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Le World Socialist Web Site condamne les attentats à la bombe simultanés mardi à Bombay, la ville la plus peuplée de l’Inde et son centre financier. Au moins 179 personnes ont été tuées et 400 autres blessées après que huit bombes eurent explosé en un court laps de temps, dans ou près de sept trains de banlieue du réseau Western Railway lors de l’heure de pointe de mardi soir.
Le moment et l’endroit de l’explosion des bombes ont été choisis pour faucher le plus de vies humaines. Les bombes ont déchiré des wagons remplis de passagers, sang et parties de corps étant projetés dans toutes les directions. Le grand nombre de blessures à la tête et au thorax indique, ont dit les enquêteurs de la police, que plusieurs bombes avaient été placées dans les porte-bagages au-dessus des sièges. On pense que le nombre de morts augmentera, les sauvetages étant encore en cours et plusieurs blessés se trouvant dans une situation critique.
Une pluie battante, l’encombrement des rues par les banlieusards tentant de rentrer chez eux et les réseaux de téléphonie mobile bloqués ont tous ont nui au sauvetage et contribué au chaos qui a régné suite aux attentats à la bombe.
«Les moments qui ont suivi les explosions ont été retransmis dans toute l’Inde, a rapporté le New York Times, montrant des images d’épaves de trains démantelés, de membres arrachés et de banlieusards blessés et en état de choc, certains avec le visage couvert de sang.»
Peu importe les buts supposés des poseurs de bombes, le massacre gratuit et délibéré de banlieusards et autres voyageurs du train est un crime horrible qui ne pourra que renforcer la réaction politique en Inde et de par le monde.
L’administration Bush, comme il fallait s’y attendre, a saisi l’occasion que lui a donnée les événements de Bombay pour promouvoir sa «guerre au terrorisme», le prétexte qu’elle a invoqué pour chercher à établir, au moyen de la conquête militaire, sa domination stratégique sur le Moyen-Orient et l’Asie centrale, riches en pétrole, et pour mener de larges attaques contre les droits démocratiques aux États-Unis mêmes. «Nous serons aux côtés de l’Inde dans la guerre au terrorisme», a déclaré la secrétaire d’État Condoleezza Rice.
Le gouvernement indien a ordonné aux forces de sécurité de passer en mode d’alerte élevée dans toutes les villes de l’Inde. Dans une déclaration transmise à la presse, le premier ministre Manmoham Singh a promis que les autorités de l’État «vont travailler pour contrer les intentions maléfiques des terroristes et ne leur permettront pas de réussir».
Mercredi matin en Inde, aucun groupe n’avait encore revendiqué la responsabilité de l’attaque terroriste de mardi. Mais les médias indiens ont rapporté que des sources anonymes haut placées dans le gouvernement ont dit que les attentats à la bombe étaient «clairement» l’oeuvre de l’Armée des purs (Lashkar-e-Taiba), une organisation terroriste islamiste qui s’oppose à ce que les États de Jammu et du Cachemire, majoritairement musulmans, restent dans l’Union indienne. Les attentats à la bombe, selon ces sources, visaient à attiser les luttes sectaires entre communautés de l’Inde, espérant que la réaction hindoue contre la minorité musulmane de l’Inde créerait des conditions favorables à l’insurrection anti-indienne au Cachemire et qu’elle minerait les négociations pour la paix entre l’Inde et le Pakistan.
L’Armée des purs et d’autres groupes terroristes islamistes opposés au contrôle indien sur le Cachemire ont monté des attaques répétées sur des civils et ont perpétré des atrocités communautaristes.
Tôt mardi, huit personnes ont été tuées et plus de 35 autres blessées à Srinagar, la capitale d’été du Jammu et du Cachemire, dans trois attaques à la grenade visant des touristes.
Mais si l’Armée des purs a été l’auteur des attentats à la bombe simultanés de Bombay, cela représenterait un degré de maîtrise technique dont elle n’a pas fait montre jusqu’à présent.
