La version originale de cet article a
été publiée le vendredi 1er décembre, avant l’élection du nouveau chef du Parti
libéral, Stéphane Dion.
Ce week-end, le congrès du Parti libéral du
Canada (PLC) à Montréal choisira le nouveau dirigeant de l’opposition officielle
au Parlement et possiblement le prochain premier ministre du pays.
Le congrès a été dominé par les grandes
manœuvres déployées pour gagner l’appui des délégués, aucun des huit candidats n’ayant
réussi à obtenir l’appui de la majorité de l’establishment du parti, des
députés ou du membership déclinant, ne parlons pas du soutien des grands
médias. Une course qui au départ était caractérisée par des débats affables et
ennuyeux est devenue très disputée au cours des dernières semaines avec de durs
échanges et des critiques acerbes.
Les quatre candidats qui ont obtenu l’appui
de 15 à 30 pour cent de la délégation (il y a aussi quelques centaines de
délégués nommés d’office) ont tous une véritable chance de gagner la course
pour succéder à Paul Martin, le précédent chef du PLC qui fut premier ministre
du Canada de décembre 2003 à février 2006.
Significativement, un seul des quatre faisait
partie du gouvernement libéral qui était au pouvoir jusqu’à récemment et deux
des principaux candidats ne sont actifs dans le PLC que depuis peu.
Les quatre sont l’universitaire et
« penseur libéral » Michael Ignatieff, l’ancien premier ministre
ontarien du Nouveau Parti démocratique, Bob Rae, l’ancien ministre de l’Education
du gouvernement libéral ontarien, Gerard Kennedy et l’ancien ministre fédéral
libéral, Stéphane Dion.
Etant donné que la course est si serrée, l’élection
pourrait facilement prendre la forme d’une lutte pour gagner l’appui des
délégués au troisième ou au quatrième tour.
Que la course au leadership demeure si
volatile alors qu’elle entre dans le dernier droit ce week-end est une
réflexion des profondes divisions au sein du Parti libéral. Ces divisions ont
peu à voir avec les questions de politique. Il y a unanimité parmi le groupe
des candidats sur la nécessité de lois anti-terroristes omnibus qui attaquent
les droits démocratiques fondamentaux; de coupes dans les programmes sociaux et
les services publics pour que le gouvernement puisse repayer sa dette et
réduire encore plus la charge fiscale de la grande entreprise et des riches; d’accroître
les dépenses militaires; et de prolonger l’intervention des Forces armées
canadiennes en Afghanistan.
Les différends portent plutôt sur la façon
de refaçonner l’image publique du PLC, un parti qui s’est décrit comme le
défenseur des services publics et des programmes sociaux et est identifié à la
tradition canadienne des soi-disant « soldats de la paix » en mission
à travers le monde, de façon à regagner la confiance et la faveur des sections
les plus importantes de la grande entreprise, tout en élargissant au même
moment la base électorale du parti.
La grande entreprise a envoyé un message
clair en appuyant sans ambiguïté le rejet par le gouvernement conservateur du minimal
programme national de garderies et en soutenant avec enthousiasme la tentative
des conservateurs d’utiliser l’intervention des Forces armées canadiennes en
Afghanistan pour habituer la population à la participation canadienne dans les
guerres à l’étranger qu’elle s’attendait à ce que les libéraux aillent encore
plus à droite.
L’évolution
du parti traditionnel du pouvoir au Canada
La bourgeoisie canadienne au vingtième
siècle a considéré les libéraux comme son principal et préféré parti pour
former le gouvernement, à cause de la capacité de ceux-ci à se présenter comme
le parti de « tous les Canadiens », y compris la minorité francophone
et les immigrants et à s’inspirer des politiques de la bureaucratie syndicale
et des sociaux-démocrates et de gagner leur appui, tout ceci avec l’objectif de
former un « consensus national » sur le programme de la grande
entreprise.
