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Les véritables objectifs de la guerre menée contre le Liban par Israël avec l’appui des États-Unis
Déclaration du comité de rédaction
22 juillet 2006
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L’attaque contre le Liban entrant dans sa dixième journée,
les troupes israéliennes se tiennent prêtes à entreprendre une invasion qui a
été préparée par un bombardement aérien meurtrier, et les vastes buts
impérialistes de la guerre sont maintenant bien trop évidents.
Avec le plein appui politique, financier et militaire des
États-Unis, le régime sioniste tente de transformer le Liban en protectorat
israélien. Cette opération militaire poursuit et intensifie la restructuration
géopolitique impérialiste du Moyen-Orient et de l’Asie centrale qui a débuté
avec les invasions de l’Afghanistan et de l’Irak, et dont l’objectif est
d’établir la domination des États-Unis sur toute la région.
Le but immédiat de cette guerre – l’élimination du
Hezbollah en tant que force militaire et politique au Liban – est dirigé contre
toute résistance des masses à la domination israélienne et américaine du pays.
L’administration Bush et ses alliés à Jérusalem voient ceci comme une étape
essentielle vers: 1) la suppression du régime baathiste syrien et 2) le
déclenchement d’une guerre totale contre l’Iran.
Bien que le gouvernement israélien et l’administration Bush
répètent sans cesse les affirmations propagandistes que l’attaque sur le Liban
n’est qu’un acte «d’autodéfense» provoqué par la capture de deux soldats, cette
assertion n’est pas crédible aux yeux des observateurs bien informés.
Comme l’a écrit le Financial Times de Londres dans
son éditorial du 17 juillet, «le bombardement massif du Liban par la terre, la
mer et les airs, en réaction à l’assaut transfrontalier du Hezbollah la semaine
dernière, concerne maintenant beaucoup plus que la libération de deux soldats
israéliens capturés par des guérilleros islamistes – et probablement comme il
en a toujours été ainsi».
Des affirmations semblables ont été publiées dans le Washington
Post et le Wall Street Journal, ainsi que dans de nombreux journaux
de par le monde. Ceux-ci ne font qu’affirmer ce qui est maintenant évident:
l’attaque israélienne sur le Liban est la réalisation d’un acte d’agression
planifié depuis longtemps.
Les récents événements ont apporté un éclairage
supplémentaire sur le sens de l’assassinat du multimilliardaire libanais et
ancien premier ministre Rafik Hariri, en février 2005.
Hariri avait été tué par une importante explosion qui avait
détruit son cortège de voitures à Beyrouth, quatre mois après qu’il eut
démissionné de son poste de premier ministre en protestation contre la décision
de Emile Lahoud, un allié de la Syrie, de rallonger son mandat de président du
Liban. Les États-Unis et la France, l’ancien chef colonial du pays, avaient
immédiatement porté le blâme de la mort de Hariri sur Damas. Leurs alliés
anti-syriens au Liban, basés principalement sur les couches sociales plus
riches, avaient profité du meurtre de Hariri pour déclencher la soi-disant
Révolution du cèdre, qui entraîna l’an dernier le retrait des troupes
syriennes, qui occupaient le Liban depuis les années 70.
Si, dans les faits, le régime syrien a été responsable du
meurtre, il l’a fait parce qu’il était devenu persuadé que Hariri avait prêté
son appui au plan américain et israélien de faire sortir la Syrie du Liban, en
préparation d’un assaut sur le mouvement du Hezbollah, qui profite d’un appui
massif parmi la population chiite pauvre et qui domine le sud du Liban. Il
était bien conscient que cela serait suivi d’une offensive contre le régime
baathiste à Damas même.
D’un autre côté, il est tout à fait possible que le meurtre
ait été une provocation organisée par les agences de renseignement israéliennes
ou américaines dans le but de créer un prétexte pour réaliser le même plan.
Dans les deux cas, l’offensive israélienne actuelle est
précisément la réalisation d’une telle opération. La Révolution du cèdre a eu
des résultats décevants aux yeux des Israéliens et des Américains. Soumise à
une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies soutenue conjointement
par Washington et Paris, la Syrie a été forcée de retirer ses troupes du Liban.
Toutefois, la puissance de son allié Hezbollah est demeurée intacte.
En effet, à l’apogée de la campagne anti-syrienne, marquée par
des manifestations à Beyrouth très publicisées, organisées par les forces
chrétiennes maronites et d’autres partis libanais alignés avec Washington, le
Hezbollah a organisé de bien plus importantes contre-manifestations qui ont
fait sortir des centaines de milliers de personnes dans les rues de la
capitale. Avec le spectre d’une nouvelle guerre civile devant lui, le
gouvernement qui a émergé de la Révolution du cèdre s’est senti obligé de
conclure un accord qui admettait des représentants du Hezbollah dans le
cabinet.
