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Les événements de Tunisie révèlent la politique pro-impérialiste du Nouveau Parti anticapitaliste

Par Kumaran Ira
19 janvier 2011

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Les événements en Tunisie, où des manifestations de masse des travailleurs contre le chômage et la dictature ont forcé le président Zine El Abidine Ben Ali à quitter le pouvoir le 14 janvier, révèlent le caractère de classe des organisations soi-disant de gauche tel le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA.) Ils sont complices des efforts des gouvernements impérialistes occidentaux d'isoler et d'étouffer la lutte des classes en Tunisie.

Les protestations de masse ont commencé le 17 décembre après que Mohamed Bouazizi, 26 ans, diplômé de l'université et travaillant comme marchand ambulant s'est immolé par le feu pour protester contre la situation économique et les abus policiers. Il est décédé des suites de ses blessures le 4 janvier. Les manifestations ont commencé dans les régions défavorisées de l'est et du sud de la Tunisie, puis se sont propagées à l'ensemble du pays. Le régime du président  Zine el-Abidine Ben Ali a d'abord eu recours à la répression policière brutale contre les manifestants, en tuant des centaines, puis le président s'est enfui en Arabie saoudite le 14 janvier.

La réaction du NPA face à l'agitation politique et sociale en Tunisie était en concordance avec la réaction des principales puissances impérialistes, les Etats-Unis, la France et d'autres pays de l'Union européenne. Ils ont tous encouragé un accord entre les partis officiels d' « opposition, » la bureaucratie de l'Union générale tunisienne du travail (UGTT), et les membres restants du régime de Ben Ali. Leur objectif, présenté comme « démocratie » voire même «  révolution démocratique, » est la formation d'un gouvernement d'unité nationale fondé sur l'ancienne dictature de Ben Ali.

Reprenant l'appel du président américain Barack Obama à des « élections libres et justes dans un avenir proche, » le palais présidentiel de l'Elysée en France a appelé à «une solution démocratique et durable à la crise actuelle. »

Ces positions cyniques ont aussi été avancées par la « gauche » bourgeoise. La dirigeante du Parti socialiste (PS) Martine Aubry a cyniquement lancé un appel au ministère français des Affaires étrangères, partisan des plus fidèles du régime de Ben Ali, à «s'engager sans ambiguïté en faveur de la démocratie en Tunisie. »

En droite ligne avec l'élite dirigeante, le NPA a cherché à présenter les développements en Tunisie non pas comme une lutte de classes révolutionnaire contre la dictature et l'impérialisme, mais comme une lutte syndicale « démocratique. »

Sa déclaration du 5 janvier décrivait la lutte tunisienne comme une « Intifada, » évoquant la lutte nationale du peuple palestinien pour les droits démocratiques au sein de l'Etat d'Israël. Mais tel n'est pas le caractère du récent soulèvement en Tunisie. Il s'agit d'un soulèvement de la classe ouvrière contre le chômage et la dictature, et cherchant à renverser le régime de Ben Ali.

Après le déclenchement des manifestations, le NPA a soutenu le syndicat tunisien Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), partisan de longue date du régime Ben Ali, qui avait participé à l'application de sa politique de réforme d'économie libérale. Sa déclaration du 5 janvier dit: «La seule force qui maille le pays, faute d'opposition en capacité de le faire, c'est l'UGTT, la centrale syndique unique. »

Cette déclaration félicite des membres de l'UGTT qui se sont personnellement déclarés en solidarité avec les manifestations. Elle dit: «Nombre d'unions locales et régionales soutiennent la population, mais ne l'organisent pas. »

C'est un mensonge. Non seulement l'UGTT n'a « pas organisé » les manifestations, mais elle n'a appelé à aucune grève de soutien. Ils n'ont pas « soutenu » la population, mais bien plutôt le régime de Ben Ali.

Tandis qu'il ment et sème la confusion quant au rôle des syndicats, le NPA est tout à fait conscient du rôle pro-gouvernemental de l'UGTT. En effet, il reconnaît en passant que le bureau national de l'UGTT a initialement publié une déclaration dénonçant les manifestations: «Reste à déplorer l'attitude de la direction confédérale de l'UGTT qui s'est désolidarisée officiellement de mobilisations organisées par certaines de ses structures et des slogans hostiles au régime qui y étaient scandés. »

En fait, bien que le NPA ne le reconnaisse pas, l'UGTT a été un élément du régime de Ben Ali. Elle a publiquement soutenu Ben Ali lors des deux dernières élections présidentielles et soutenu ses coupes sociales. Dans une interview accordée au journal tunisien Achourouk avant la chute de Ben Ali puis affichée à nouveau sur le site de l'UGTT, le secrétaire de l'UGTT Abdessalem Jerad déclarait: « Le mouvement réformateur conduit par le Président Zine El Abidine Ben Ali constitue une mutation qualitative dans le processus d'édification de la Tunisie moderne. »

En soutenant le programme de réforme de Ben Ali, l'UGTT a soutenu les diktats de l'élite financière et du FMI qui ont institué « des programmes d'ajustement structurels » en privatisant la plus grande part de l'économie et en autorisant un niveau sans précédent de « libre échange. » Ces mesures ont empêché des milliers de jeunes Tunisiens comme Bouazizi de trouver du travail, tandis que les élites haut placées de Tunisie s'enrichissaient.

