Israël a réagi de façon belliqueuse à l’envoi de deux
navires de guerre iraniens en Méditerranée via le Canal de Suez égyptien,
qualifiant cette démarche de provocation et brandissant la menace de
représailles.
Ces menaces attestent du danger grandissant d’une attaque contre
l’Iran et d’une guerre régionale plus étendue après des avertissements
répétés d’Israël, qui dispose d’un arsenal de plus de 200 armes
nucléaires, de vouloir attaquer les installations nucléaires de l’Iran.
Mercredi dernier, Israël a annoncé que l’Iran allait envoyer deux
navires de guerre en Méditerranée, une frégate Mk-15 Alvand, et un navire
ravitailleur Kharg, et les faire passer par le Canal de Suez. De prime abord,
l’Egypte et l’Iran l’avaient nié, puis l’Egypte a
affirmé que l’Iran était revenu sur sa demande que ses navires empruntent
le Canal. Mais, l’Iran a plus tard confirmé qu’il avait avisé
l’Egypte, comme le requiert la réglementation sur l’usage du Canal,
qu’il envisageait d’envoyer ses navires par Suez.
Avigdor Lieberman, le ministre israélien des Affaires étrangères, a dit lors
d’une réunion des principales organisations juives américaines à
Jérusalem que le passage des navires par Suez était « une provocation
prouvant que l’excès de confiance des Iraniens augmentait de jour en
jour. »
« A mon grand regret, la communauté internationale ne se montre aucunement
prête à répondre aux provocations récurrentes des Iraniens, » a-t-il
poursuivi.
Dans des remarques qui visaient Washington, il a dit qu’il attendait du
monde qu’il « remette les Iraniens à leur place. Nous sommes les
véritables alliés des Etats-Unis dans la région, et les seuls à partager leurs
valeurs. La communauté internationale doit comprendre qu’Israël ne peut
pas éternellement ignorer ces provocations. »
Le premier ministre Benyamin Netanyahu a dit, « Je pense qu’aujourd’hui,
nous pouvons voir dans quelle région instable nous vivons, une région dans
laquelle l’Iran essaie de profiter de la situation qui a été créée pour élargir
son influence en faisant franchir le canal de Suez à des navires de
guerre. »
« Les besoins de sécurité d’Israël vont augmenter et le budget
de la défense devra augmenter en conséquence, » a-t-il ajouté.
Selon un commentaire du contre-amiral iranien Gholam-Reza Khadem Bigham
adressé le mois dernier à l’agence d’information semi officielle
Fars, l’Iran projetait d’envoyer des navires vers la Méditerranée
afin de collecter « de bons renseignements et de bonnes information sur la
région qu’il doit visiter. »
Il a dit qu’ils s’entraînaient pour défendre « les navires
cargo et les navires pétroliers du pays » contre la menace des pirates
somaliens.
Vendredi dernier, un porte-parole du ministère de la Défense à Téhéran avait
déclaré que les navires qui étaient en route vers les eaux syriennes pour
procéder à des exercices n’auraient à leur bord aucun équipement
militaire, matériel nucléaire ou chimique.
Tandis que c’est la première fois depuis la Révolution islamiste de
1979 que Téhéran envoyait des bâtiments de guerre par le Canal de Suez, Israël
l’utilise régulièrement. En juillet 2009, avec l’appui tacite de
l’Egypte, Israël avait envoyé un sous-marin Dauphin vers la Mer Rouge
pour y participer à des exercices militaires. Ces sous-marins pourraient servir
au lancement de missiles de croisière sur l’Iran. Les exercices avaient à
l’époque été largement interprétés comme un signal qu’Israël avait
la capacité d’atteindre l’Iran.
Le porte-parole de la Maison Blanche, Jay Carney, a dit au sujet des navires
iraniens, « Nous suivons ceci de près… Nous surveillons toujours ce
que fait l’Iran… L’Iran n’a jamais eu un comportement
responsable dans la région. »
Les Etats-Unis sont en train d’accroître leur présence militaire dans
la région comme faisant partie de ce qu’ils affirment être « des
opérations de sécurité maritime » mais qui sont clairement une réaction
aux soulèvements révolutionnaires en Egypte et partout dans le Moyen Orient et
en Afrique du Nord.
