Le SEP (Australie) tient avec succès son septième congrès national

Du 3 au 6 octobre, le Socialist Equality Party (SEP, Parti de l’égalité socialiste] en Australie a tenu un congrès national de quatre jours, au cours duquel ont été adoptées deux résolutions pour guider son travail des deux prochaines années et a été élue la direction du parti.

L'événement a été caractérisé par le niveau élevé des discussions qui furent intensives. Y particpèrent les nouveaux membres ayant rejoint le SEP depuis le dernier Congrès il y a deux ans, autant que des camarades politisés ces 12 derniers mois par le génocide de Gaza et ceux actifs au sein du SEP depuis des décennies.

Ce fut un congrès résolument international, tant par la perspective politique qui y fut définie que par la participation. Des membres dirigeants de pratiquement toutes les sections et groupes de soutien du Comité international de la Quatrième Internationale ont présenté des salutations, faisant ressortir les points communs des problèmes auxquels la classe ouvrière est confrontée partout dans le monde et rendant palpable la lutte unifiée du mouvement trotskyste mondial pour un programme socialiste, révolutionnaire et international.

Dans un rapport d’ouverture détaillé, la secrétaire nationale du SEP (Australie), Cheryl Crisp, a souligné que les délibérations du Congrès et les tâches auxquelles le parti est confronté ne peuvent être comprises que dans leur contexte international et historique.

Le Congrès se tenait dans un contexte international explosif, a déclaré Crisp, caractérisé par la plus grande éruption du militarisme impérialiste depuis 1945. Alors que le Congrès se réunissait, les puissances impérialistes poussaient deux des théâtres de la guerre mondiale en train de se développer au bord de l’embrasement massif, menaçant de déclencher une Troisième Guerre mondiale.

Crisp a déclaré: «Alors que le Congrès se réunit, l’invasion terrestre du Liban par Israël a commencé et est menée avec un degré de barbarie comparable à la transformation de Gaza en champ de ruine, où environ 200 000 personnes ont été tuées et 2 millions d’habitants déplacés à plusieurs reprises.»

Dans les jours et semaines qui avaient précédé, le régime sioniste, en coordination avec les États-Unis et les autres grandes puissances, avait mené une série d’attentats terroristes au Liban, bombardé sa capitale densément peuplée et assassiné Hassan Nasrallah, le chef du parti politique Hezbollah. Ces crimes de guerre, a averti Crisp, montrent que le génocide des Palestiniens n’est qu’une des composantes d’une guerre plus générale visant non seulement le Liban mais aussi l’Iran.

Plus généralement, cela avait démontré qu’il «n’existe aucune ligne rouge ou limite qui ne soit et ne sera pas franchie par l’impérialisme. Il n’existe aucun obstacle en termes de droit international ou de conséquences d’une guerre nucléaire et de l’annihilation possible de l’humanité».

Cela était apparu clairement sur un autre théâtre du conflit en développement, la guerre par procuration menée par les États-Unis et l’OTAN contre la Russie en Ukraine.

En 2022, Washington et ses alliés avaient poussé le régime russe à envahir l’Ukraine, un acte réactionnaire et nationaliste, afin de mettre en œuvre les plans, existant de longue date, d’un conflit avec la Russie. Aujourd’hui, a prévenu Crisp, ils poussent Poutine à utiliser potentiellement des armes nucléaires, entre autre en franchissant les «lignes rouges» que le président américain Joe Biden et d’autres dirigeants impérialistes avaient déjà admises comme pouvant conduire à une guerre mondiale, notamment en autorisant l’utilisation des armes de l’OTAN pour frapper la Russie en profondeur.

La marche vers la guerre, souligna Crisp, exprimait l’effondrement historique du capitalisme mondial, qui provoquait également une radicalisation politique et l’entrée de la classe ouvrière dans la lutte. Le Comité international de la Quatrième Internationale (CIQI) et ses sections étaient les seuls à lutter pour doter ce mouvement en développement d’une perspective révolutionnaire et socialiste, seul moyen de mettre un terme à la menace que le capitalisme fait peser sur l’existence même de l’humanité.

Dans ce contexte, Crisp a évoqué l’importance de la lutte prolongée pour le trotskysme représentée par le CIQI. Ce dernier est aujourd’hui attaqué, notamment par la publication récente d’une biographie calomnieuse sur Gerry Healy, ancien dirigeant de la Quatrième Internationale qui a joué un rôle crucial dans les années 1950 et 1960, et de deux livres d’universitaires britanniques dénonçant le trotskysme comme «non pertinent».

