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Un an après: les leçons des attentats de Londres

Déclaration du Parti de l’égalité socialiste (Grande-Bretagne)
10 juillet 2006

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La commémoration officielle des attentats terroristes de Londres qui tuèrent 52 personnes le 7 juillet 2005 est utilisée par le gouvernement Blair comme justification pour s’arroger des pouvoirs répressifs encore plus grands.

Derrière les larmes de crocodile qu’il a versées, le gouvernement est indifférent à la souffrance de ceux qui ont été impliqués dans les événements. À ce sujet, rien de témoigne plus que les compensations dérisoires offertes aux victimes et à leurs familles. Par exemple, Nader Mozakka, qui a perdu sa femme dans les attentats, n’a reçu que £5.500 en compensation, alors que Martine Wright, qui a perdu ses deux jambes, a reçu £110.000.

La commémoration par le gouvernement constitue une honteuse tentative pour manipuler la peine de la population dans le but d’éliminer toute discussion critique sur les leçons politiques qui doivent être tirées de la pire atrocité terroriste jamais commise en territoire britannique. En ce qui concerne le gouvernement, le silence sur les circonstances entourant le 7 juillet et son contexte politique se poursuivra bien plus longtemps que les deux minutes réservées à la commémoration des victimes de l’attaque.

Le gouvernement du parti travailliste du premier ministre Tony Blair a passé les derniers jours précédant l’anniversaire à s’opposer aux demandes des parents de ceux qui ont été tués ou estropiés, qui exigent une enquête publique sur les attentats. Blair maintient qu’une telle enquête détournerait des ressources nécessaires à la guerre au terrorisme.

Son argument cynique fut soutenu par la ministre de la Culture Tessa Jowell, qui dirige la commémoration au nom du gouvernement. Elle se fit surprendre en plein mensonge lorsqu’elle affirma que l’enquête officielle sur le massacre de personnes qui manifestaient pour les droits civils en Irlande du Nord, le dimanche sanglant de 1972, avait coûté £400 millions. La véritable somme était en fait la moitié.

De toute façon, l’argument de Blair est fallacieux. Comment une enquête publique pourrait-elle nuire à une véritable tentative pour protéger la population contre les attaques terroristes?

D’abord, le gouvernement ne souhaite pas qu’il y ait une enquête parce que cela soulèverait des questions politiques sur le rôle qu’ont joué la guerre et l’occupation illégales de l’Irak à créer les conditions qui ont mené à l’atrocité du 7 juillet.

Des millions de personnes à travers la Grande-Bretagne et le monde s’étaient opposées à la guerre et avaient exprimé la crainte que, loin de protéger les innocents contre les attaques terroristes, l’indignation soulevée internationalement par l’agression néo-coloniale rendrait les populations des États-Unis et de la Grande-Bretagne encore plus vulnérables. Blair, dans sa ruée pour la création d’une sphère d’influence géopolitique pour le grand capital britannique au Moyen-Orient, dans le sillage de l’administration Bush, a négligé ces préoccupations et a mis les vies de chaque homme, femme et enfant en Grande-Bretagne en danger.

Encore aujourd’hui, le gouvernement insiste que la guerre en Irak n’a rien à voir avec l’augmentation de la menace terroriste. Pourquoi, alors, Blair a-t-il admis qu’il n’était «probablement pas la personne qui devait se présenter à la communauté musulmane», et pourquoi a-t-il demandé à Jowell, relativement peu connue, de présider les commémorations du 7 juillet?

De plus, le gouvernement s’oppose à une enquête car il ne veut pas répondre à des questions difficiles sur le rôle des forces de sécurité juste avant les attentats du 7 juillet. Il espère qu’un étalage organisé «d’unité nationale» détournera l’attention du public de telles questions.

Pas un mois n’a passé sans que des accusations ne soient portées sur les forces de sécurité, avançant que celles-ci possédaient des avertissements détaillés d’une possible atrocité terroriste à Londres.

Le journal Observer a révélé que, au début de 2005, les services de renseignement saoudiens avaient averti des représentants britanniques que quatre militants islamiques, incluant au moins quelques citoyens britanniques, planifiaient de faire exploser le métro de Londres avant six mois. Le journal a mentionné que l’ambassadeur saoudien et d’importants agents de contre-terrorisme du Conseil de sécurité nationale des États-Unis avaient confirmé le rapport.

Les forces de sécurité avaient admis qu’ils connaissaient deux des terroristes, Mohammad Sidique Khan et Shehzad Tanweer, depuis au moins deux ans avant le 7 juillet. À deux occasions, M15 relia les deux qui étaient sous surveillance à d’autres individus qui étaient sous enquête. Le duo avait aussi été observé au Pakistan. M15 possédait déjà le numéro de téléphone de Khan en tant que contact d’un suspect terroriste, et aussi le numéro de téléphone d’un troisième terroriste, Jermaine Lindsay.

