Environ 16 civils ont été massacrés et plus de 25 ont été blessés
par des soldats américains en Afghanistan ce dimanche, ce a qui provoqué des
manifestations d’Afghans en colère exigeant le retrait des forces
d’occupation et la démission de la marionnette de Washington, le
président Hamid Karzaï.
La tuerie a eu lieu sur une autoroute principale reliant la
ville afghane de Jalalabad à la frontière pakistanaise après que ce soit
produit un attentat suicide à la voiture piégée à proximité d’un convoi
de marines américains.
Des témoins oculaires ainsi que des responsables afghans ont
dit que les soldats américains ont fait feu sans discrimination sur des civils
dans leur véhicule et sur des piétons dans un geste de vengeance enragée.
Un porte-parole de l’armée américaine a déclaré que les
civils avaient été « pris dans des tirs croisés » et que la voiture
piégée était un des éléments d’« une embuscade multiple impliquant
les tirs d’armes automatiques ennemies venant de plusieurs
directions ».
Suivant de près le scénario habituel des forces d’occupation,
le porte-parole de l’armée, le lieutenant-colonel David Accetta, a émis
une déclaration cynique affirmant que « les terroristes ont fait preuve
d’un mépris évident de la vie humaine en attaquant les forces de la
coalition dans une région peuplée, sachant très bien que des Afghans innocents
seraient tués et blessés. »
Les témoins, toutefois, ont dit que seuls les soldats américains
avaient ouvert le feu. Les médecins qui se sont occupé des blessés ont déclaré
que toutes les blessures avaient été causées par des balles et aucune par des éclats
métalliques de la bombe.
« Ils tiraient partout et ont même ouvert le feu sur 14
ou 15 véhicules circulant sur l’autoroute » a dit à Associated Press
Tur Gul, atteint par deux balles à la main alors qu’il se trouvait dans
une station-service près du lieu de l’incident. « Ils ont tiré sur
tout le monde, sur ceux qui étaient à pied aussi bien que ceux qui étaient dans
des véhicules. »
Mohammed Ishaq, âgé de quinze ans, qui a aussi été touché par
deux balles, a ajouté : « Lorsque nous avons arrêté notre voiture,
ils nous ont dépassés et ont tiré sur nous. C’était un convoi de trois Humvees
américains. Les trois Humvees tiraient dans toutes les directions. »
Ahmed Najib, 23 ans, a été blessé ainsi que son frère âgé de
deux ans. « Il y avait un Américain dans le premier véhicule, criant de
nous arrêter sur le bord de la route, ce que nous avons fait, dit-il. Le
premier véhicule n’a pas tiré sur nous, mais le deuxième si. Je les ai vu
virer et tirer dans cette direction, et virer encore et tirer dans une autre
direction. J’ai même vu un fermier tomber sous le feu des
Américains. »
Un autre homme a déclaré à l’agence de presse Al Jazeera
que cinq membres de sa famille avaient été tués au cours de la fusillade.
« Des balles américaines ont tué ma famille », a-t-il dit.
« C’est de la tyrannie et de l’injustice. »
Le chef du district de Shinwar, Mohammad Khan Katawazi, a
déclaré à l’agence de presse que les marines américains semblaient
traiter tout le monde sur l’autoroute, ceux en voiture comme ceux à pied,
comme des insurgés.
Le chef de police de la province, Abdul Nangahar, a
ajouté : « Lorsque des gens des environs sont venus sur les
lieux, les soldats ont ouvert le feu sur la foule. Certains ont été tués et
d’autres blessés. »
Dans une tentative de camoufler le massacre, les soldats
américains ont confisqué les caméras des photographes et effacé les images de
l’atrocité. L’Associated Press a rapporté que l’un des ses
photographes indépendants et un caméraman de AP Television News ont tous deux
subis des menaces de violence et se sont fait confisquer leurs caméras après
être arrivés sur les lieux et avoir filmé les images de civils morts dans leurs
automobiles.
