Alors que l'administration Trump redouble d'efforts pour nettoyer ethniquement et annexer la bande de Gaza, les États-Unis ont lancé une nouvelle offensive militaire visant le Yémen et, à terme, l'Iran, dans le cadre d'une escalade systématique de la guerre américano-israélienne visant à remodeler le Moyen-Orient sous la domination de Washington.
Dimanche, l'armée américaine a lancé une attaque majeure contre le Yémen, un pays pauvre de 34,7 millions d'habitants situé dans le sud-ouest de la péninsule arabique, suivie de plusieurs jours de bombardements continus.
Mercredi, le président Donald Trump s'est engagé à « anéantir » le Yémen, déclarant : « Ce n'est même pas un combat à armes égales, et ça ne le sera jamais. Ils seront complètement anéantis. » Il a ensuite menacé l'Iran, affirmant qu'il « en subira les conséquences, et ces conséquences seront terribles ».
En déclarant son intention d'« anéantir » le Yémen, Trump a invoqué les paroles de son modèle politique, Adolf Hitler. Le 30 mars 1941, Hitler a déclaré à ses généraux que la guerre que l'Allemagne nazie préparait contre l'Union soviétique serait un « Vernichtungskampf », c'est-à-dire une « lutte d'anéantissement ». Fidèle à sa promesse, Hitler a mené la guerre pour détruire l'Union soviétique, en massacrant et en affamant systématiquement la population civile, ce qui a entraîné la mort de plus de 30 millions de personnes.
La menace de Trump d'« anéantir » un petit pays appauvri à l'autre bout du monde exprime à quel point le langage du génocide, le concept clé de la guerre américano-israélienne qui vise à expulser le peuple de Gaza de sa terre par des massacres et la famine, définit de plus en plus des domaines plus larges de la politique étrangère américaine. Trump s'engage à traiter toute résistance à l'assujettissement colonial direct des États-Unis de la même manière que son client israélien traite les Palestiniens : par l'extermination.
Avant le génocide de Gaza, le Yémen était le premier exemple mondial de famine de masse délibérée des civils à la demande des puissances impérialistes. Entre 2015 et 2022, le Yémen a été soumis à une campagne américano-saoudienne de bombardements et de famine délibérée qui a entraîné la mort de 400 000 personnes. Comme l'a déclaré Kamel Jendoubi, président d'un groupe d'experts des Nations unies sur le Yémen, en 2020, «les civils au Yémen ne meurent pas de faim, ils sont affamés sciemment », citant le blocus délibéré des ports du Yémen par l'Arabie saoudite, soutenu par les États-Unis.
À l'époque, la conduite de l'Arabie saoudite au Yémen était reconnue comme criminelle, même par les gouvernements qui finançaient et armaient son armée. Lors du débat présidentiel de novembre 2019, Joe Biden a accusé les Saoudiens « d'aller tuer des enfants et des innocents », ajoutant qu'« ils doivent rendre des comptes ». Il s'était engagé à ne pas leur vendre davantage d'armes.
Mais c'est précisément ce que Biden a fait dès son accession à la présidence. Il a vendu au régime despotique saoudien pour 650 millions de dollars de missiles en 2021 et a ensuite levé toutes les restrictions sur les ventes d'armes au royaume. En 2022, Biden a salué publiquement par un check le prince héritier saoudien de facto Mohammed ben Salmane, l'homme qui a orchestré le meurtre en 2018 de Jamal Khashoggi, résident américain de longue date et journaliste au Washington Post. Le régime barbare de Ben Salmane a présidé au plus grand nombre d'exécutions de l'histoire saoudienne en 2024, où plus de 300 personnes ont été mises à mort.
Le contexte immédiat du nouvel assaut américain contre le Yémen est l'abandon systématique de toute prétention d'Israël, avec le soutien des États-Unis, à œuvrer en faveur d'un « cessez-le-feu » à Gaza.
Après avoir mené des attaques quotidiennes pendant les deux mois au cours desquels un cessez-le-feu était théoriquement en vigueur, tuant des centaines de personnes, Israël a maintenant abandonné toute adhésion au «cessez-le-feu ». Il y a dix-neuf jours, Israël a bloqué l'entrée à Gaza de toute nourriture, eau et soins médicaux. Cette semaine, il a repris ses bombardements aériens à grande échelle sur Gaza, tuant plus de 400 personnes en une seule journée, mardi.
Conformément au « cessez-le-feu » négocié il y a deux mois, le mouvement houthi du Yémen, qui contrôle un territoire abritant 60 % de la population du pays, a suspendu ses attaques contre les navires transitant par la mer Rouge. En réponse à l'imposition par Israël d'un blocus total de la nourriture, de l'eau, du carburant et des fournitures médicales à Gaza, le gouvernement houthi a déclaré qu'il prendrait pour cible les navires israéliens en mer Rouge.
Les États-Unis ont, à leur tour, profité de cet avertissement des Houthis pour relancer leur assaut sur le Yémen dans le cadre d'une escalade militaire dans l'ensemble du Moyen-Orient. Des personnalités de l'administration Trump préconisent ouvertement une attaque directe contre les installations nucléaires iraniennes.
Depuis plus de quatre décennies, l'impérialisme américain est déterminé à inverser les conséquences de la révolution iranienne de 1978-1979, qui a renversé la tyrannie sanguinaire du Shah Mohammed Reza Pahlavi, larbin des États-Unis.
Les attaques terroristes du 11 septembre 2001 ont servi de prétexte au lancement d'une gigantesque opération militaire au Moyen-Orient visant à restaurer la domination directe des États-Unis sur la région.