Ces attaques d’universitaires, selon Crisp, ont été menées au nom d’un milieu pseudo de gauche de la classe moyenne supérieure, associé aux organisations bourgeoises telles que le Parti démocrate aux États-Unis et le Parti travailliste en Grande-Bretagne. Ces ouvrages étaient entre autre des tentatives désespérées de promouvoir des solutions réformistes, et ce dans les conditions d’une crise mondiale massive qui pose directement l’alternative du socialisme ou de la barbarie.

Ces livres constituent un aveu tacite, de la part des opposants politiques du CIQI, que sa perspective historiquement fondée et sa lutte pour un leadership révolutionnaire recoupent les expériences d’un nombre croissant de travailleurs et de jeunes.

L'introduction de Crisp donna le ton à toute la discussion qui s’ensuivit. Les membres du parti ont parlé des principaux développements internationaux et de leurs implications pour le travail du SEP. Nick Beams, membre du comité éditorial international du WSWS, a présenté une contribution approfondie sur l'aggravation de la crise économique mondiale et les signes d'une nouvelle crise financière, qui, a-il-dit, sont essentiellement la cause de l'éruption de la guerre.

De nombreuses contributions ont évoqué l'importance de l'histoire du CIQI. Les membres ont évoqué l'importance de travailler sur les conférences données à l'université d'été 2023 du SEP américain. En expliquant la lutte pour le trotskysme sur tout un siècle, ces conférences ont renforcé la compréhension qu’ont les camarades des expériences stratégiques de la classe ouvrière au XXe siècle, décisives pour le développement de la conscience socialiste aujourd'hui.

Le Comité national sortant du parti a présenté au Congrès un projet de résolution intitulé : « L’effondrement du capitalisme, la lutte contre la guerre et les tâches du Parti de l’égalité socialiste». Le document, qui sera publié sur le WSWS, a fait l’objet de discussions approfondies dans les branches du parti avant le Congrès.

En présentant la résolution, Oscar Grenfell, membre du Comité national du SEP, a développé certains des thèmes du document. Parmi ceux-ci figurait le rôle de plus en plus central de l'Australie dans la marche vers la guerre mondiale ; notamment son soutien actif au génocide à Gaza et son soutien à la guerre des États-Unis et de l'OTAN contre la Russie. Le pays était surtout en train de se transformer en base d'opérations centrale pour les préparatifs des États-Unis en vue d'un conflit avec la Chine, regardée comme la principale menace à la domination impérialiste américaine.

Grenfell a souligné l'importance de cette militarisation menée à bien par le gouvernement travailliste du Premier ministre Anthony Albanese. Cela était dans la continuité du rôle joué par le Parti travailliste comme parti prééminent de la guerre impérialiste et de la répression tout au long de son histoire.

Grenfell a souligné que la lutte du SEP pour mobiliser la classe ouvrière contre la guerre sur la base d'un programme socialiste exigeait une lutte continue contre toutes les autres tendances politiques, en particulier la pseudo-gauche. La position de celle-ci dans le mouvement de protestation sur Gaza, consistant à promouvoir continuellement des appels vains au Parti travailliste, était une tentative de faire obstacle à un véritable mouvement anti-guerre. Cela allait de pair avec le soutien total de ces tendances à d'autres campagnes de guerre impérialistes, comme la guerre contre la Russie.

Dans un contexte de crise politique de plus en plus grave, la résolution mettait en garde contre une dérive autoritaire, qui se traduisait par la diffamation des manifestants anti-génocide et, en particulier, par la promotion bipartite de la xénophobie anti-immigrés. En opposition à l’ensemble de l’establishment parlementaire, qui virait à droite, le SEP luttait pour l’indépendance politique de la classe ouvrière et le développement d’un nouveau mouvement socialiste de masse.

L'importance centrale de l'intervention active du SEP a été soulignée dans un rapport du secrétaire national adjoint du parti, Max Boddy. Il a évoqué la lutte récemment menée par le SEP pour gagner 1 500 membres électoraux (ME) afin de pouvoir retrouver son statut de parti politique enregistré au niveau fédéral. La campagne des ME a démontré l'existence d'un électorat croissant pour la perspective révolutionnaire et socialiste du SEP, a déclaré Boddy, expliquant qu'elle faisait partie d'une série d'interventions cruciales de sections du CIQI à travers le monde.

