États-Unis : À la veille d’une guerre contre l’Iran, la ministre du Travail se rend à Seattle pour mettre un terme à la grève chez Boeing

La ministre du Travail par intérim Julie Su s'exprime devant le président Joe Biden lors d'une visite au centre de formation de l'U.A. Local 190 à Ann Arbor, dans le Michigan, le vendredi 6 septembre 2024. [AP Photo/Paul Sancya]

Participez à la lutte pour que la base prenne le contrôle ! Adhérez au Comité de base des travailleurs de Boeing en envoyant un SMS au (406) 414-7648 ou en écrivant à boeingworkersrfc@gmail.com.

La ministre du Travail par intérim, Julie Su, s'est rendue à Seattle lundi afin de discuter avec des représentants du syndicat et de l'entreprise dans le but de mettre fin à la grève de quatre semaines des 33.000 travailleurs de Boeing, a rapporté l'agence Reuters lundi après-midi.

L’intervention de Su est l'acte le plus manifeste du gouvernement contre la grève jusqu'à présent, après une série de déclarations au cours de la semaine dernière. Alors que l'activité de Su sera inévitablement masquée par des phrases sur « un accord équitable », sa tâche est d'imposer, grâce à une étroite collaboration avec la bureaucratie de l'Association internationale des machinistes (AIM), un contrat favorable à l’entreprise.

L'année dernière, Su s'est rendue sur la côte ouest alors que les débardeurs commençaient à mener des grèves sauvages pour protester contre le fait qu'ils avaient continué à travailler pendant un an sans convention collective. En quelques jours, Su a négocié un nouvel accord, que la bureaucratie de l'ILWU (International Longshore and Warehouse Union) s'est empressée de faire adopter. Le fait qu'elle soit maintenant envoyée personnellement à Seattle indique que la Maison-Blanche a l'intention de mettre fin à la grève dans les prochains jours.

La situation est urgente. Les travailleurs de Boeing doivent adopter une nouvelle stratégie, basée sur la compréhension du fait qu'ils sont en lutte non seulement contre Boeing, mais aussi contre le gouvernement et l'ensemble de la classe capitaliste. Pour ce faire, ils doivent créer le Comité de base des travailleurs de Boeing afin d'établir des liens avec les travailleurs de tous les États-Unis et du monde entier. La rébellion des travailleurs de Boeing contre l'appareil de l'AIM, qui ne voulait pas de grève et qui tente d'affamer les travailleurs, doit être reliée à une lutte plus large contre l'exploitation et la guerre.

La Maison-Blanche est déterminée à mettre fin à une grève contre un grand entrepreneur de la défense alors qu'elle prépare une guerre majeure contre l'Iran. Les États-Unis ont annoncé qu'ils déplaçaient des troupes américaines et des systèmes de défense aérienne en Israël afin de s'immiscer dans le conflit. Cette escalade, après que Washington a soutenu et armé le génocide israélien à Gaza pendant plus d'un an, vise à restaurer la domination américaine sur le Moyen-Orient et ses principales ressources énergétiques et voies d'approvisionnement.

L'intervention de l'administration Biden chez Boeing fait suite à son rôle dans l'arrêt d'une grève de trois jours sur les docks de la côte est et du golfe du Mexique il y a deux semaines. La Maison-Blanche utilise la bureaucratie syndicale nationaliste et pro-patronale, que Biden qualifie d'« OTAN nationale », pour réprimer l'opposition intérieure aux guerres de l'impérialisme américain à l'étranger et à la guerre contre la classe ouvrière à l'intérieur du pays.

Boeing, confiant dans le soutien du gouvernement, est passé à l'offensive en annonçant vendredi dernier qu'il allait licencier 10 % de sa main-d'œuvre mondiale, soit 17.000 employés.

Vendredi, lors des plaidoiries au tribunal concernant un accord sur deux accidents mortels survenus à bord d'avions de ligne Boeing, qui ont fait 346 morts, les avocats de la société ont affirmé avec arrogance que le géant de l'aérospatiale « est un pilier de l'économie nationale et de la défense nationale » et qu'il ne devrait donc pas être soumis à des sanctions plus sévères pour les graves problèmes de sécurité sur les avions Boeing. Un avocat a notamment prévenu que Boeing serait privé de futurs contrats de défense et que la « chaîne d'approvisionnement mondiale et nationale » serait « remise en question » si l'accord actuel n'était pas accepté.

