WSWS : Nouvelles et analyses : Economie mondiale
Des dizaines de milliers de manifestants qui s'étaient rassemblés à Copenhague samedi dernier pour exiger de manière pacifique que la Conférence des Nations-unies sur le climat (COP15) apporte des mesures sérieuses à la crise du réchauffement de la planète ont été confrontés à des contingents massifs de policiers anti émeute qui ont encerclé et isolé une partie de la manifestation et arrêté de façon arbitraire près de 1 000 personnes.
Les mesures brutales employées par la police danoise représentent une violation flagrante du droit démocratique de liberté de rassemblement. Elles doivent servir d'avertissement à la classe ouvrière et aux jeunes d'Europe et du monde entier.
La manifestation regroupant de nombreuses familles avec enfants a été rompue par des escadrons de police lourdement armés qui ont eu recours à la tactique du « kettling, » savoir l’encerclement et l’isolement d’une foule par des cordons policiers, pour prendre au piège et retenir des groupes de manifestants. Les manifestants, pour la plupart des jeunes, ont été menottés et forcés de s'asseoir sur des trottoirs glacés pendant plusieurs heures avant d'être placés dans des cages.
Un manifestant venu d'Allemagne a ainsi décrit cet emprisonnement: « Vous avez un sol en dur, froid et quatre murs grillagés et un plafond grillagé; dehors il y a des flics qui tournent avec leurs chiens. » Ceux qui ont été arrêtés ont été contraints de s'asseoir « les jambes de chaque côté de la personne assise devant nous, appuyés sur la personne assise derrière nous et nos mains toujours menottées derrière le dos. C'était très douloureux pour la personne assise derrière vous et c'était douloureux pour vous du fait de la personne assise devant vous. Ca rappelle Guantanamo, quand on voit ça. »
La grande majorité des gens arrêtés ont été libérés une fois que leurs papiers ont été vérifiés et que leur photo et renseignements personnels ont été enregistrés par la police. Lundi, sur près de 1 000 manifestants arrêtés samedi, 13 sont restés en garde à vue.
Ces arrestations en masse avaient été précédées le vendredi par un certain nombre de détentions sélectives quand la police a arrêté 68 membres du groupe « Our Climate - Not Your Business » au motif qu'ils risqueraient de commettre des actes illégaux. La police danoise s'est vue accorder le pouvoir d'arrêter des gens sur la base de suspicion non confirmée, suivant une loi qui a été votée à toute vitesse au parlement danois juste avant le début de la conférence de Copenhague.
Dimanche dernier, la police a arrêté 257 manifestants de plus après avoir utilisé la méthode du « kettling » sur une partie de la manifestation près de la gare de Osterport. Ceux qui ont été arrêtés ont été menottés et mis dans des bus qui les ont conduits jusqu'à un centre de rétention.
Cette tactique agressive du « kettling » et d'arrestation en masse de manifestants n'est pas une nouveauté. Elle est de plus en plus utilisée lors de récentes manifestations de par le monde, dont notamment en avril dernier lors de la manifestation du sommet du G20 à Londres où la police avait encerclé et isolé un groupe de manifestants. L'un d'entre eux était mort alors qu'il était retenu dans une zone qui avait été encerclée et isolée par la police de Londres.
Mais samedi dernier, c'est la première fois qu'une telle tactique policière de « tolérance zéro » a été utilisée contre une manifestation de masse sur des questions d'environnement.
Cet acte policier non provoqué avait pour objectif d'envoyer un signal clair au moment où le sommet du COP15 entrait dans sa deuxième semaine. Cette semaine, 110 chefs d'Etat assisteront à la conférence.
Les autorités danoises voulaient faire un exemple: aucun manifestant ne sera toléré aux alentours du centre où se tient la conférence. La tenue des événements dans le centre ne devra pas être « perturbée » par les opinions des manifestants qui reflètent les inquiétudes de centaines de millions de gens à travers le monde, qui s'alarment de voir l'incapacité des dirigeants du monde de parvenir à une quelconque décision ressemblant à un accord contraignant pour combattre le réchauffement de la planète.
