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Le conflit au Liban et le point de vue de la classe ouvrière

Par Chris Marsden
11 août 2006

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Voici le rapport présenté par Chris Marsden, secrétaire national du Parti de l’égalité socialiste (Grande-Bretagne), lors de réunions publiques tenues cette semaine et la semaine dernière à Londres et à Manchester.

Je n’ai pas besoin de dresser le terrible portrait de la situation qui se déroule au Liban. Les médias ne peuvent faire autrement que présenter des scènes qui rendent ceci superflu : des scènes de corps mutilés, en majorité des femmes et des enfants, et de villes transformées en décombres. De plus, en tant que lecteurs du World Socialist Web Site, vous êtes bien conscients de la destruction gratuite qu’a infligée Israël au Liban et aux territoires occupés.

La question fondamentale qui doit être clarifiée est comment doit-on s’opposer à tout ceci.

Des millions de personnes en Grande-Bretagne sont dégoûtées par la complicité du gouvernement de Blair, alors que celui-ci se range derrière Washington pour appuyer l’agression israélienne. Des dizaines de milliers de ces personnes se sont réunies samedi dernier à Londres pour exprimer leur opposition et exiger un cessez-le-feu immédiat.

Mais la perspective pour opposer la dévastation du Liban avancée par la Coalition Halte à la guerre (STWC) ne vaut rien. La pièce maîtresse de leur campagne a été d’envoyer une lettre au premier ministre Tony Blair se plaignant de sa « soumission totale à la politique étrangère de l’administration des États-Unis » et du fait que « notre pays est humilié et notre isolement de l’opinion mondiale est mis en évidence encore une fois ».

La lettre se termine par « Nous demandons donc au gouvernement qu’il change sa position et qu’il rejoigne la grande majorité des États du monde, le secrétaire général de l’ONU et l’archevêque de Canterbury dans leur appel à un cessez-le-feu immédiat et inconditionnel au Liban afin de sauver des vies et prévenir la destruction de ce pays. »

À quoi équivaut cet appel et quelles sont les prémisses politiques sur lesquelles il se base?

Essentiellement, il rejette le blâme de la guerre au Liban sur les caprices de l’administration Bush et l’appui de la Grande-Bretagne pour Israël sur les défauts personnels de Blair. Et il soutient que si seulement de plus sages conseils étaient écoutés, comme ceux de Kofi Annan, d’autres dirigeants mondiaux, de personnalités religieuses et de divers politiciens et fonctionnaires britanniques qui ont exprimé leur humiliation nationale, alors la raison serait rétablie.

Le Parti socialiste ouvrier, qui joue le rôle d’aile gauche du mouvement officiel antiguerre, tient essentiellement le même discours. Il feint de présenter une perspective révolutionnaire et anti-impérialiste en « exprimant notre solidarité avec les combattants du Hezbollah et notre espoir... qu’ils réussissent à contrer l’attaque israélienne sur le Liban. »

Mais leur tâche est de bâtir « le plus grand mouvement possible contre cette guerre » sur la base de « l’unité de tous ceux qui s’opposent à l’offensive israélienne, indépendamment des nombreux désaccords politiques qui peuvent exister parmi eux à propos du Moyen-Orient et d’autres questions ».

Malgré les risques du cliché, cela est en effet un cas où l’histoire se répète de manière grotesque. En 2003, la Coalition Halte à la guerre s’est retrouvée à la tête d’un énorme mouvement de millions de personnes et leur a lancé le même message : compter sur les Nations unies, l’Europe, les dissidents du Parti travailliste, les syndicats, les libéraux-démocrates, les chefs chrétiens et musulmans. Ils pouvaient au moins baser leur déclaration sur l’opposition à la guerre déclarée par les grandes puissances européennes comme la France et l’Allemagne, et mentionner les votes de 216 députés, dont 39 dissidents travaillistes, qui s’opposaient à la guerre.

Mais cette opposition a été réduite à presque rien avant même que la guerre ne débute, et par la suite le Trade Union Congress avait décidé de renier le mouvement antiguerre. Le porte-parole de Brendon Barber, le secrétaire général du TUC, avait affirmé qu’il avait refusé une invitation à participer à un rassemblement antiguerre, car il n’était « pas prêt à faire partie d’aucun mouvement dont le but est de renverser Tony Blair ».

