Le 10 mars 2011, les CRS ont été envoyés sur le port de
Marseille pour débloquer le port, les travailleurs de la SNCM (Société
Nationale maritime Corse Méditerranée) étant en grève depuis le 30 janvier.
Les grévistes s’opposaient à la diminution du nombre
de rotations entre Nice et la Corse, et l’arrêt de la liaison entre Nice
et la Corse par un navire à grande vitesse. Les travailleurs bloquaient
l’entrée du port de Marseille depuis le 8 mars.
Quinze travailleurs de la SNCM ont été interpellés par les
CRS dans un raid qui « s’est déroulé dans le calme », selon le
préfet. Le journal l’Express dans l’article intitulé Marseille :
le port débloqué, mais pas le conflit à la SNCM, reprend les propos de
Frédéric Alopozzo représentant de la CGT SNCM : « Des dizaines de CRS ont envahi le port afin
d'apporter le message de l'Etat... à grands coups de matraques et de gaz ».
Les marins ont été
arrêtés et menottés par la police. Les dockers du port de Marseille
et de Port St Louis se sont mis en arrêt de travail tant que les ouvriers de la
SNCM n’étaient pas relâchés. Ces derniers l’ont été à partir de 17h,
sans qu’il y ait eu de poursuites contre eux.
La SNCM est une compagnie de transport maritime de passagers
faisant la liaison entre la métropole et la Corse. Elle est détenue à 25 pour
cent par l’Etat, à 9 pour cent par les salariés et à 66 pour cent par le
groupe Véolia.
Le président du directoire de la compagnie, M. Couturier, a expliqué les
mesures qu’envisage la direction : « Pour compenser les rotations manquantes au départ de Nice, nous avons
augmenté l'offre depuis Marseille ». Selon Couturier, le
programme 2011 permet de maintenir le trafic avec « légèrement plus de rotations » qu'en
2010 sur les neuf bateaux de la compagnie.
Les grévistes sont convaincus que se cache derrière une
volonté de démanteler la société et de mettre en œuvre un plan social,
avec un désengagement possible de l'actionnaire principal, Véolia.
L'instance nationale de la CGT a« condamné fermement l'usage de la force »
et « exigé l'ouverture de réelles
négociations ».
« Nous sommes face au dépeçage de la compagnie », Alpozzo
a dit lors d'une conférence de presse. Il a dénoncé « la vente prévue de
navires et de biens immobiliers de la compagnie au profit des actionnaires, qui
va causer un cataclysme social sans précédent dans les prochaines semaines ».
Il a estimé que « l'État actionnaire et opérateur industriel doit protéger
l'emploi et l'intérêt général ».
Fréderic Alpozzo déclare : « Nous voulons les ministres de tutelle, avec
l'actionnaire Veolia, autour de la table, avec les syndicats grévistes pour
faire la transparence sur la suppression des navires [...] et apporter les
garanties sociales et industrielles pour l'avenir de la SNCM et de ses salariés »,
prévenant : « Tant que nous
n'aurons pas ça, le mouvement continuera ». Le mouvement de
grève des travailleurs de la SNCM est reconduit pour les prochains jours.
Cependant, l’incident sur le port indique clairement
que l’Etat se tient du côté de l’actionnaire principal et ne
s’intéresse pas à des négociations avec les salariés sur la base
d’une défense de leurs emplois et de leurs conditions de travail.
Le message envoyé par le gouvernement est qu’il réprimera
toutes luttes de la classe ouvrière pour la défense des acquis sociaux. Cette
situation se produira systématiquement.
La perspective de la CGT n’est pas de mener une lutte
sérieuse contre l’offensive soutenue du gouvernement et des actionnaires
contre les acquis des travailleurs. Le syndicat souhaite seulement entamer des
négociations avec le gouvernement et le patronat.
Les commentaires de la CGT attaquant l’action des CRS
ne sont qu’un leurre cynique. Les sentiments d’opposition
qu’ils semblent exprimer n’ont rien à voir avec la politique que le
syndicat mène vraiment lors des luttes — qui est de négocier un accord
avec l’Etat, au prix d’une défaite totale si c’est ce que
tout ce que l’Etat a l’intention de négocier.
Ainsi pendant le conflit des retraites d’octobre 2010,
le gouvernement, alors affaibli par la pénurie d’essence, avait envoyé
les CRS dans les raffineries telles que Grandpuits et aux dépôts pétroliers de
Fos. Les syndicats ont refusé d’organiser la défense des grévistes, insistant
que toute opposition ouvrière devait être « symbolique ». Ceci a entraîné
la défaite du mouvement, comme le WSWS avait mis en garde dans ses analyses.
Avec la crise économique mondiale, la bourgeoisie veut faire
payer la crise à la classe ouvrière. Les antagonismes de classes
s’accentuent, poussant la bourgeoisie à s’attaquer aux droits
démocratiques des travailleurs. Les gouvernements conservateurs comme sociaux-démocrates
mènent une politique de plus en plus dictatoriale pour réprimer les luttes
ouvrières.