WSWS : Nouvelles et analyses : Europe
Travailleurs, étudiants et lycéens ont poursuivi la grève durant le week-end contre les coupes du président Nicolas Sarkozy dans les retraites malgré des arrêtés de réquisition des autorités régionales et nationales pour briser les grèves. Le gouvernement s'inquiète tout particulièrement du risque de pénurie de pétrole et de carburant aujourd'hui, premier jour de la semaine des vacances de la Toussaint.
Les 12 raffineries françaises étaient officiellement en grève, bien que les forces de police soient intervenues dans trois d'entre elles, Fos, Donges et Grandpuits, forçant les travailleurs à suspendre leur blocage et à pomper du pétrole pour réapprovisionner les stations-service. Néanmoins, les grèves et blocages des dépôts de pétrole se sont poursuivis et les raffineries de Donges et de Feyzin ont voté la reconduction de la grève pour toute la semaine.
L'avocat des travailleurs de Donges a déposé plainte hier pour empêcher d'autres réquisitions de pétrole à la raffinerie. Dmitri Guiller, représentant syndical CFDT (Confédération française démocratique du travail) de la branche de Donges a dit à Libération que « tout le personnel de la raffinerie » avait été réquisitionné.
A Donges toujours, 100 grévistes et manifestants ont bloqué quatre remorqueurs dans le port, les empêchant de faire entrer un pétrolier qui devait décharger sa cargaison.
Alors que le gouvernement avait annoncé en fin de semaine dernière que seule une station-service sur cinq était à court de carburant, le conseiller de Sarkozy aux affaires sociales, Raymond Soubie, a dit dimanche sur Europe 1 que « globalement, une station-service sur quatre n'est pas approvisionnée. » Mais il a dit que 5 stations-service seulement sur les 350 que comptent les principales autoroutes françaises n'auraient pas de carburant.
Jean-François Roubaud, président de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) a qualifié les grèves du secteur pétrolier de « terrorisme économique. »
Le bureau du préfet des Bouches-du-Rhône près de Marseille a pris un arrêté de réquisition pour forcer les éboueurs en grève à reprendre le travail. L'arrêté déclare: « Les notifications de réquisition sont en cours pour quelques agents des centres des Aygalades et de la Capelette. L'arrêté prendra effet ce lundi 25 octobre jusqu'au samedi 30 octobre inclus. »
Depuis le 11 octobre, les éboueurs du secteur public sont en « grève totale jusqu'au retrait du projet de loi sur les retraites, » selon la branche locale du syndicat Force ouvrière (FO.) Mercredi dernier, 150 membres de la Sécurité civile de l'armée de l'unité de Brignoles ont reçu l'ordre de collecter les ordures de Marseille en se concentrant sur les quartiers commerçants du centre ville.
Les grèves se poursuivent aussi chez les cheminots. Le gouvernement affirme que 8 TGV sur 10 et pratiquement la moitié des Transiliens seront en circulation.
Des étudiants et des lycéens ont dit à la presse qu'ils essaieraient de poursuivre la mobilisation durant les vacances ou, dans le cas de certaines universités qui n'ont pas de vacances, augmenteront leurs actions pour souligner la poursuite de l'opposition populaire au gouvernement. L'université Paris-10 de Nanterre a voté le blocus des bâtiments de lettres et sciences humaines dans une assemblée générale à laquelle assistaient 650 étudiants.
Des représentants de l'UNEF (Union nationale des étudiants de France) et de l'UNL (Union nationale lycéenne) et de la FIDL (Fédération indépendante et démocratique lycéenne) ont fait remarquer que les vacances n'avaient pas stoppé le mouvement des jeunes contre le CPE (Contrat première embauche) en 2006. Ces fédérations appellent à une manifestation nationale des jeunes mardi 26 octobre.
Les mobilisations se poursuivent malgré un manque de soutien des directions syndicales nationales qui ont reporté toute action de grève plus large au 28 octobre, jour de l'adoption officielle par une commission paritaire d'un texte de compromis entre la version du projet de loi de réforme des retraites votée au Sénat et celle votée à l'Assemblée nationale. Par cette décision, les syndicats signalent qu'ils n'organiseront pas de grève pour défendre les travailleurs ciblés par les réquisitions de l'Etat. Au contraire, ils agissent pour étouffer et mettre fin au mouvement de masse.
Ils sont soutenus en cela par les soi-disant partis de « gauche. » Le premier secrétaire du Parti communiste (PCF) Pierre Laurent a dit au journal Le Monde, « Faut pas mégoter. Les syndicats ont très bien fait leur boulot dans une situation tendue. Il faut leur faire confiance et se mettre derrière à fond. »
Le Monde a aussi fait remarquer que le Nouveau parti anticapitaliste (NPA) d'Olivier Besancenot avait revu sa sa rhétorique à la baisse. Il écrit: «Depuis début octobre, Olivier Besancenot a rangé ses critiques à l'égard des syndicats jugés trop mous et ses appels à un 'nouveau Mai 68'. »
Comptant sur la capitulation des syndicats et des partis de « gauche », le gouvernement cherche à montrer que l'opposition à la réforme est une cause perdue. Dans un article intitulé « Retraites, vers la fin de la bataille, » le Journal du Dimanche cite Soubie disant que la loi prendra effet « aux alentours du 15 novembre. »
Le Journal ajoute que, d'après Soubie, le gouvernement va présenter la loi au Conseil constitutionnel pour vérification « pour faire taire la contestation nationale. » Les sondages continuent d'afficher un soutien écrasant pour les grèves. Un sondage Ifop pour Dimanche Ouest-France montre que 63 pour cent de la population soutient les grèves contre les coupes de Sarkozy, ce qui marque une certaine baisse par rapport aux 71 pour cent antérieurs. Mais la cote d'approbation de Sarkozy est tombée à un nouveau record de 29 pour cent.
En poursuivant la lutte contre les coupes de Sarkozy, les
travailleurs, étudiants et lycéens s'engagent dans une lutte politique contre
le gouvernement. Cela souligne la signification de l'appel du World Socialist
Web Site aux travailleurs pour qu'ils forment leurs propres comités d'action
indépendants pour défendre et étendre la grève et préparer une grève générale
visant à renverser le gouvernement Sarkozy et à le remplacer par un
gouvernement de travailleurs.
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