Le Mexique et le Pérou participent à des exercices militaires américains qui préparent la guerre contre la Chine

Alors que le président mexicain Andrés Manuel López Obrador (AMLO) se présente souvent comme un défenseur de la souveraineté du Mexique et de la région contre l’impérialisme américain, il a militarisé le Mexique et intégré l’armée mexicaine dans les plans de guerre mondiaux des États-Unis et de l’OTAN à des niveaux sans précédent.

Des Marines américains s’entraînent à la guerre urbaine lors de l’exercice Steel Knight 23.2. [Photo: US Marine Corps photo by Cpl. Earik Barton]

Ces dernières semaines, son gouvernement a rejoint le régime fasciste péruvien de Dina Boluarte en envoyant les premières troupes étrangères à participer à l’exercice militaire Steel Knight, organisé chaque année par le Pentagone pour préparer indubitablement la guerre contre la Chine, qui est dotée de l’arme nucléaire.

Le 5 décembre, le US Naval Institute a rapporté : «Tout au long de Steel Knight, les Marines s’entraînent avec le groupe expéditionnaire de frappe 3 basé à San Diego et des unités de la troisième flotte américaine dans des scénarios maritimes qui incluront des navires de guerre amphibies péruviens et mexicains en appui dans des scénarios d’entraînement d’aide humanitaire». Le porte-parole de la 1re division de Marines, le capitaine Joseph Di Pietro, a déclaré : «Nous sommes très enthousiastes à l’idée d’intégrer les marines mexicaine et péruvienne à cet exercice.»

En dehors des médias militaires américains, la participation du Mexique et du Pérou à ces exercices, qui duraient trois semaines et se terminaient le 15 décembre, n’a été rapportée par aucun média et n’a été mentionnée par aucun responsable gouvernemental aux États-Unis ou au Mexique.

Au début du mois, en réponse au scandale national provoqué par l’invitation de formateurs américains armés au Mexique, AMLO a déclaré : «Il ne s’agit pas d’une intrusion ou d’une atteinte à notre souveraineté. Les temps ont changé depuis qu’ils avaient l’habitude d’entrer sans demander la permission».

La différence aujourd’hui est qu’AMLO est devenu un cheval de Troie, ouvrant les portes à l’impérialisme américain. Son administration a transformé le Mexique et sa nouvelle Garde nationale en une extension de la patrouille frontalière américaine, tandis que le Mexique est devenu si essentiel à l’impérialisme américain que les entreprises de défense ont déclaré qu’elles ne pouvaient pas opérer dans les premiers stades de la pandémie de COVID-19 quand les usines des fournisseurs mexicains étaient fermées.

Aujourd’hui, la marine mexicaine s’entraîne pour devenir «interopérable» avec la même division de marines américains qui a envahi et occupé le port de Veracruz en 1914, lorsque Woodrow Wilson a transformé son embargo sur les livraisons d’armes contre la révolution mexicaine en une invasion militaire directe qui a tué des centaines de soldats mexicains. Alors que les États-Unis se préparaient à entrer dans la Première Guerre mondiale, Wilson prévoyait également d’envahir à nouveau et de prendre le contrôle de toute une zone allant de Veracruz, dans le golfe du Mexique, à l’océan Pacifique, ainsi que des champs pétrolifères de Tampico.

L’exercice de ce mois-ci montre à quel point les préparatifs de guerre contre la Chine sont avancés et que l’Amérique latine deviendrait un champ de bataille dans une troisième guerre mondiale.

Avec plus de 7000 membres du corps des Marines, de la marine et de l’armée de l’air des États-Unis, l’exercice consistait à «planifier, déployer, commander et contrôler une force interarmées contre une force de combat d’un adversaire équivalent ou quasi équivalent», comme l’expliquent les légendes des photos montrant des membres des services péruviens et mexicains pendant l’exercice.

Les termes «équivalent» ou «quasi équivalent» sont utilisés par Washington de manière interchangeable pour décrire la Chine et la Russie. La semaine dernière, le Congrès a approuvé à la hâte un budget record pour le Pentagone en vue d’une «guerre future contre des concurrents quasi équivalents (guerre avec la Russie, la Chine ou une autre grande puissance)», selon le résumé de la Chambre des représentants.

Le US Naval Institute a ajouté : «Le scénario global de Steel Knight intègre un espace de combat étendu qui reproduit le scénario de conflit dans une chaîne d’îles de l’Indo-Pacifique envisagé par les chefs militaires.»

L’armée américaine a publié en ligne des photographies montrant des troupes mexicaines et péruviennes sur une barge de débarquement avec des marines et des marins américains à la base de Camp Pendleton, en Californie, le 30 novembre. Ensuite, une série de photos montre les Mexicains et les Péruviens rejoints par des marines philippins le 7 décembre lors d’une visite du navire de guerre USS San Diego (LPD-22) dans le cadre de l’exercice Dawn Blitz.