Boddy a placé la campagne des ME dans le contexte de la radicalisation politique croissante et de la montée de la lutte des classes au cours des deux années précédentes. Cela comprenait a notamment des luttes importantes des infirmières, des travailleurs de la santé et d'autres sections de travailleurs, dans lesquelles le SEP était intervenu. Il a expliqué l'importance de la mise sous administration par le gouvernement fédéral travailliste de la branche construction du syndicat CFMEU (employés de la construction, de la foresterie et de la marine) en juillet, une forme de dictature d'État de fait. Il s'agissait d'une mesure préventive visant à empêcher des luttes majeures de la classe ouvrière.

Boddy a déclaré que toutes les luttes qui s’étaient développées avaient posé la nécessité d’une rébellion contre la bureaucratie syndicale pro-patronat. Cette dernière avait aidé le Parti travailliste à imposer le plus grand recul du niveau de vie de la classe ouvrière depuis des décennies. Le SEP avait accumulé une expérience importante dans la lutte pour aider les travailleurs à constituer des comités de la base au cours des deux années précédentes, expérience qui devait être approfondie et élargie.

Mike Head, membre du Comité national, a parlé de la lutte pour la libération de Bogdan Syrotiuk, un trotskyste emprisonné par le régime fascisant ukrainien. Head a expliqué que Syrotiuk était persécuté pour avoir promu la perspective socialiste et internationaliste d'unification des travailleurs ukrainiens et russes contre la guerre des États-Unis et de l'OTAN et contre tous les régimes de la région.

Les salutations des dirigeants du CIQI ont fait partie intégrante du Congrès, soulignant son caractère international. Des représentants du CIQI venus des États-Unis, de Grande-Bretagne, d'Allemagne, du Sri Lanka, du Brésil, du Canada, de Nouvelle-Zélande et de Turquie ont pris la parole lors de l'événement, détaillant l'impact de la crise qui se développe dans ces régions et décrivant les interventions actives du CIQI.

Le candidat du SEP (États-Unis) à la présidence, Joe Kishore, s'est adressé au Congrès sur la marche vers la guerre de l'impérialisme américain et de l'intervention du SEP, dans le contexte d'une crise politique sans précédent aux États-Unis. Le candidat à la vice-présidence, Jerry White, a décrit les expériences du SEP dans une série de conflits sociaux clés.

Le secrétaire général du SEP au Sri Lanka, Deepal Jayasekera, a évoqué la crise politique dans ce pays, qui s’est manifestée dans l'élection du parti populiste de droite Janatha Vimukthi Peramuna (JVP) à l'élection présidentielle du mois dernier. Ce résultat surprise soulignait que la crise politique, qui avait entraîné un soulèvement de masse en 2022, s'était aggravée. Le gouvernement du JVP, a averti Jayasekera, imposerait les diktats d'austérité du FMI et réprimerait l'opposition. Le SEP était le seul parti à lutter pour mobiliser la classe ouvrière et les pauvres des zones rurales autour d'un programme socialiste, sur fond d'une énorme crise sociale.

Le Congrès a adopté à l'unanimité la principale résolution présentée aux membres, ainsi qu'une résolution s'engageant à intensifier la lutte pour la libération de Syrotiuk.

Il a élu un nouveau Comité national, qui comprend un large éventail de générations et d’expériences au sein du parti, allant des membres plus jeunes qui jouent aujourd’hui un rôle politique important à ceux qui sont dans la direction du mouvement trotskyste depuis des décennies.

Le Comité national a réélu Cheryl Crisp comme secrétaire nationale, Max Boddy comme secrétaire national adjoint et Peter Symonds comme rédacteur national du WSWS.

Dans ses remarques de clôture au Congrès, Crisp a souligné que la période à venir serait une période de bouleversements sociaux et politiques. Le parti devait constamment fonder ses activités sur les expériences historiques du mouvement trotskyste mondial. Il devait intervenir avec audace et de manière active dans la lutte pour résoudre la crise de la direction révolutionnaire de la classe ouvrière, dans le cadre de la lutte du CIQI pour la perspective de la révolution socialiste mondiale.

(Article paru en anglais le 12 octobre 2024)

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