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Stupidité politique ou provocation?Le groupe « Antira » du Brandebourg injurie le World Socialist Web SitePar Peter Schwarz Utilisez cette version pour imprimer En politique, il est parfois difficile de faire la différence entre bêtise et provocation. La séparation entre les deux n'a en tout cas rien d'absolu. Le 31 octobre dernier, le site internet d'information antifasciste Inforiot publiait un article représentant un mélange, peu subtil, des deux. L'article, intitulé « Le World Socialist Web Site pourchasse les antirassistes » est signé par l'organisation « Antira du Brandebourg ».Cet article attaque le World Socialist Web Site dans les termes les plus injurieux pour s'être défendu contre une tentative des services de renseignement de le faire passer pour une organisation de gauche extrémiste et violente. Les services de renseignement du Land de Brandebourg avaient accusé faussement le World Socialist Web Site d'être l'inspirateur d'un attentat contre le service d'immigration de Francfort-sur-Oder et avait justifié cela par le fait qu'on a retrouvé sur les lieux un article du WSWS publié il y a deux ans et traitant de façon critique de la politique d'immigration de l'Etat allemand. Bien que cet article s'appuyât sur des faits vérifiables et ne fit d'aucune manière appel à la violence, les services de renseignement affirmèrent : « La voie qui mène au délit est pavée de ce genre de textes ». Le WSWS s'est défendu contre cette calomnie et s'est aussi réservé le droit de recourir à la justice (voir l'article : Les services du renseignement du Brandebourg diffament le World Socialist Web Site). L'article de l'« Antira » qualifie l'attentat contre le service d'immigration d'« action d'antirassistes inconnus » et explique que le WSWS devrait être « fier » de ce qu'« on rendît son travail théorique responsable de l'activité pratique des autres », au lieu de s'en démarquer. L'article accuse par ailleurs le WSWS de calomnier « la gauche radicale et militante » et d'avoir fourni «une assistance pratique à la police » en réalisant sa propre enquête sur les faits en question. Il se termine par un flot d'insultes à caractère ordurier dont nous préférons ici éparner la vue au lecteur. L'auteur veut dire par là qu'il ne considère le WSWS ni comme socialiste ni comme révolutionnaire ni comme antirassiste, mais comme « un danger considérable pour les milieux de gauche ». Il faut tout d'abord noter que l'auteur de l'« Antira », malgré toutes ses invectives à allure radicale contre « l'appareil de répression rassiste » est d'accord avec les services de renseignement sur ce point : politique de gauche et usage de la violence sont la même chose. Il considère (pour lui c'est une évidence) que le fait d'aller casser des fenêtres la nuit constitue un acte d'antirassisme militant et il ne se donne même pas la peine d'expliquer en quoi ce genre d'action est censé faire avancer la lutte contre le rassisme et la xénophobie. Dans quelle mesure démolir les locaux de l'administration contribue-t-il à faire obstacle à la politique xénophobe du gouvernement ou bien à mobiliser la population contre cette politique, reste une énigme totale. De telles actions n'ont rien à voir avec une politique de gauche ou une politique socialiste. La politique socialiste est démocratique dans le sens originel du mot, qui signifie : gouvernement du peuple. Elle s'efforce de développer la conscience politique de la classe ouvrière et de renforcer sa confiance en soi. Elle aspire à placer la grande majorité de la population dans une situation où elle peut prendre une part active à la politique et prendre en main son propre destin. L'acte de Francfort-sur-Oder n'exprime au contraire que le mépris pour l'opinion de la population dans son ensemble, qui n'a rien à gagner de ces actes de vandalisme. Il s'agit, dans le meilleur des cas, d'un acte de vengence de la part de jeunes politiquement confus et, dans le pire des cas, d'une provocation pure et simple. Parler des auteurs de l'attaque de Francfort-sur-Oder comme de « révolutionnaires » comme le fait celui qui a écrit l'article de l'« Antira » est carrément absurde. Les révolutions sont de grands mouvements de masse. Elles se caractérisent par