Israël multiplie les provocations à l’encontre des Palestiniens en Cisjordanie occupée et à Jérusalem-Est

Alors que l’attention se concentre sur le génocide israélien soutenu par l’impérialisme à Gaza, le gouvernement fasciste d’Israël, ses colons et ses forces de sécurité intensifient leurs attaques en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, illégalement occupés depuis la guerre israélo-arabe de 1967.

L’objectif du Premier ministre Benjamin Netanyahou, est de chasser le plus grand nombre possible des trois millions de Palestiniens, en multipliant les provocations pour inciter à des représailles, comme cela s’est produit le 7 octobre. Celles-ci peuvent ensuite être utilisées pour sanctionner une campagne préétablie de meurtres de masse et de nettoyage ethnique de la Cisjordanie avant de s’attaquer aux deux millions de citoyens palestiniens d’Israël. Cela fait partie de son plan plus large visant à annexer ce territoire et à empêcher les Palestiniens de devenir majoritaires en Israël/Palestine.

Des soldats israéliens patrouillent dans une zone endommagée par les incendies de véhicules incendiés lors d’une attaque de colons à Hawara, près de la ville de Naplouse en Cisjordanie, le mercredi 1er mars 2023. [AP Photo/Majdi Mohammed]

Les projets d’annexion de Netanyahou, ainsi que les mesures qui visent à modifier la composition démographique, le caractère et le statut de Jérusalem-Est occupée, ne sont ni nouveaux ni secrets, de nombreux ministres et responsables gouvernementaux ayant appelé au contrôle d’Israël sur l’ensemble de la zone «du Jourdain à la mer Méditerranée».

La charte du parti Likoud de Netanyahou, datant de 1977, déclare sans ambiguïté qu’« entre le Jourdain et la mer, il n’y aura que la souveraineté israélienne». Lui-même a souligné que c’était «son insistance qui avait empêché la création d’un État palestinien qui aurait constitué un danger existentiel pour Israël».

«Tant que je serai Premier ministre, a déclaré Netanyahou, je continuerai à insister fortement sur ce point».

La Cisjordanie

Depuis son entrée en fonction à la fin de 2022, le gouvernement le plus à droite de l’histoire d’Israël a approuvé une série de mesures qui visent à étendre les colonies en Cisjordanie. Cela comprend notamment : la légalisation de neuf avant-postes illégaux de colons et l’avancement de six autres; l’établissement de 26 nouveaux avant-postes, dont au moins 10 depuis le 7 octobre; l’attribution au ministre fasciste des finances Bezalel Smotrich de la majeure partie de l’administration civile en Cisjordanie; et le raccourcissement de la procédure d’approbation de la construction des colonies, tout en donnant à Smotrich le pouvoir d’approuver l’une des étapes. Au cours des six premiers mois, 13.000 logements ont été construits dans les colonies, soit près de trois fois plus qu’en 2022.

Le gouvernement a modifié la Loi sur le Désengagement ; il a annulé l’interdiction aux citoyens israéliens de séjourner dans les zones d’où Israël s’est retiré dans le cadre du désengagement de Gaza en 2005, permettant ainsi aux Israéliens d’entrer dans les zones où la colonisation a été annulée comme dans n’importe quelle autre partie de la zone C qui est sous le contrôle total de l’armée israélienne. Cela fait de la région nord de la Cisjordanie, jusque-là un territoire palestinien contigu, une zone pour colons, avant-postes et colonies, ce qui revient à légaliser l’avant-poste illégal de Homesh.

Le nettoyage ethnique qui a commencé en 1947 s’est poursuivi au point que 517.000 colons vivent aujourd’hui en Cisjordanie, soit près du double d’il y a 20 ans, et plus de 200.000 à Jérusalem-Est.

Les forces de défense israéliennes (FDI) organisent quotidiennement des opérations de fouilles et d’arrestations en Cisjordanie, qui durent souvent des heures, voire des jours, et qui ont tué plus de 400 Palestiniens depuis le 7 octobre. Les soldats israéliens sont souvent stationnés autour des hôpitaux, empêchant les ambulances d’atteindre les blessés.