Au cours du boum d’après-guerre, c’est-à-dire
dans les décennies qui ont immédiatement suivi la Deuxième Guerre mondiale, les
libéraux ont avancé (tout comme les progressistes-conservateurs) une politique
de réformes sociales limitées dans le cadre de politiques économiques keynésiennes,
qui cherchait un compromis de classe relatif en mitigeant le cycle des affaires
et en cherchant à créer le plein emploi. Toutefois, à la fin des années 1960,
alors que le boum cédait le pas à une série de crises économiques, cette
politique est devenue de plus en plus impossible à maintenir. Le gouvernement
libéral de Pierre Trudeau est entré en conflit avec une classe ouvrière de plus
en plus combative.
Sous Trudeau, les libéraux ont mis en
place, en l’appelant contrôle des prix et des salaires, un programme de trois
ans de diminutions des salaires et ensuite, au début des années 1980, un
programme plus limité de contrôle des salaires dans le secteur public. En 1978,
trois avant que le président américain Ronald Reagan eût congédié les
contrôleurs aériens, Trudeau a menacé de congédier les postiers en grève en
masse s’ils ne se soumettaient pas à une loi de retour au travail qu’avait
votée le gouvernement.
Trudeau a aussi invoqué la Loi des mesures
de guerre en prétextant combattre les terroristes du Front de libération du
Québec. Le dernier acte du gouvernement libéral des années 1980-84 a été de
voter une loi établissant le Service canadien du renseignement de sécurité
(SCRS) avec le pouvoir de réaliser plusieurs des actes que son prédécesseur, la
Gendarmerie royale du Canada, avait dû commettre en contravention avec la loi.
De retour au pouvoir en 1993 après avoir
promis de mettre fin à la fixation des conservateurs envers le déficit
budgétaire du gouvernement, d’annuler la Taxe sur les produits et les services,
un impôt régressif, et de renégocier l’accord sur le libre-échange d’Amérique
du Nord (ALENA), les libéraux ont rapidement adopté le programme de leurs
prédécesseurs conservateurs dans son ensemble. Ensuite en 1995, les libéraux
ont lancé la plus grande campagne de compressions budgétaires publiques de l’histoire
canadienne qui fut suivie cinq ans plus tard par des diminutions d’impôts records.
Et en réponse à l’arrivée au pouvoir de l’administration Bush et à la
proclamation par Washington d’une guerre mondiale au terrorisme, les libéraux
ont fait du Canada le partenaire des Américains pour la conquête de l’Afghanistan
et ont voté une série de lois anti-terroristes qui renversaient des principes
démocratiques et juridiques en vigueur depuis longtemps.
Le gouvernement libéral de Jean Chrétien et
Paul Martin au pouvoir de 1993 à 2006 a été, et de loin, le gouvernement le
plus à droite de l’histoire canadienne moderne. Et pourtant, la grande
entreprise est devenue de plus en plus impatiente envers les libéraux parce
que, selon elle, ils n’imposaient pas avec suffisamment de vigueur les privatisations,
les déréglementations, le démantèlement des services publics et sociaux et les
diminutions d’impôts et qu’ils irritaient inutilement Washington.
Dans l’élection de janvier présentée par
les médias presque entièrement en termes de corruption des libéraux, ces
derniers ont été remplacés par le gouvernement minoritaire actuel dirigé par
Stephen Harper et ses conservateurs, un nouveau parti formé d’un amalgame du
vieux Parti progressiste-conservateur et du parti populiste de droite, l’Alliance
canadienne.
Du point de vue de la classe dirigeante
canadienne, chacun des candidats à la direction libérale est inadéquat, soit parce
qu’il n’était pas assez connu, soit parce qu’il était un électron libre, soit parce
qu’il était trop associé à la rhétorique libérale en faveur de l’Etat-providence,
soit parce qu’il n’avait pas la personnalité pour arriver à convaincre un
nombre suffisant d’électeurs que le Parti libéral est un parti pour le peuple.
Mais la grande entreprise et ses médias ont
aussi reconnu que le gouvernement minoritaire de Stephen Harper est très faible
et que son pouvoir n’est pas solide.
