La COP29 se termine sur un accord vide, alors que 2024 s'annonce comme l'année la plus chaude jamais enregistrée par l'humanité

L'accord final issu de la dernière conférence internationale sur le changement climatique, la COP29, qui s'est achevée dimanche à Bakou, en Azerbaïdjan, est un autre accord sans effet. Il met en évidence l'incapacité des gouvernements capitalistes du monde à réduire les émissions croissantes de gaz à effet de serre et à combattre la crise écologique continue et accélérée causée par le réchauffement climatique.

L’annonce principale est l’Objectif financier de Bakou, un «engagement» des pays développés de 300 milliards de dollars par an en faveur des pays en développement d’ici 2035, et l’augmentation de ce montant à 1 350 milliards de dollars en utilisant des sources publiques et privées.

Le ministre saoudien de l'Énergie, le prince Abdulaziz Bin Salman, fume une cigarette électronique lors d'une séance plénière du sommet climatique COP29 de l'ONU, le dimanche 24 novembre 2024, à Bakou, en Azerbaïdjan. [AP Photo/Rafiq Maqbool]

Si de tels fonds avaient été consacrés à la lutte contre le changement climatique il y a 40 ans, ces ressources auraient probablement été suffisantes pour éviter ses pires conséquences. Et si les avertissements concernant les émissions continues de gaz à effet de serre, lancés par des sociétés de combustibles fossiles comme ExxonMobil pour un usage interne et énoncés publiquement au Congrès par des scientifiques comme Carl Sagan, avaient été entendus, les températures mondiales auraient atteint leur pic au milieu des années 2000 et l’expression « conditions météorologiques extrêmes» n’aurait jamais fait son entrée dans le lexique de l’humanité.

Mais aujourd’hui, ces sommes ne sont qu’une goutte d’eau dans l’océan. Selon un article publié cette année dans la revue Nature, d’ici 2035, le changement climatique entraînera une baisse permanente des revenus à l’échelle mondiale, qui s’élèvera à plus de 10 000 milliards de dollars par an en dollars de 2005. L’article estime que le coût du changement climatique d’ici 2049 se situera entre 38 000 et 59 000 milliards de dollars par an.

L’augmentation vertigineuse des coûts est le résultat direct de l’absence de mesures d’atténuation depuis des décennies, combinée à une consommation accrue de combustibles fossiles. La concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère est passée d’environ 340 parties par million en 1984 à environ 425 parties par million aujourd’hui. Les émissions de CO2 par habitant sont passées de 4,1 à 4,7 milliards de tonnes par an. Le niveau de la mer a augmenté de 20 à 23 cm depuis 1880.

Aujourd'hui, les derniers rapports du service européen Copernicus sur le changement climatique, qui mesure l'augmentation des températures mondiales en utilisant une base de référence de 1850 à 1900, indiquent qu'il est «pratiquement certain» que la température annuelle en 2024 sera supérieure de plus de 1,5 degré Celsius (°C) au niveau préindustriel, et sera probablement plus élevée de plus de 1,55 °C.

Pendant quinze des seize derniers mois, la température moyenne a été supérieure de 1,5 degré à la moyenne préindustrielle. En octobre, elle a été supérieure de 1,65 °C au niveau préindustriel, soit le deuxième mois d'octobre le plus chaud jamais enregistré, dépassé seulement par octobre 2023. Au cours des 12 derniers mois, la température moyenne a augmenté de 1,62 °C.

Selon Copernicus, «l’anomalie de température moyenne pour le reste de l’année 2024 devrait chuter à presque zéro pour que 2024 ne soit pas l’année la plus chaude ».

Les dangers de la hausse des températures sont mis en évidence dans l’Emissions Gap Report du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), qui souligne qu'il faut réduire de 42 pour cent les émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 pour avoir une chance de ramener le réchauffement à moins de 1,5 °C. Il prévient également que, même si les réductions déjà convenues étaient pleinement mises en œuvre, le réchauffement atteindrait toujours 2,6 °C. Si les émissions se maintiennent au niveau actuel, la hausse des températures atteindrait 3,1 °C.