Un article du New York Times publié le 20 juillet
donne un aperçu de la frustration qui règne au sein de l’administration Bush et
des cercles dirigeants américains: «Malgré les espoirs qu’avait soulevés la
soi-disant révolution du cèdre en mettant fin à près de trente années de
domination syrienne, le gouvernement est toujours coincé dans la camisole de
force sectaire d’un système qui accorde les postes de ministres selon la
religion.» (Le Times n’a pas de semblables objections envers «la
camisole de force sectaire» en place chez le voisin sud du Liban, qui non
seulement accorde tout le pouvoir aux représentants d’une religion, mais qui se
définit comme un «État juif».)
Ce commentaire signale ce qu’est le véritable objectif du
massacre actuel du peuple libanais. Il a pour but la restructuration politique
complète du pays, les sentiments farouchement propalestiniens et
anti-israéliens des masses chiites devant être écrasés et la part du pouvoir
allant aux forces de droite et pro-américaines, principalement, la Phalange
chrétienne, devant être augmentée.
C’est une tentative de renverser le résultat de la guerre
civile libanaise qui a pris place de 1975 à 1990. Les États-Unis, Israël et les
autres puissances impérialistes, surtout la France, ont joué un rôle central
pour inciter et perpétuer le long et sanglant conflit, y compris l’envoi de
forces militaires américaines et françaises, et une invasion israélienne en
1982, qui a été suivie d’une occupation israélienne de 18 ans du sud du Liban.
Le principal allié de Washington fut la Phalange, un mouvement fasciste, qui
était à la tête d’une coalition de forces de droite regroupées contre
l’alliance de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) et la gauche
libanaise.
Les intrigues et les interventions impérialistes ont réussi
l’objectif d’expulser l’OLP du Liban, mais à la fin, d’un côté, le pouvoir de
la Phalange a été réduit, et de l’autre le Hezbollah appuyé par la Syrie et
l’Iran est apparu comme une force incontournable. C’est cet état de fait que
Washington est déterminé à changer. De façon notable, l’offensive actuelle d’Israël
a permis aux États-Unis d’envoyer des forces militaires au Liban pour la
première fois depuis leur retrait après le bombardement du campement des
marines américains à Beyrouth en octobre 1983.
Les antécédents historiques
Israël a une longue histoire de tentatives de transformer
le Liban en quasi protectorat, au moyen de pressions militaires et d’alliances
politiques avec des forces de droite dans ce pays.
En mars 1978, au milieu de la guerre civile libanaise, Israël
a envoyé ses forces militaires au Liban, justifiant ses actions comme une
réponse aux activités terroristes de l’OLP. Même s’il a été forcé par les
pressions internationales de se retirer après que ses opérations militaires
aient résulté en la mort de plus de deux mille Libanais, Israël a gardé son
autorité sur une bande de 19 kilomètres au nord de la frontière en soutenant
une milice de droite, dénommée l’Armée du Liban Sud, mandatant le commandement
au major Saad Haddad.
Quatre ans plus tard, en 1982, le premier ministre
israélien Menachem Begin et son ministre de la Défense, Ariel Sharon, ont mis
en œuvre un plan beaucoup plus ambitieux pour prendre la direction politique de
tout le Liban et expulser l’OLP du pays. Encore une fois, un prétexte a été
trouvé lorsque l’ambassadeur israélien a été blessé à Londres par un assassin
palestinien en juin 1982. Même si les experts en renseignement ont reconnu que
l’OLP n’avait rien à voir avec l’incident, le gouvernement Begin a utilisé
l’événement comme prétexte pour envahir le Liban. Dans une opération appelée
avec un total cynisme «Paix pour Galilée», les troupes israéliennes se sont
dirigées vers le nord jusqu’aux abords de Beyrouth, qui fut soumis à un
bombardement prolongé.
La guerre a forcé l’expulsion de l’OLP du Liban et a mené
au massacre cautionné par Israël de milliers de réfugiés palestiniens par les
milices fascistes libanaises.
Les États-Unis ont eux aussi été impliqués dans
l’assujettissement du Liban, l’administration Reagan basant des marines à
Beyrouth. Mais l’implication directe des États-Unis dans les quartiers pauvres
de Beyrouth (qui ont été bombardés par les navires américains) a suscité une
profonde hostilité qui résulta en l’attentat à la bombe suicide dans lequel
près de 250 marines furent tués. L’administration Reagan décida de minimiser
ses pertes et les États-Unis se sont retirés du Liban.
Le régime israélien, toutefois, a cherché à maintenir sa
domination sur de grandes parties du sud du Liban. C’est le mouvement
d’opposition populaire à l’occupation qui a entraîné le développement du
Hezbollah en tant que puissante force militaire et politique. La guérilla
conduite par le Hezbollah a finalement forcé Israël à retirer ses forces en
2000.
Les tactiques militaires israéliennes
La guerre actuelle n’a pas seulement pour but de détruire
le Hezbollah, mais aussi d’éliminer toute résistance à la domination américaine
et israélienne au Liban. Le but désiré explique les moyens employés. Israël
bombarde sans discernement le sud du Liban, là où l’on trouve la population
chiite pauvre et la principale base d’appui au Hezbollah. L’armée israélienne
cible délibérément toute la population civile, détruisant des villages entiers
et rendant toute la région inhabitable.
