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Signes de récession aux États-Unis et de ralentissement économique mondial
Par Nick Beams
19 août 2006
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Trois commentaires publiés dans le Financial Times
durant la dernière semaine ont indiqué qu’une récession aux États-Unis était de
plus en plus probable, ce qui aurait d’importantes conséquences pour l’économie
mondiale.
Dans un article publié le 10 août et intitulé « Le
monde doit se préparer à la récession aux États-Unis », l’économiste de
l’Université de New York Nouriel Roubini a fait l’avertissement que, bien que
la Réserve fédérale des États-Unis ait pu avoir espéré un « atterrissage
en douceur » lorsqu’elle a mis un terme à sa série de hausses de taux
d’intérêt, la décision est venue trop tard et la Réserve fait maintenant face à
une récession.
« La récession américaine sera déclenchée par trois
forces irrésistibles : le ralentissement du marché de l’immobilier; les
prix plus élevés du pétrole; et de plus hauts taux d’intérêts. Le consommateur
américain, portant déjà le fardeau d’un endettement élevé et de salaires réels
à la baisse, sera durement frappé par ces chocs, » a-t-il écrit.
Selon Roubini, les effets de la récession dans l’immobilier
seront plus graves que ceux qui ont suivi l’éclatement de la bulle technologique
en 2000. La raison en est que la propriété constitue une part beaucoup plus
grande de la richesse d’un ménage que des actions en technologie et qu’environ
30 pour cent de l’augmentation des emplois aux États-Unis depuis la récession
de 2001 est relié à l’immobilier.
Les dernières statistiques du produit intérieur brut (PIB)
des États-Unis sont un « signe inquiétant », avec la baisse de la
consommation des biens durables, l’investissement résidentiel en « chute
libre », et les inventaires qui augmentent alors que la production fait
face à des ventes en baisse. « L’investissement accru dans des équipements
et logiciels informatiques, supposé compenser les plus faibles dépenses en
immobilier et en consommation, est plutôt en train de diminuer. »
Alors que la Réserve peut essayer de contrer l’impact d’une
récession en abaissant les taux d’intérêt, « la récession dans les marchés
de l’immobilier et de la consommation dominera tout soulagement
monétaire. »
Une récession aux États-Unis s’étendrait internationalement
car « la marge de manoeuvre pour un soulagement monétaire et fiscal est
beaucoup plus limitée maintenant qu’en 2001, lorsque le Groupe des Sept pays
industrialisés ont diminué leurs taux d’intérêts et facilité la politique fiscale.
Il existe maintenant d’importantes limites au soulagement monétaire alors que
l’inflation mondiale est en hausse; et la politique fiscale ne peut être
facilitée car presque tous les pays du G7 font face à de sérieux déséquilibres
fiscaux. »
Des prédictions similaires ont été faites dans un
commentaire de l’économiste en chef de Morgan Stanley, Stephen Roach, publié
lundi. Ce serait une « grave erreur », a-t-il écrit, d’anticiper un
taux de croissance mondiale de 4,8 pour cent pour les trois prochaines années.
« Il est beaucoup plus probable que la croissance mondiale ait atteint un
sommet et que le boum soit à la veille de prendre fin. »
« Le principal moteur de la
croissance mondiale, les États-Unis, est au ralenti. C’est le verdict du marché
de l’emploi, avec une croissance de l’emploi au cours des 4 derniers mois de 35
pour cent en dessous de la moyenne depuis 2004. C’est également le verdict du
marché immobilier, dont la chute qui s’annonce dans la construction
résidentielle a déjà fauché 1 pour cent du PIB de la croissance au cours des 3
dernières années. »
Les changements aux États-Unis ont été déterminants pour
l’économie mondiale, qui est devenue de plus en plus dépendante des dépenses en
consommation comme source finale de la demande. Il est peu probable que
le fossé laissé par un recul dans la consommation aux États-Unis puisse être
comblé. Même si l’on prévoyait une croissance économique dans la zone euro de
2,5 pour cent cette année, la plus élevée depuis 2000, il est peu probable
qu’elle puisse être soutenue et elle pourrait retomber en dessous de 1,5 pour
cent l’an prochain. « L’économie européenne est sur le point de frapper un
‘triple mur’ : un gros resserrement de la politique fiscale, un impact qui
se fait attendre du resserrement monétaire et le poids d’une Euro plus
forte. »
La croissance de l’économie japonaise ne peut combler le fosse
laissé par le ralentissement aux États-Unis. Alors que la croissance devrait
dépasser 2,5 pour cent cette année, il pourrait ralentir à moins de 2 pour cent
en 2007.
