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Les actes d’Israël à Gaza et en Cisjordanie constituent des crimes de guerre.
Peu sont ceux qui croient encore que Tel Aviv se préoccupe sérieusement d’assurer la libération du caporal Gilad Shalit. Plutôt, comme l’a déclaré mardi le premier ministre Ehud Olmert, Israël mène «une guerre de longue haleine» visant à détruire ce qui reste de l’infrastructure politique de l’Autorité palestinienne afin de provoquer un changement de régime.
Déclencher une telle guerre d’agression constitue un «crime contre la paix» selon les Principes de Nuremberg, formulés à la suite de la 2e Guerre mondiale durant les procès des membres du Parti nazi afin d’établir ce qu’était un crime de guerre, et incorporés ensuite dans la Charte des Nation unies. Ce crime est aggravé par le caractère grotesquement inégal du conflit qui se déroule actuellement, Israël profitant d’une supériorité militaire écrasante.
Israël compte arrêter et emprisonner les plus importants parlementaires palestiniens. Il a bombardé les bureaux du premier ministre Ismail Haniya et menacé d’assassiner le chef politique du Hamas, Khaled Meshaal, ainsi que d’autres qui sont exilés à Damas.
Faisant référence à l’arrestation d’au moins un tiers du cabinet palestinien et de dizaines de députés du Hamas, le ministre de la Défense d’Israël, et chef du Parti travailliste, Amir Peretz a déclaré : «La mascarade est terminée... Les complets et les cravates ne pourront plus cacher l’implication et l’aide aux kidnappings et au terrorisme.»
La politique de changement de régime d’Israël ne se limite pas qu’à la Palestine. La Syrie est aussi une cible. Dans un geste délibéré de provocation, quatre chasseurs israéliens ont volé tout près du palais d’été du président Bashar Al-Assad alors qu’il s’y trouvait. Olmert a affirmé que la solution pour résoudre la crise se trouvait en Syrie, accusant Damas d’avoir ordonné les récentes attaques sur Israël. Le vice-premier ministre Shimon Peres a insisté pour que Assad expulse ce qu’il affirme être un «appareil terroriste» oeuvrant à partir de la Syrie.
Tel Aviv compte enfoncer les Palestiniens dans la misère noire afin d’éradiquer toute volonté de résister à ses ordres. À cette fin, l’incursion dans Gaza a créé l’occasion de punitions collectives, une pratique associée encore une fois aux SS nazis et à la Wehrmacht, et identifiée explicitement comme crime de guerre et bannie sous les Conventions de Genève.
Lors de la présente offensive, la première action entreprise par Israël fut de détruire la seule centrale énergétique de Gaza, privant ainsi d’électricité près de 50 pour cent des résidents de Gaza, à un moment où les températures avoisinent les 35 degrés. Depuis, Israël a continué de bombarder les infrastructures civiles, y compris les ponts, les routes, une université et une institution caritative. Chaque nuit, des chasseurs passent au-dessus de Gaza City et d’autres grands centres populeux, causant des bangs supersoniques et faisant voler des fenêtres en éclats. Olmert a déclaré : «Je prends la responsabilité personnelle pour ce qui arrive à Gaza. La nuit, je ne veux que personne ne dorme à Gaza.»
Ces mesures punitives sont dirigées contre un peuple qui a déjà horriblement souffert à cause d’un blocus économique et militaire qui dure depuis des mois. La Bande de Gaza abrite un million et demi de personnes et constitue l’une des régions les plus densément peuplées de la terre. La plupart d’entre elles sont des réfugiés qui vivent toujours dans huit camps administrés par l’ONU et dépourvus de l’infrastructure la plus élémentaire. Depuis cinq mois, Israël, avec l’appui des grandes puissances, a fermé les frontières autour de Gaza et a refusé de lui payer des impôts. Conséquemment, des centaines de milliers de personnes étaient presque dans une situation de famine avant même que les présentes hostilités ne débutent.
Le programme politique et militaire d’Israël est si évident que plusieurs commentateurs ont été forcés d’exprimer leur désaccord avec les affirmations habituelles des médias selon lesquelles l’attaque sur Gaza aurait pour but de libérer le soldat capturé.
