La manifestation de Londres exige un cessez-le-feu immédiat à Gaza, pas une «pause opérationnelle »

Des centaines de milliers de personnes ont manifesté samedi à Londres pour réclamer la fin de l'assaut israélien sur Gaza.

Cette marche était la première dans la capitale britannique depuis la conclusion de l'accord sur les otages entre Israël et le Hamas et le début, vendredi, d'une pause de quatre jours dans les bombardements aériens des Forces de défense israéliennes (FDI).

Les manifestants écoutent les discours lors du rassemblement de Londres, 25 novembre 2023

Les manifestants, à Londres et dans le monde entier, sont venus en nombre, rejetant les efforts des gouvernements occidentaux qui prétendent que la pause des bombardements israéliens signifie un mouvement vers un éventuel cessez-le-feu et vers la paix. De nombreux participants à la manifestation londonienne avaient apporté des pancartes condamnant les crimes de guerre perpétrés par le gouvernement Netanyahou, avec le soutien total des États-Unis, de la Grande-Bretagne et d’autres puissances impérialistes, notamment le bombardement de camps de réfugiés, d’hôpitaux et d’écoles. L’une des banderoles de la manifestation était une réplique du tableau saisissant de Pablo Picasso, Guernica, comparant les crimes de guerre d’Israël aux destructions perpétrées par les forces allemandes en avril 1937 pendant la guerre civile espagnole.

La marche a fait l’objet d’une intimidation massive de la part de l’État, la police métropolitaine étant soutenue, en vertu d’accords d’«aide mutuelle», par des forces de tout le pays venues d’aussi loin que le Northumberland, le Durham et le Pays de Galles.

Les policiers ont distribué des tracts d’intimidation le long du parcours de la marche, de Park Lane à Whitehall, et ont déployé des «guetteurs» à l’affût de ce qui était censé être une activité criminelle. Le tract avertissait: «Pour éviter de finir dans nos cellules, N’UTILISEZ PAS de mots ou d’images racistes ou incitant à la haine contre une quelconque religion», ou qui «soutiennent le Hamas ou toute autre organisation interdite», et précisait: «En cas de doute, mettez à la poubelle toute pancarte ou signe susceptible d’enfreindre ces règles». Il mettait en garde contre l’utilisation de «mots menaçants ou de comportements agressifs qui pourraient être considérés comme intimidants».

Sky News a rapporté que les officiers de police seraient «également briefés sur les chants pouvant franchir la ligne de la criminalité, avec des avocats et des arabophones à portée de main».

La police a procédé à 18 arrestations, dont quatre membres du Parti communiste maoïste de Grande-Bretagne (marxiste-léniniste) qui tenaient un stand à Whitehall. La police a confisqué de la documentation. Selon un communiqué de la police, «des images ont été partagées sur les réseaux sociaux montrant de la documentation distribuée comportant une croix gammée à l’intérieur d’une étoile de David», ce qui était «susceptible d’attiser la haine raciale».

Loading Tweet ...
Tweet not loading? See it directly on Twitter

Les domiciles des quatre membres du CPGB (M-L) ont été perquisitionnés par la police à 3 heures du matin dimanche, alors qu’ils étaient toujours détenus en cellule.

Il y a deux semaines, une manifestante avait été arrêtée à la suite d’une chasse aux sorcières menée par la police et les médias pour avoir porté une pancarte avec la même image représentant une croix gammée entrelacée avec l’étoile de David.

Les organisateurs de la marche, dont ‘Stop the War Coalition’ (STWC) et ‘Palestine Solidarity Campaign’, insistent depuis des semaines pour dire que le seul moyen d’arrêter les attaques d’Israël est de faire pression sur les politiciens bourgeois comme le Premier ministre Rishi Sunak et le leader du Parti travailliste d’opposition Sir Keir Starmer, pour qu’ils reviennent sur leur soutien à Tel-Aviv. Cette même ligne de conduite a été adoptée samedi.

