Révolution Permanente appelle à une alliance avec le NFP, qui négocie avec Macron

Après la censure du gouvernement Barnier, l’organisation moréniste Révolution permanente (RP) appelle à une lutte commune avec le Nouveau Front Populaire (NFP), notamment LFI et la bureaucratie CGT pour «dégager Macron et imposer une Assemblée unique». Ceci masque son rejet d’une mobilisation des travailleurs, indépendamment des appareils syndicaux nationaux contre la militarisation, l’austérité et la répression policière qu’imposent tous les gouvernements européens.

Il est impossible de réconcilier une opposition révolutionnaire à Macron avec l’alliance que propose RP avec le NFP, qu’elle traite de «gauche politique et sociale». Le NFP discute actuellement avec Macron de la formation d’un gouvernement. Pourtant, dans l’article «Barnier censuré: il faut une réponse ouvrière pour dégager Macron et imposer une Assemblée unique!», RP s’adresse à lui pour dire:

«Plutôt que de laisser le développement de la crise entre les mains des classes dominantes, qui sauront l’arranger en fonction de leurs intérêts, l’urgence devrait être de construire une riposte par en bas. La classe ouvrière, les classes populaires et la jeunesse, qui ont manifesté par millions contre la réforme des retraites en 2023, ont la force d’apporter une réponse à la crise politique, autour d’un programme contre l’austérité, les licenciements, mais aussi contre les institutions pourries de la Vème République.»

Les travailleurs ne peuvent pas confier la lutte contre la Ve République française et ses politiques d’austérite et de guerre au NFP ou aux bureaucraties syndicales qui lui sont alliées.

En 2023, des millions de personnes étaient dans les rues contre la réforme des retraites de Macron qui consistait à faire des dizaines de milliards d’économies par an pour les transférer pour les ultra riches et l’augmentation du budget militaire. Macron a mis fin aux manifestations, qu’il a fait réprimer violemment, grâce à l’aide des bureaucraties syndicales qui ont mis fin à la mobilisation. Pourtant une large majorité de la population était favorable à faire chuter Macron et la question d’une grève générale bloquer l’économie était posée.

RP a participé à cette trahison de la lutte en affirmant que la situation n’était pas révolutionnaire et que les travailleurs devaient faire l’expérience de la démocratie bourgeoise. En 2024, sur fond de génocide à Gaza et de menaces nucléaires entre l’OTAN et la Russie, la situation politique et militaire est plus explosive encore. Conscient d’une opposition massive des travailleurs et des jeunes qui couve, RP appelle à des manifestations en soutien à un gouvernement capitaliste NFP:

«En tant que révolutionnaires, nous sommes prêts à mettre toutes nos forces dans une telle bataille aux côtés de la gauche politique et syndicale, LFI et CGT en tête. Mais il faut lutter avec les méthodes de la lutte de classes et autour de revendications sérieuses. Se limiter à une issue par en haut, en réclamant la démission de Macron et en cherchant à le remplacer par un nouveau monarque républicain, est une impasse. Celles et ceux qui se préoccupent de défendre la démocratie doivent se doter d’un programme conséquent sur ce terrain: la fin de la Présidence de la République et du Sénat, et pour une Assemblée unique qui vote les lois et gouverne, dont les députés soient élus pour 2 ans, payés au salaire médian et révocables à tout moment.»

Cette perspective d’un soutien au NFP et à une Assemblée unique, qui fait le silence sur les guerres en Ukraine et en Syrie ainsi que sur le génocide à Gaza, est antitrotskyste. Elle remplace la lutte internationale de la classe ouvrière pour le pouvoir et pour le socialisme par une perspective de refondation de l’Etat capitaliste national. La proposition d’une alliance avec les bureaucraties du NFP souligne en particulier comment RP étrangler l’opposition des travailleurs à l’austérité, à la réaction d’extrême-droite, au génocide et à la guerre impérialiste.

Le programme du NFP appelle à envoyer des «casques bleus» en Ukraine et à renforcer la gendarmerie et du renseignement. Le PS sous la présidence de Hollande, membre du NFP, a mené une politique d’extrême-droite en réprimant les Roms, les migrants et les musulmans. Hollande a instauré l’état d’urgence. Le PS a mené des guerres néocoloniales dans le Sahel et soutient explicitement la guerre en Ukraine et le génocide israélien à Gaza.