La déclaration du 26 juillet du TUC sur le Liban ne dit rien au sujet de l’appui de Blair pour la guerre, appuie Annan et ses « appels à la retenue par toutes les parties » ainsi que son « importante critique de la capture des soldats israéliens par le Hamas et le Hezbollah et l’usage disproportionné de la violence par Israël ».

Donc encore une fois on nous incite à nous en remettre aux Nations unies.

Pour ce qui est du Parti travailliste, malgré les rapports que la moitié du cabinet est opposée à l’appui trop manifeste de Blair pour Washington, personne n’a encore avancé de position alternative. Et que dire des diverses branches du Parti travailliste ? Étant donné leur caractère moribond, qui pourrait le savoir ?

Les Nations unies et les puissances européennes n’ont jamais laissé leurs appels à un cessez-le-feu interférer avec leur abaissement devant Washington lorsqu’une décision menant à une véritable action était en jeu. Le Conseil de sécurité de l’ONU n’a réussi à passer aucune résolution condamnant Israël, mais il a réussi à passer une résolution contre l’Iran à propos de son programme nucléaire sous le chapitre 7 de la Charte de l’ONU qui permet la coercition par des moyens militaires. Les ministres des Affaires étrangères de l’UE n’ont même pas pu exiger un cessez-le-feu immédiat à cause de l’appui de la Grande-Bretagne, et maintenant de l’Allemagne, pour les États-Unis.

Le week-end dernier, la France, qui a le plus souvent déclaré être pour d’un cessez-le-feu, a accepté avec Washington une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU : un diktat pro-israélien qui annonce la transformation du Liban en un protectorat dominé par les États-Unis.

L’absence totale d’une opposition significative et réglée par des principes à l’intérieur du mouvement officiel travailliste a entraîné la domination des critiques de gauche de Blair par les représentants de l’establishment, parmi eux un grand nombre à la retraite, se sentant en sécurité pour formuler les plaintes de ceux qui ne le sont pas. Ils basent essentiellement leur critique sur la même ligne que la STWC, à laquelle ils adaptent leur propagande, soit une fierté nationale blessée et la croyance que Blair ne sert pas au mieux les intérêts de l’impérialisme britannique.

Certaines de ces critiques ont été violentes. Sir Rodric Braithwaite, un ancien ambassadeur à Moscou et ancien président du Comité conjoint du renseignement, a écrit dans le Financial Times que Blair devait se retirer immédiatement. Il l’a qualifié de « zombie fatigué et cireux tout droit sorti du musée de cire de Madame Tussaud » programmé par la CIA « pour débiter les paroles de la Maison-Blanche dans un accent anglais artificiel ». Blair a « réduit le Foreign Office à un chiffreur démoralisé, » a-t-il écrit, et son « identification totale à la Maison-Blanche a détruit son influence à Washington, en Europe et au Moyen-Orient ».

Cette position exprime la perspective d’une section de l’establishment, particulièrement le Foreign Office, qui regarde la débâcle en Afghanistan, en Irak et au Liban et qui réalise que les choses seront encore pires. Mais leur position n’est presque pas exprimée au gouvernement ou au Parlement dans leur ensemble.

Beaucoup de travaillistes craignent l’étendue de l’hostilité que Blair a générée. Il est plus détesté actuellement que Thatcher. Mais tout ce que le chancelier Gordon Brown, le principal opposant de Blair au leadership, peut trouver le courage de faire est de ne pas parler du Liban. Il n’ose pas exprimer un accord par crainte d’être terni à jamais aux yeux de l’électorat. Il n’ose pas exprimer un désaccord, car il est lié tout aussi étroitement à Washington, à Murdoch et aux néoconservateurs que son rival.

Blair n’est pas prêt de se retirer et son départ lui-même, quoique bienvenue, ne changerait de toute façon fondamentalement rien. Ce que la plupart des critiques de Blair veulent est qu’il prenne ses distances de Washington. Aucun d’entre eux ne demande de rupture avec la politique des États-Unis.