Comme le monde l’a constaté au cours de la dernière décennie, même un réchauffement de moins de 1,5 °C entraîne des niveaux de mortalité et de destruction considérables. Rien qu’aux États-Unis, 24 phénomènes météorologiques extrêmes ont coûté au moins 1 milliard de dollars. Dans le monde entier, les dégâts se chiffrent en centaines de milliards de dollars chaque année, avec des millions de personnes déplacées et des dizaines de milliers de morts.

Ces questions et les coûts réels qu’elles impliquent n’ont pas été abordés dans les débats de Bakou. Tine Stege, envoyée des Îles Marshall pour le climat, a fait remarquer: «Nous partons avec une petite partie du financement dont les pays vulnérables au climat ont un besoin urgent. Ce n’est pas suffisant du tout.»

Si le réchauffement climatique atteint 2 °C, il est probable que les îles Marshall, ainsi que d’autres nations insulaires, disparaîtront tout simplement sous l’océan à mesure que le niveau de la mer continuera d’augmenter.

Le véritable objectif de la COP29, comme cela a été le cas lors des précédents sommets sur le climat, était de trouver de nouvelles façons de spéculer sur les émissions de carbone par le biais des «crédits carbone» et de la «finance climatique», en utilisant le changement climatique comme un autre moyen pour la bourgeoisie de s’enrichir.

L’industrie des combustibles fossiles a joué un rôle important dans les délibérations, avec la présence d’au moins 1 773 délégués de diverses sociétés du secteur du charbon, du pétrole et du gaz. Chevron, ExxonMobil, SOCAR (la compagnie pétrolière publique azerbaïdjanaise) et TotalEnergies (compagnie pétrolière et gazière française) ont tous parrainé la COP29, aux côtés de l’agence de relations publiques Teneo, qui entretient des liens de longue date avec l’industrie énergétique et a joué un rôle dans la faillite d’Enron en 2001.

De plus, comme dans les accords précédents sur le climat, il n’existe aucun mécanisme réel pour contraindre les pays, notamment les États-Unis, la Chine, l’Inde et les pays européens, les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre, à limiter leurs émissions. Un prétendu «cadre» avait été mis en place en 2015 par l’Accord de Paris, selon lequel les pays développés, historiquement responsables de la grande majorité des émissions de gaz à effet de serre, en supporteraient le plus gros coût. Mais cela n’a jamais fonctionné car toutes les réductions sont finalement considérées comme volontaires.

Plus fondamentalement, de tels accords n’ont jamais fonctionné en raison des contradictions inhérentes au système économique capitaliste. Le communiqué de presse du PNUE pour son rapport souligne spécifiquement la nécessité d’une «réforme de l’architecture financière mondiale, d’une action vigoureuse du secteur privé et d’une coopération internationale».

Mais de telles choses sont impossibles dans un monde divisé entre des États-nations rivaux et en guerre, tandis que les entreprises sont poussées par le besoin de profits toujours plus grands. Une lutte contre le changement climatique, un problème mondial exigeant des solutions mondiales, va à l’encontre des intérêts nationaux monétaires et géopolitiques de la classe capitaliste ; elle est donc, dans la pratique, rejetée d’emblée.

Comme le montre le nombre de lobbyistes du secteur de l'énergie présents, les discussions sur le climat ne sont pas un cadre où l'on discute de la sauvegarde de l'environnement de la planète, mais bien plutôt de comment celui-ci peut être exploité davantage. La mort massive causée par le réchauffement climatique et celle encore plus grande sur le point de se produire sont, pour cette couche sociale parasitaire et dépassée, tout bonnement le prix à payer pour faire des affaires.

(Article paru en anglais le 25 novembre 2024)

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