Remarquable dans la manifestation de cette semaine était l’absence de tout représentant en vue de la «gauche» travailliste, regroupée au sein du Socialist Campaign Group (SCG), ou de tout dirigeant syndical reconnaissable de la soi-disant gauche. Les semaines précédentes, y compris à la marche de 800.000 personnes il y a deux semaines, des discours avaient été prononcés à la tribune par l’ex-dirigeant travailliste Jeremy Corbyn, qui siège à présent comme indépendant après son exclusion du groupe parlementaire par Starmer et qui a pris la parole à chaque rassemblement national depuis le début du génocide, par son ancien chancelier fantôme John McDonnell et par le secrétaire du SCG, Richard Burgon.

L’une des deux seuls députées travaillistes à avoir pris la parole à Londres samedi, Bell Ribeiro-Addy, a déclaré: «Une pause de quatre jours est une bonne chose. La libération des otages israéliens et des prisonniers palestiniens est une bonne chose, mais ce n’est pas suffisant… Les gouvernements occidentaux devraient cesser de prétendre qu’ils ne peuvent rien faire. Ils devraient emprunter toutes les voies diplomatiques pour obtenir un cessez-le-feu».

Bell Ribeiro-Addy à la manifestation à Londres

Elle conclut: «Nous devons donc maintenir la pression à l’international. Nous devons continuer à manifester, à faire pression, à siéger, parce que c’est ce qui a provoqué la pause — le pouvoir du peuple exigeant la fin de l’effusion de sang, et cela commence par un cessez-le-feu véritable, significatif et permanent, parce qu’en fin de compte, la seule option est la paix».

Ni Ribeiro-Addy ni sa collègue Apsana Begum n’ont parlé de leur appartenance à un parti qui soutient le génocide, les trois quarts de ses députés s’étant opposés à un cessez-le-feu lors d’un vote il y a seulement dix jours. Une fois de plus, comme pour tous les députés travaillistes et Corbyn, le chef du parti, Sir Keir Starmer, a été le grand absent, la «gauche» étant déterminée à ne pas entrer en conflit avec la direction travailliste pro-génocide.

John Rees, leader du groupe pseudo-de gauche ‘Counterfire’, s’est exprimé au nom de la coalition Stop the War et a confirmé l’amnistie pour la bureaucratie travailliste et syndicale. Les mots «Labour», «Starmer» ou «trade union» n’ont jamais franchi ses lèvres.

John Rees lors de la manifestation à Whitehall, Londres

John Rees a déclaré: «Nous aurons un cessez-le-feu, nous ne reviendrons pas au massacre de masse des Palestiniens par les FDI. Si cette pause ne se transforme pas en cessez-le-feu complet, nous aurons une manifestation d’une ampleur que la capitale de ce pays n’a jamais connue».

Rien, a-t-il ajouté, en pleine envolée rhétorique, n’empêchera les manifestants de manifester et de scander les slogans qu’ils choisissent «et de viser à faire tomber tout gouvernement, ce gouvernement, le prochain gouvernement qui ne s’engage pas en faveur de la liberté de la Palestine».

La STWC n’a rien à faire de la mission nécessaire et essentielle de mobiliser la classe ouvrière pour faire tomber les gouvernements qui soutiennent le génocide israélien à Gaza, et ne fera rien qui nuise à ses relations douillettes avec la «gauche» travailliste et syndicale. Son objectif explicite est uniquement de modifier la politique des cercles dirigeants pour que l’impérialisme britannique ne soit pas aussi étroitement lié à l’impérialisme américain et qu’il ait une orientation plus paisible.

La semaine dernière, Rees a pris la parole lors d’une manifestation devant le bureau de circonscription de Starmer. Il a déclaré qu’après la manifestation de 800.000 personnes, «mercredi dernier, ils [les députés] faisaient la queue pour s’exprimer sur notre plate-forme devant la Chambre des communes. Et nous avons maintenant obtenu que les libéraux-démocrates se prononcent pour un cessez-le-feu, nous avons divisé le gouvernement conservateur, nous avons provoqué la plus grande rébellion au sein du Parti travailliste depuis la rébellion contre Blair à propos de l’Irak, nous avons obtenu que le parlement gallois se prononce pour un cessez-le-feu, nous avons obtenu que le chef du parlement écossais se prononce pour un cessez-le-feu… Mon message à Keir Starmer est le suivant: suivez le programme. Exigez un cessez-le-feu maintenant ».

(Article paru en anglais le 27 novembre 2023)

Loading