Le 1er juillet, on pouvait lire en une du Financial Times : «Le nouveau gouvernement israélien de Ehud Olmert affirme que son unique objectif est d’assurer la libération du caporal Gilad Shalit, capturé dimanche dernier lors d’un assaut sur un poste militaire israélien par des militants palestiniens. Mais la disproportion entre les moyens et les fins suggère que ceci pourrait être un prétexte... [Olmert] a été élu sous l’engagement de créer unilatéralement de nouvelles frontières pour un État israélien élargi, en annexant de larges bandes des Territoire occupés sur lesquelles les Palestiniens espéraient bâtir leur État indépendant. Faire accepter cette saisie de territoire dépendra de la crédibilité du gouvernement israélien lorsqu’il allègue que la Palestine ne veut pas discuter et qu’il doit donc agir pour préserver sa sécurité.»
Will Hutton a écrit dans l’Observer, «L’interprétation sombre de la réaction de l’Israël à Gaza est qu’il ne veut pas de partenaire de négociation politiquement viable en Palestine. La caractérisation le Hamas comme étant des terroristes fondamentalistes inacceptables fait l’affaire de l’Israël. Ainsi, il peut aller de l’avant unilatéralement avec les colonies, le mur et l’annexion de territoire, ce qui attise en retour les flammes de l’extrémisme palestinien.»
Shimon Schiffer a écrit dans Yediot Ahronot, «Ce que nous avons ici, ce n’est pas une tentative de sauver le caporal Shalit et de le ramener sain et sauf à sa famille, ni une tentative d’arrêter l’utilisation de fusées Qassam, mais une action qui a pour but de détruire le gouvernement Hamas…»
Le procès-verbal des négociations de la semaine dernière entre le président Mahmoud Abbas et les dirigeants de factions du Hamas, du Jihad islamique, le Front populaire de libération de la Palestine et le Front démocratique de libération de la Palestine, publiées dans Ha’aretz, viennent aussi confirmer que l’assaut sur Gaza avait pour but de prévenir que les groupes islamiques s’entendent pour reconnaître Israël.
Abbas a décrit la «feuille de route» élaborée par les États-Unis, l’Europe, la Russie et les Nations Unies comme une «bouée de sauvetage». Personne ne peut faire pression sur les Israéliens, «sauf les Américains» et aucune autre voie n’est possible, a-t-il insisté, ajoutant que les institutions de l’Autorité palestinienne à Gaza «sont détruites à 75 pour cent, alors qu’en Cisjordanie, elles le sont complètement».
C’est ce que le Hamas et le Jihad islamique ont signé le jour où l’Israël a envahi Gaza. C’était une tentative désespérée de la part d’un régime sur le point de s’effondrer de courtiser Bush pour convaincre les États-Unis de maîtriser leur client régional. Mais Tel-Aviv ne voulait pas une capitulation de la part du Hamas car cela l’aurait privé de son prétexte pour mener sa campagne contre l’Autorité palestinienne. Il a organisé un bombardement de Gaza à la roquette dans le but de provoquer un geste de défiance qui fournirait le prétexte pour une invasion à grande échelle. Son souhait s’est réalisé avec le raid à la frontière par des commandos palestiniens et la capture du caporal Shalit.
Ces faits sont internationalement connus dans les cercles dirigeants. De plus, les attaques de l’Israël sont menées contre un gouvernement qui a été élu par la population en janvier par un processus sur lequel a insisté le quatuor des États-Unis, de l’Union européenne, de la Russie et des Nations Unies. Et malgré cela, après une offensive qui dure depuis une semaine et qui menace de terminer dans un bain de sang, aucun gouvernement occidental n’a émis la moindre protestation si n’est, pour la forme, d’appeler l’Israël à se restreindre.
Il en est ainsi parce que l’offensive de Gaza a l’appui entier de Washington.
Dans une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU le 30 juin, les États-Unis ont bloqué une résolution critiquant l’Israël. L’ambassadeur américain aux Nations Unies John Bolton a dit que le Conseil de sécurité devrait «éviter de prendre des initiatives qui pourraient exacerber les tensions de façon inattendue dans la région» et a insisté pour que la libération de Shalit était «la meilleure solution de résoudre la crise actuelle». La réunion a été pour lui l’occasion de faire monter la pression sur la Syrie et l’Iran, demandant que les deux «mettent fin à leur rôle en tant qu’États finançant le terrorisme et qu’ils condamnent sans équivoque les actions du Hamas, y compris cet enlèvement».
