Les remarques suivantes ont été prononcées lors de la réunion de dimanche dernier du Comité de la base des travailleurs de Boeing intitulé «Mobilisez la classe ouvrière derrière la grève de Boeing!» Près de 200 travailleurs, dont des dizaines en dehors des États-Unis, se sont réunis pour discuter d’une stratégie globale pour gagner la grève et en faire le début d’une contre-offensive plus vaste de la classe ouvrière.
Des travailleurs de six pays et de quatre continents ont parlé de l’unité entre la lutte des travailleurs de Boeing et la lutte des classes dans leur propre pays. «L’énorme pouvoir social de la classe ouvrière, aux États-Unis et dans le monde, doit être activé afin d’infliger une défaite massive à l’oligarchie des entreprises», a expliqué le Comité dans l’annonce de sa réunion.
Pour contacter le Boeing Workers Rank-and-File Committee, envoyez un texto au 406-414-7648, un courriel à boeingworkersrfc@gmail.com ou remplissez le formulaire à la fin du présent article.
Bonjour. Je suis Daniel Berkley, postier rural à la Société canadienne des postes et un membre actif du comité de la base des travailleurs des postes (Canada). Je vous remercie de me donner l’occasion de participer à cette réunion.
Les conventions collectives des quelque 55.000 facteurs de Postes Canada devaient expirer au début de 2022. Au lieu de se préparer à des négociations ou à des mesures de grève lorsque nos conventions collectives ont expiré il y a près de trois ans, le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) a unilatéralement accepté de prolonger les conventions collectives de deux ans. Cette décision a été prise en pleine pandémie de COVID-19. Ces prolongations ont maintenant expiré depuis plus de sept mois, et nous en sommes à la dernière étape de négociations contractuelles prolongées.
Notre vote de grève s’est tenu il y a sept jours, et le STTP a annoncé les résultats du vote deux jours plus tard, avec 96% des travailleurs postaux votant en faveur d’une action de grève. Peu avant l’annonce officielle des résultats, un communiqué du Comité de la base des travailleurs des postes (Canada) encourageait les travailleurs à voter OUI à la grève, tout en les avertissant que «si la bureaucratie du STTP fait ce qu’elle veut, nous n’irons jamais en grève, même si nous obtenons un vote de grève unanime».
Cet avertissement s’est confirmé lorsque le STTP a annoncé les résultats du vote en affirmant qu’ils ne compteraient que si le Conseil exécutif national déterminait qu’une action de grève est «nécessaire pour obtenir satisfaction de nos revendications [et] empêcher les reculs devant l’employeur». Je pense que les membres parlent d’eux-mêmes avec un mandat aussi écrasant, mais le syndicat ne respecte manifestement pas les 96% qui ont voté en faveur de la grève.
Même si les syndicats lancent des appels démagogiques aux travailleurs, il n’en reste pas moins que nos syndicats sont alignés dans une alliance corporatiste tripartite avec le gouvernement et le patronat. Les bureaucrates syndicaux lâches – y compris le STTP et l’Association internationale des machinistes aux États-Unis – ne songeraient jamais à défier une législation briseuse de grève, qui nécessiterait une large mobilisation des travailleurs des diverses industries et régions géographiques, comme nous le faisons en ce moment même.
Les travailleurs, dont moi-même et d’autres personnes présentes ici aujourd’hui, ont vécu toute une série de négociations dans le cadre desquelles nous avons fini par affronter les gouvernements capitalistes. Biden appelle la bureaucratie syndicale son «OTAN domestique». Par là il entend qu’elle l’aide à sécuriser le «front intérieur» pour la guerre. La bureaucratie syndicale joue consciencieusement son rôle de classe en nous abandonnant promptement sur l’autel tout-puissant du profit privé.
Depuis l’expiration de nos conventions collectives ces sept derniers mois, l’IA et l’automatisation ont eu toute une incidence sur nos lieux de travail, qu’il s’agisse des centres de tri, des espaces de vente au détail ou des dépôts de courrier. Que l’on parle des débardeurs de la côte Est, des cheminots du CN et du CPKC, et bien sûr, de Boeing – et je suis sûr qu’on peut trouver d’autres exemples – il est devenu clair que les assauts contre les travailleurs sont négociés et appliqués par les bureaucraties syndicales. Ces bureaucraties sont plus préoccupées d’assurer la rentabilité des entreprises que des conditions de travail ou des salaires décents.
Par opposition, la classe ouvrière internationale partage les mêmes intérêts fondamentaux, et nos négociations collectives ici sont liées aux conditions de travail qui règnent ailleurs en Amérique du Nord et même dans le monde entier.
Les nouvelles technologies d’automatisation telles que le système de mise en séquence du courrier et les technologies d’intelligence artificielle telles que le routage dynamique ont le potentiel de raccourcir nos semaines de travail et d’améliorer nos emplois, mais ce potentiel ne peut être réalisé que sous le contrôle démocratique des travailleurs eux-mêmes.
Je pense que nous devons rompre avec les limites des organisations syndicales qui nous démobilisent et nous isolent, en opposant à leur autorité dictatoriale nos organes de pouvoir des travailleurs. C’est pourquoi nous mettons sur pied des comités de la base alignés sur l’Alliance ouvrière internationale des comités de base (IWA-RFC).
Cette réunion de la base a été organisée par nos frères et sœurs des États-Unis. Notre capacité à rejoindre de plus vastes sections de travailleurs est une expression des conditions objectives qui nous sont imposées au niveau international. Dans tous les secteurs et dans toutes les régions, les travailleurs sont confrontés à une augmentation de leur charge de travail, à des baisses de salaire réel et à la détérioration de leur sécurité en milieu de travail.
Bien que nous ayons subi des assauts sauvages contre nos conditions de travail au cours des dernières décennies, y compris des attaques contre notre régime de retraite à prestations définies, nos temps libres les fins de semaine et nos temps de vacances, nous sommes aujourd’hui dans une position bien plus forte que nos frères et sœurs ne l’étaient dans le passé pour défier les attaques du gouvernement et des syndicats et gagner nos justes revendications dans la lutte.
Des secteurs clés de la classe ouvrière sont en effet déjà en grève, ou en rébellion contre leur bureaucratie syndicale, partout en Amérique du Nord – se battant bien souvent pour les mêmes revendications que les nôtres.
Le 1er octobre, 45.000 débardeurs de la côte Est se sont mis en grève pour réclamer une sécurité d’emploi, des augmentations de salaire et s’opposer à l’utilisation de l’automatisation qui détruit leurs emplois. Pour sa part, le syndicat des UAW est totalement discrédité aux yeux des travailleurs de l’automobile, car il applique des conventions prétendument «historiques» qui, en réalité, permettent de licencier des dizaines de milliers de personnes. Et bien sûr, comme cette réunion le démontre clairement, les machinistes de Boeing font face à non seulement à l’entreprise, mais aussi au gouvernement et à la bureaucratie syndicale.
Bref, nous sommes tous dans le même bateau! Je vous remercie en terminant de m’avoir donné l’occasion de participer à cette réunion et je vous salue.
(Article paru en anglais le 29 octobre 2024)