Il y a une semaine, le mardi 24 mai, les électeurs de la circonscription
électorale du 26e District de New York ont participé à un scrutin spécial
qui, chose inhabituelle dans la politique bourgeoise américaine, portait en
fait sur une question importante de politique publique : Le programme
Medicare, qui garantit les soins de santé de la grande majorité des
Américains de plus de 65 ans devrait-il être progressivement supprimé et
remplacé par une assurance privée?
La candidate républicaine qui se présente pour le poste vacant de New
York, Jane Corwin, a dit qu'elle soutenait le projet présenté par le député
Paul Ryan de mettre fin à Medicare. La candidate démocrate Kathy Hochul a
presque exclusivement centré sa campagne sur son opposition au projet Ryan
et a gagné avec une confortable avance. Dans le contexte du système
politique peu représentatif existant aux Etats Unis, ce scrutin est ce qui
se rapproche le plus d'un référendum sur l'avenir de Medicare, .
Dans la semaine qui a suivi cette élection, l'establishment politique
américain a tout fait pour remettre le génie dans la bouteille et renforcer
le consensus politique à Washington, selon lequel le programme Medicare est
hors de prix et doit être démantelé pour éviter la faillite nationale.
Il n'y a pas meilleur exemple pour révéler au grand jour l'escroquerie de
la démocratie aux Etats-Unis. L'élection confirme ce que les sondages ont
largement démontré: que l'écrasante majorité de la population, y compris une
majorité de Républicains, sont contre les coupes dans le financement de
Medicare. Mais ce sentiment très répandu n'a aucun impact sur le cours réel
de la politique du gouvernement.
Alors même que cette élection était une répudiation ouverte des
propositions républicaines, les résultats ont été, pour le moins, plus
perturbants pour les Démocrates. Plusieurs ténors du Parti démocrate et
grands noms des médias libéraux sont vite montés au créneau pour déclarer
qu'il ne faudrait pas tirer des conclusions erronées du vote de Buffalo.
Il y a eu tout d'abord l'ancien président Bill Clinton qui le lendemain
de l'élection s'est inquiété que « les Démocrates tireront la conclusion que
parce que la proposition du député Paul Ryan n'est pas la meilleure, il ne
faudrait rien faire. » Il a ajouté, « Je ne suis absolument pas d'accord
avec cette position. »
Plusieurs députés démocrates en vue ont tenu à exprimer avec insistance
leur accord avec Clinton. Le gouvernement Obama, pour sa part, progresse par
des discussions à huis clos avec les Républicains dans son projet de
diminuer d'au moins un millier de milliards de dollars les dépenses du
gouvernement, y compris dans les programmes de santé.
Le New York Times a réagi à cette élection en consacrant son éditorial,
sa chronique et ses articles d'opinions, à l'intensification de sa campagne
pour la diminution draconienne des dépenses de santé.
Un éditorial du Times conseille aux Démocrates de ne pas en tirer la
leçon qu'ils devraient faire campagne en 2012 comme le parti s'opposant aux
coupes dans le financement de Medicare. Citant avec approbation les
remarques de Clinton, le Times fait remarquer, « Les Démocrates n'aiment pas
le reconnaître, mais la loi du président Obama sur le service public de
santé réduit les dépenses de Medicare de plus de 500 milliards de dollars
jusqu'en 2019. »
Et ce n'est qu'un début. « Une fois que la loi a été votée, M. Obama a
proposé de réduire les coûts de santé encore plus brutalement, » ajoute le
Times.
L'Amérique de 2011 est un vaste catalogue de besoins sociaux non
satisfaits. Et pourtant les porte-parole de l'élite dirigeante prêchent
l'austérité et les sacrifices et mettent en garde de façon moralisatrice que
« nous » devons abandonner nos habitudes « dépensières. » Ils attaquent non
pas la fraude et la spéculation des banques, des préteurs immobiliers et de
fonds spéculatifs [hedge funds] qui ont déclenché le crash de Wall Street de
2008, ni les compagnies pétrolières qui se gorgent de profits, mais les
besoins de soins de santé des personnes âgées, des pauvres et des
handicapés.
La politique du gouvernement Obama, en matière de santé et dans toutes
les autres sphères aussi, est taillée pour satisfaire les intérêts et les
exigences de l'élite financière. Comme le Times lui-même le reconnaît
presque dans son éditorial, le projet d'Obama sur la santé n'était pas une
réforme progressiste mais bien plutôt le premier pas vers une attaque contre
les prestations sociales.. Elle fait partie d'une campagne grandissante pour
éliminer tous les acquis sociaux que la classe ouvrière a conquis au 20e
siècle aux Etats Unis et dans le monde.
Le Socialist Equality Party (SEP) rejette en bloc le cadre du débat au
sein de l'establishment politique. L'idée qu'il n'y a pas d'alternative aux
coupes dans le financement de Medicare et des autres programmes sociaux est
un mensonge. Une richesse phénoménale a été accumulée par une aristocratie
financière qui a exploité la crise financière pour piller le trésor public.
Comme étape initiale pour préserver et étendre les programmes de santé
dont dépendent des millions de personnes, le SEP propose une augmentation
radicale de l'impôt des riches. Une simple augmentation de 10 pour cent de
l'impôt sur la fortune du un pour cent le plus le plus riche produirait plus
de 1,5 mille milliards de dollars. Les grandes entreprises ont des
liquidités de milliers de milliards de dollars. Les actifs des fonds
spéculatifs dans le monde entier atteignent deux mille milliards de dollars.
Un tel impôt ne constituerait pas à lui seul une mesure socialiste. Mais
même cette modeste mesure progressiste et démocratique provoquerait une
opposition immédiate et féroce de la part de l'ensemble de l'élite patronale
et financière qui contrôle les partis démocrate comme républicain. Il est
remarquable que deux ans et demi après la crise financière, qui a crée aux
Etats-Unis et dans le monde entier, une misère passée sous silence, aucune
proposition sérieuse n'a été introduite pour alléger la détresse sociale et
réduire le chômage. Au contraire, la force toute entière des mesures prises
va dans la direction opposée.
Le service public de santé est un droit social fondamental. Défendre et
étendre ce droit nécessite la mobilisation de masse de la classe ouvrière en
opposition à l'ensemble de l'establishment politique et au système
capitaliste qu'il défend. Si le capitalisme américain n'est pas en mesure
d'assurer les soins de santé des personnes âgées, alors c'est un argument
irréfutable pour mettre fin au capitalisme et pour placer la vie économique
sur une base nouvelle et plus rationnelle, où priorité est donnée aux
besoins humains et non au profit privé.
La solution à la crise du service de santé est de mettre fin aux
entreprises privées dans le domaine de la santé, d'interdire l'exploitation
de la souffrance humaine à des fins de profits privés et de mettre en place
une médecine sous contrôle public qui fournisse des soins de santé de haute
qualité et gratuits à la population toute entière.