N’ayant obtenu que 36 pour cent du vote
exprimé lors des dernières élections de janvier, les conservateurs ont le plus faible
mandat populaire de l’histoire canadienne. Malgré une couverture de presse
flatteuse et les tentatives concertées des médias de faire appel au patriotisme
sur la question de l’intervention canadienne en Afghanistan, les sondages
montrent que l’appui aux conservateurs n’a pas augmenté au cours des dix mois
où ils ont été au pouvoir. De plus, les masses des Canadiens sont en colère de
voir l’appui soumis des conservateurs à l’administration Bush, sans compter la
colère envers leur vision rétrograde et conservatrice sur les questions
sociales, telles l’avortement et les droits des homosexuels.
Alors qu’une élection fédérale est très
possible au printemps 2007 et très certainement certaine au cours des 18
prochains mois, le choix d’un chef libéral n’est pas une question sans
importance pour l’élite canadienne. Une large couverture médiatique sur la
course à la direction a été accompagnée d’une pile d’éditoriaux signalant à l’opposition
officielle que les « temps avaient changé », qu’il n’y avait pas de
soutien « au pays », c.-à-d. dans les conseils d’administration des
grandes entreprises de tout le pays, pour les solutions avec de « gros
gouvernements », que le libéralisme doit être « repensé » pour
un 21e siècle caractérisé par la montée de la Chine, de l’Inde et d’autres
menaces aux marchés et aux profits de l’entreprise canadienne et par la
« guerre à la terreur ».
Un apologiste de la guerre et de
la torture
Peu importe le résultat de la course au leadership du Parti libéral, l’émergence
de Michael Ignatieff en tant que force dirigeante du Parti libéral — il se
présente au congrès comme favori — en dit long sur l’orientation qu’est en
train de prendre le Parti libéral.
Ignatieff, qui a enseigné à Oxford et Harvard et qui a publié plusieurs
romans et ouvrages théoriques, dont une biographie du philosophe politique
libéral britannique et anti-marxiste Isaiah Berlin, a été louangé par les
médias et ses partisans libéraux comme étant un géant intellectuel.
Pour sa part, Ignatieff a revendiqué la direction du Parti libéral en
mettant de l’avant ses qualités d’expert des droits humains et défenseur de la
justice sociale et des droits des minorités.
La réalité est toute autre. Non seulement Ignatieff est-il le candidat à la
direction du Parti libéral qui a exprimé le plus ouvertement son appui à la
participation canadienne à la contre-insurrection de type colonial en
Afghanistan, mais il a aussi joué un rôle majeur internationalement en
fournissant une couverture libérale philosophique à l’impérialisme. Dans des
articles,des livres et des entrevues, il a justifié les guerres d’agression de
l’administration Bush, y compris l’invasion et l’occupation illégales de l’Irak,
et a défendu la suppression des libertés civiles et l’utilisation de la torture
pour lutter contre le terrorisme.
Ignatieff a émergé en 1999 en tant qu’apologiste de la guerre des Etats-Unis
et de l’OTAN dans les Balkans, appuyant les allégations de génocide serbe au
Kosovo dans les pages du New York Times. Ses prises de position et ses
écrits depuis ce temps — incluant son ouvrage honteusement hypocrite The
Lesser Evil : Political Ethics in the Age of Terror — ont fait de lui
un candidat potentiel au leadership aux yeux de la bourgeoisie canadienne alors
qu’elle tente de revendiquer sa place dans la recolonisation du monde.
En vue de le préparer à remplacer l’hésitant Paul Martin, d’importants
libéraux ont amadoué Ignatieff, qui avait passé la plus grande partie des trois
dernières décennies à l’étranger, pour qu’il revienne au Canada en 2005.
Mais la barbarie de l’occupation américaine — une récente étude a démontré
que l’invasion a été responsable de plus de 600 000 morts — et le flagrant
fiasco de la tentative de l’administration Bush de défendre la position
géopolitique mondiale des Etats-Unis par la guerre, ont fait qu’Ignatieff tente
maintenant de fuir son rôle dans le rassemblement de l’appui libéral pour le
viol de l’Irak.
Ignatieff a tenté de justifier son appui pour la guerre en Irak en soutenant
qu’il a été révolté par l’oppression des minorités kurdes et chiites par le
régime de Hussein et il a essayé de se distancer de l’horreur qu’est
actuellement l’Irak en affirmant ne pas avoir réalisé que la guerre pouvait
être menée de si mauvaise façon : « Georges Bush a fait toutes les
erreurs possibles et inimaginables en Irak. »
Ignatieff se présente au congrès avec un appui de 30 pour cent des délégués.