L’administration Bush a initialement jonglé avec la possibilité d’une entente négociée, acceptant un État palestinien dans une partie des territoires occupés dans le but d’apaiser ses alliés arabes et de leur faciliter politiquement la tâche de continuer à appuyer l’invasion de l’Irak malgré l’opposition populaire intérieure. Toutefois, au printemps dernier, avec l’intention des Américains de consolider leur emprise sur le Moyen-Orient, le premier ministre Ariel Sharon a pu obtenir l’appui de Bush pour son plan de dessiner les frontières israéliennes de façon unilatérale. Le successeur de Sharon, Olmert, sait qu’il a carte blanche à Gaza et en Cisjordanie et que les États-Unis accueillent également l’augmentation des tensions avec Damas.
Les puissances européennes sont inquiètes que les actions israéliennes menacent de déstabiliser le Moyen-Orient. Mais, elles ne sont pas prêtes à considérer une confrontation directe avec Washington dans le but de les empêcher.
Plus fondamentalement, le silence de fait des principales puissances mondiales montre combien les normes fondamentales de droit international ont été universellement abandonnées depuis la guerre lancée par les États-Unis contre l’Irak.
Il n’y a rien que l’Israël fait à Gaza qui n’ait pas déjà été réalisé en Irak par les États-Unis et son principal allié, l’Angleterre. Là aussi, la guerre a été déclarée sur la base d’un prétexte manufacturé. Et Washington a même moins de réticences à professer ouvertement un changement de régime en violation du droit international. Comme le montre l’assaut meurtrier des États-Unis sur Fallujah, la punition collective subséquemment infligée au peuple irakien pour avoir osé résister à l’occupation a été aussi brutale et obscène que celle maintenant imposée aux Palestiniens.
Sur cette question, l’administration Bush agit comme défricheur et trace une voie qu’empruntent toutes les puissances impérialistes.
L’Union européenne a cherché à garder une certaine distance vis-à-vis des États-Unis sur la question de l’Irak et a demandé que l’on continue de respecter la loi internationale et les institutions multilatérales. Mais à part la participation militaire directe, les puissantes européennes ont fait leur possible pour faciliter l’attaque contre Bagdad et ont par la suite appuyé l’occupation américaine.
Quelques mois à peine après la guerre, le Conseil de sécurité de l’ONU a cautionné l’invasion et accordé aux forces d’occupation un contrôle illimité sur les richesses pétrolières du pays. En fait, le vote presque unanime a justifié non seulement l’asservissement colonial de l’Irak, mais aussi de futures guerres d’agression.
Avant l’Irak, la principale critique adressée par les puissances européennes aux États-Unis visait surtout sa doctrine de la guerre «préventive». Mais le projet subséquent de constitution européenne – qui a échoué uniquement à cause de votes massifs pour le Non dans des référendums en France et aux Pays-Bas – préconisait la guerre préventive en tant que doctrine militaire de l’Union européenne.
Cette descente dans l’illégalité comprend l’acquiescement des puissances européennes devant les abus commis à Guantanamo et Abou Graïb, et la complicité dans les restitutions de la CIA. Elle façonne également l’agenda politique au sein même de l’Europe. Toutes les mesures attaquant les droits démocratiques dont les États-Unis se sont fait les pionniers dans la soi-disant «guerre à la terreur» ont été adoptées par les grandes puissances – la détention arbitraire, la surveillance étatique et la criminalisation de toute dissidence politique.
La tragédie qui s’abat sur les Palestiniens est peut-être l’exemple le plus éloquent de la complicité entre les États-Unis et les gouvernements européens.
Les États-Unis financent la machine de guerre israélienne, tandis que l’Europe accepte de renflouer l’Autorité palestinienne – pourvu que celle-ci abandonne toute résistance à l’occupation. C’est l’essence de la «feuille de route» acceptée par le Quartet. Lorsque Tel Aviv utilisa l’élection du Hamas à la tête de l’Autorité palestinienne pour exiger un blocus économique, tant Bruxelles que Washington l’ont soutenu.
On ne peut opposer à l’offensive d’Israël à Gaza des appels à la «communauté internationale» comme le fait à présent l’Autorité palestinienne. Des puissances qui cherchent elles-mêmes à légitimer un retour aux guerres de conquête coloniale et à l’installation de régimes fantoches ne peuvent protester trop fort quand des crimes semblables sont commis par Israël. Il faut plutôt la mobilisation politique des travailleurs, des jeunes et des intellectuels sur la base d’un programme socialiste et internationaliste qui place l’opposition au sionisme dans la perspective plus large de libérer le Moyen-Orient de la domination impérialiste.
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