Un porte-parole de l’organisation a nié qu’elle avait quoique que ce soit à voir avec les attaques terroristes de mardi à Srinagar ou à Bombay. Selon le Hindu, un représentant de l’Armée des purs, Abdullah Ghaznavi, a condamné les deux attaques comme «inhumaines et barbares» lors d’un appel téléphonique à une agence de presse de Srinagar. «Blâmer l’Armée des purs pour de tels actes inhumains est une tentative des agences de sécurité indiennes de salir la lutte pour la liberté du Jammu et du Cachemire», a déclaré Ghaznavi.
Par leur nature même, les actes terroristes font qu’il est impossible de déterminer où finit la conspiration terroriste et où commencent les machinations des agences du renseignement, des forces de sécurité et des provocateurs de droite.
Les forces de sécurité indiennes ont cherché à mater les insurgés du Cachemire et à étouffer l’agitation séparatiste dans d’autres parties du pays au moyen de la répression la plus implacable. Elle ont recours de façon courante à la torture, au meurtre, à l’infiltration, à la provocation et à des détentions de masse supposées débusquer les «terroristes».
Il n’est pas exclu que l’atrocité d’avant-hier à Bombay ait été organisée ou facilitée par des agents provocateurs travaillant pour l’une des agences de renseignement de l’Inde ou que des éléments au sein des forces de sécurité aient laissé l’attaque terroriste prendre place, dans le but de semer la panique dans le public et lui faire accepter une extension des pouvoirs répressifs de l’État. Il est également possible que les attentats de Bombay aient été l’œuvre de fanatiques hindous déterminés à attiser la violence anti-musulmane.
Le ministre indien de l’Intérieur, Shivraj Patil, a dit que les autorités ont été averties qu’une attaque s’en venait, mais «ni le lieu, ni l’heure n’était connue».
En décembre 2001, le gouvernement indien, alors dirigé par le Bharatiya Janata Party (BJP), avait invoqué une attaque terroriste contre le parlement indien, dont la responsabilité fut imputée à l’Armée des purs, pour faire passer une loi draconienne de Prévention du terrorisme et menacer son grand rival de longue date, le Pakistan, qu’il a accusé d’épauler l’Armée des purs. Dans une tentative de forcer le Pakistan à faire d’importantes concessions, le gouvernement de l’Inde a maintenu un million de soldats en formation de bataille près de la frontière pakistanaise pendant presque un an.
L’Alliance progressiste unie (APU), qui a succédé à l’Alliance démocratique nationale dirigée par le BJP, en tant que gouvernement de l’Inde suite aux élections de mai 2004, a abrogé la loi de Prévention du terrorisme mais a incorporé à la loi introduite pour remplacer celle-ci plusieurs de ses clauses anti-démocratiques.
Contrairement à la réaction du gouvernement BJP en décembre 2001, le gouvernement APU dirigé par le Parti du congrès n’a soulevé aucune accusation, du moins jusqu’à présent, d’implication pakistanaise dans les attaques terroristes de Bombay ou de Srinagar. Islamabad, de son côté, s’est empressé de dénoncer les attentats de Bombay.
Le Shiv Sena – l’allié du BJP, adepte comme lui de la suprématie hindoue, qui contrôle le gouvernement municipal de Bombay et forme l’opposition officielle dans la région de Maharashtra – a répondu à l’atrocité terroriste d’avant-hier en exigeant la démission du gouvernement régional (Parti du congrès/Parti nationaliste du congrès) pour son échec à assurer la sécurité des citoyens.
Le chef de parti du Shiv Sena, Bal Thackeray, a cherché à mettre les explosions à la bombe sur le compte des efforts du Congrès visant à établir de meilleures relations avec le Pakistan. «Le Centre s’affaire à mettre en service des autobus vers le Pakistan, tandis que Islamabad, de son côté, s’affaire à acheminer des terroristes en Inde», a dit Thackeray au Times of India. «Je dois avertir le Congrès que les gens sont à bout de patience. Si on ne traite pas les terroristes d’une main ferme, il y aura une explosion de mécontentement contre les gouvernements du Congrès non seulement au Centre, mais dans les régions également.»
Le BJP accuse depuis des mois le gouvernement APU dirigé par le Parti du congrès de «mollesse» à l’endroit du terrorisme, et mène une agitation pour que la loi de Prévention du terrorisme soit rétablie dans sa totalité.
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