Quelques mois plus tôt, il était le favori, pour ne pas dire le seul favori, à
la direction du Parti libéral. Mais il été attaqué pour son manque d’expérience
politique, après avoir fait ce qui a été qualifié hypocritement de
« gaffes politiques » par la presse.
Expliquant sa position sur le bombardement par Israël de civils du village
libanais de Qana en août dernier, Ignatieff a brutalement dit : « Ce
n’est pas ce qui va m’empêcher de dormir. » Ignatieff pensait alors sans
aucun doute que son indifférence face à la souffrance humaine allait stimuler
sa campagne en démontrant à l’establishment qu’il n’était pas l’un de ces
libéraux poltrons qui craignent d’employer la force. Mais ses remarques ont
provoqué la colère du grand public, particulièrement au Québec, qui abrite des
dizaines de milliers d’immigrants libanais.
Dans les semaines qui ont suivi, Ignatieff a tenté de renverser l’impression
du public selon laquelle il appuyait totalement, comme Harper, l’agression
israélienne contre le Liban, en déclarant que le bombardement israélien de
civils libanais étaient des crimes de guerre. Ce commentaire a provoqué une
avalanche de réactions défavorables de la presse, beaucoup plus que les
réactions provoquées par ses remarques sur Qana, et les médias ont alors
commencé à l’accuser de « faire volte-face », de « se
prêter aux moindres exigences » et de comparer Israël au Hezbollah.
Tout ceci aurait pu exploser. Mais ce qui a fait que la majorité de l’establishment
libéral et de la grande entreprise a entrepris de réévaluer sérieusement la
candidature d’Ignatieff est son appel à la reconnaissance constitutionnelle du
Québec en tant que « nation » au sein du Canada.
Ignatieff a avancé la reconnaissance de la « nation québécoise »
comme moyen pour renforcer « l’unité canadienne » et l’Etat fédéral.
Mais sa position a peu d’appui au sein de la classe dirigeante canadienne.
Celle-ci craint que la réouverture du débat constitutionnel déstabilise l’Etat
fédéral et que la reconnaissance de la nation québécoise, même si elle n’est
accompagnée d’aucune redistribution des pouvoirs, renforce politiquement et
peut-être légalement les indépendantistes québécois et ceux qui demandent plus
de pouvoirs pour le Québec à l’intérieur de la Confédération.
Bob Rae – un aspirant Tony Blair
Bob Rae, l’ancien premier ministre néo-démocrate de l’Ontario, arrive au
congrès en deuxième place, mais avec 20 pour cent de délégués l’appuyant, il se
retrouve significativement derrière Ignatieff. Dans les derniers jours, Rae a
été capable d’obtenir plusieurs appuis importants. Parmi ceux-ci, il a
obtenu le vote de certains libéraux en colère contre Ignatieff pour « avoir
ouvert la boîte de Pandore de la reconnaissance du Québec en tant que
nation », a indiqué l’ex-ministre des Finances, Ralph Goodale, et le Toronto
Star, le le plus important journal libéral du pays.
Rae a des liens de longue date avec le Parti libéral. Son frère, John Rae,
un des vices-présidents de Power corporation, a longtemps été un des plus
proches conseillers de Chrétien.
Cependant, de 1979 jusqu’à sa retraite de la vie politique en 1995, Bob Rae a
été une figure clé du Nouveau Parti démocratique (NPD), un parti social-démocrate.
De 1990 à 1995, la période à laquelle il était à la tête du seul et unique
gouvernement NPD qu’a eu l’Ontario, il était sans aucun doute le plus puissant social-démocrate
du pays
Elu par les travailleurs qui cherchaient à se protéger contre un
ralentissement économique majeur, le gouvernement NPD de Rae entra en conflit
ouvert avec la classe ouvrière. Il imposa un contrat de travail qui éliminait
des emplois et imposait des diminutions de salaire à plus d’un million de travailleurs
du secteur public, imposa des coupures brutales dans les dépenses sociales et
introduisit le travail obligatoire pour les assistés sociaux. La politique de
droite du NPD ouvrit tout grand la porte du pouvoir au gouvernement
conservateur de Harris, qui accéléra massivement l’assaut contre la classe
ouvrière, au moyen de diminution de taxes tous azimuts, de coupes dans les
programmes sociaux et de l’adoption de lois antisyndicales.
