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Par une équipe de reporters du WSWS
17 février 2003
Quelque 200.000 personnes ont défilé à Paris samedi pour protester contre la guerre américaine imminente contre l'Irak. La marche, qui a rassemblé des manifestants de toutes les régions de la France, a pris plusieurs heures pour se rendre de la Place Denfert-Rochereau au sud de Paris à la Place de la Bastille dans le centre-est.
Des étudiants, des syndicalistes, des travailleurs professionnels, des immigrés nord-africains et africains ont participé à la marche. Selon la récente tradition française, il n'y a pas eu de discours et l'immense foule s'est dispersée en début de soirée.
Les manifestants brandissaient des pancartes dénonçant George W. Bush et le gouvernement américain, accusant Washington de planifier une guerre meurtrière pour le pétrole. De nombreux manifestants condamnaient la "Busherie" qui se prépare. «Exigeons le veto», était un autre slogan, faisant référence au droit de veto de la France dans le Conseil de sécurité des Nations Unies. D'autres scandaient: «Nous sommes tous contre la guerre!», «Bush, assassin!» et «Avec l'ONU ou pas, la guerre on n'en veut pas!». On pouvait lire sur certaines pancartes: «Bush et Rambo, le couple de l'année», «War is not a game», et «Give peace a chance».
La banderole en tête de la manifestation portait l'inscription:
«Non à la guerre contre l'Irak. Justice et paix au
Moyen-Orient». Parmi ceux qui ouvraient la marche se trouvaient
les représentants du Parti communiste français
(PCF) Marie-George Buffet et Jean-Claude Gayssot, Noël Mamère
pour les Verts, le secrétaire général de
la CGT (syndicat associé au PCF) Bernard Thibault et celui
de la CFDT (syndicat associé au Parti socialiste) François
Chérèque, le leader de la Confédération
paysanne José Bové ou encore Alain Krivine pour
la Ligue communiste révolutionnaire.
Plus de 80 organisations, partis politiques, syndicats ou mouvements
pacifistes ont parrainé la manifestation, y compris la
gauche officielle et certains partis de «l'extrême-gauche»,
ainsi que le mouvement anti-mondialisation Attac, la Ligue des
droits de l'homme, le Mouvement de la Paix, le Mouvement contre
le racisme et pour l'amitié entre les peuples, et des comités
de solidarité avec la Palestine. Ont pris également
part à la marche des délégations de Lutte
Ouvrière, des mouvements anarcho-syndicalistes et d'une
série d'autres organisations. Les syndicats représentés
comprenaient la CGT, la CFDT et SUD (un petit syndicat de gauche)
et, bien moins nombreux, les syndicats catholiques. Plusieurs
dizaines d'Américains vivant en France figuraient également
dans les rangs des manifestants.
La direction du Parti socialiste (PS) était là en force, y compris le premier secrétaire François Hollande, les anciens ministres Laurent Fabius, Jack Lang, Pierre Mauroy, Martine Aubry ou encore Elisabeth Guigou. Cette délégation avait une certaine signification. Les dirigeants du PS ont généralement évité de se montrer en public depuis la débâcle électorale du parti au printemps dernier.
Des manifestations ont pris place dans 80 villes de France, les plus nombreuses à Toulouse, Bordeaux, Nice et Marseille. Les organisateurs estiment à au moins un demi-million le nombre total de participants à ces protestations.
Aussi substantielles qu'ont été les protestations en France, leur ampleur n'était pas comparable aux manifestations de masse ayant eu lieu en Angleterre, en Allemagne ou en Espagne. C'est en grande mesure le fruit de la conjoncture politique actuelle à l'échelle nationale et internationale. Le conflit persistant entre les intérêts impérialistes américains et français a permis au gouvernement de Jacques Chirac de prendre une pose «humanitaire» et «pacifique». Cette illusion est renforcée par les médias et la gauche officielle.
Les manifestations avaient un air d'événements officiels. Bien que ni le parti gouvernemental, l'UMP (Union pour un mouvement populaire), ni son partenaire de coalition, l'UDF (Union pour la démocratie française) n'aient soutenu les manifestations, 15 députés de la droite ont signé un appel anti-guerre et Philippe de Villiers, l'ultra-droitiste anti-européen a dit à des journalistes qu'il avait l'intention de participer à la marche.
Les dirigeants du PS et du PCF présents à Paris ont exprimé leur accord de base avec la politique du régime Chirac. Hollande a réaffirmé le soutien du PS pour le gouvernement sur la question de l'Irak, en expliquant que c'était là «le rôle d'une opposition consciente de ses responsabilités». Buffet du PCF a déclaré à la presse: «Nous sommes ici pour dire non à la guerre, oui à la paix. Aujourd'hui, on se sent tous un peu citoyens et citoyennes du monde au vu de l'ampleur de la mobilisation à l'échelle internationale. Je trouve que la position de la France est courageuse mais j'espère que cette position sera tenue jusqu'au bout». Thibault de la CGT a eu le commentaire suivant: «La position de la France a été assez ferme. Il est à souhaiter que notre pays reste sur ces principes qui ne sont qu'une chose: le droit international.»
D'autres comme Jacques Nikonoff de l'association Attac ont plutôt suggéré qu'ils soutenaient Chirac en concentrant toutes leurs critiques sur le gouvernement américain. Nikonoff a souhaité que «le rejet de la guerre qui s'exprime dans les sondages se concrétise dans la rue» car «la volonté des États-Unis de consolider leur suprématie impériale va de pair avec la mondialisation libérale».
Il ne pouvait y avoir aucun doute quant au sentiment d'hostilité de la masse des manifestants envers Bush et l'impérialisme américain ou d'horreur devant les conséquences de la guerre imminente. Dans des discussions, beaucoup ont aussi exprimé un scepticisme quant aux motifs de l'opposition de Chirac aux plans américains, attirant l'attention sur l'actuelle intervention de style colonial de la France en Côte-d'Ivoire.
Des sympathisants du WSWS sont intervenus à la manifestation, distribuant des milliers de copies de la version française de la déclaration: «Les tâches que le mouvement contre la guerre doit confronter».
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