La tuerie a provoqué des manifestations massives tandis que
des milliers d’Afghans arrivaient sur la scène du carnage, bloquant
l’autoroute qui est la principale route reliant la capitale Kaboul à la
frontière pakistanaise. Les manifestants lançaient des pierres sur la police
anti-émeute en scandant « Mort aux Etats-Unis. Mort à Karzaï. »
Ce terrible incident est caractéristique d’une
occupation ratée et assiégée où les troupes des Etats-Unis et de l’OTAN
perçoivent la population dans son ensemble comme hostile et voient en presque
chaque civil rencontré un agresseur potentiel. Le 3 décembre, des soldats
britanniques avaient ouvert le feu au hasard alors qu’ils fuyaient une
autre attaque kamikaze à Kandahar. La fusillade avait provoqué la mort
d’un civil et en avait blessé au moins six autres. En mai 2006, des
soldats américains avaient ouvert le feu sur une foule d’Afghans après un
accident lors duquel un camion militaire américain était entré en collision
avec des voitures prises dans un embouteillage. Au moins quatre civils avaient
été tués et beaucoup d’autres blessés. Cet incident avait déclenché des
émeutes massives qui avaient coûté la vie à au moins 20 autres personnes.
L’instabilité et la violence ne font que s’intensifier
tandis que l’administration Bush et son principal allié, la
Grande-Bretagne, procèdent à une autre « intensification » militaire
en Afghanistan afin de contenir l’offensive grandissante des forces liées
à l’ancien régime taliban évincé par l’invasion américaine de 2001.
Cette attaque du convoi de marines américains était le
deuxième attentat à la voiture piégée en moins d’une semaine. Mardi de la
semaine dernière, un autre kamikaze avait tué au moins 23 personnes lors
d’une attaque devant la principale base américaine de Bagram, durant une
visite du vice-président des Etats-Unis, Dick Cheney, dans cette base. Cheney
avait rapidement été conduit dans un abri sécurisé après l’attaque. Alors
que la très grande majorité des victimes étaient des Afghans, deux Américains
et un Sud-coréen avaient aussi perdu la vie dans cet attentat.
Entre-temps deux soldats britanniques ont été tués dans une
attaque à la roquette dans la province de Helmand samedi.
Les dernières pertes humaines ont été annoncées alors que les
États-Unis et leurs alliés se préparent à l’offensive de printemps attendue
des résistants afghans.
Il y a des indications claires d’une intensification de
la résistance à l’occupation menée par les États-Unis. Si 24
attentats suicides ont été répertoriés en 2005, ce chiffre est monté à 139
l’an dernier. Durant la même période, comme le mentionnait le président
Bush lui-même dans son discours du 15 février dernier, « le nombre
d’attaques sur les routes a presque doublé, les attaques avec tirs
directs contre les forces internationales ont presque triplé ».
Cette menace a été utilisée pour justifier
l’intensification de la répression par les forces d’occupation. Le
secrétaire à la Défense, Robert Gates, a récemment déclaré que les forces
dirigées par les États-Unis allaient intensifier l’offensive plutôt que
d’attendre une attaque des insurgés.
« Ce que nous voulons pour ce printemps, c’est que
l’offensive du printemps soit notre offensive à nous », a
déclaré Gates.
Mais l’intensification des opérations militaires,
combinée aux actes de vengeance enragée et paniquée comme celui de ce dimanche
ne font qu’intensifier l'hostilité de la population afghane envers les
occupants étrangers.
Une étude publiée la semaine dernière par le groupe de
réflexion américain, la Fondation Jamestown, a averti : « Alors que
les troupes de la coalition continuent d’utiliser un soutien aérien
rapproché et une puissance de tir d’artillerie supérieure pour repousser
les insurgés talibans hors des provinces comme Kandahar, ce qui décidera du
gagnant des cœurs et des esprits… pourrait bien être les
"dommages collatéraux" infligés par les deux
belligérants. »
Quelque 27 000 soldats américains sont actuellement déployés
en Afghanistan, composant plus de la moitié de la force de l’OTAN
comptant 35 000 soldats, en plus des 10 000 soldats supplémentaires
opérant sous un commandement américain distinct. L’administration Bush a
récemment augmenté les forces d’occupation en retardant le retrait prévu
de 3 500 soldats américains.
La nouvelle direction démocrate au Congrès, pendant ce temps,
a pleinement embrassé la stratégie consistant à augmenter la répression
militaire en Afghanistan, accusant l’administration Bush de n’avoir
pas déployé suffisamment de troupes dans le pays. La sénatrice Hillary
Clinton, candidate démocrate pour les élections présidentielles de 2008 et
Nancy Pelosi, la représentante démocrate à la Chambre des représentants, ont
toutes deux visité l’Afghanistan au cours des derniers mois pour signaler
leur soutien à l’escalade de l’aventure militariste de Washington
dans le pays.