pour satisfaire les
exigences du capital financier international. Vendredi dernier, Papandreou a
menacé de mobiliser l'armée pour briser la grève des éboueurs, les menaçant de
peines de prison. (Voir en anglais "Greek refuse workers threatened with
army intervention on eve of general strike")
Les
banques font déjà pression en faveur de mesures d'austérité de la part du
prochain gouvernement. Le lendemain de l'élection de Hollande à la primaire
socialiste, l'agence de notation Moody's a publié un avertissement concernant
le ralentissement de l'économie française et les dettes que la France
contractera si elle rembourse les mauvaises dettes grecques de toutes les
banques françaises. Moody's a donné trois mois à la France pour réduire
drastiquement ses dépenses publiques. Sinon, l'agence dégradera la note en
triple A de la France qui lui permet d'emprunter de l'argent à des taux
d'intérêts plus bas.
D'importantes
sections droitières de la bourgeoisie voient en Hollande leur candidat.
L'ancien président de droite Jacques Chirac a dit qu'il voterait pour Hollande
contre Sarkozy. Hollande a introduit dans son équipe de campagne Jean-Pierre
Jouyet du PS qui a pris le poste de secrétaire d'Etat aux affaires européennes
dans le gouvernement droitier de Sarkozy en 2008. Jouyet espère devenir
secrétaire général de l'Elysée si Hollande est élu président.
Pour
sa part, la « gauche » officielle de l'establishment bourgeois
est à présent totalement engagée à promouvoir Hollande. Arnaud Montebourg du
PS, qui se présentait comme un candidat de « gauche » à la primaire,
disant qu'il allait abroger les coupes de Sarkozy dans les retraites et
adopter une politique commerciale protectionniste, est devenu un défenseur
éhonté de la candidature pro-austérité de Hollande.
Montebourg
a dit à ses électeurs qu'il voterait pour Hollande au second tour de la
primaire. Il a dit que la victoire de Hollande signifiait que le PS a
maintenant «un leader incontesté, » prétendant de façon ridicule qu'il y
avait eu «un extraordinaire processus de rénovation du parti. »
Sa plateforme protectionniste avait pour objectif
de séduire les soi-disant partis de gauche tel le Front de Gauche, qui comprend
le Parti communiste stalinien (PCF) et le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA).
Ces partis essaient de maintenir des illusions sur le PS dans leur base
électorale, d'empêcher une opposition de gauche à la candidature anti-ouvrière
de Hollande. Le PCF dépend financièrement et politiquement du soutien du PS et
des sections de plus en plus de larges du NPA veulent développer une alliance
gouvernementale avec le PS (voir L'université
d'été du Nouveau Parti anticapitaliste marque un nouveau tournant droitie.)
Mélenchon du Front de Gauche a qualifié le
programme de Hollande de « tarif super minimum de gauche, » et dans
une interview avec Médiapart le 18 octobre, il a fait l'éloge de Hollande comme
«un personnage intelligent, cultivé, qui a des choses à dire. »
(Article original paru en anglais le 21 octobre
2011)