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France: le Parti socialiste feint d'être choqué par la collusion entre le camp Chirac et Le PenPar David Walsh à Paris Le Parti socialiste (PS) français fait face à une défaite ignominieuse au deuxième tour des élections législatives dimanche prochain. Les sondages laissent croire que les partis de droite, y compris la coalition gaulliste, l'Union pour la majorité présidentielle (UMP), pourraient gagner entre 392 et 427 sièges dans le nouveau parlement, alors qu'ils en détenaient 245 dans l'Assemblée nationale sortante. Les partis de la gauche, y compris le PS, reconduiraient entre 150 et 191 députés, en baisse par rapport aux 314 qu'ils avaient fait élire en 1997. Le PS pourrait perdre la moitié de ses 248 sièges. Dans une tentative de limiter l'ampleur de cette débâcle, les sociaux-démocrates français essaient de tendre la main à certains électeurs traditionnels de la gauche qui étaient si désappointés par le bilan de la coalition gouvernementale dirigée par le PS sous l'ancien premier ministre Lionel Jospin qu'ils se sont abstenus au premier tour de l'élection législative, le 9 juin dernier. Dans le cadre de cet effort, les dirigeants du Parti socialiste se sont mis à faire du tapage, comme si c'était une révélation choc, autour de quelque chose qu'ils savent depuis longtemps, à savoir la collusion qui existe entre l'UMP du président Jacques Chirac et les partis néo-fascistes, soit le Front national (FN) de Jean-Marie Le Pen et le Mouvement national républicain (MNR) de Bruno Mégret. Le maire adjoint socialiste de Nantes, Jean-Marc Ayrault, a déclaré mardi que la droite officielle «se discréditait» en refusant de retirer ses candidats dans deux circonscriptions où les candidats de l'UMP ont fini en troisième position, derrière le PS et le Front national. «Une nouvelle fois, la droite préfère le Front national», a déclaré Ayrault. «La décision de l'UMP de maintenir ses candidats dans la deuxième circonscription du Gard et la treizième du Rhône confirme l'existence d'accointances locales pour empêcher l'élection des candidats de la gauche. Une telle attitude discrédite les déclarations de Jacques Chirac et de Jean-Pierre Raffarin [le premier ministre] contre tout accord avec l'extrême droite.» Des représentants du PS à Bouches-du-Rhône, dans le sud-est de la France, ont dénoncé «la porosité entre les leaders locaux de la droite et de l'extrême droite», particulièrement dans la 12ème circonscription de Vitrolles, où Mégret du MNR a été éliminé comme candidat au premier tour de dimanche dernier. Le leader du MNR a appelé ses partisans à «barrer la route» à la gauche à l'échelle nationale, sans se prononcer sur les courses locales. Mais un maire local du MNR, Daniel Simonpiéri, a ouvertement endossé le candidat de l'UMP, Éric Diard, qui a terminé deuxième derrière un socialiste au premier tour. Le PS a accusé Diard d'avoir «reçu et accepté le soutien inconditionnel de Daniel Simonpiéri et celui à peine masqué de Bruno Mégret». Christophe Masse, l'actuel député socialiste dans la 8ème circonscription de Bouches-du-Rhône, où se tiendra la seule triangulaire (PS-UMP-NF) de la région, a accusé le camp Chirac de faire appel aux électeurs des partis d'extrême droite. L'une des déclarations du candidat local de l'UMP soutenait que «la triangulaire ne sera pas un obstacle à la victoire de l'UMP si les électeurs du FN comprennent que voter pour l'extrême droite c'est faire élire la gauche». La fédération socialiste locale a fait le commentaire suivant: «La gauche a fait sortir l'extrême droite par la porte [au deuxième tour de l'élection présidentielle du 5 mai, en aidant Chirac à obtenir une majorité de 82 pour cent]. La droite vient de lui ouvrir la fenêtre.» Un autre cas évident de collusion entre le camp de la droite officielle et les néo-fascistes concerne Charles Million, ancien membre de l'Union pour la démocratie française (UDF), l'un des partis parlementaires de la droite, et ministre de la défense dans le gouvernement Alain Juppé du milieu des années 90. Million était un des nombreux candidats ayant conclu un pacte électoral avec le Front national dans