Cette activité visait à tester la capacité «à mener des opérations amphibies en réponse à une crise mondiale et à projeter la puissance à terre», selon la légende.

Les plans de guerre contre la Chine ne sont pas dissimulés par les responsables américains ou les médias et sont en place depuis plus d’une décennie. Le New York Times a fait état ce week-end d’un exercice de guerre dans la jungle qui s’est déroulé en octobre-novembre et auquel ont participé de nombreux pays de la région Asie-Pacifique.

Le Times a écrit : «Les préparatifs dans la jungle, qui trouvent leur origine dans le «pivot vers l’Asie» du président Barack Obama, mettent en évidence le défi auquel l’armée américaine est confrontée alors qu’elle tente de prioriser la Chine et de se libérer de décennies de guerre au Moyen-Orient, même si le conflit qui s’y déroule attire de nouveau les États-Unis.»

AMLO a explicitement déclaré son alignement sur la campagne de guerre menée par les États-Unis contre la Chine. Lors d’un sommet nord-américain en 2021, par exemple, AMLO a appelé à «arrêter» la Chine.

Il a expliqué : «Si la tendance de la dernière décennie se poursuit, en 2051, la Chine dominerait 42 % du marché mondial et nous, les États-Unis, le Mexique et le Canada, n’en aurions plus que 12 %, ce qui, outre une disproportion inacceptable dans le domaine économique, entretiendrait la tentation de miser sur la résolution de cette disparité par le recours à la force, ce qui nous mettrait tous en danger.»

L’administration de López Obrador se prépare en fait, avec Biden, à «résoudre cette disparité par la force».

Cette intégration est ancrée dans les intérêts de l’oligarchie mexicaine, qui souhaite attirer les investissements en offrant une main-d’œuvre bon marché et des ressources naturelles à l’impérialisme américain, en particulier avec la délocalisation vers l’Amérique du Nord, alors que les États-Unis intensifient leur confrontation économique et militaire avec la Chine.

Lors d’une visite de la secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, ce mois-ci, l’administration AMLO a accepté de laisser Washington contrôler les investissements étrangers dans le pays, sur la base de «préoccupations de sécurité nationale» visant en particulier les entreprises chinoises.

«Nous voulons voir un approfondissement de nos relations économiques en ce qui concerne nos chaînes d’approvisionnement, la résilience de nos chaînes d’approvisionnement», a déclaré Yellen.

AMLO a également donné à l’armée un contrôle sans précédent sur la gestion des projets d’infrastructure, des ports, des aéroports et de l’économie dans son ensemble, et a demandé une augmentation de 81 % du budget de l’armée pour l’année prochaine. Les intérêts matériels de l’armée mexicaine corrompue sont désormais entièrement alignés sur cette intégration plus large avec l’impérialisme américain.

Ce processus a également mis en lumière les prétentions d’AMLO à défendre la démocratie, notamment en dénonçant le coup d’État soutenu par les États-Unis qui a instauré le régime de Dina Boluarte au Pérou il y a un an. En mai dernier, AMLO a critiqué l’administration Biden pour avoir envoyé 700 soldats américains afin de former les forces armées péruviennes. «Ils ont tué 70 personnes qui manifestaient. Je ne peux pas rester silencieux face à cela», a-t-il déclaré.

La participation des marines philippins n’est pas moins importante. L’actuel président Ferdinand Marcos Jr considère son régime comme un défenseur et un continuateur de l’héritage de la dictature de ses parents, Ferdinand et Imelda Marcos, soutenue par les États-Unis, qui a tué des milliers de personnes et détenu et torturé des dizaines de milliers de travailleurs, de paysans et de jeunes.

Au début de l’année, AMLO a déclaré que le coup d’État péruvien avait eu lieu parce qu’«une oligarchie péruvienne, mais surtout étrangère, pille les ressources naturelles du Pérou [...] Et ils ont besoin d’une marionnette, d’un pantin, d’un dirigeant et d’un Congrès qui leur conviennent.»

La même description peut être appliquée à AMLO, qui incarne l’impasse de tous les programmes nationalistes latino-américains à l’ère de la mondialisation, des guerres et des révolutions.

Les travailleurs du Mexique et de toute l’Amérique latine n’ont aucun intérêt à faire la guerre et à tuer leurs frères et sœurs de classe en Chine, dont beaucoup sont exploités par les mêmes sociétés transnationales. Leurs propres luttes contre la classe dirigeante mexicaine corrompue, l’armée et le capital étranger font partie de l’essor de la lutte des classes au niveau international, ainsi que du mouvement de masse mondial émergent contre la guerre, dans lequel des millions de personnes protestent contre le génocide israélo-américain à Gaza.

(Article paru en anglais le 18 décembre 2023)

Loading