Rae dit maintenant que son gouvernement aurait dû couper beaucoup plus tôt
et plus profondément. Il dénonce son ancien parti pour être coincé dans un
carcan idéologique et condamné à être perpétuellement dans l’opposition – une
caractérisation qui n’a rien à voir avec le NPD. (Le « radicalisme »
du NPD ne dépasse pas les demandes pour de modestes augmentations dans les
dépenses sociales et la fin des diminutions d’impôts.)
Rae a été poussé dans la course à la direction par une section de l’establishment
du Parti libéral qui espèrerait qu’il redonnerait un peu de crédibilité populiste
au Parti libéral durement affectée par ses années au gouvernement. Il est
considéré comme étant un pragmatique consommé et quelqu’un de plus fiable sur
les questions délicates – Rae était un membre de l’agence qui supervise le
travail du SCRS – qu’Ignatieff. Comme un commentateur le disait, certains
libéraux préfèrent les erreurs passées de Rae que les nouvelles d’Ignatieff.
Mais, en conséquence directe de son rôle en tant que premier ministre de
1990 à 1995 à la tête du NPD, Rae n’est pas très populaire en Ontario, la plus importante
province et le siège du plus grand nombre de députés libéraux. La grande
entreprise est toujours hostile à Rae à cause de son association avec le NPD et
que son gouvernement est jugé avoir été trop timide dans son offensive contre
la classe ouvrière.
Kennedy et Dion
Gerard Kennedy espère convaincre le Parti libéral qu’il est le candidat qui
a le plus de chance d’être élu, compte tenu de son jeune âge, sa belle
apparence, son charme et son image progressiste. Il cherche également à gagner
des appuis en appelant au sentiment nationaliste canadien. Il est le seul
candidat dans la course à s’être opposer sans ambiguïté à la reconnaissance du
Québec comme nation, allant même jusqu’à s’opposer à un vote en faveur d’une
motion parlementaire sans réel impact sur cette question.
Kennedy met beaucoup en valeur le fait qu’il a été directeur d’une banque
alimentaire, mais il a également été membre d’un gouvernement libéral en
Ontario qui a laissé intactes les politiques de droite du gouvernement Harris,
incluant les coupes dans l’aide sociale et autres mesures punitives dirigées
contre les pauvres.
Stéphane Dion a terminé quatrième lors du choix des délégués en octobre
dernier, à seulement un point de pourcentage derrière le troisième, Kennedy.
Mais la campagne de Dion a bénéficié d’un bon coup de pouce des grands médias.
Le Globe and Mail, la voix traditionnelle de Bay Street, a endossé la
candidature de Dion.
Un professeur de sciences politiques, Dion a été recruté par le cabinet
libéral après le référendum de 1995 au Québec, pour mener la contre-offensive
fédéraliste. Il a longtemps été salué par l’élite canadienne comme étant l’architecte
de la Loi sur la clarté – une loi antidémocratique qui fait du parlement
canadien le seul arbitre de la légitimité d’un futur référendum québécois et
qui menace le Québec sécessionniste de partition.
Néanmoins, les médias ont prédit que la campagne de Dion ferait long feu à
cause de son manque de charisme. Dion qui a été ministre de l’Environnement la
majeure partie du règne de Martin, a tenté de se présenter comme le candidat de
l’environnement.
La difficulté de l’élite dirigeante à se trouver un dirigeant capable de
rassembler un large appui est une autre indication du fossé qui sépare les
aspirations de l’establishment et celles de la vaste majorité.
Alors que les sections les plus puissantes de la grande entreprise
continuent d’appuyer Harper, comme ils l’ont fait lors des élections de
janvier, ils sont déterminés de remodeler le Parti libéral en un instrument
politique encore plus à droite, afin de s’assurer que derrière la fiction du
choix électoral, leur monopole politique se perpétue.