A Washington DC, on saisit rapidement l’atmosphère politique
qui règne sur la capitale nationale. C’est un lieu où les intérêts de la grande
entreprise et sa légion de lobbyistes invitent les politiciens des deux partis
à de grands dîners où ils boivent de bons vins où ils se font acheter. C’est un
lieu où les groupes de réflexion financés par la grande entreprise et le gouvernement
développent les politiques impérialistes affectant la vie d’une quantité indénombrable
de personnes à l’intérieur et à l’étranger, entièrement hors du contrôle et
hors de vue du peuple américain.
Un incident a eu lieu ce lundi qui a offert un exemple
parlant des véritables rapports et forces à l’œuvre à Washington.
Ce journaliste a été empêché d’assister à un événement
public du Center for Strategic and International Studies (CSIS, Centre pour les
études stratégiques et internationales), un groupe de réflexion national ayant
des liens étroits avec le gouvernement et qui compte parmi ses responsables
certains de grands noms de l’establishment de la politique étrangère américaine.
L’événement, intitulé « La voie de l’avant en Irak »,
était annoncé sur le site web du CSIS et décrit sur sa page des événements, qui
déclare que tous les événements qui y sont inscrits « sont ouverts au
public ». Il était télédiffusé en direct sur le réseau du câble CSPAN.
Ce n’est qu’un parmi plusieurs événements officiels et
semi-officiels qui ont actuellement lieu dans la capitale comme partie de la
tentative de forger un consensus bipartisan, en opposition criante au sentiment
anti-guerre exprimé dans les élections de novembre, sur la base duquel la
catastrophique occupation américaine de l’Irak doit se poursuivre et même s’intensifier.
Le World Socialist Web Site s’est
enregistré pour couvrir le forum du CSIS comme partie de son reportage à
Washington sur le 110e Congrès nouvellement arrivé au pouvoir et sur le
développement de la politique américaine en Irak, en Afghanistan et au Moyen-Orient
dans son ensemble.
Les conférenciers devant participé à l’événement
consistaient de quatre membres du comité sur l’armée de la Chambre des
représentants américaine : le nouveau président du comité, Ike Skelton
(démocrate, Montana), Jim Marshall (démocrate, Géorgie), Jim Saxton
(républicain, New Jersey) et Mac Thornberry (républicain, Texas).
Le soir avant l’événement, j’ai fait parvenir un courriel au
bureau des relations externes, le bureau de presse du CSIS, pour m’enregistrer
comme membre de la presse, en accord avec les instructions données sur le site
web du CSIS. Tôt lundi matin, j’ai téléphoné au bureau pour confirmer que j’étais
enregistré et me suis fait répondre que j’étais sur la liste des journalistes
enregistrés pour la couverture de la discussion des conférenciers.
Toutefois, lorsque je me suis rendu à la table 30 minutes
avant le début prévu de l’événement, je me suis fait dire par H. Andrew Schwartz,
l’adjoint au directeur des relations externes du CSIS que je n’étais pas sur la
liste et que je ne pouvais participé en tant que membre de la presse. Lorsque j’ai
expliqué que j’étais inscrit et que mon inscription avait été confirmée le
matin même, M. Schwartz a tout simplement nié qu’il en était ainsi.
Je lui ai alors demandé s’il était possible de participer à
l’événement de toute façon et il m’a répondu que c’était impossible parce que
la politique du CSIS n’était d’admettre que les journalistes avec des « crédits
fédérés ». Il a déclaré que cette politique est énoncée sur le site web de
l’organisation. (Je n’ai pu trouver aucune trace d’une telle règle lorsque je l’ai
cherché plus tard sur le site web). Lorsque j’ai protesté que c’était une
tentative arbitraire de m’exclure, Schwartz a ajouté que l’enregistrement des
journalistes « dépassaient les capacités d’admission » et qu’il n’y
avait plus de place.
J’ai ensuite demandé si je pouvais assister en tant que
membre du public, l’événement ayant en effet été annoncé sur le site web du
CSIS comme étant public. Schwartz a soutenu que je ne pouvais pas, car j’avais
déjà essayé d’y assister en tant que journaliste. Sentant l’irrationalité de
cet argument, il a ajouté que les inscriptions pour le public étaient déjà
complètes. Durant ce dernier échange, il a modifié sa version de son histoire,
reconnaissant que je m’étais inscrit « à 8h50 ce matin », mais qu’à
ce moment, selon lui, les inscriptions pour les gens de la presse étaient déjà
complètes.
Lorsque je lui ai dit que rien de tout cela n’était vrai,
il a menacé de m’expulser de l’immeuble.
Les prétextes de Schwartz pour exclure le World
Socialist Web Site étaient absurdes. C’était un événement public où
allaient s’exprimer des représentants officiels des deux partis. Pourquoi ai-je
été exclu ?
J’ai été exclu car, ayant réalisé qui j’étais, les
officiels du CSIS s’inquiétaient que je puisse soulever une question qui ne
respecterait pas le cadre complètement pro-establishment de la presse de
Washington. Ils craignaient, particulièrement en présence des caméras de CSPAN,
qu’une question dévoilant d’une quelconque façon le véritable contenu des
politiques en développement ne soit posée. Aucune intrusion dans leurs
délibérations réactionnaires par des représentants des médias autres que ceux
de leur propre milieu ne pouvait être tolérée.
L’incident met en évidence le caractère élitiste et
antidémocratique de tout le système des organes politiques, des organisations
médiatiques et des groupes de réflexion qui forment l’establishment de
Washington. C’est une très petite et incestueuse fraternité d’organisations et
d’individus qui partagent une allégeance commune envers l’élite dirigeante
corporative et financière et qui méprisent le public.