L’échec manifeste à garder sous surveillance étroite les futurs poseurs de bombe a été expliqué par le fait que l’on croyait que Khan et Tanweer n’étaient que des acteurs secondaires. Toutefois, selon le journaliste américain Ron Suskkind, Khan s’est vu refusé l’accès aux États-Unis pour des raisons de sécurité deux ans avant les attentats de Londres parce qu’il était considéré comme un membre important des cercles d’al-Qaïda. Suskind déclare aussi que les autorités américaines ont transmis un dossier détaillé sur Khan au MI5 à cette époque.

Il a plus tard été prouvé que les poseurs de bombes agissaient sous le leadership de al-Qaïda. En septembre 2005, une vidéo de Khan a été rendue publique, dans laquelle il disait avoir été inspiré par Oussama ben Laden. Le même ruban contenait un message du second de al-Qaïda, Ayman al-Zawahri, qui revendiquait la responsabilité pour les attentats à la bombe. Hier, une vidéo semblable a été diffusée sur laquelle on pouvait voir Tanweer et qui comprenait une déclaration de al-Zawahri et de Adam Gadahn, aussi connu sous le nom de Azzam al-Amriki, à qui on attribue habituellement le rôle de responsable de la propagande de al-Qaïda.

Toutes les allégations selon lesquelles les services de sécurité britanniques avaient de l’information sur le complot terroriste ont soit été niées, soit banalisées comme des «oublis» ou encore des «échecs du service de renseignement». Si ces explications sont exactes, alors elles condamnent le gouvernement anglais pour fraude massive contre le peuple britannique sous la forme de la soi-disant «guerre à la terreur». Si le gouvernement Blair et les services de sécurité étaient vraiment en train de mener une lutte quotidienne et intensive pour protéger la population contre une menace terroriste qu’ils ont eux-mêmes décrite comme immense et imminente, alors un «oubli» aussi monumental ne se serait pas produit.

À tout le moins, les soi-disant «échecs du service de renseignement» démontrent que la «guerre au terrorisme» est une fraude qui vise à susciter la peur et la panique et pour justifier une agression militaire à l’étranger et un assaut sans précédent sur les droits démocratiques au pays.

Mais, une autre explication est possible : les attentats à la bombe n’ont pas résulté d’«oublis» ou d’«échecs du service de renseignement», mais sont plutôt la conséquence d’une décision délibérée de les laisser se produire, avec l’objectif d’obtenir un prétexte au gouvernement pour d’autres attaques contre les libertés civiles et pour de nouvelles aventures militaires outremers.

Il faut noter qu’il n’y a toujours eu aucune explication donner sur la décision prise en mars 2005 de diminuer l’état d’alerte nationale, malgré le sommet du G8 imminent en Écosse et qui a pris place au moment même des attentats suicides à la bombe dans la capitale.

Depuis dix ans au moins, ces rassemblements des chefs d’États de pays les plus riches et les plus puissants se sont tenu dans des conditions de sécurité militaires, des centres urbains entiers étant dans des conditions semblables à celles que l’on trouve sous une loi martiale et les mesures antiterroristes les plus intensives et perfectionnées étant en place. Particulièrement depuis les attentats à la bombe d’un train à Madrid, l’Angleterre, en tant que hôte du sommet, aurait dû être considérée comme une des cibles prioritaires pour une attaque de al-Qaïda. Inexplicablement, le gouvernement a décidé de diminuer le niveau de l’alerte à la terreur!

Les attentats à la bombe ont certainement constitué un cadeau politique pour le gouvernement, qui venait juste de subir une importante défaite lors des élections générales et qui rencontrait une opposition importante, y compris du système juridique, à sa dernière série de lois antiterroristes. Après le 7 juillet, il a pu faire voter la Loi de prévention du terrorisme, décrit par Blair comme un «point tournant» de l’histoire du droit, avec seulement quelques amendements mineurs.

Le gouvernement, la police et les services de sécurité ont ainsi obtenu des pouvoirs étendus de surveillance et de détention au nom de la nécessité à combattre le terrorisme. Au cours de ce processus, ils ont abrogé l’habeas corpus et le droit de parole et secrètement mis en oeuvre une politique tirer-pour-tuer.

Ces mesures ont déjà coûté la vie à des innocents. L’exécution de sang-froid de Jean Charles de Menezes l’an dernier a été suivie le mois dernier d’un raid sur une maison de Forest Gate au cours duquel un autre homme innocent a été abattu.