L’impérialisme britannique fait face à une crise qui s’intensifie et qui est sans précédent. Il est plongé dans une crise politique qui comporte des dangers incalculables, mais pour lesquels il ne semble y avoir aucune solution.

La fureur des anciens diplomates et de certaines sections de députés conservateurs est concentrée sur des plaintes d’impuissance politique, sur les dommages faits à la réputation de la Grande-Bretagne, et sur le fait que le vaste ensemble d’expérience qu’ils représentent n’est pas pris en compte par Blair. Toutefois, ils ne font pas que réagir contre les défauts d’un seul homme, mais contre le caractère fondamental de la vie politique contemporaine.

Blair semble ne pas entendre les supplications de ceux qui croient représenter les intérêts nationaux de la bourgeoisie britannique, car il est un représentant de l’oligarchie financière mondiale qui est capable de déterminer le cours des affaires mondiales – une oligarchie dont les desseins prédateurs sur les richesses du monde trouvent parfaite expression dans les impératifs de la politique de Washington et de Londres.

Mais que des sections de la bourgeoisie sentent qu’elles ont été exclues du processus politique ne fait pas d’elles des alliées de millions de travailleurs qui cherchent à s’opposer à la décimation du Liban et de Gaza. La question n’est pas de s’allier aux critiques qui cherchent à sauvegarder les fortunes politiques de l’impérialisme britannique au Moyen-Orient et internationalement, mais d’organiser une trajectoire indépendante.

La stratégie de la classe ouvrière doit être dictée par la nature et l’ampleur des tâches à sa portée. Cela ne peut être une stratégie prétendument acceptable au plus grand nombre de personnes, mais qui en fait se tourne vers des sections de la bourgeoisie et ses institutions pour opposer les États-Unis.

Et pour élaborer cette stratégie, il doit être compris que l’amertume générée parmi des sections de l’establishment quant à leur exclusion du processus décisionnel n’est que la plus faible manifestation des conséquences beaucoup plus significatives de l’autorité de l’oligarchie financière. La liquidation des formes traditionnelles de responsabilité démocratique qui a prêté à Blair un aspect présidentiel et l’apparence d’un pantin des États-Unis a pour but avant tout d’isoler le gouvernement des perspectives, des besoins et des aspirations de la classe ouvrière.

La démocratie est incompatible avec un programme économique et politique basé sur l’enrichissement continuel d’une couche déjà fabuleusement riche et parasitique, par une combinaison de pillage de style colonial et d’érosion constante du niveau de vie des travailleurs. La lutte contre la guerre et la défense des droits démocratiques et des gains sociaux des travailleurs doit être menée par les méthodes de la lutte de classe et par un nouveau parti qui met de l’avant les intérêts politiques indépendants de la classe ouvrière.

Dans « Après Munich, une leçon toute fraîche », Léon Trotsky a écrit en 1938 :

« Un nouveau partage du monde est à l'ordre du jour. La première tâche dans l'éducation révolutionnaire des travailleurs doit être de développer la capacité à percevoir derrière les formules officielles, les slogans et les phrases hypocrites, les véritables appétits impérialistes, leurs objectifs et leurs calculs. »

Une telle clarification est toujours le point de départ pour l’éducation politique des travailleurs aujourd’hui et pour la reformation d’un mouvement ouvrier international sur des bases socialistes.

Le World Socialist Web Site a cherché a mettre à nu la nature essentielle de la période dans laquelle nous entrons maintenant et ses implications politiques. La doctrine Bush de la « guerre préventive » marque un tournant par les Etats-Unis vers la guerre comme un instrument de la politique étrangère, qui vise à assurer son hégémonie sur tout le Moyen-Orient et le reste du monde.

C’est une nouvelle époque dans la politique mondiale — la fin du cadre de la loi internationale mise en place après la Deuxième Guerre mondiale et le retour vers les formes les brutales et les pures de politiques impérialistes.

Ce phénomène s’exprime aussi dans les actions des puissances européennes qui se sont alignées avec la poussée des Etats-Unis pour la guerre. Blair a peut-être pris le rôle de l’apologiste le plus lâche de Bush, mais sa politique de l’apaisement est à l’ordre du jour à travers l’Europe.

