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L'hypocrisie de Bush et de Clinton lors des obsèques de Coretta Scott King

Par Jerry Isaacs
Le 8 février 2006

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Les obsèques de Coretta Scott King, la veuve de Martin Luther King, le leader assassiné du mouvement des droits civiques, eurent lieu mardi à Atlanta. Les jours précédents, plus de 157.000 personnes étaient venues rendre hommage à Mme King, décédée le 30 janvier d'un cancer, à l'âge de 78 ans.

La mort de Coretta Scott King suscita une vague de sympathie populaire parmi tous ceux qui voyaient en elle et son mari les représentants de la lutte pour l'égalité sociale et la justice animant le mouvement de masse contre les lois ségrégationnistes « Jim Crow » aux Etats-Unis. Sa mort provoqua également des démonstrations d'hypocrisie en masse de la part de personnalités influentes des deux partis politiques, y compris le président Bush et trois de ses prédécesseurs, qui vinrent assister aux obsèques.

Il fut impossible d'écouter leurs déclarations sans remarquer que Martin Luther King était opposé à presque tout ce qu'ils représentent. De Carter et de l'ex-président Bush à Clinton et jusqu'à l'actuel occupant de la Maison Blanche, tous présidèrent à d'énormes atteintes aux droits civiques, à la montée de la précarité et de inégalité, ainsi qu'à une véritable explosion du militarisme américain partout dans le monde. Il est bon quant à cela, de rappeler que King fut tué en 1968 au moment où commençait son opposition au Parti démocrate sur la question de la guerre du Vietnam.

La présence de George W. Bush à la cérémonie fut particulièrement grotesque. La carrière du président est étroitement liée à ceux qui s'opposèrent au mouvement des droits civiques, parmi lesquels son propre père. Au cours de son infructueuse campagne électorale pour le Sénat en 1964, George Herbert Walker Bush s'était opposé à la Loi des Droits Civiques adoptée la même année, qualifiant le sénateur démocrate du Texas, Ralph Yarborough, « d'extrémiste » et de « démagogue de gauche » pour son soutien à la loi fédérale qui rendait la ségrégation raciale illégale.

Le Parti républicain actuel est le produit d'un appel délibéré au vote ségrégationniste durant les années 1960, après que la direction nationale du Parti démocrate-longtemps le parti des ségrégationnistes dans le Sud des Etats-Unis- ait commencé à soutenir les lois en faveur des droits civiques. Des personnages très en vue dans le Parti républicain d'aujourd'hui, tel l'ancien membre du Congrès Bob Barr, de Géorgie et l'ancien leader de la majorité au Sénat, Trent Lott, du Mississippi, sont étroitement et ouvertement liés à des organisations suprémacistes blanches tel le Conseil des Citoyens Conservateurs.

Bush, dont la totale indifférence quant aux conditions de vie de la classe ouvrière, en particulier celles des Afro-américains pauvres, affichée à la face du monde au moment de l'ouragan Katrina, est en train de démanteler systématiquement aux Etats-Unis le peu qui reste encre du filet social, y compris Medicare (pour les personnes âgées et les handicapés), Medicaid (pour les pauvres), l'éducation nationale et le logement public. De plus, au moment même où il se référe aux « mots brutaux », aux « attentats » et autres menaces que Coretta Scott King et sa famille ont enduré, il mène une campagne d'espionnage illégal des citoyens américains qui n'a rien à envier à la surveillance à laquelle le FBI s'était livré il y a quarante ans à l'égard de King et d'autres militants du mouvement des droits civiques.

Une semaine avant les funérailles, Bush n'avait pas même l'intention d'y assister. Il prévoyait d'y envoyer sa femme et son père, l'ancien président, pendant qu'il tiendrait un discours au New Hampshire sur ses projets de coupes budgétaires. Les conseillers du président semblent l'avoir convaincu qu'il servirait mieux sa cause politique en y assistant, et ce d'autant plus que le soutien minime dont il jouissait parmi les électeurs noirs a chuté dramatiquement après l'ouragan Katrina. Le fait que ce soit un pasteur noir étroitement lié à la Maison Blanche qui dirigea la cérémonie facilita les choses.

Les déclarations faites par Bush et son père ne le furent que pour la forme et toute l'assistance était consciente de l'hypocrisie de l'effort fait pour s'identifier à l'héritage de King.