l'intervention autonome des masses sur la scène politique, ce qui est d'ordinaire le privilège d'une petite élite. L'assimilation de la politique révolutionnaire à des actes clandestins de sabotage, des escarmouches avec le pouvoir étatique et les actes de violence individuelle, cela fait en revanche partie de l'arsenal théorique de la police et des services de renseignement qui voient un complot violent derrière chaque mouvement d'opposition. Il n'y a que les cercles anarchistes qui aient à l'occasion qualifié les actes de violence individuels de moyens de la politique révolutionnaire. Ils entendaient réveiller les masses par une « propagande » spectaculaire «de l'action ». Mais, dans la pratique, ils ont toujours obtenu l'effet inverse. Leurs actes de terreur ont un effet paralysant sur les masses et ils fournissent en même temps à la classe dirigeante les prétextes indispensables pour intensifier ses mesures de répression. Les marxistes ont toujours rejeté ces méthodes. « Mais, contrairement aux anarchistes, et en opposition directe avec eux» écrivit Trotski dès 1911, « la social-démocratie rejette toutes les méthodes et tous les moyens ayant pour but de forcer artificiellement le développement de la société et de substituer des préparations chimiques à la force révolutionnaire insuffisante du prolétariat». Dans l'article de l'« Antira », le mépris de la classe ouvrière va de pair avec le dédain vis-à-vis des droits démocratiques. L'auteur de l'article réagit avec une hostilité non dissimulée au fait que la rédaction du WSWS défend les droits démocratiques. Le fait que celle-ci prenne au sérieux la liberté d'opinion et se défende contre la calomnie des services de renseignement, constitue selon lui « un échec à critiquer l'Etat et le Droit de façon radicale». Une lettre à Inforiot signée « lil x-quadrat » et qui exprime des points de vue semblables à ceux de l'article de l'« Antira », va jusqu'à nier l'existence même de droits démocratiques. On y lit : « En fin de compte tout acte révolutionnaire est punissable dans le capitalisme, même si cela n'est pas stipulé dans les articles de la Loi ». Dans les deux cas, des clichés radicaux sur « l'action révolutionnaire » et « l'agitation militante » cachent un immense pessimisme. Les deux auteurs sont fermement convaincus que l'Etat dispose d'un pouvoir absolu et sans limites et qu'il peut disposer des droits démocratiques selon son bon plaisir. Les droits démocratiques ne sont toutefois pas un cadeau de l'Etat qui peut être repris par les autorités comme bon leur semble. Ces droits sont en dernière analyse le résultat de décennies de luttes de la part du mouvement ouvrier. L'introduction du suffrage universel et d'autres droits démocratiques sous le règne de Guillaume II, fut la conséquence du travail politique de la social-démocratie. Les droits démocratiques inscrits dans la constitution de la République de Weimar étaient une conscession à la révolution de 1918. Et les droits garantis par la constitution de la République fédérale furent une réaction à l'effondrement du régime nazi et aux opinions anticapitalistes d'une grande partie de la classe ouvrière. Il est vrai qu'aujourd'hui ces droits sont de plus en plus attaqués et qu'ils ne sont plus guère défendus par les partis politiques officiels, y compris le SPD et les Verts. Mais il est impensable qu'ils soient abolis et remplacés par des formes de gouvernement dictatoriales, sans qu'une telle politique ne se heurte à une résistance massive d'une grande partie de la population. C'est sur cela que se fonde une politique socialiste. Il est impossible de prendre fait et cause pour une perspective socialiste sans défendre les droits démocratiques et sociaux existants de la classe ouvrière. Le mépris pour la classe ouvrière, l'indifférence vis-à-vis des droits démocratiques et la conviction que l'Etat est tout-puissant, font des milieux « autonomes » au nom desquels parle l'article de « l'Antira », une arène idéale pour les provocations de l'Etat. Quiconque a déjà observé comment le soit-disant « Bloc noir » surgit aux abords des grandes manifestations, de quelle façon systématique il casse les vitrines, démolit les voitures et lance des bombes incendiaires pour disparaître ensuite tandis que la police