L’apaisement est premièrement dicté par la faiblesse militaire — les dirigeants de l’Europe sont béats devant la puissance américaine et craignent que leur opposition ne réussisse qu’à inciter Washington à suivre un cours unilatéraliste avoué. Mais ils sont aussi déterminés par leurs propres ambitions impériales et par le désir d’obtenir leur part des ressources vitales de pétrole et de gaz en retour à leur appui pour Washington.

Voilà pourquoi il n’y a pas un secteur de la classe dirigeante, en Angleterre ou dans le reste de l’Europe, qui peut être chargé d’opposer l’assaut sur le Liban d’inspiration américaine ou d’empêcher le danger grandissant de l’élargissement de la guerre au Moyen-Orient.

Ni le gouvernement américain, ni le britannique ne vont se retirer du Liban à cause de simples protestations, parce qu’ils y ont tant investi.

Le conflit n’est pas le résultat d’une action indépendante d’Israël, dans laquelle il a eu recours à une violence « disproportionnée ». Elle a été conçue par Washington et la violence utilisée est entièrement en proportion avec son véritable objectif — réduire tout le Moyen-Orient en un protectorat des Etats-Unis dans lequel Israël jouera le rôle d’agent de police régional. Le but de la conquête impérialiste ne peut pas être réalisé sans la destruction de tous les vestiges de résistance au sein des peuples de la région, arabe, iranien, afghan et y compris la classe ouvrière juive.

Il y a toujours des parallèles à faire entre les actions des nazis dans les années 30. J’aimerais vous faire part de quelques-uns.

Entre 1933 et 1936, le Troisième Reich a débuté un programme de réarmement en préparation de la mise en œuvre d’un politique étrangère expansionniste. Le 12 mars 1938, l’Autriche fut occupée par l’armée allemande et le jour suivant, annexée au Reich. La prochaine cible était la Tchécoslovaquie.

Le site web Shofar explique comment Hitler et le ministre de la Guerre Wilhelm Keitel ont conçu cette conquête.

Le 22 avril 1938, les deux discutaient des prétextes que l’Allemagne pourrait invoquer pour expliquer une attaque subite et écrasante — un « incident » de leur invention, y compris l’assassinat de l’ambassadeur allemand à Prague. Le plan était nommé Cas vert et fut circulé en secret dans les forces armées allemandes.

Le 30 mai 1938, Hitler signa les directives militaires révisées du Cas vert, qui allaient comme suit :

« 1. Préalables politiques

« C’est ma décision irrévocable d'écraser militairement la Tchécoslovaquie dans un proche avenir. C’est la tâche des dirigeants politiques d’attendre ou de créer le moment propice politiquement et militairement […]

« La bonne décision et l’utilisation déterminée et entière du moment favorable sont le gage le plus sûr du succès. En conséquence, les préparatifs doivent être réalisés.

« 2. Les possibilités politiques pour que l’action débute.

« Ce qui suit constitue les préalables nécessaires par l’invasion anticipée :

« a. une cause évidente appropriée, et, en plus de celle-ci

« b. une justification politique suffisante,

« c. une action à laquelle ne s’attend pas l’ennemi, qui se trouvera le moins bien préparé pour y répondre.

« D’un point de vue militaire autant que politique, le cours le plus favorable est une action éclair rapide comme résultat d’un incident qui provoque l’Allemagne d’une façon insupportable et pour lequel au moins une partie de l’opinion mondiale offrira la justification morale pour l’action militaire. »

Cela ne vous rappelle-t-il pas quelque chose ? On pourrait aujourd’hui le renommer la doctrine Olmert ou le gambit de Shalit.

Nous avons déjà attiré l’attention sur un reportage du San Francisco Chronicle du 21 juillet selon lequel la réponse militaire israélienne à la capture de ses soldats par des commandos du Hezbollah — et par extension, l’action précédente des Forces de défense israéliennes à Gaza — était planifiée depuis au moins une année.