Mercredi, lors d’un raid à Jénine, les forces israéliennes ont tué trois Palestiniens au cours d’une vaste opération d’arrestations et ont détruit des infrastructures et des bâtiments à l’aide de bulldozers et de véhicules blindés. Elles ont déclaré avoir arrêté 14 «suspects». Lors d’un raid sur le camp de réfugiés de Jénine en novembre dernier, Les FDI avaient arrêté au moins 100 de ses habitants et abattu un jeune de huit ans et un autre de 15 ans, tout en démolissant des infrastructures, notamment les canalisations d’eau, d’électricité et d’égouts, ainsi que des habitations.

Al Jazeera rapporte qu’au 10 janvier 2024, les FDI avaient arrêté près de 6.000 Palestiniens en Cisjordanie depuis le 7 octobre, et qu’environ 3.000 d’entre eux étaient placés en détention administrative. Au moins 7.000 prisonniers palestiniens sont actuellement détenus dans des conditions atroces dans les prisons israéliennes. Depuis le 7 octobre, les conditions se sont détériorées, sur ordre explicite du ministre de la sécurité nationale Itamar Ben-Gvir, avec une augmentation de la fréquence et de la gravité des passages à tabac et d’autres formes de torture. Au moins neuf Palestiniens arrêtés dans le cadre de la campagne actuelle sont morts en détention israélienne.

Les FDI ont effectué des raids quasi quotidiens à Ramallah, centre administratif de l’Autorité palestinienne (AP), endommageant maisons et commerces.

Des groupes fascistes de colons armés terrorisent les Palestiniens en toute impunité, protégés par l’armée. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA) a enregistré 573 attaques de colons israéliens contre des Palestiniens, qui ont fait 51 victimes palestiniennes, endommagé des biens appartenant à des Palestiniens (459 incidents) ou fait à la fois des victimes et endommagé des biens (63 incidents), depuis le 7 octobre.

Alors qu’une grande partie de l’armée israélienne est déployée à Gaza et à la frontière nord d’Israël avec le Liban, l’armée a envoyé des milliers de réservistes en Cisjordanie, dans le cadre de bataillons de «défense régionale» nouvellement formés. Elle a élargi ses «unités d’intervention d’urgence», composées de civils lourdement armés et de colons en grande partie d’extrême droite, ce qui a entraîné une forte recrudescence de la violence et du harcèlement.

Dror Sadot, porte-parole du groupe israélien de défense des droits de l’homme B’Tselem, a déclaré: «Ce que nous voyons ressemble à des milices mixtes composées de colons et de soldats» et «personne ne sait qui est qui et qui donne les ordres». Les attaques atteignent généralement leur paroxysme pendant les mois de récolte des olives.

Plus de 1.000 Palestiniens ont été expulsés de 16 villages qui ont été rasés. Le 1er février, le président américain Joe Biden s’est senti obligé de faire un geste symbolique de protestation en sanctionnant quatre colons israéliens qui avaient attaqué des Palestiniens en Cisjordanie, et d’autres pays lui ont emboîté le pas. Les responsables israéliens ont appelé les banques israéliennes à ignorer les sanctions.

Israël a imposé des restrictions extrêmes qui empêchent la moitié des agriculteurs palestiniens de Cisjordanie de récolter leurs olives. Dans les bonnes années, la récolte rapporte 200 millions de dollars à l’économie palestinienne. Prétextant que les restrictions visent à permettre à l’armée de protéger les Palestiniens contre les attaques des colons, les FDI ont ensuite annulé les jours «protégés», les empêchant ainsi de récolter la totalité de leur production ou de préparer la terre pour les cultures d’hiver.

La guerre a eu un impact dévastateur sur l’économie palestinienne. Les ouvriers travaillant dans le secteur de la construction en Israël et dans les colonies se sont vu retirer leur permis d’entrée, ce qui a entraîné la perte de 276.000 emplois (32 pour cent de l’emploi) en décembre.

L’armée a mis en place 400 points de contrôle, affectant 67.000 travailleurs supplémentaires qui travaillent dans des gouvernorats autres que leur lieu de résidence. Cette situation a entraîné une hausse des coûts et entravé la production. Les agriculteurs incapables d’acheminer leurs produits sur le marché ont subi des pertes dévastatrices.

Le fait que certains des principaux donateurs de l’UNRWA, tels que l’Allemagne, les États-Unis et l’Union européenne, vont cesser de financer l’agence des Nations unies, qui fournit des services humanitaires et sociaux vitaux aux réfugiés palestiniens de 1948 et 1967 et à leurs descendants, va dévaster les conditions de vie en Cisjordanie, où 871.000 personnes dépendent de son soutien.

