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En supplément
: Unedic
La réforme du régime d'assurance-chômage
français
Par Marianne Arens et Françoise Thull
9 décembre 2000
La nouvelle convention sur l'assurance-chômage Unedic
(Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie
et le commerce) agréée par le gouvernement est
la plus mauvaise depuis 1958 pour n'être pas seulement
une attaque draconienne contre les chômeurs, mais également
contre l'ensemble des salariés. Elle fut signée
le 19 octobre par l'organisation patronale Medef et trois
syndicats, CFTD, CFTC et CGC, alors que la CGT et FO refusèrent
de la signer. L'accord devant entrer en vigueur au 1er janvier
2001 et être appliqué sur la période 2001-2003.
La nouvelle convention ne garantit plus le droit à
une indemnisation en cas de chômage, celle-ci est désormais
conditionnelle à la signature d'un Plan d'aide au retour
à l'emploi (PARE) dont découle un Projet d'action
personnalisé (PAP). Ces mesures sont démagogiquement
justifiées en prétendant qu'elles encouragent un
retour à l'emploi plutôt qu'elles ne compensent
passivement le chômage.
À l'avenir, chaque chômeur s'inscrivant comme
demandeur d'emploi aux Assedic (agences locales de l'Unedic)
devra s'engager par écrit à respecter un certain
nombre d'engagements qui lui seront imposés, par exemple
faire le bilan de l'ensemble de ses capacités professionnelles,
suivre différents stages, contrats d'apprentissage ou
actions d'insertion et de formations ou accepter les différentes
propositions d'embauche qui lui seront soumises par l'Agence
nationale pour l'Emploi (ANPE) et les Assedic et ceci même
lorsque les rémunérations seraient nettement inférieures
à celles de son dernier emploi. En cas de refus, il s'exposera
à des sanctions telles la suspension ou l'extinction du
droit à l'indemnité. Au bout d'un an au plus tard,
il devra accepter toute offre d'emploi.
Actuellement, seuls 42 pour cent des chômeurs sont couverts
par l'Unedic. La raison en est que tous ceux qui, avant
leur chômage, avaient fait partie des salariés précaires,
soit en raison d'emplois à durée déterminée,
d'intérimaires, à temps partiel ou mal payés
soit parce qu'ils étaient des chômeurs de longue
durée, ne sont dorénavant plus couverts par l'Unedic.
En sont particulièrement touchés les chômeurs
de longue durée, les jeunes ainsi que les salariés
pauvres. La nouvelle réglementation augmentera encore
le nombre de tous ceux qui sont radiés annuellement, qui
atteint déjà 185 000 par an, en forçant
de plus en plus de gens à être pris en charge par
le régime général (payé par l'État)
au profit de l'Unedic.
Les contributions à la caisse d'assurance-chômage
devant baisser de 43 milliards de francs d'ici à 2003,
cette somme rondelette devrait permettre de diminuer sensiblement
les charges sociales en France. À l'origine, le Medef
avait même prévu une réduction des contributions
atteignant 71 milliards de francs.
La plus grande part de l'argent de la caisse d'assurance-chômage
servira dorénavant à la formation professionnelle,
à des parcours de formation et d'insertion au gré
des besoins des entreprises françaises. Ceci profitera
en premier lieu aux petites et moyennes entreprises qui, en dépit
d'un chômage élevé, ont souvent des problèmes
de recrutement.
L'organisation patronale Medef avait projeté
de longue date cette refonte de l'Unedic et avait bataillé
pendant près d'un an pour cela. Les statistiques et les
sondages prouveraient que le système social français
était, comparé à ceux en vigueur en Europe
et de par le monde, indubitablement beaucoup trop cher et que
la France n'était pas assez attractive aux yeux des groupes
internationaux. La déléguée aux affaires
européennes et internationales de l'Unedic, Marina
Pineschi-Gapenne, a déclaré que le projet mis en
avant par le Medef reposait sur une conception rassemblant
les meilleures pratiques opérationnelles et existant déjà
en Grande-Bretagne, aux Pays-Bas, en Allemagne et au Canada.
Mme Pineschi-Gapenne remarqua que le nouveau modèle français
aurait d'ores et déjà rencontré l'intérêt
de ses collègues à l'étranger. Ceci devrait
éclairer d'un jour nouveau la perspective de Jospin quant
à « l'agenda social européen », pour
lequel la France doit faire fonction de modèle pour l'ensemble
de l'Europe.
À l'heure actuelle, 2,3 millions de personnes sont
officiellement au chômage en France. Lionel Jospin plastronnait
lors du congrès de Grenoble que le chômage était
passé de 12,6 pour cent en 1997 à seulement 9,5
pour cent. Le fait est cependant que c'est surtout le nombre
des chômeurs indemnisés qui a baissé alors
qu'une part importante de demandeurs d'emploi, en majorité
des jeunes, étaient obligés d'accepter n'importe
quel emploi précaire et mal payé, allant du contrat
à durée déterminée (CDD) à
des postes d'intérimaires.
Selon un rapport du Secours catholique, le chômage aurait
baissé depuis 1997, mais pas l'exclusion économique
et sociale dont souffrent les mères isolées et
les personnes appelées « working poor » (ceux
qui travaillent mais vivent néanmoins en-dessous du seuil
de pauvreté avec un revenu inférieur à 4
150 francs). La proportion de personnes vivant uniquement de
transferts sociaux dépassait en 1999 de 4 pour cent le
chiffre de 1994.
Selon les publications de l'Insee du mois d'octobre,
plus de jeunes auraient trouvé des emplois (en 1997,
58 pour cent des jeunes avaient trouvé un emploi, contre
71 pour cent en 2000) mais parallèlement à ceci
les emplois précaires ont dominé, c'est-à-dire
des emplois à très faible salaire, à durée
déterminée ou « petits boulots». Présentement,
22 pour cent des jeunes doivent se contenter de ce genre d'emploi
en comparaison de 7 pour cent en 1991. Les accidents du travail
ont également connu une recrudescence; l'année
dernière seulement, il y a 27 000 cas de plus que l'année
précédente.
Le programme contre le chômage des jeunes, préconisé
par le gouvernement Jospin de même que la manière
avec laquelle la semaine de 35 heures a été introduite
en France ont contribué à détériorer
la situation. Ces deux mesures n'ont pas, comme promis en 1997,
garanti les salaires, créé des emplois et offert
une chance aux jeunes, mais elles ont en réalité
contribuer à augmenter le stress et favoriser la flexibilité
et la baisse des salaires.
Le dernier accord en date concernant l'assurance-chômage
Unedic n'est que la première étape envisagée
par les patrons pour transformer l'ensemble du système
social d'après-guerre de façon à l'adapter
aux besoins du marché et, ce faisant, ils s'attaquent
en premier aux couches de la classe ouvrière les plus
faibles. Les prochaines étapes sont déjà
programmées, elles concernent la formation professionnelle,
la retraite et la sécurité sociale.
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