Après l'invasion américaine de l'Afghanistan en 2001, le président américain George W. Bush a proclamé l'existence d'un « axe du mal » comprenant l'Irak et l'Iran. « Cette campagne ne s'achèvera pas sous nos yeux, mais elle doit être menée, et elle le sera, sous nos yeux », a-t-il déclaré. La proclamation de Bush a été suivie l'année suivante par l'invasion de l'Irak en 2003.
Au moment des attentats du 11 septembre, le général Wesley Clark a déclaré qu'il avait été décidé d'entrer en guerre contre « sept pays en cinq ans, en commençant par l'Irak, puis la Syrie, le Liban, la Libye, la Somalie, le Soudan, et enfin l'Iran ».
L'administration Bush n'a pu procéder qu'à des invasions de grande ampleur en Afghanistan et en Irak. En revanche, l'administration Obama a lancé des opérations de changement de régime en Libye et en Syrie, réussissant à renverser le gouvernement libyen en 2011. Le gouvernement syrien, après plus d'une décennie de guerre, a été renversé en décembre 2024.
En 2006, la conseillère à la sécurité nationale Condoleezza Rice, faisant l'éloge de l'invasion israélienne du Liban soutenue par les États-Unis cette année-là, a proclamé le « nouveau Moyen-Orient » dans lequel les États-Unis mèneraient la guerre contre les pays alignés sur l'Iran avec une violence accrue.
L'expression de Rice – le « nouveau Moyen-Orient » – a été le mot d'ordre du régime de Benjamin Netanyahou pour mener à bien le génocide de Gaza et faire la guerre dans toute la région. Quelques jours avant le soulèvement du 7 octobre 2023 mené par le Hamas, Netanyahou s'est rendu aux Nations unies pour présenter une carte montrant qu'Israël annexait l'ensemble du territoire de la Palestine. Netanyahou a déclaré : « Nous construirons un nouveau corridor [...] qui reliera l'Asie à l'Europe en passant par les Émirats arabes unis, l'Arabie saoudite, la Jordanie et Israël. »
Cette tentative d'imposer un contrôle colonial direct des États-Unis sur le Moyen-Orient s'inscrit dans le cadre plus large des efforts déployés par les États-Unis pour se positionner en vue d'un conflit imminent avec la Chine. Le Moyen-Orient abrite 50 % des réserves prouvées de pétrole et 40 % des réserves prouvées de gaz naturel.
Plus important encore peut-être, environ 9 % du trafic maritime mondial et 20 % du trafic mondial de conteneurs passent par le détroit de Bab-el-Mandeb, qui relie la mer Rouge et le golfe d'Aden. Le Yémen occupe la totalité des rives orientale et septentrionale de cette voie maritime essentielle.
Comme l'explique Bloomberg :
D'énormes volumes de pétrole brut, de diesel, de gaz naturel, d'autres produits pétroliers et de marchandises brutes en provenance du Moyen-Orient et de l'Inde empruntent la mer Rouge pour se rendre en Europe, car c'est le chemin le plus court entre ces régions. Les sanctions occidentales imposées à la Russie à la suite de son invasion à grande échelle de l'Ukraine en 2022 ont transformé la mer Rouge en une partie d'une artère commerciale vitale pour le brut circulant dans l'autre sens également, Moscou vendant désormais la part du lion de son pétrole à l'Asie.
Sous Trump, l'impérialisme américain cherche à s'emparer des principaux points d'étranglement du commerce mondial afin de se préparer à un conflit avec la Chine. Cela inclut non seulement la domination de la mer Rouge, mais aussi le projet de Trump de s'emparer du canal de Panama et d'annexer le Canada et le Groenland pour contrôler un futur passage du Nord-Ouest à travers l'Arctique.
La guerre mondiale et la volonté d'établir une dictature à l'intérieur du pays sont des composantes essentielles du programme de Trump. Trump cherche, par une violence militaire illimitée et l'utilisation d'outils économiques coercitifs comme les droits de douane, à assurer la domination mondiale des États-Unis, principalement contre la Chine.
Son escalade de la guerre est inséparable de l'attaque frontale contre la classe ouvrière menée par son administration, qui vise à liquider les programmes sociaux fondamentaux que sont Medicare, Medicaid et la sécurité sociale et à utiliser les économies pour le réarmement et le renflouement des banques.
Rien de tout cela ne peut se faire sans le recours à des formes dictatoriales de gouvernement. L'administration Trump cherche à calomnier les opposants à la politique étrangère américaine en les qualifiant de « terroristes », en utilisant les mécanismes d'État policier du système d'immigration américain pour les détenir et les expulser illégalement. Avec l'escalade de la guerre de Trump dans tout le Moyen-Orient, y compris une possible attaque directe contre l'Iran, cette campagne visant à faire taire toute opposition aux politiques de son administration s'étendra également aux citoyens américains.
Les plans de Trump pour une guerre mondiale nécessitent l'érection d'une dictature et l'appauvrissement de la classe ouvrière. C'est pourquoi la lutte contre son administration ne peut se limiter à l'opposition au génocide de Gaza ou à son attaque contre les droits démocratiques.
La seule force sociale capable d'arrêter les efforts de Trump pour créer une dictature aux États-Unis est la classe ouvrière. La tâche centrale est de construire une direction socialiste dans la classe ouvrière, armée du programme théorique du marxisme, afin qu'elle puisse être mobilisée dans une lutte sociale et politique pour mettre fin à la guerre impérialiste et au système de profit capitaliste qui est la cause première de la guerre. Le Parti de l'égalité socialiste et le Mouvement international des jeunes et des étudiants pour l’égalité sociale (IYSSE) sont en première ligne de cette lutte.
(Article paru en anglais le 21 mars 2025)