Le NFP négocie actuellement avec Macron la possibilité d’instaurer un gouvernement capable d’amplifier les attaques contre les acquis sociaux des travailleurs. Ceci se déroule dans un contexte de restructuration et l’extrême-droitisation de la politique européenne avec l’arrivée de Trump au pouvoir et la poursuite du génocide à Gaza.

Avant que la chute de Barnier, RP n’a lancé aucun appel à la mobilisation des travailleurs pour imposer leurs propres revendications. L’écrasante majorité des travailleurs rejettent la réforme des retraites de Macron et tout son programme d’austérité, sa proposition d’envoyer des troupes en Ukraine et le génocide à Gaza. Mais plutôt que mobiliser les travailleurs sur des revendications de transition indiquant la nécessité d’une lutte contre toute la classe dirigeante, RP s’allie au NFP.

Bien implantée dans une fraction jeune de la bureaucratie cégétiste, RP avance une perspective petite-bourgeoise pour une réorganisation de l’État nation français, sur une rhétorique démocratique avec des appels à la politique de genre ou racisée. Les racines de leur perspective antitrotskyste se trouvent dans la politique du renégat Felix Morrow, qui a rompu avec la IVe Internationale peu après la fin de la Deuxième Guerre mondiale.

Morrow soutint un rejet opportuniste de la révolution socialiste et à un accommodement avec les États capitalistes européens existants. Morrow appela à la liquidation des sections européennes de la IVe Internationale dans les partis sociaux démocrates et aux appareils étatiques du capitalisme européen après leur collaboration avec les nazis. En France, Morrow lança une campagne tous azimuts pour que les trotskystes français approuvent l’Assemblée constituante formée par de Gaulle et la constitution de la Quatrième République bourgeoise de 1946.

Reconnaissant que l'Assemblée constituante ne satisferait pas les besoins des masses, il demandait néanmoins aux trotskystes français de dire aux masses de faire pression sur lui pour construire le socialisme. Morrow rejeta définitivement le trotskisme en 1946 et devint un anti-communiste.

Cette politique antitrotskyste est enracinée dans les origines petite-bourgeoises de RP. C’est une ancienne fraction du NPA pabliste, liée au Parti des travailleurs socialistes (PTS) moréniste argentin. Le NPA descend des forces dirigées par Michel Pablo et Ernest Mandel qui ont rompu avec le Comité international de la IVe Internationale (CIQI) en 1953, insistant que la IVe Internationale devait se liquider dans les mouvements staliniens ou nationalistes bourgeois. Ainsi ils se rangeaient en France derrière le soutien du PCF pour la constitution de la Quatrième République.

Les morénistes eux descendent d’une tendance au sein du CIQI mais qui en 1963 a rompu avec le CIQI pour rechercher une alliance avec le mouvement pabliste. Dans la mesure où ils ont conservé une critique du pablisme de leur passée, ce n’était pas la lutte du CIQI pour défendre le programme socialiste et internationaliste du trotskysme. Ils font écho aux positions de Morrow, avançant une orientation politique nationaliste fondée sur de vagues mots d’ordre démocratiques.

La bourgeoisie en France à l’ère de la mondialisation et n’a pas l’intention de faire des concessions même limitées aux travailleurs en lutte, comme après la Deuxième Guerre mondiale. Avec la victoire de Trump et la marche vers la guerre, les classes dirigeantes européennes préparent une guerre de classe incompatible avec les normes démocratiques bourgeoises. Le Pen monte en puissance en France, comme Trump aux USA.

Face à un capitalisme qui plonge dans une nouvelle guerre mondiale, le génocide et la réaction d’extrême droite, il faut préparer une offensive politique socialiste de la classe ouvrière. Ceci exige la mobilisation de l’opposition parmi des masses de travailleurs à l’austérité, à la guerre impérialiste et et au génocide, et la construction d’une avant-garde trotskyste, le Parti de l’égalité socialiste, section française du CIQI, contre les morénistes de RP.

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