Les « deux dynamos » de l’Asie, la Chine et l’Inde,
ne seront pas plus en mesure de contrer cette tendance des principales
économies. La Chine faisant face au risque d’une surchauffe économique, les
autorités financières n’ont guère d’autre choix que d’adopter des mesures
restrictives.
Il devait vraisemblablement y avoir “ une modération dans la
croissance de la Chine débutant en 2007, avec une réduction correspondante dans
sa voracité pour les marchandises. Cela devrait produire une onde à travers les
manufacturiers en Australie, au Canada, au Brésil et en Afrique. » Un
ralentissement en Chine aura également un impact sur les principaux producteurs
de pétrole aussi bien que sur ses fournisseurs asiatiques, tels le Japon, la
Corée et Taiwan.
« Il y a une signification plus profonde au
ralentissement à venir», conclut Roach. « Le boum global des 4 dernières
années n’a jamais été soutenable. Il était soutenu par l’excès du cycle de
liquidité, qui est venu des mesures d’urgence anti-déflationnistes prises par
les grandes banques centrales du monde. La vigueur de la croissance mondiale
qui s’ensuivit était dominée par les consommateurs américains mais la noce
américaine à été payée au prix d’une chute record dans l’épargne personnelle
soutenue par une entrée massive de capitaux et un déficit record du compte
courrant américain. Ce boum reposait précairement sur un déséquilibre global
sans précédent. L’excès de capital acheta du temps pour un monde précaire.
Maintenant que les banques centrales entreprennent de normaliser la politique
monétaire, ce temps est écoulé.»
Autrement dit, l'instabilité sous-jacente à
l'économie mondiale, qui s'est manifestée dans la crise asiatique de 1997-98 et
l'effondrement de la bulle boursière de 2000-2001, pour ensuite reculer
suite à une politique monétaire et du crédit particulièrement souple,
peut bien être sur le point de faire une réapparition.
Dans un commentaire également publié lundi,
le chroniqueur du Financial Times, Wolfgang Munchau, a conclu que
quiconque pensait que l'Europe et l'Asie pourraient prendre la relève en cas
de sérieux ralentissement dans la croissance économique américaine
«voudrait peut-être ajouter que la fée des dents allait passer au cours
de la nuit et laisser des liasses d'argent sous l'oreiller». Loin
d'échapper aux conséquences d'un ralentissement aux États-Unis, la zone
euro pourrait en subir un contre-coup encore plus grave qu'en Amérique.
Alors que les États-Unis ont mis cinq mois
à se remettre de la récession de 2001, a-t-il noté, il a fallu cinq ans à
la zone euro pour revenir au taux de croissance économique d'avant-récession.
Le Japon et la Chine ne sauraient non plus faire office de substituts tant
les deux pays dépendent directement ou indirectement pour leur croissance
économique de la demande des consommateurs américains.
L'ampleur de cette dépendance est indiquée
par les données sur l'exportation. En 2005, 32 pour cent des exportations de
marchandises de la Chine sont allées aux États-Unis, ainsi que 23 pour cent de
celles du Japon et 20 pour cent de celles des 10 pays de l'Association des
nations de l'Asie du sud-est.
Au cours de la dernière décennie, le
taux de croissance économique asiatique a été plus élevé que celui des
États-Unis, mais la part des exportations de la région allant aux États-Unis
est restée la même. Autrement dit, les économies de la région asiatique sont
devenues plus dépendantes de la demande des consommateurs américains. Ceci
signifie que loin d'être en mesure de parer à l'impact de la récession aux États-Unis,
elles en seront sensiblement affectées.
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