Augmentation des cas de variole simienne au Canada

Bien que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ait déclaré que la variole simienne (mpox) constitue une urgence de santé publique internationale, le nombre de cas continue d’augmenter au Canada. La dernière flambée de cas découle directement du fait que les gouvernements fédéral et provinciaux négligent la menace que représente le virus de la variole, quel que soit le clade du virus.

Micrographie électronique à transmission colorisée de particules mpox (rouge) trouvées dans une cellule infectée (bleu), cultivée en laboratoire [AP Photo/NIAID]

À la mi-août, 164 cas avaient été enregistrés dans le pays cette année, dépassant de loin les totaux enregistrés par l’Agence de santé publique du Canada (ASPC) en 2023. Le gouvernement s’est empressé de noter que le pic actuel est bien inférieur aux chiffres observés lors de la première vague de propagation de la variole dans le monde en 2022, lorsque plus d’un millier de personnes ont été infectées au Canada avant que l’épidémie ne soit déclarée terminée sans cérémonie.

Actuellement, la souche de clade 1 du virus mpox ravage certaines régions de l’Afrique centrale, en particulier la République démocratique du Congo (RDC), ce qui a conduit l’OMS à déclarer en août une deuxième urgence de santé publique de portée internationale (USPPI) pour le virus mpox. Cette déclaration fait suite à l’apparition, à la fin de l’an dernier, d’une nouvelle souche de variole, le clade 1b, au Sud-Kivu, l’une des 26 provinces de la RDC se trouvant à l’est du pays.

L’enquête révèle que le virus se transmet maintenant plus facilement d’une personne à l’autre et l’on s’inquiète de l’augmentation du nombre de cas d’infection au sein de la population et de sa propagation potentielle tant dans l’ensemble de la région qu’au-delà des frontières du pays. Avec un taux de létalité de 3,6 %, cette infection est bien plus mortelle que les infections par la souche du clade 2b, qui s’est propagée dans plus d’une centaine de pays à travers le monde.

La présence de la souche clade 1b en Suède et en Thaïlande pourrait être le proverbial canari dans la mine de charbon, signalant la menace bien trop réelle d’une propagation rapide de cette souche.

L’abandon total de tout semblant de réponse à l’épidémie de clade 2b en 2022 soulève de nombreuses inquiétudes quant à la façon dont les autorités de santé publique réagiront une fois que la souche de clade 1 s’implantera.

L’absence de réponse épidémiologique solide de la part des autorités sanitaires canadiennes face à la souche actuelle du virus mpox est emblématique de la réponse internationale anti-santé publique. À chaque fois, les déclarations et les annonces de santé publique minimisent les dangers posés par le virus et tentent de donner de fausses assurances que ces agents pathogènes ne constituent pas une menace sérieuse et que tous les outils nécessaires sont en place en cas de besoin. Des déclarations comme celle de Theresa Tam, administratrice en chef de la santé publique du Canada, qui a admis que l’absence d’échantillons positifs du clade 1 dans les eaux usées «pourrait changer», devraient faire sourciller.

Le virus mpox touche principalement la province de l’Ontario, où 142 cas confirmés ont été signalés depuis le début de l’année. Jusqu’à maintenant, deux cas ont nécessité une hospitalisation, mais personne n’est décédé.

Peu de cas positifs, voire aucun, n’ont été associés à des voyages internationaux. Après son apparition, le virus a alimenté une vaste épidémie entièrement due à la transmission communautaire locale. Seuls 15 % des cas ont déclaré avoir voyagé en dehors de la province dans les 21 jours précédant l’apparition des symptômes et le taux de positivité des tests est supérieur à 27,3 % depuis la fin du mois de juin, selon le ministère provincial de la santé.

Cela signifie que les autorités sanitaires poursuivent une stratégie de «vivre avec le virus» – la même approche adoptée pour la pandémie de la COVID-19 – plutôt que de lutter pour éradiquer le virus mpox, défigurant et potentiellement mortel.

Les autorités espèrent que les traitements actuels, principalement l’antiviral Tecovirimat, combinés à une vaccination ciblée des populations à risque, pourront limiter la propagation de la maladie. Mais les personnes à qui l’on a recommandé de se faire vacciner à Toronto signalent des retards importants dans la prise de rendez-vous. Selon le Bureau de santé publique de Toronto, les vaccins post-exposition doivent être administrés dans les deux semaines suivant une première exposition. De tels retards seront conséquemment catastrophiques en cas d’épidémie se développant rapidement.

En outre, l’utilisation du Tecovirimat ne semble pas réduire les lésions de la variole simienne chez les enfants et les adultes en RDC. Ce qui semble faire la différence en termes de mortalité, c’est l’hospitalisation et la fourniture de soins de soutien de haute qualité. Mais toute épidémie généralisée submergerait très rapidement les établissements de santé, qui deviendraient alors des vecteurs de propagation de la maladie.

Santé Canada soutient avoir un «approvisionnement suffisant» en vaccins pour freiner la propagation du virus mpox, alors même que des épidémiologistes et autres professionnels de la santé critiquent la futilité de cette approche. L’un d’entre eux, cité sur le réseau de CTV News, faisait remarquer que «tôt ou tard, le feu sera là».

Un article d’opinion paru récemment dans la revue médicale BMJ dénonçait le nationalisme vaccinal des pays riches en ce qui concerne le mpox et, soulignant les similitudes avec la réaction lors de l’explosion de la COVID-19, où le stockage des vaccins a entraîné un nombre de morts incalculable dans les pays pauvres, avant de faciliter par la suite l’émergence de variants plus mortels. Les auteurs de l’article notaient que des intérêts corporatistes étaient en jeu, expliquant qu’actuellement

les CDC en Afrique [signalent] que des 10 millions de doses de vaccin environ requis pour contrôler l’épidémie, seulement environ 280.000 sont disponibles, c’est-à-dire moins de trois pour cent du besoin estimé, alors même que les pays riches accumulent, stockent et refusent de partager leurs vaccins. Ces mêmes pays accumulaient les vaccins contre la COVID-19, et ont activement bloqué ou retardé l’exemption de brevet qui aurait pu permettre aux pays du Sud de fabriquer des vaccins contre la COVID-19 pendant la pandémie et érodé les clauses d’équité du projet d’accord sur la pandémie à la suite des pressions exercées par les grandes sociétés pharmaceutiques.

Le gouvernement canadien affirme ne pas avoir l’intention de puiser dans son stock de vaccins, qui comprend des millions de doses de vaccins antivarioliques qui sont considérés comme efficaces contre la variole simienne. Avec l’éradication de la variole au début des années 1980, des cohortes de jeunes n’ont jamais reçu le moindre vaccin antivariolique au cours de leur vie.

Les experts notent que les caractéristiques du virus de la variole simienne devraient rendre les efforts visant à enrayer sa propagation beaucoup plus faciles à gérer que ceux menés contre la COVID, même dans les conditions de promiscuité régnant dans les camps de personnes déplacées en RDC, pays déchiré par la guerre. Le principal obstacle à cet objectif reste, comme dans le cas de la pandémie de la COVID-19, la relégation de la santé publique derrière les intérêts de profit de l’élite dirigeante capitaliste et la division du monde en États-nations concurrents.

(Article paru en anglais le 10 septembre 2024)

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