Le porte-avions américain USS Enterprise a traversé le canal de Suez et se
dirige vers le Golfe persique tout comme le missile croiseur USS Leyte Gulf et
le navire de ravitaillement USS Arctic. Là, il sera rejoint par le porte-avion
USS Carl Vinson qui se trouve actuellement en Mer d’Arabie.
Ces informations ont fait chuter les marchés boursiers la semaine passée et fait
rebondir les prix du pétrole, attisés par les craintes d’un nouveau
conflit, à des niveaux presque record. Les prix du pétrole avaient déjà connu
une forte hausse après que les manifestations de masse en Egypte se soient étendues
aux pays producteurs de pétrole que sont Bahreïn, l’Iran, la Libye, le Soudan
et le Yémen s’ajoutant à la crainte d’une possible perturbation des
approvisionnements pétroliers.
Israël réclame depuis longtemps une action militaire pour contenir l’influence
iranienne grandissante dans la région, demandant instamment une action
militaire par le biais de ses relations politiques étendues et de ses groupes
de pression aux Etats-Unis. Il a aussi cherché à miner le programme nucléaire
de Téhéran. L’on croit qu’Israël a été impliqué dans des
enlèvements et des assassinats ciblés de scientifiques nucléaires en Iran et
d’avoir été responsable d’avoir introduit le virus informatique
Stuxnet dans la principale usine iranienne d’enrichissement
d’uranium.
L’attitude d’Israël s’est encore durcie avec le
renversement de son principal allié régional, Hosni Moubarak. Il a
continuellement insisté que le mouvement populaire de masse contre le régime
passerait inévitablement sous l’influence des Frères musulmans et de Téhéran
et fait tout son possible pour garder Moubarak au pouvoir. En dépit des
assurances de la junte militaire qu’elle respecterait les traités de paix
avec Tel Aviv, les médias israéliens regorgent d’articles commandités
exprimant la crainte que tout gouvernement civil qui serait installé s’engagerait
moins à l’égard d’une alliance avec Israël contre l’Iran.
Israël a été encore davantage isolé par la chute au Liban du gouvernement
Hariri soutenu par les Etats-Unis et l’Arabie saoudite après que le
Hezbollah et ses alliés, qui sont soutenus par l’Iran et la Syrie, aient quitté
la coalition gouvernementale.
Les autres appuis d’Israël, la Jordanie et l’Autorité palestinienne,
n’ont pas l’air plus sûrs. La Jordanie a connu des manifestations
de masse répétées forçant le roi Abdullah à nommer un nouveau premier ministre
ayant pour tâche de former un gouvernement.
Mahmoud Abbas, le dirigeant de l’Autorité palestinienne, s’était
senti obligé d’organiser des élections au vu des divulgations par Al
Jazeera des « papiers palestiniens » qui confirmaient le rôle de
celle-ci comme organe subalterne des Etats-Unis et d’Israël pour imposer
l’ordre au peuple palestinien. Il y eut une manifestation de masse à
Ramallah durant le week-end du 20 février pour appeler à la fin des combats
entre le parti Fatah d’Abbas et le Hamas, à la formation d’un
gouvernement d’unité nationale dans la Bande de Gaza et en Cisjordanie,
et la révocation des accords d’Oslo.
Netanyahu n’est pas moins isolé sur le front intérieur. Ses
partenaires de la coalition travailliste ont quitté le gouvernement en le
laissant plus dépendant des partis d’extrême droite et notamment du parti
Yisrael Beiteinu de Lieberman. Son ministre de la Défense, Ehoud Barak, a
scissionné d’avec le Parti travailliste pour former son propre parti
indépendant, qui soutient la coalition mais qui n’a que peu de soutien.
Ce qui est encore plus important, c’est que Netanyahu est confronté à
une population de plus en plus en colère et qui doit faire face à des hausses
de prix, à la pauvreté et à l’inégalité sociale. Pour l’élite
israélienne, la propagande de guerre est une politique du ‘diviser pour
mieux régner’ bien rodée pour prévenir un défi politique de la classe
ouvrière. Cette élite est en train de planifier activement une guerre et
cherche à créer les conditions d’une confrontation avec Téhéran, des
attaques contre le Liban, Gaza et même l’Egypte ne pouvant toutefois pas non
plus être écartées.