Dans une tentative délibérée de provoquer l’effondrement de l’Autorité palestinienne, Israël a retenu 164 millions de dollars sur les 205 millions de dollars de revenus mensuels de l’Autorité palestinienne, laissant cette dernière dans l’incapacité de payer les salaires de ses 144.000 employés à temps ou dans leur intégralité. Le montant total des retenues en 2023 s’élève à 1,5 milliard de dollars, soit 25 pour cent des recettes de l’Autorité palestinienne. Le ministre des finances de l’Autorité palestinienne, Shoukry Bishara, a déclaré qu’il n’y aurait plus d’argent d’ici la fin du mois de février.

L’Organisation internationale du travail (OIT) a estimé que, dans l’ensemble, cela signifiait que la Cisjordanie avait subi des pertes économiques de 500 millions de dollars par mois en octobre et novembre. Selon le ministère de l’économie de l’Autorité palestinienne, l’économie de la Cisjordanie s’est contractée de plus de 20 pour cent au cours du dernier trimestre de 2023, un tiers des entreprises étant fermées ou en chômage technique ; les pertes quotidiennes se montaient à 25 millions de dollars.

Volker Türk, le responsable des droits de l’homme de l’ONU, a qualifié la situation en Cisjordanie occupée de «potentiellement explosive».

Jérusalem-Est

De violents affrontements ont éclaté entre les manifestants et les forces de sécurité israéliennes après le 7 octobre, malgré les bouclages dans tout Jérusalem-Est. Ces affrontements ont conduit à la mort de six Palestiniens et à des dizaines d’arrestations généralement basées sur leur activité sur les réseaux sociaux. L’armée a mené de nombreuses incursions à Shuafat, le camp de réfugiés palestiniens situé dans les limites de la ville, conduisant à des arrestations massives et à la destruction de biens. Les Palestiniens, y compris les enfants, sont régulièrement harcelés, arrêtés et fouillés.

Les autorités limitent l’accès à la vieille ville et en particulier à l’enceinte de la mosquée al-Aqsa, en imposant des restrictions sur les personnes autorisées à y prier. La police israélienne est très présente, avec 2.500 agents et volontaires qui patrouillent. Des fidèles juifs ont continué à se frayer un chemin jusqu’à al-Aqsa sous la protection de la police pour prier sur le site, en violation des accords de longue date avec la Jordanie, qui régissent le site.

Ben-Gvir a profité de l’assassinat d’un Israélien à un poste de contrôle près de Jérusalem-Est occupée pour réclamer des restrictions encore plus sévères à la liberté de circulation et pour promettre davantage d’armes pour les citoyens israéliens. Smotrich a utilisé la fusillade pour demander l’expansion de la colonie/ville de Maale Adumim et des colonies voisines.

Ben-Gvir prévoit maintenant de renforcer les restrictions concernant l’accès à l’enceinte d’Al-Aqsa pendant le ramadan (du 10 mars au 10 avril), en interdisant aux citoyens palestiniens d’Israël âgés de 10 à 70 ans de pénétrer dans la mosquée et en interdisant totalement aux Palestiniens de Cisjordanie de s’y rendre pour y pratiquer leur culte. C’est également la date annoncée pour le début de l’invasion terrestre de Rafah à Gaza, qui embrasera collectivement les territoires occupés et l’ensemble du Moyen-Orient.

Le rôle de l’Autorité palestinienne

Les Palestiniens confrontés à l’escalade de la violence de la part de l’armée et des colons doivent également faire face à la perfide direction politique de l’Autorité palestinienne dominée par le Fatah et dirigée par le président multimillionnaire Mahmoud Abbas, âgé de 87 ans et malade.

Le secrétaire d’État américain Antony Blinken rencontre le président palestinien Mahmoud Abbas, le 5 novembre 2023 [AP Photo]

L’hostilité croissante des Palestiniens à l’égard de l’Autorité palestinienne en raison de sa corruption, de son copinage et de sa servilité à l’égard d’Israël a réduit à néant les efforts du gouvernement Biden pour l’utiliser comme façade d’efforts nominaux en vue d’une «solution à deux États» et de l’établissement d’une forme de gouvernement palestinien à Gaza après les opérations militaires. Il s’agit là d’un mécanisme transparent qui vise à rallier les alliés régionaux des États-Unis, notamment l’Arabie saoudite, l’Égypte, le Qatar, la Turquie et la Jordanie, à son objectif militaire plus large de guerre contre l’Iran.

Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a fait le tour des capitales du Moyen-Orient pour les convaincre que l’AP était un «bon choix» pour gouverner Gaza après la guerre. L’AP s’est recommandé à Blinken par sa position anti-Hamas et sa volonté d’agir en tant que sous-traitant d’Israël en matière de sécurité.

Pendant des années, l’AP a cherché à réprimer toute opposition à son contrôle administratif de la Cisjordanie et tout soutien à d’autres factions, comme le Hamas, dont elle a arrêté les membres et contre lequel elle a mené une guerre civile à Gaza en 2007 après sa victoire surprise aux élections de janvier 2006. Elle a coopéré avec le blocus israélien de Gaza et a empêché toute action en Cisjordanie pendant les guerres menées par Israël contre l’enclave assiégée en 2008-2009, 2012 et 2014. Le Fatah est devenu si impopulaire qu’Abbas a refusé d’organiser des élections après 2006.

L’AP a donné carte blanche aux colons israéliens pour attaquer les agriculteurs, les villes et les villages palestiniens et n’a rien fait pour mettre fin aux perquisitions et aux arrestations menées par les FDI dans la zone A, désignée par les accords d’Oslo comme étant sous le contrôle total de l’AP.

Depuis le 7 octobre, le soutien de l’Autorité palestinienne à Israël est encore plus flagrant: ses forces de sécurité ont réprimé des manifestations et des marches de solidarité, tirant à balles réelles sur les participants et arrêtant les personnes qui exprimaient leur soutien à la résistance palestinienne.

Après avoir fait tout ce qui était en son pouvoir pour démontrer la soumission de son administration dirigée par le Fatah à Israël et à ses bailleurs de fonds impérialistes, Abbas a indiqué qu’il était prêt à accepter que l’Autorité palestinienne serve de façade à la domination militaire d’Israël sur Gaza après la destruction de cette dernière. Abbas a accueilli Blinken et le conseiller à la Sécurité nationale Jake Sullivan lors de leurs visites à Ramallah pour exiger de l’AP qu’elle «apporte du sang neuf» au gouvernement.

La Russie n’est pas moins disposée que les États-Unis à utiliser une Autorité palestinienne au service d’Israël pour contrôler les Palestiniens. S’exprimant lors de la conférence de Munich sur la sécurité, le Premier ministre de l’Autorité palestinienne, Mohammad Shtayyeh, a annoncé que la Russie avait invité les factions palestiniennes à se réunir à Moscou le 26 février. Il a déclaré: «Nous sommes prêts à nous engager. Si le Hamas ne l’est pas, c’est une autre histoire. Nous avons besoin de l’unité palestinienne ». Le Qatar lui, a déclaré que le Hamas était prêt à discuter de la formation d’un gouvernement technocratique pour la Cisjordanie et Gaza sous l’autorité de l’OLP.

L’abaissement d’Abbas devant l’impérialisme américain est le point final commun à tous les mouvements nationalistes bourgeois qui ont cherché l’«indépendance» de leurs maîtres coloniaux, mais qui ont fini par dépendre toujours plus de puissances extérieures pour imposer leur domination. Le projet de construction d’un État palestinien indépendant dans les territoires occupés est devenu le moyen pour la bourgeoisie palestinienne, composée d'une poignée de familles, de s’enrichir, tout en opprimant les Palestiniens et en les confinant dans des bantoustans appauvris en Cisjordanie et dans une prison à ciel ouvert à Gaza.

L’échec de l’OLP nationaliste bourgeoise et laïque à garantir un État palestinien ou même à améliorer les conditions de vie des Palestiniens a donné naissance au Hamas, mais le mouvement islamiste n’est pas moins dans une impasse.

La libération du peuple palestinien ne pourra jamais être obtenue par la construction d’un État-nation caricatural dans le cadre d’un processus négocié par l’impérialisme. C’est là la tâche de la classe ouvrière, dans une lutte commune au-delà des différences nationales et religieuses, contre l’impérialisme et ses agents locaux, tant israéliens qu’arabes, pour un État multinational avec l’égalité pour tous ses citoyens, et pour les États socialistes unis du Moyen-Orient. C’est la seule façon de mettre fin à l’oppression, à la pauvreté, à l’épuration ethnique et à la guerre.

(Article paru en anglais le 24 février 2024)

Loading