De Menezes a faussement été identifié comme un conspirateur impliqué dans un complot d’attentat à la bombe à Londres ayant échoué. Après des douzaines d’arrestations, plus tard le même mois, quatre hommes ont été arrêtés et ont été accusés de tentative d’assassinat de passagers. Ils attendent toujours leur procès.

Au total, la police affirme que soixante personnes ont été arrêtées et accusées depuis le 7 juillet 2005 de crimes reliés au terrorisme. De façon extraordinaire, très peu d’informations ont été rendues public sur leurs supposés crimes, et il a été rapporté que la plupart n’auront pas de procès avant deux années. Des centaines d’autres ont été relâchés sans accusation.

La menace du terrorisme a été utilisée de manière de plus en plus arbitraire pour bannir ou limiter la contestation. Dans un article pour Observer, Henry Porter a parlé du cas de Steve Jago, qui a été arrêté en juin pour avoir montré une pancarte en avant de Downing Street, puis accusé d’avoir organisé une manifestation illégale. Soumis à une fouille par la police, on a trouvé sur Jago un article par Porter sur les libertés civiles, intitulé «L’Angleterre Big Brother de Blair». L’article, publié dans la revue Vanity Fair, qui est diffusée à plus d’un million d’exemplaires, a été décrit par la police comme étant du «matériel à motivation politique» et utilisée en tant qu’élément de justification pour porter des accusations contre Jago.

L’image qui ressort de tout ça c’est celle où des pratiques généralement associées à une dictature d’Amérique latine deviennent monnaie courante en Grande-Bretagne. L’anniversaire du 7 juillet est utilisée pour attiser un climat de peur afin de pousser encore plus loin dans cette direction.

Au cours des derniers jours, il y a eu des avertissements répétés que le niveau d’alerte à la terreur était au plus haut, y compris des allégations de complots visant à «libérer du gaz cyanide sur une place publique – même le réseau de transport de Londres». Blair a dit que le danger d’attaques terroristes contre la Grande-Bretagne est «clair et actif», tandis que Peter Clarke, chef de la section anti-terroriste de la police métropolitaine, a décrit la menace comme étant «sans précédent». Il a ajouté que «le flux de nouveaux cas ne semble pas ralentir – en fait, il accélère».

Des reportages dans les médias font état, sans offrir la moindre preuve, d’un grand nombre de britanniques blancs qui seraient «leurrés» et enrôlés par des groupes terroristes islamiques, et des sources de Whitehall prétendent que des sympathisants de al-Qaïda auraient cherché à infiltrer MI5.

L’hystérie qui caractérise la plupart des ces proclamations ne vise pas seulement à tromper le public. La manière dont la menace terroriste est devenue synonyme de toute forme d’opposition sociale et politique laisse entrevoir une élite dirigeante qui est profondément désorientée, et se sent isolée et assiégée de toutes parts par des ennemis.

Le gouvernement Blair applique une politique qui est diamétralement opposée aux intérêts des grandes masses de la population. Agissant au nom d’une oligarchie financière, il s’est aligné sur les États-Unis dans une campagne de pillage colonial visant à assurer une hégémonie sur les ressources vitales et les marchés mondiaux. Dans sa politique intérieure, il a entrepris d’éliminer des clauses sociales qui sont considérées par ses patrons comme un fardeau inacceptable sur les profits, facilitant ainsi une redistribution de la richesse de la population laborieuse vers les riches qui a résulté en une polarisation sociale historiquement sans précédent.

Incapable de tolérer le moindre recul sur sa politique d’imposer les diktats de la grande entreprise, la seule réponse du gouvernement à l’opposition montante sera de recourir à d’autres provocations et attaques sur les droits démocratiques.

Tous les rapports officiels soulignent maintenant que la menace terroriste est «interne», ce qui implique la nécessité de plus de répression dans le pays. Dans cette optique, le ministre des Finances Gordon Brown a annoncé que £40 millions additionnels seraient mis à la disposition des services de renseignement pour développer «de nouvelles capacités précises», ce qui amène leur budget à plus de £1,6 milliard. MI5 a entrepris une campagne massive de recrutement, visant à doubler le nombre de ses employés à 3.500, et s’apprête à mettre en place huit bureaux régionaux à travers le pays dans son plus grand déploiement en temps de paix à l’extérieur de la capitale.

Il ne peut être exclu que la Grande-Bretagne soit la cible d’une autre attaque terroriste. Les travailleurs ne doivent toutefois pas laisser le gouvernement rallier de force l’opinion publique à son agenda anti-démocratique en utilisant une menace alimentée par sa propre politique. Ils doivent plutôt lancer la construction d’un mouvement politique et social de masse apte à lier l’opposition à la guerre impérialiste à la défense des droits démocratiques. Ceci doit être fait dans la lutte contre le système de profit qui est la source du militarisme, de la guerre et des inégalités sociales.

 

 

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