Des funérailles ne sont pas le cadre adéquat pour faire une évaluation franche et objective des changements survenus aux Etats-Unis depuis l'assassinat de Martin Luther King ou du sort du mouvement des droits civiques avec lequel on l'a identifié, lui et sa veuve. Toujours-est-il, qu'il fut impossible de cacher la profondeur du fossé existant entre le mode de vie des personnalités privilégiées présentes à la cérémonie et les grandes masses de la population noire et ouvrière. En dépit de tous les hommages hypocrites rendus à la lutte pour les droits civiques d'il y a quatre décennies, on avait le sentiment manifeste, en regardant cette cérémonie, que les idéaux pour lesquels King avait lutté avaient été trahis par le chemin pris par les Etats-Unis depuis 1968.

Le co-fondateur du Southern Christian Leadership Council, le révérend Joseph Lowrey, tout comme d'autres, notèrent que Coretta Scott King s'était publiquement opposée à la guerre en Iraq, dont le déclenchement, rappela-t-il, fut basé sur le mensonge. Se référant clairement à l'attaque de Bush contre les libertés civiques, l'ancien président Jimmy Carter nota que les King furent « mis secrètement sur écoute» et que le « couleur de la peau » des victimes de l'ouragan Katrina avait prouvé que la lutte pour les droits civiques n'avait pas été achevée.

Les tensions politiques sous-jacentes au sein de l'élite dirigeante devinrent visibles quand Carter refusa de serrer la main du président républicain.

Cependant, les efforts entrepris par les démocrates pour revêtir le manteau du mouvement pour les droits civiques manquaient tout autant de sincérité que ceux entrepris par Bush. La capitulation des démocrates face à l'administration Bush en ce qui concerne maintes questions, allant de la guerre en Iraq et l'espionnage gouvernemental jusqu'à la nomination de juges de droite à la Cour Suprême, est en fin de compte l'expression du fait que ce parti défend les intérêts de la même élite financière que les républicains.

L'ancien président Clinton nota que quatre jours seulement après l'assassinat de son mari, Coretta Scott King se rendit à Memphis pour apporter son soutien à la lutte des éboueurs en grève, lutte que son mari avait soutenue au moment où il fut tué. A l'époque, elle avait insisté que le « droit à l'emploi et au salaire » était le seul moyen pour accéder, aux Etats-Unis, aux droits « à la vie, à la liberté et au bonheur .»

Mais, de nos jours, les démocrates, au même titre que les républicains, sont totalement hostiles à la lutte de la classe ouvrière pour l'obtention de tels droits fondamentaux. Il y a tout juste deux mois, l'ensemble de l'establishment politique accusait les travailleurs des transports publics de la ville de New York d'être des « égoïstes » et des « voyous » pour oser se mettre en grève en défense de leurs droits aux soins médicaux et à la retraite., Hillary Clinton, le sénateur de New York, qui avait pris la parole au côté de son mari lors des funérailles, avait à l'époque qualifié la grève d'illégale en soutenant la loi Taylor, loi anti-ouvrière de l'Etat de New-York imposant à chaque travailleur des amendes s'élevant à des milliers de dollars par jour de grève.

Le président Clinton dont la « réforme de l'aide sociale » eut des conséquences dévastatrices en supprimant la garantie d'un salaire minimum à des millions de pauvres, y compris des Afro-américains, incarnait le virage à droite du Parti démocrate au cours de ces dernières décennies et sa répudiation des réformes sociales d'antan.

Au cours de ces dernières quarante années on assista à une polarisation sociale énorme aux Etats-Unis qui affecte l'ensemble de l'élite politique dirigeante, unie dans ses efforts pour enrichir encore davantage les couches les plus riches de la société américaine.

Ce processus eut également des conséquences graves pour le mouvement pour les droits civiques lancé par King. Ce mouvement-qui ne mit jamais en cause les raisons sous-jacentes à l'inégalité, c'est-à-dire, le système capitaliste lui-même-eut pour résultat d'engendrer une couche privilégiée d'Afro-américains par le biais de programmes telle l'« Action affirmative », sans vraiment améliorer les conditions de la plupart des travailleurs et des jeunes noirs.

La lutte contre la discrimination raciale est directement liée à la grande question sociale des Etats-Unis: la division de la société en deux classes dont les intérêts sont opposés d'une manière irréconciliable. La garantie d'une égalité véritable et des droits démocratiques nécessite une réorganisation fondamentale de la vie économique pour satisfaire les besoins de la majorité des travailleurs et non ceux d'une riche minorité.


 

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