L’ouragan Helene sème la dévastation dans le sud des Appalaches : 1000 disparus et au moins 66 morts

Les berges de la rivière Swannanoa débordent suite à l'ouragan Helene, vendredi 27 septembre 2024, à Asheville, en Caroline du Nord. [AP Photo/Erik Verduzco]

Le bilan de l'ouragan Helene s'élève à 66 morts dans cinq États. Ce chiffre va certainement augmenter au fur et à mesure que le vent et les eaux de crue, de la Floride à l'Ohio, commenceront à se retirer dans les jours à venir, et que d'autres corps seront retrouvés.

Dix décès ont été confirmés dans le comté de Buncombe, en Caroline du Nord, où se trouve la ville d'Asheville, la plus grande de la région. « Nous assistons à une dévastation biblique dans tout le comté », a déclaré Ryan Cole, responsable des situations d'urgence pour le comté de Buncombe. « Il s'agit de la catastrophe naturelle la plus importante que chacun d'entre nous ait jamais vue. »

Au moins 1000 personnes sont portées disparues dans le sud des Appalaches, dans l'ouest de la Caroline du Nord et l'est du Tennessee, après que la gigantesque tempête a déversé plus d'un mètre de pluie sur la région.

Depuis samedi, on dénombre au moins 11 morts en Floride, 17 en Géorgie et 23 en Caroline du Sud. Un décès a été signalé en Virginie.

Une grande partie de la zone touchée étant impraticable en raison des inondations et des coulées de boue, et des centaines, voire des milliers de personnes étant privées d'électricité et de moyens de communication, il est certain que ce nombre augmentera considérablement dans les jours à venir, à mesure que les secours se poursuivront.

Les médias sociaux regorgent déjà de photos d'êtres chers disparus, dont beaucoup étaient en train de fuir devant les torrents d'eau qui dévalaient les pentes abruptes des Smoky Mountains et des Blue Ridge Mountains pour se jeter dans les vallées en contrebas.

Le premier ouragan de catégorie 4 à se développer dans la région de Big Bend en Floride a provoqué des ondes de tempête record, dans certains cas, comme dans la baie de Tampa, battant le record établi par l'ouragan Idalia il y a seulement 13 mois.

La tempête s'est rapidement intensifiée au-dessus du golfe du Mexique jeudi, passant d'une tempête de catégorie 1 à une énorme tempête de catégorie 4 en moins de 24 heures, avant de s'abattre sur la Floride, puis de foncer vers le nord en direction de la Géorgie, des Caroline et du Tennessee.

Le renforcement rapide d'Helene et les énormes volumes d'eau qu'elle a balayés puis déversés comme une série de bombes sur les campagnes éloignées du golfe du Mexique étaient tout à fait prévisibles, compte tenu de l'analyse du changement climatique faite par d'innombrables études scientifiques et météorologiques. Pourtant, rien n'a été fait pour s'y préparer.

Alors que les politiciens capitalistes murmuraient des condoléances hypocrites et offraient des prières pour les morts et les disparus, et que la Maison-Blanche annonçait que le président Joe Biden se rendrait dans la région ravagée par la tempête, les habitants d'Asheville et de nombreuses autres régions durement touchées ont déclaré aux médias bourgeois qu'ils n'avaient reçu aucune aide de la part de l'Agence fédérale de gestion des urgences (FEMA) et très peu de la part des autorités des États.

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Joseph Kishore, candidat du Parti de l'égalité socialiste à la présidence des États-Unis, a publié une déclaration condamnant ce qu'il appelle « la négligence flagrante des partis démocrate et républicain face à la dévastation catastrophique causée par l'ouragan Helene ».

La destruction causée par l'ouragan Hélène n'est pas seulement le résultat d'une catastrophe naturelle, mais aussi de l'incapacité de la classe dirigeante, depuis des décennies, à répondre aux besoins sociaux les plus élémentaires. Les systèmes d'alerte d'urgence étaient inadéquats et il n'y avait pas de plan coordonné pour les évacuations massives. Les routes, les ponts, les barrages et les digues – éléments fondamentaux de l'infrastructure sociale – s'effondrent après des décennies de négligence. De nombreuses communautés se sont donc retrouvées vulnérables face à la force de la tempête, disposant de peu de moyens de protection.