Cela montre qu’Israël a informé de façon détaillée non seulement le gouvernement des Etats-Unis, mais aussi ses médias. Ils savaient tous que chaque mot qu’ils prononçaient, que chaque ligne qu’ils écrivaient qu’Israël organisait une attaque défensive était un mensonge.

Dans la dernière parution du New Statesman, son éditeur John Kampfner écrit que « Blair savait que l’attaque contre le Liban se préparait, mais il n’a pas tenté de l’arrêter, parce qu’il ne le voulait pas. »

Il continue de façon oblique : « Je me suis laissé dire que les Israéliens ont informé George W. Bush à l’avance de leurs plans pour " détruire " le Hezbollah en bombardant les villages du sud Liban. Les Américains en ont dûment informé les Anglais. Et donc, Blair savait. »

On peut supposer que Kampfner ne peut faire ses affirmations que parce que ces sources sont irréprochables.

Ces reportages indiquent un fait important. Ce n’est pas Israël qui est comme l’Allemagne des années 30. Ce rôle revient en fait aux Etats-Unis. En faisant la guerre au Liban, Israël implémente un plan beaucoup plus large des Etats-Unis pour créer, dans les mots de Condoleezza Rice, un « nouveau Moyen-Orient ».

La stratégie israélienne a été développée par les mêmes néoconservateurs de Washington que ceux qui déterminent la politique américaine et elle est inexplicable hormis cette réalité. Israël compte sur les Etats-Unis, non seulement pour ses forces armées et sa survie économique, mais en fin de compte pour assurer sa position en tant que puissance régionale incontestée.

Aussi loin qu’en 1996, les néoconservateurs, y compris Richard Perle, Douglas Feith et David Wurmser ont proposé un plan du « groupe d’étude pour une nouvelle stratégie israélienne en 2000 » de l’Institute for Advanced Strategic and Political Studies au nouveau gouvernement du Likoud de Binyamin Netanyahu.

Ce plan appelait pour la fin des négociations pour la paix basée sur l’octroi de territoire pour les Palestiniens qui menaçaient la souveraineté nationale d’Israël :

« Premièrement et principalement, les efforts d’Israël pour sécuriser ses rues peuvent demander de chaudes poursuites dans les régions sous autorité palestinienne, une pratique justifiable à laquelle les Américains ne peuvent qu’être d’accord […] Israël n’a aucune obligation selon les accords d’Oslo si l’OLP ne remplit pas les siennes. Si l’OLP ne peut satisfaire ces normes minimales, alors elle ne peut ni un espoir pour l’avenir, ni un interlocuteur valable pour le présent. Pour se préparer à cette éventualité, Israël voudra peut-être cultiver les solutions de rechange à la base du pouvoir d’Arafat. »

Dans la section intitulée « Rendre la frontière nord sécuritaire », il disait que « la Syrie défie Israël à partir du territoire libanais. Une approche efficace, avec laquelle les Etats-Unis peuvent être d’accord, serait si Israël saisissait l’initiative stratégique le long de ses frontières nord en affrontant le Hezbollah, la Syrie et l’Iran comme principaux agents d’agression au Liban. »

La tâche cruciale était de « se concentrer pour retirer Saddam Hussein du pouvoir en Irak, un objectif stratégique important pour Israël en soi, comme façon d’affaiblir les ambitions de la Syrie dans la région. »

Ils appelaient aussi pour le « rétablissement du principe de la guerre préventive ».

Comme il est bien connu, en janvier 1998, ces mêmes couches ont envoyé une lettre au président de l’époque, Bill Clinton, qui recommandait une deuxième guerre contre l’Irak — une nouvelle stratégie au Moyen-Orient qui devait viser « le renversement du régime de Saddam Hussein ».

La lettre a émis l’avertissement que « si Saddam développait la capacité de créer des armes de destruction massive [une phrase qui est devenue par la suite tellement familière] une part significative des réserves de pétrole du monde serait mise en danger ».

La lettre se terminait par « Nous croyons que les États-Unis ont le pouvoir sous les résolutions existantes de l’ONU de prendre les mesures nécessaires, incluant les mesures militaires, pour protéger nos intérêts vitaux dans le Golfe. De toute façon, la politique américaine ne peut continuer d’être minée par une insistance erronée sur la nécessité d’une unanimité au Conseil de sécurité de l’ONU. »

En 2003, les néo-conservateurs ont vu leur vœu d’une guerre contre l’Irak exaucé, et sur la même base qu’avait portée leur argumentation.

