Depuis qu'il a pris parti pour Donald Trump à la présidentielle en août, le fanatique anti-vaccin d'extrême droite Robert F. Kennedy Jr. a joué un rôle de plus en plus important dans la campagne de Trump, en particulier lors de ses derniers événements.
Depuis plus de vingt ans, Kennedy, qui n’a aucun diplôme en médecine, utilise son immense richesse, sa renommée et ses relations pour propager le mensonge pernicieux que les vaccins sont à l’origine de pratiquement tous les troubles et maladies du développement corporel. Sa propre campagne présidentielle indépendante et droitière n’ayant pas réussi à décoller, Kennedy a proposé ses services à Trump après la tentative d’assassinat contre lui à Butler, en Pennsylvanie.
Au meeting fasciste du Madison Square Garden dimanche dernier, Trump a vanté le soutien de Kennedy à sa campagne, déclarant: «L'avoir à mes côtés est un immense honneur. Je vais le laisser se déchaîner sur la santé. Je vais le laisser se déchaîner sur l’alimentation. Je vais le laisser se déchaîner sur les médicaments.»
À la lumière des récentes maladies d’origine alimentaire survenues chez McDonald’s (article en anglais) et Boar’s Head et des libertés déjà accordées par les autorités américaines à l’industrie alimentaire, une telle politique aura des conséquences considérables et mortelles pour la population.
Trump a ensuite invité Kennedy à la tribune pour ses discours de campagne à Las Vegas (Nevada) le jeudi 31 octobre et à Warren (Michigan) le vendredi 1er novembre. Il a promis que Kennedy allait «se charger de la santé des femmes» et a ajouté dans le Michigan que celui-ci allait «se charger de la santé des hommes et de la santé de vos enfants ». Il a ajouté: «J'ai dit tu peux tout faire. Vas-y et amuse-toi bien, Bobby.»
Lorsque les deux hommes sont apparus ensemble dans un restaurant de Dearborn, dans le Michigan vendredi, des journalistes ont demandé à Trump s’il était «à l’aise» avec les opinions de Kennedy sur les vaccins. Trump, ayant Kennedy à ses côtés, a répondu en se vantant que celui-ci «jouerait un grand rôle dans le domaine de la santé».
Interrogé sur le passé anti-vaccin de Kennedy, Trump a déclaré: «Nous allons parler de beaucoup de choses, mais il va jouer un rôle important dans le domaine de la santé, un rôle très important. Il le sait mieux que quiconque. Il a des opinions avec lesquelles je suis très fortement d’accord et ce depuis longtemps.»
Il n’est pas difficile de deviner les opinions sur lesquelles Trump, promoteur de la «Kung Flu » [grippe Kung] et du «virus chinois» et Kennedy sont d’accord, y compris sur la théorie du complot antisémite de Kennedy selon laquelle le coronavirus avait été conçu en sorte qu’il épargne les «Chinois» et les «Juifs ashkénazes».
Depuis le début de la pandémie de COVID-19, les forces de droite opposées à toute mesure de santé publique empiétant sur le cumul des profits ont mené une campagne concentrée contre toutes les stratégies d’atténuation et d’élimination de la pandémie, dont la vaccination. Le fait que Kennedy soit élevé au premier plan de la campagne de Trump à l’approche de l’élection et après celle-ci laisse présager une attaque massive contre les soins de santé publics, y compris contre les programmes de vaccination dans les écoles.
Avant même d’être soutenu par Kennedy, Trump avait promis à plusieurs reprises au cours de sa campagne de «ne pas donner un seul centime à une école qui imposerait une campagne de vaccination ou le port du masque».
Les vaccins et la vaccination précoce des enfants ont permis de prolonger et de sauver des millions de vies dans le monde. De l'éradication de la variole à la réduction de 99 pour cent des cas de polio dans le monde, les vaccins ont, comme le souligne le magazine Scientific American dans un essai, «sauvé plus de vies que presque toute autre intervention».
Une étude publiée en mai dans The Lancet a révélé que depuis 1974, les vaccinations ont permis d’éviter 154 millions de décès, dont ceux de 146 millions d’enfants de moins de cinq ans ; parmi ceux-ci 101 millions avaient moins de 12 mois.
Un Observatoire mondial de la santé a constaté que le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans est passé de 12,8 millions en 1990 à 4,9 millions en 2022, soit une baisse de près de 60 pour cent. Ces chiffres stupéfiants soulignent l’importance essentielle des vaccins.
Depuis la mise en place du premier vaccin contre le COVID-19 le 8 décembre 2020, les vaccinations, malgré le nationalisme vaccinal qui a entraîné une répartition inéquitable de ces traitements, ont permis d’éviter environ 14,4 millions de décès dus à l’infection en seulement un an. Selon une analyse de la surmortalité, les vaccins contre le COVID-19 ont permis d’éviter près de 20 millions de décès. Cela équivaut à une réduction mondiale de 63 pour cent du nombre total de décès. Pourtant, la diffusion mondiale de ces traitements vitaux stagne et pourrait s’inverser. En 2023, 14,5 millions d’enfants n’ont pas été vaccinés.