Jerad s'est félicité des relations du président avec l'UGTT et dit qu'il était impatient de travailler avec le gouvernement et a rampé devant Ben Ali: « Notre fierté était encore plus grande que nos programmes rejoignaient les objectifs définis par le Président Ben Ali. Nous n'avons pas hésité alors à l'appuyer parce qu'à l'UGTT nous ne prêtons pas allégeance aux personnes, ni cherchons à leur plaire. Nous soutenons, plutôt, les programmes et les réformes. »

En promouvant l'UGTT comme une force d'opposition en Tunisie, le NPA démontre son profond désintérêt et son hostilité envers les revendications sociales de la classe ouvrière. De plus ce n'est pas un accident mais cela reflète organiquement les positions du NPA. En France et de par l'Europe, le NPA insiste pour dire que l'opposition de la classe ouvrière à la politique d'austérité sociale devrait être subordonnée aux syndicats droitiers déterminés à négocier les coupes sociales avec les gouvernements bourgeois. Ceci a conduit à la déclaration tristement célèbre de membres du NPA disant qu'il ne devrait y avoir qu'une opposition « symbolique » aux actions policières pour briser la grève dans les raffineries françaises.

Vendredi, tandis que Ben Ali quittait la Tunisie, le NPA publiait un communiqué disant, « La fuite du dictateur, c'est une grande victoire pour le peuple tunisien. » Et d'ajouter, « Le NPA renouvelle tout son soutien au peuple tunisien, à la révolution démocratique à laquelle il aspire. »

Le NPA n'a pas expliqué comment il aiderait la classe ouvrière tunisienne à effectuer une révolution contre le régime de Ben Ali tout en accordant publiquement  son soutien aux grouillots de Ben Ali. Cette question se pose avec d'autant plus d'acuité que le nouveau gouvernement d'intérim a été annoncé à Tunis.

Sa composition montre clairement que le nouveau gouvernement représente une tentative par l'ancien gouvernement de se maintenir au pouvoir en incluant quelques éléments de l'opposition officielle. Huit des ministres de Ben Ali ont gardé leur poste, dont les postes régaliens du premier ministre Mohammed Ghannouchi, du ministre des Affaires étrangères Kamel Morjane et du ministre de l'Intérieur Ahmed Kriaâ. Des personnalités de l' « opposition », ex-staliniens ou pro-capitalistes, ont ont pris divers ministères de second rang, tel celui du Développement régional, ou de l'Enseignement supérieur.

C'est une question d'importance primordiale pour l'impérialisme américain et européen. L'élite dirigeante de Tunisie travaille avec les puissances impérialistes pour former un gouvernement qui appliquerait la politique dictée par le Pentagone, le Quai d'Orsay et le Fonds monétaire international: des coupes sociales, le soutien à la « guerre contre le terrorisme » des Etats-Unis et de l'OTAN l'occupation de l'Afghanistan et de l'Irak et l'oppression incessante du peuple palestinien par l'Etat d'Israël.

Le jour même de la fuite de Ben Ali, le NPA signait un communiqué commun avec les partis officiels de la « gauche » bourgeoise française, dont le Parti socialiste (PS), le Parti communiste français (PCF), et les Verts. Le communiqué dit: «Nous exigeons que le gouvernement français et l'Union européenne cessent leur soutien explicite ou implicite au régime tunisien et soutiennent une véritable transition démocratique. »

En publiant ce communiqué, le PS et le PC poursuivaient leur longue et sordide bilan d'architectes des crimes de l'impérialisme français. Parmi ces crimes on compte le soutien du PC à la poursuite de la guerre contre l'indépendance de l'Algérie en 1956 du premier ministre socialiste Guy Mollet; La participation du président socialiste François Mitterrand à la Guerre du Golfe de 1991 conduite par les Etats-Unis contre l'Irak; et la participation du gouvernement de coalition PS-PC-Verts à l'invasion de l'Afghanistan en 2001.

Marie-George Buffet, ancienne secrétaire du PCF, a expliqué ce qui a motivé ce communiqué commun dans une interview accordée au quotidien stalinien L'Humanité. Elle a fait remarquer le soutien de longue date accordé par le gouvernement français au régime de Ben Ali mais a dit, après que des protestations de masse ont profondément ébranlé le régime de Ben Ali, que le moment était venu pour un changement de cap.

Faisant remarquer le levier commercial que les gouvernements français et européens ont sur la Tunisie, elle a dit: «On a les moyens de faire pression sur le pouvoir tunisien. Il existe un accord privilégié entre l'UE et la Tunisie, soumis à des conditions. »

Ce levier a, il ne fait aucun doute, été activement utilisé pour essayer de donner à la dictature tunisienne un nouveau souffle en remaniant vaguement le personnel à sa direction. Le NPA n'a rien fait d'autre que de contribuer à donner une coloration un peu plus de « gauche » à ces machinations impérialistes anti-ouvrières.

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