En avril 2003, immédiatement après le début de la guerre en Irak, Feith et d’autres ont exigé une guerre immédiate contre l’Iran et le secrétaire à la Défense des États-Unis, Donald Rumsfeld, a ordonné l’élaboration de plans dans l’éventualité d’une guerre contre la Syrie.

Bush a rejeté les plans. L’Irak était une entreprise importante et une nouvelle guerre était impossible. Mais l’anéantissement de la Syrie et, plus important encore, de l’Iran sont demeurés des nécessités pour la complète réalisation de l’hégémonie américaine au Moyen-Orient.

Il serait judicieux d’écouter ce que disent présentement les néoconservateurs si l’on souhaite comprendre ce qui se passe au Liban. Ils affirment clairement que l’offensive d’Israël n’est que le premier chapitre d’une guerre qui ne peut que se conclure en Iran.

James Phillips, membre du bureau éditorial du Middle East Quarterly, le principal journal conservateur d’étude politique du Moyen-Orient, a témoigné devant le comité sénatorial des relations étrangères qui s’est réunit en mai sur« La politique américaine et le défi nucléaire iranien ».

Il appelait pour la création d’une « coalition des volontaires » afin « d’isoler le régime Ahmadinejad… Si Téhéran persiste dans sa volonté d’obtenir des armes nucléaires malgré ces pressions montantes, alors les Etats-Unis pourront considérer l’option militaire afin de stopper le programme nucléaire iranien … Il n’y a aucune politique qui puisse garantir l’arrêt du programme nucléaire iranien autre que la guerre. »

William Kristol, éditeur du Weekly Standart, caractérise ainsi les attaques du Hezbollah contre Israël : « La guerre par procuration de l’Iran ». Il écrit un article le 24 juillet portant le titre, « C’est notre guerre : Bush devrait se rendre à Jérusalem – et les Etats-Unis devraient confronter l’Iran. »

Il déclare « Les régimes comptent. Les mouvements idéologiques deviennent plus dangereux lorsqu’ils deviennent des régimes gouvernant des nations importantes. Le communisme est devenu vraiment dangereux lorsqu’il prit le contrôle de la Russie. Le national-socialisme est devenu vraiment dangereux lorsqu’il prit le contrôle de l’Allemagne. L’islamisme est devenu vraiment dangereux lorsqu’il prit le contrôle de l’Iran…Non à la République islamique d’Iran, aucun appui au régime syrien d’Assad. Pas d’appui iranien pour la Syrie. »

Il conclut en suggérant que « nous devrions peut-être, considérer répliquer à cette agression iranienne  par une frappe militaire contre les installations nucléaires iraniennes. Pourquoi attendre ? »

Newt Gingrich, écrivant dans le Guardian, déclarait, « La troisième guerre mondiale est commencée : l’attaque du Hezbollah contre Israël fait partie d’une crise globale de civilisation. » L’Iran, poursuit-il, était « dans l’épicentre » de cette menace.

Michael Ledeen, écrivant dans le National Review du 13 juillet, appelait pour que la guerre soit dorénavant prise en charge par les États-Unis et étendue à travers toute la région. « La seule façon pour nous de gagner cette guerre est de faire tomber ces régimes à Téhéran et Damas, et ils ne seront pas défait simplement suite aux combats entre leurs mandataires terroristes à Gaza et au Liban, d’un côté, et Israël de l’autre. Seuls les Etats-Unis sont capables de le faire. Il n’y a pas d’autre façon. »

Nous devons ajouter à cette liste l’un des plus éminents néoconservateurs de la planète, le premier ministre Tony Blair.  Son discours de la semaine passée au Conseil des affaires mondiales de Los Angeles pour une « renaissance complète » en politique étrangère pour combattre « l’islamisme réactionnaire ».