Ce thème est repris dans la presse bourgeoise. Dimanche, le Wall Street Journal a publié un éditorial accusant les travailleurs de Boeing de « prendre Boeing en otage ». En réalité, c'est Boeing et ses actionnaires qui prennent l'économie en otage en brandissant la menace de licenciements collectifs en représailles à la grève.

Le Journal écrit : « Bien que la grève n'ait pas le même potentiel de paralyser l'économie américaine que l'arrêt des débardeurs, elle pourrait avoir des conséquences plus importantes pour la sécurité nationale. La grève retarde la production d'avions militaires et les licenciements pourraient réduire la recherche et le développement dans les domaines de la défense et de l'espace. »

Jerry White, candidat du Parti de l'égalité socialiste à la vice-présidence des États-Unis, a publié lundi soir une déclaration dénonçant les mesures prises par l'administration Biden pour mettre fin à la grève.

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« En intervenant pour mettre fin à la grève, l'administration Biden défend les criminels d'entreprise impliqués dans la mort de centaines de personnes », a-t-il écrit. « Des années de réduction des coûts acharnée et axée sur le profit ont conduit à de graves problèmes de sécurité sur les avions 737 MAX de la société, y compris deux accidents mortels en 2018 et 2019. En outre, la mort suspecte de deux lanceurs d'alerte de Boeing n'a toujours pas été expliquée de manière adéquate. Ce sont des vies qui ont été sacrifiées au profit. »

White a dénoncé l'escalade de la guerre au Moyen-Orient et le génocide à Gaza, notant que « les bombes qu'Israël, le chien d'attaque des États-Unis au Moyen-Orient, fait pleuvoir sur la population sans défense de Gaza sont fabriquées aux États-Unis et expédiées par la Maison-Blanche en Israël aussi vite qu'elles peuvent être fabriquées ».

Il a souligné la nécessité d'une mobilisation totale de l'ensemble de la classe ouvrière, « qui a un intérêt dans cette grève parce qu'il ne s'agit pas seulement d'une lutte contre les dirigeants de Boeing, mais contre l'ensemble du système de profit capitaliste, qui subordonne toute prise de décision au profit ».

Il a ajouté : « Le pouvoir irresponsable de Boeing et des autres grandes entreprises doit être brisé, et leurs actifs doivent être mis à la disposition des besoins humains, et non de Wall Street. J'appelle les travailleurs à lutter pour la transformation de Boeing et des autres industries essentielles en services publics, gérés démocratiquement par les travailleurs eux-mêmes. »

Un machiniste de Boeing : « Maintenant que la grève des débardeurs a été arrêtée, ils peuvent se concentrer sur nous »

Un machiniste de Boeing a déclaré au WSWS : « Maintenant que la grève des débardeurs a été arrêtée, ils peuvent se concentrer sur nous. C'est comme ce qui s'est passé en 2022 avec les chemins de fer. Les cheminots se sont fait avoir. J'espère vraiment que cela ne nous arrivera pas. »

Le travailleur poursuit : « Les licenciements en font également partie. J'ai parlé à l'un de mes amis ingénieurs et ils sont tous très inquiets de l'impact que cela aura sur eux. Ils ne sont pas licenciés par ancienneté, donc même s'il est là depuis 20 ans, il pourrait être licencié.

« Mes amis machinistes ne cessent de me demander quand nous allons reprendre les piquets de grève. Les piquets de grève sont très peu nombreux et il n'y a pas vraiment de calendrier de piquetage comme au début de la grève.

« Les gens sont partis à la recherche d'un autre emploi parce que les indemnités de grève (250 dollars par semaine) ne sont pas suffisantes. Cela signifie aussi qu'il y a moins de monde sur le piquet de grève. Je connais également plusieurs collègues originaires du Viêt Nam qui sont rentrés chez eux après la première semaine environ pour rester avec leur famille là-bas. Ils reviendront après la grève, mais ils n'avaient pas les moyens de rester. »

(Article paru en anglais le 15 octobre 2024)

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