les élections régionales des 1998. Bien qu'ils aient été officiellement frappés d'ostracisme et se soient fait taper sur les doigts, les trois présidents régionaux qui avaient accepté l'aide du FN, y compris Million, étaient présents tout au long de la récente campagne présidentielle de Chirac. Au premier tour de l'élection législative, l'UMP n'a officiellement appuyé aucun candidat dans la banlieue de Lyon où Millon se présentait. Mais, affirmant avoir le soutien personnel de Juppé, Millon a ajouté «soutenu par l'UMP» sur ses affiches de campagne. S'étant qualifié pour le deuxième tour, le candidat du Parti socialiste et ancien ministre du gouvernement Jospin, Jean-Jack Queyranne, a publiquement critiqué les «arrangements en préparation entre le Front national et Million». Million, qui a mené au premier tour une campagne très à droite, axée sur le maintien de l'ordre, n'a pas nié l'allégation, choisissant plutôt d'accuser vaguement Queryanne de «fantasme sur des accords qui auraient été négociés entre tel et tel candidat». Lundi, alors que le chef du Front national Le Pen énumérait les candidats de gauche qu'il voudrait particulièrement voir défaits au deuxième tour de l'élection législative (des membres en vue du PS, du Parti communiste et des Verts), ce dernier a ouvertement endossé Jean Kiffer, maire d'Amnéville, qui se présente sous la double étiquette UMP-RPF [Rassemblement pour la France] dans la région de Moselle dans le nord-est de la France. Kiffer a par la suite indiqué qu'il était «très fier» d'avoir reçu le soutien de Le Pen. Ces épisodes ne sont sans doute que la pointe de l'iceberg. L'ampleur de la victoire de la droite au premier tour a permis à la direction nationale de l'UMP d'adopter une attitude quelque peu olympienne envers les accords avec le Front national. Elle a promis qu'il n'y aurait aucun compromis avec l'extrême droite, car elle n'a besoin à ce point-ci de personne pour s'assurer une claire majorité parlementaire. Mais au niveau local, toute une série d'accords et d'arrangements pourris se font entre le camp Chirac et les forces du FN-MNR. Les socialistes essaient maintenant d'effrayer une partie de ceux qui se sont abstenus le 9 juin pour les amener à voter pour eux dimanche prochain en invoquant le danger d'une droite unie: «parlementaire» et «extrémiste». C'est un peu fort même venant des sociaux-démocrates français connus pour leur hypocrisie et leur complaisance. Ils aimeraient apparemment que les électeurs effacent de leur mémoire tout ce qui s'est passé entre le premier tour de l'élection présidentielle le 21 avril et le deuxième tour de ballottage le 5 mai. Après le premier tour de l'élection présidentielle, qui a vu l'élimination du candidat du PS Jospin et produit un ballottage entre le président en exercice Jacques Chirac et Le Pen, la France officielle a monté une opération politique concertée pour légitimer et aseptiser Chirac et son camp. La haute direction du Parti socialiste en tête de file, l'establishment politique et médiatique a, jour après jour, présenté Chirac au public français comme étant le sauveur de la démocratie et le défenseur des «valeurs républicaines» contre le néo-fasciste Le Pen. La gauche a insisté qu'on pouvait compter sur Chirac, même s'il était un politicien corrompu, pour servir de rempart démocratique contre l'extrême droite de Le Pen. Les inquiétudes soudainement réveillées
du PS concernant la collusion entre la droite gouvernementale
et les néo-fascistes est entièrement opportuniste
et cynique, et fondée sur de mesquines considérations
électorales. C'est peu probable qu'elles aient beaucoup
d'impact sur l'électorat. Ceux qui ont été
convaincus auparavant qu'il fallait voter pour les forces de
Chirac, en partie grâce à la campagne du PS, vont
faire fi de ces dénonciations. Ils pourraient demander
avec raison: «Si c'est si grave, pourquoi ne nous l'avoir
pas dit en mai?» Pour la plupart de ceux qui se sont abstenus
le 9 juin parce qu'ils étaient écoeurés
par le PS, cette poussée de «gauchisme» tardif
ne peut que renforcer leur colère et le sentiment d'avoir
été trahis. Voir aussi :
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