Parmi les platitudes de routine concernant les appels à un règlement juste de la question palestinienne et de la lutte politique pour les valeurs démocratiques, il n’y avait rien de substantiel qui distingue son programme actuel de celui de ses copenseurs américains qui ont maintenant découvert un soi-disant « arc chiite » ou comme il le décrit « un arc d’extrémisme qui s’étend maintenant à travers la région » pour maintenant remplacer al-Qaïda comme point de mire de la supposée guerre au terrorisme.

Il a déclaré « Nous allons continuer de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour mettre un terme aux hostilités. Mais une fois que cela sera fait, nous devons nous consacrer à la renaissance totale de notre stratégie pour vaincre ceux qui nous menacent. »

Il poursuivit « Toutefois, le but de ces interventions, du point de vue militaire et autres, n’était pas que de réaliser des changements de régimes mais de changer les systèmes de valeurs qui dirigeaient les nations concernées. Le mot d’ordre n’était pas " changement de régime ", mais bien " changement de valeurs ". »

Ainsi, par un tout de passe-passe, Blair accueille et défend la politique illégale de changement de régime comme son propre objectif explicite. Ses références à la Syrie et à l’Iran font clairement savoir qui seront les prochaines cibles. Mais ses formulations sont telles que partout, personne n’est à l’abri.

Les divagations des néoconservateurs semblent souvent si folles qu’il est facile de les ridiculiser. Mais cela serait une erreur. Leur folie exprime la logique derrière les relations sociales et politiques contemporaines.

Le 29 mars 2003, le World Socialist Web Site a organisé une conférence aux Etats-Unis intitulée « Le socialisme et la lutte contre l’impérialisme et la guerre : une stratégie et un programme pour un nouveau mouvement ouvrier international ».

Dans ses remarques d’ouverture, David North a fait l’observation suivante pour expliquer notre stratégie d’opposition à la guerre sur la base d’une mobilisation politique indépendante de la classe ouvrière internationale :

« Mais l’histoire ne pose jamais que des problèmes pour lesquels elle offre aussi la solution. Il n’y a pas que la réponse impérialiste prédatrice aux problèmes du développement économique mondial. Inséré objectivement au sein de ces processus mondiaux, se trouve le potentiel pour une solution sociale internationale. »

North attira ensuite l’attention sur la signification des manifestations de masse contre la guerre qui ont mobilisé plus de dix millions de personnes. Il a déclaré « Ces manifestations, qui se sont développées presque spontanément, indépendamment et en opposition aux forces politiques traditionnelles de l’establishment bourgeois, ne peuvent être comprises que comme l’expression préliminaire du développement d’une réponse internationaliste et socialiste à la crise mondiale du système capitaliste. »

Laissez-nous aussi vous rappeler que le New York Times s’est senti obligé d’émettre le commentaire suivant à ce moment : « La brisure de l’alliance occidentale sur la question de l’Irak et les immenses manifestations contre la guerre à travers le monde ce week-end sont un rappel qu’il pourrait bien y avoir encore deux superpuissances sur cette planète : les Etats-Unis et l’opinion publique mondiale. »

Les trois dernières années ont amplement confirmé notre analyse que la guerre en Irak était un point tournant essentiel signalant l’ouverture d’une nouvelle période de luttes sociales et révolutionnaires. Au cours de cette période, le schisme entre l’augmentation des sentiments de gauche et anti-impérialistes au sein des travailleurs et des jeunes et le virage à droite des institutions de la politique officielle est plus grand que jamais auparavant.

Ceux qui en sont actuellement réduits à regarder avec colère ce qui se passe au Liban veulent faire quelque chose, mais ne trouvent aucun véhicule politique pour l’action.

Les fondations sont posées pour le développement d’un mouvement révolutionnaire de la classe ouvrière. Mais passer de la protestation à l’action révolutionnaire n’est possible que par les efforts constants des marxistes pour élever la conscience politique des travailleurs et de jeunes pour qu’elle soit en accord avec la situation objective. Ce qu’il faut, c’est un programme, une perspective et le parti politique international pour les diriger. C’est ce que représentent le Comité international de la Quatrième Internationale et le Parti de l’égalité socialiste ici en Grande-Bretagne.

 

 

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