L'absence d'une réponse adéquate aux situations d'urgence n'est pas accidentelle, mais résulte de la subordination de tous les besoins sociaux aux intérêts des riches. Depuis des décennies, les administrations démocrates et républicaines ont systématiquement réduit le financement de la préparation aux catastrophes, des infrastructures et des services publics, tout en consacrant des milliers de milliards de dollars à la guerre et au renflouement des banques.

Dans ces conditions, des millions de travailleurs sont laissés à eux-mêmes face à des catastrophes comme l'ouragan Helene.

La dévastation

Vendredi, le gouverneur de Caroline du Nord, Roy Cooper, a fermé toutes les routes de l'ouest de l'État. Actuellement, plus de 400 routes restent fermées. Le ministère des Transports du Tennessee recommande aux automobilistes d'éviter de circuler dans la région, car toutes les routes sont considérées comme dangereuses.

La dévastation du système de transport dans la seule région est immense.

  • Une large section de l'Interstate 40 en direction de l'est, la seule grande artère de transport à travers les Smoky Mountains reliant le Tennessee à la Caroline du Nord, s'est effondrée dans la rivière Pigeon près de la frontière entre le Tennessee et la Caroline du Nord.
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  • L'US Route 74, l'autoroute de Caroline du Nord qui relie les villes d'Asheville, de Charlotte et de Wilmington à la côte atlantique, est complètement inondée par les eaux de crue.
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  • L'Interstate 26 a été emportée par les eaux à la sortie 40, à la frontière entre la Caroline du Nord et Erwin, dans le Tennessee.
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  • Dans le Tennessee, une vidéo a capturé le moment où le pont Kisner sur l'autoroute 107 dans la ville d'Afton a succombé aux eaux tumultueuses de la rivière Nolichucky.
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Des opérations de transport aérien sont en cours pour secourir les habitants coupés du monde par les inondations et les dégâts causés aux routes secondaires et tertiaires.

  • Dans le Tennessee, 54 personnes ont été secourues sur le toit de l'hôpital du comté d'Unicoi, la ville ayant été rapidement inondée par les eaux de crue de la rivière Nolichucky.
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  • Des fournitures sont acheminées par avion à Asheville, en Caroline du Nord, qui a été isolée par les inondations et les dégâts causés par la tempête Helene. Le village historique de Biltmore a été inondé par les eaux de crue. Les habitants se sont réfugiés sur les toits pour échapper à la montée des eaux des rivières French Broad et Swannanoa.
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Les infrastructures électriques, de communication et d'approvisionnement en eau ont été décimées par le vent, les coulées de boue et les inondations. Plus de 700.000 personnes sont privées d'électricité dans la région et le service de téléphonie mobile à l'ouest de l'Interstate 77 est médiocre, voire inexistant, selon les médias locaux.

La Tennessee Valley Authority (TVA), qui gère les systèmes fluviaux du Tennessee et de certaines parties de la Caroline du Nord, estime que le niveau des eaux a dépassé de 2,4 mètres le niveau record. Si les murs des deux barrages ont réussi à résister à l'immense pression de la montée des eaux, on commence à peine à voir l'étendue des dégâts subis par les structures.

Dimanche en début d'après-midi, Laura White, directrice de la Greeneville Water Commission, a annoncé que les habitants du comté de Greene pourraient manquer d'eau d'ici la fin de la journée. Selon les autorités, deux prises d'eau avec quatre pompes sur la rivière Nolichucky, à partir desquelles l'eau est pompée pour la région, ont été submergées et détruites par les inondations.

Selon CNN, sept usines de traitement de l'eau de Caroline du Nord sont fermées et 17 usines de traitement de l'eau sont privées d'électricité, ce qui touche au moins 70.000 foyers.

Le météorologue en chef d'AccuWeather, Jonathan Porter, a déclaré à Reuters que les dégâts causés par Helene pourraient se situer entre 95 et 110 milliards de dollars, ce qui en ferait l'une des tempêtes les plus coûteuses de l'histoire des États-Unis.