Washington regorge de groupes de réflexion comme le CSIS.
Un examen de cette institution en particulier nous éclaire sur tout le réseau
d’organisations quasi-gouvernementales et sur les gens et les perspectives
politiques qui façonnent la politique du gouvernement.
Commençons d’abord par H. Andrew Schwartz. Selon le site
web du CSIS, « Avant de joindre le CSIS, M. Schwartz était porte-parole pour
le Comité aux Affaires publiques américano-israéliennes (AIPAC), un lobby
américain pro-Israël. Auparavant, M. Schwartz a produit sur le réseau Fox News
le Special Report with Brit Hume pendant plus de cinq ans et a été par
la suite producteur de la Maison-Blanche pour le réseau... Tôt dans sa
carrière, M. Schwartz a été assistant de recherche de Stuart E. Eizenstat,
conseiller à la politique intérieure de Carter, ... et membre législatif dans
les bureaux du sénateur J. Bennett Johnston (démocrate, Los Angeles) et du
représentant Lindy Boggs (démocrate, Nouvelle-Orléans). »
Voilà le profil d’un fonctionnaire du parti démocrate qui
en est venu à travailler pour l’empire médiatique de droite de Murdoch et pour
un puissant lobby américain oeuvrant au nom du régime sioniste en Israël.
Toutefois, il n’est que du menu fretin dans les rangs du
CSIS. La personnalité qui est probablement la plus connue et qui fait partie
des « experts » du groupe de réflexion est Anthony H. Cordesman, titulaire
de la chaire de stratégie Arleigh A. Burke.
Analyste de la sécurité nationale pour ABC News, Cordesman
a fait plusieurs apparitions aux bulletins de nouvelles télévisés et émissions
de commentaires. Le site Internet du CSIS énumère la liste des sujets d’étude auxquels
il donne la priorité, qui comprend l’énergie, le Moyen-Orient et l’Afrique du
Nord, la politique de défense, le terrorisme et la menace transnationale. La
liste de son expertise telle qu’énuméré sur le site inclus les affaires
militaires au Moyen-Orient, les armes de destruction massives, les missile
défense, la défense nationale, l’énergie du Moyen-Orient, l’Arabie saoudite, et
la guerre en Irak et en Afghanistan.
Ancien assistant à la sécurité nationale et sénateur républicain
pro-guerre, John McCain, a également occupé un poste au Département de la
défense, le Département d’État, le Département de l’énergie et l’OTAN. Ses
assignations étrangères incluent des périodes au Liban, en Iran et en Arabie saoudite.
« Il a », selon le site Internet, « dirigé des études sur le
système de défense par missiles, la guerre asymétrique, les armes de
destruction massive, et la protection des infrastructures critiques ».
Ce profil correspond à la description d’un vétéran actif au
service de l’Etat, spécialisé dans la défense des intérêts pétroliers de
l’impérialisme américain et dans la contre-insurrection.
Une liste des autres lumières du CSIS comprend une
brochette d’individus mêlés aux intrigues impérialistes américaines, à la
guerre et la subversion. Elle comprend le président de l’organisation, Sam
Nunn, un ancien sénateur démocrate de la Géorgie ayant des liens très étroits
avec l’establishment militaire et homme de confiance de Richard Armitage,
anciennement adjoint de Colin Powell dans l’Etat de George W. Bush; Harold
Brown, secrétaire à la défense sous Carter; Zbigniew Brzezinski, le conseiller
à la sécurité nationale de Carter; William Cohen, secrétaire à la défense sous
Clinton; Felix Rohatyn, banquier investisseur; David M. Rubenstein, cofondateur
et directeur de Carlyle Groupe; James R. Schlesinger, secrétaire à la défense
sous Nixon et Ford et secrétaire à l’énergie sous Carter; Brent Scowcroft,
conseiller à la sécurité nationale sous Bush senior; et Henry Kissinger.
Sous « À propos du CSIS », le site indique que l’organisation
« cherche à faire avancer la sécurité globale » et « sert de
partenaire de planification stratégique pour le gouvernement ». La
« brève histoire » fournit sur le site vante les mérites anticommunistes
du CSIS, déclarant que « Le CSIS a été créé au sommet de la guerre froide »
et souligne son caractère bipartisan : « Dès ses origines, le CSIS
s’est consacré à la résolution de problèmes bipartisans…Le CSIS unit activement
les dirigeants des deux partis à se joindre dans la résolution commune des
problèmes. »
Selon la page d’information financière du site Internet, le
CSIS reçoit 9 pour cent de son financement du gouvernement américain et 28 pour
cent de la grande entreprise.
Nous avons là le profil d’une organisation qui se trouve au
centre même de la fabrication des politiques de l’impérialisme américain. Elle représente l’establishment de Washington dans son ensemble.
Le CSIS ne veux pas d’un site Internet lu par des dizaines
de milliers d’étudiants et de travailleurs partout à travers le monde qui
s’immisce dans ses tentatives de sauver l’intervention américaine en Irak et en
Afghanistan. La poursuite des guerres néo-coloniales au nom de la
« démocratie » marque la fin de la démocratie aux Etats-Unis.
L’exclusion du World Socialist Web Site reflète le
caractère essentiel de la politique à Washington DC. Ce n’est pas le centre du
gouvernement représentatif. C’est plutôt le centre des conspirateurs, dirigé
contre le peuple américain et la classe ouvrière internationale.
(Article original anglais publié le 9 janvier 2007)