Le Washington Post a rapporté jeudi qu'Israël a
ordonné à tous les Libanais vivant au sud du fleuve Litani d'évacuer
la région dans un délai de 24 heures.
Le but est de transformer le Liban sud en zone interdite
afin de préparer l'entrée soit de troupes israéliennes ou d'une
combinaison de forces israéliennes et américaines, avec peut-être des
contingents d'autres pays, fonctionnant comme une «force internationale de
maintien de la paix» avec la bénédiction des Nations Unies.
L'offensive israélienne est surtout une guerre contre les
pauvres du Liban. Les quartiers résidentiels plus riches de Beyrouth et
d'autres parties du pays ont été en grande partie épargnés. Cela concorde bien
avec la politique israélienne et américaine durant la guerre civile, lorsqu'ils
s'étaient alliés à la Phalange contre les masses chiites et la population de
réfugiés palestiniens.
La campagne mortelle de destruction lancée contre le Liban
sud va de pair avec un bombardement visant les banlieues chiites sud de
Beyrouth et les aéroports, ports, routes, ponts et centrales électriques du
reste du pays. L'objectif est de détruire l'infrastructure du pays. Avant de
pouvoir remodeler politiquement le Liban, celui-ci doit d'abord être
physiquement anéanti. Cela donne une idée du sort que réservent l'impérialisme
américain et son allié israélien aux peuples de la Syrie, d'Iran et
d'ailleurs.
Il n'y a pas non plus lieu de croire Israël lorsque celui-ci
nie préparer une invasion terrestre. Plus les chefs israéliens
écartent une telle action, plus elle devient probable. Bien que
l'intensité du bombardement au Liban sud soit suffisante pour tuer des
milliers de personnes, ce n'est pas assez pour réaliser l'objectif
israélien de détruire le Hezbollah en tant que force militaire et politique, et
convertir le Liban en protectorat sioniste.
Citant le journal israélien Haaretz, l'émission de
nouvelles du soir du NBC a rapporté jeudi que des milliers de soldats
israéliens ont commencé à franchir la frontière pour pénétrer au Liban sud.
Le rôle des États-Unis
Les États-Unis jouent un rôle décisif dans la guerre. Ils
ont cautionné d'avance la guerre et travaillent en étroite collaboration
avec la machine militaire israélienne, qu'ils ont eux-mêmes mise sur pied
et financée, pour la mener.
Au niveau diplomatique, l'administration Bush aligne
ouvertement ses actions sur les objectifs militaires et les calculs
politiques du gouvernement israélien. Washington est en train de coordonner
avec Israël la visite imminente dans la région de la secrétaire d'état
américaine Condoleezza Rice afin de laisser aux militaires israéliens
tout le temps qu'ils demandent pour infliger le plus de dommages possibles
au Liban sud. Comme l'a rapporté le New York Times le 19
juillet, «les responsables américains ont laissé entendre que Mme Rice
attendrait au moins quelques jours de plus avant d'intervenir dans le conflit,
en partie pour donner à Israël plus de temps pour affaiblir les forces du
Hezbollah.»
Il n'y a aucun précédent à l'opposition ouverte du
gouvernement américain à un cessez-le-feu. Dans une évaluation plutôt franche
de la politique américaine publiée le 19 juillet, le Wall Street
Journal a commencé par rappeler le rôle diplomatique de Washington lors du
dernier conflit majeur entre Israël et le Hezbollah:
«Il y a dix ans, lorsque le Hezbollah et les forces
israéliennes ont pris part à un bain de sang pendant des semaines, le
président Clinton a envoyé le secrétaire d'État Warren Christopher dans la
région pour six jours d'intense diplomatie de navette entre Damas et Jérusalem.
En fin de compte, il a obtenu un accord de cessez-le-feu qui a mis fin aux
combats, au moins temporairement.
«Aujourd'hui, l'administration Bush a une approche
foncièrement différente.»
Les États-Unis sont en train de légitimer entièrement et
ouvertement la guerre en tant qu'instrument de politique étrangère. Cela
représente la poursuite de son agression militaire en Irak, et le signe
annonciateur de futures agressions contre la Syrie, l'Iran et d'autres
pays. C'est lié à la doctrine Bush de la «guerre préventive» qui a été
embrassée par tout l'establishment politique américain et les deux partis de
l'impérialisme américain - démocrates comme républicains.
L'effort déterminé de Washington pour permettre à Israël de
continuer le massacre au Liban souligne le fait que la guerre
actuelle fait partie de la campagne de l'impérialisme américain pour
établir par tous les moyens la suprématie des États-Unis dans tout le
Moyen-Orient.
Il reste à voir si cette aventure militaire téméraire et
criminelle contribuera à court terme à faire avancer cet objectif
ou entraînera plutôt Washington dans une débâcle encore plus
grande dans la région.
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