Où étaient les avertissements ?

Selon une étude de l'American Meteorological Society, le sud des Appalaches est l'un des six « points chauds » des États-Unis en matière d'inondations soudaines. Le terrain escarpé de la région, combiné aux fortes pluies alimentées par le golfe du Mexique et l'océan Atlantique, fait des inondations un danger permanent.

Au cours des dix dernières années, 230 personnes ont trouvé la mort dans près de 20 inondations déclarées par le gouvernement fédéral dans les Appalaches, a indiqué en mai dernier l'Appalachian Citizens' Law Center (Centre juridique des citoyens des Appalaches).

Les Blue Ridge et les Smoky Mountains, où Helene a frappé, connaissent des conditions persistantes de sécheresse depuis 2022, selon Drought.gov. Les comtés situés dans les zones les plus touchées par la tempête tropicale ont été désignés comme « anormalement secs » par le U.S. Drought Monitor (Observatoire américain de la sécheresse).

Dans des conditions de tempête « normales », de fortes pluies sur ce terrain provoqueraient des coulées de boue et des inondations soudaines en raison du sol meuble et de la végétation affaiblie par la sécheresse.

L'ouragan Helene est une tout autre affaire. Brian McNoldy, climatologue à l'université de Miami qui suit la chaleur des océans, a déclaré à Vox que le golfe du Mexique n'avait jamais été aussi chaud dans les annales modernes, avec des températures de surface avoisinant les 32 degrés Celsius.

S'il est de notoriété publique que les températures de surface élevées des eaux océaniques alimentent les ouragans, ce sont les eaux chaudes sous la surface qui ont permis à Helene de passer de la catégorie 1 à la catégorie 4 en moins de 24 heures, jeudi.

Ben Kirtman, directeur de l'Institut coopératif d'études marines et atmosphériques, a déclaré à Vox que lorsque l'eau est chaude, même sous la surface, les vents de l'ouragan peuvent augmenter de 55 km par heure ou plus en moins de 24 heures, comme cela s'est produit avec Helene.

En outre, l'atmosphère plus chaude causée par le changement climatique peut contenir jusqu'à 7 % d'humidité en plus. C'est pourquoi les taux de précipitations des ouragans ont augmenté, a expliqué Tom Knutson, scientifique principal au laboratoire de dynamique des fluides géophysiques de l'Administration nationale des océans et de l'atmosphère (NOAA), au journal Hill.

Les prévisions pour les Blue Ridge et les Smoky Mountains jeudi, bien que catastrophiques, ont averti les habitants qu'ils devaient s'attendre à des chutes de pluie bien inférieures à celles qui sont réellement tombées. Le parc national des Great Smoky Mountains prévoyait de 10 à 13 cm de pluie du côté du Tennessee et de 15 à 23 cm du côté de la Caroline du Nord jusqu'à vendredi.

Selon les médias locaux, un record de 44 cm est tombé sur Asheville, 61 cm sont tombés dans le comté de Mitchell, au nord-est de la ville. Le comté de Yancey, également au nord d'Asheville, a reçu 76 cm de pluie.

Compte tenu de l'intensification rapide des pluies d'Helene et des conditions de sécheresse dans la région, pourquoi n'a-t-on pas déployé davantage d'efforts pour évacuer les habitants de l'ouest de la Caroline du Nord et de l'est du Tennessee avant l'arrivée de la tempête vendredi ?

Le changement climatique aux États-Unis, comme ailleurs, est dû à l'activité humaine et à un système économique qui privilégie le profit au détriment de la durabilité de l'environnement et du bien-être de l'humanité. Malgré les effets de plus en plus visibles du changement climatique, les gouvernements capitalistes ne prennent pas les mesures adéquates pour atténuer ces catastrophes prévues de longue date.

Au lieu d'investir dans la protection de l'environnement et la gestion des catastrophes, les États-Unis ont détourné des sommes considérables vers l'armée pour financer leurs missions impérialistes en Russie, en Chine et au Moyen-Orient.

(Article paru en anglais le 30 septembre 2024)

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