Pour des sections de l’oligarchie financière, la réduction du nombre de décès, en particulier ceux des éléments «non productifs» de la société, n’est plus considérée comme un objectif louable ou une dépense souhaitable.
En septembre dernier, Kennedy, qui recherchait les faveurs de Trump alors qu’il lui servait de substitut dans la tournée de l’émission de Tucker Carlson à Milwaukee (Wisconsin), a loué les «talents extraordinaires» de l’ex-président, le premier étant «son très bon instinct». Kennedy précisa: «Quand il s’est prononcé pour la première fois, vous vous souvenez, il s’opposait publiquement et très fort aux confinements.»
Il a poursivi ainsi:
Il était pour l'hydroxychloroquine, il était pour les médecines alternatives. Il était contre les masques, mais il était entouré de bureaucrates qui ont fini par s'opposer à ces hypothèses et nous ont poussés à adopter des politiques qui ont été vraiment néfastes pour notre pays.
Il ne le fera plus.
L’attaque de Kennedy contre les mesures de confinement est le cri de ralliement de certaines parties de l’oligarchie financière qui restent indignées de ce que les travailleurs aient pris les choses en main et aient quitté leur travail en mars 2020, lorsque la menace du virus COVID-19 était devenue évidente. Alors que les bureaucraties syndicales, la Maison Blanche de Trump et le Congrès étaient conscients du danger que représentait le virus, ils ont tout fait en leur pouvoir pour minimiser le danger et maintenir les travailleurs au travail à produire du bénéfice.
Lorsque Kennedy loue le «très bon instinct» de Trump s’opposant aux confinements, il loue le fait que le fasciste Trump soit prêt à sacrifier la vie de n’importe quel nombre de travailleurs au nom du profit. Il faut se rappeler que lorsque les travailleurs ont quitté leur travail, Trump est allé sur Fox News et sur ses comptes de réseaux sociaux pour y attaquer les fermetures de lieux de travail et qu’il a mobilisé ses partisans, organisés dans les milices des Proud Boys et des Three Percenter.
Le 30 avril 2020, des fascistes armés de fusils AR-15 ont pris d’assaut le Capitole à Lansing, dans le Michigan, et menacé les législateurs de violence s’ils n’«ouvraient» pas le Michigan à une infection de masse.
L’avancement de Kennedy dans les derniers jours de la campagne électorale de Trump est un signal que de larges pans de l’oligarchie financière sont prêts à mettre fin à la vaccination publique et à banaliser les décès massifs dus à des maladies infectieuses jusque-là contenues.
Si Kennedy parvient à séduire un certain public avec ses théories du complot anti-vaccins, c’est entièrement la faute du Parti démocrate. Aux élections de 2020, des millions de gens ont cru à tort que voter pour Joe Biden équivalait à voter pour «suivre la science» et pour promouvoir la santé publique.
Au lieu de quoi, après son accession à la présidence suite au coup d’État manqué de Trump, Biden, avec l’aide des bureaucraties syndicales comme celle de la Fédération américaine des enseignants, a cherché à rouvrir les écoles pour que les parents puissent retourner au travail et générer des profits pour Wall Street. Biden et les CDC (Centres de contrôle et prévention des maladies) et avec eux le Dr Anthony Fauci, ont promu la stratégie du «vaccin uniquement» comme solution miracle pour faire face à la pandémie, ce qui a eu pour effet de désinformer le public tout en apportant un soutien à la droite fasciste.
Au lieu d’associer les vaccinations à tout l’arsenal des mesures sanitaires pour éliminer le COVID-19, comme la réfection des infrastructures qui pourraient fournir un air propre et sûr, le gouvernement Biden, employant les tactiques de son prédécesseur, a laissé aux États individuels, y compris ceux dirigés par des gouverneurs d’extrême droite, le soin de définir leurs propres politiques.
Cela a permis aux conceptions les plus réactionnaires et antiscientifiques de prospérer, tandis que les données montrant une infection et des décès de masse étaient occultées et que les nouveaux variants se répandaient – et continuent de se répandre – sans cesse. L’ascension de RFK Jr. en tant que fervent partisan de l’anti-vaccination est liée au refus des démocrates d’employer les mesures sanitaires connues pour éliminer la pandémie. Plus de 800 000 personnes sont mortes du COVID-19 aux États-Unis sous Biden, et 50 000 autres mourront au cours de la cinquième année de la pandémie.
En opposition à la politique anti-science de la classe dirigeante qui place le «droit au profit» au-dessus de tout, la classe ouvrière doit adopter une politique de santé publique socialiste et consciente de sa classe, qui donne la priorité à la vie et à la sécurité des travailleurs et de leurs familles. Cela nécessite une lutte politique contre les partis politiques capitalistes et leur système.
(Article paru en anglais le 2 novembre 2024)