La conférence elle-même est devenue un exemple même de l'impossibilité, dans le cadre du capitalisme et de la division du monde en Etats nations rivaux, de développer une politique rationnelle et internationalement coordonnée pour sauver la planète des conséquences potentiellement désastreuses de l'émission grandissante de carbone.
Cette conférence a donné le spectacle des principales puissances impérialistes, conduites par les Etats-Unis, cherchant à imposer le fardeau économique d'une queconque limitation des émissions de carbone sur les pays pauvres et historiquement opprimés.
La conférence a révélé plus encore les tensions grandissantes entre les principaux blocs commerciaux, conduits par les Etats-Unis, l'Union européenne et la Chine. Les élites dirigeantes de ces blocs et les nations individuelles sont déterminées à utiliser la question du changement de climat pour promouvoir leurs propres intérêts stratégiques et financiers.
Tandis que les délégués des Etats-nations assemblés sont à couteaux tirés concernant les mesures à adopter pour empêcher une catastrophe environnementale, ils s'accordent à penser que la force toute entière de l'Etat doit être utilisée contre les militants pour le climat et les citoyens ordinaires qui cherchent à utiliser leur droit démocratique de rassemblement et de manifestation.
La répression exercée contre les manifestants à Copenhague est une expression de l'offensive grandissante de la bourgeoisie européenne et des gouvernements capitalistes du monde entier contre les droits démocratiques et sociaux.
Dans la période d'après-guerre, les pays d'Europe de l'ouest tels l'Allemagne et les nations scandinaves, dont le Danemark, se présentaient au monde comme des bastions de la liberté d'expression et de la démocratie. Parmi ces pays scandinaves on compte certaines des plus anciennes démocraties bourgeoises.
La démocratie de l'Europe capitaliste a toujours été limitée et conditionnelle. Chaque fois que les classes dirigeantes européennes sentaient que leurs intérêts fondamentaux étaient menacés par la classe ouvrière, ils ripostaient par la répression policière et la victimisation.
Ces dernières décennies, avec la fin du boom d'après-guerre, l'intensification de la crise économique et l'accroissement des inégalités sociales, ont vu une augmentation des attaques contre les droits démocratiques et une intensification des pouvoirs policiers de l'Etat.
L'Europe est à présent en guerre. Malgré une vaste opposition de l'opinion publique, l'Allemagne, la France et un certaine nombre de nations scandinaves ont envoyé des troupes en Afghanistan se battre aux côtés des Etats-Unis. Ils envisagent à présent d'accroître leur engagement. Rien que la semaine dernière, l'élite européenne a accordé au président Barack Obama une tribune, lors de la cérémonie de remise du Prix Nobel, d'où propager son message de guerre sans fin et de conquête néo-coloniale.
En 2006, la campagne xénophobe et anti-islamique centrée sur les caricatures de Mahomet publiées par un journal danois avait reçu le soutien officiel de personnalités politiques de premier plan dans le gouvernement danois. Trois ans plus tard, la campagne anti-islamique en Europe a atteint un nouveau seuil avec la récente décision de la Suisse d'interdire les minarets.
La guerre, la xénophobie et les attaques incessantes contre les conditions de vie et le niveau social sont incompatibles avec les droits démocratiques fondamentaux. Il est à présent nécessaire d'ajouter à cette liste la question cruciale de la protection du climat . Dans tous les cas, l'Etat a sa propre réponse lorsque les travailleurs et les citoyens ordinaires cherchent à exprimer leurs différends avec leur gouvernement respectif: la « tolérance zéro » et la répression d'Etat.
L'unique moyen de défendre les droits démocratiques et de promouvoir une solution progressiste à la menace grandissante du réchauffement de la planète est la mobilisation internationale des travailleurs pour contrer le système capitaliste sur la base d'un programme socialiste.
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