tape sur des manifestants pacifiques, sait de quoi il est question. A chaque fois que cela se produit, on remarque aussi le contact étroit maintenu par les participants cagoulés du « Bloc noir » avec la police. On en a eu une illustration des plus parfaites à l'occasion du sommet du G8 à Gênes, en juillet 2001. A l'époque, plusieurs reporters avaient vu et en partie filmé comment des casseurs du « Bloc noir » s'étaient entendus avec la police, puis avaient fait leur saccage sans être inquiétés, fournissant ainsi le prétexte à l'attaque de manifestants pacifiques. Des avocats ont découvert plus tard que les forces de sécurité s'étaient servi d'une masse de provocateurs et d'extrémistes de droite connus qui, déguisés en anarchistes, avaient démoli d'innombrables vitrines et mit le feu à des centaines de voitures. Comme nous l'avons écrit plus haut, il est difficile dans de telles circonstances de faire la part de la stupidité politique et de celle de la provocation. Mais, même lorsque cela est possible, les activités « hyper-révolutionnaires » des « autonomes » et les activités au service de l'Etat sont beaucoup plus proches qu'on ne l'imagine en général. C'est ce que montre la biographie du lanceur de pavés le plus connu d'Allemagne, Joshka Fischer. Tout juste dix ans séparent les années où Fischer faisait partie de « Combat révolutionnaire » et au cours desquelles il ne s'est pas contenté de casser des carreaux mais a aussi pris des policiers pour cible et son intronisation comme ministre de l'Environnement du Land de Hesse. Depuis, il est devenu, comme chef de la diplomatie allemande et vice-chancelier fédéral, le représentant de l'Etat Allemand, en Allemagne comme à l'étranger. La carrière politique de Fischer est en général présentée comme une conversion de Saint-Paul réussie. Mais il existe aussi un lien commun entre son appartenance au groupe « Combat révolutionnaire » et son ascension aux échelons les plus élevés de l'Etat : son hostilité et son mépris pour la classe ouvrière. Etant directement concernée, la rédaction du WSWS a le plus grand intérêt à éclaircir les circonstances de l'attaque contre le service d'immigration de Francfort-sur-Oder. Le seul résultat notable de cette attaque a été jusqu'à présent l'offensive des services de renseignement du Brandebourg contre le WSWS. Si l'enquête policière et judiciaire n'a encore donné aucun résultat au bout de deux mois et demi, les services de renseignement n'ont eux, pas perdu de temps pour faire porter au WSWS la responsabilité idéologique de l'attaque. Il fallait donc poser les questions suivantes et il faut les reposer puisqu'elles sont restées sans réponse : qui a déposé un article du WSWS vieux de deux ans sur les lieux du méfait ; est-ce que les services de renseignement et la police en savent plus qu'ils ne le disent ; et des agences de l'Etat ont-elles été pour quelque chose dans les faits en question ? L'accusation faite faussement par l'article de l'« Antira » comme quoi le WSWS en menant sa propre enquête persécuterait les antirassistes et les dénoncerait, est grotesque. Sur la base d'un tel raisonnement on pourrait reprocher à tous les reporters, organisations de défense des droits de l'homme et avocats qui ont examiné les circonstances des événements de Gênes en juillet 2001, de « persécuter » les opposants à la globalisation. Ils ont en fait révélé l'ampleur des provocations de l'Etat de façon tellement incontestable que finalement même le procureur de la république s'est vu obligé d'agir. La rédaction du WSWS ne sait pas qui est responsable
de l'attentat de Francfort-sur-Oder et ne peut pas exclure qu'il
s'agisse là de l'uvre de jeunes gens aux idées
politiques confuses, qui s'imaginent de cette manière
lutter contre la xénophobie et le rassisme. Mais, si c'était
le cas, ce ne serait pas le WSWS mais bien l'auteur de
l'« Antira » qui serait responsable s'ils avaient
des problèmes avec la police et la justice. Son article
est irresponsable au plus haut point. Il défend et justifie
des actions qui sont, du point de vue politique, idiotes et insensées
et qui attirent des jeunes politiquement naïfs dans un piège
grâce auquel ils peuvent être facilement criminalisés. Voir aussi :
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