La saison des feux de forêt au Canada ne cesse de battre des records

La saison des feux de forêt, qui bat tous les records au Canada, se poursuit à un rythme effarant. Au 12 juillet, les incendies avaient ravagé près de 10 millions d’hectares (100.000 kilomètres carrés), une superficie combinée qui éclipse la province du Nouveau-Brunswick (72.908 kilomètres carrés) ou, à titre de comparaison avec les États-Unis, l’État du Maine (79.883 kilomètres carrés). Alors qu’il reste plus de deux mois avant la fin de la saison des incendies dans le pays, la superficie brûlée a déjà dépassé celle de 1989, la pire jamais enregistrée, lorsque 7,5 millions d’hectares avaient été consumés par les flammes.

Estimation par détection satellite du nombre d’hectares de forêt qui ont brûlé (en millions)

Au 5 juillet, on dénombrait 432 incendies actifs au Canada, dont 80 sont considérés comme non maîtrisés. Les feux de camp sont interdits en Colombie-Britannique depuis lundi, car des incendies se sont déclarés dans la région centrale de Cariboo.

Les incendies font rage dans tout le pays depuis le début du mois de mai, soit environ deux mois avant le début habituel de la saison des feux de forêt. Par un temps inhabituellement sec, des incendies ont éclaté en Nouvelle-Écosse à la fin du mois de mai, détruisant plusieurs banlieues rurales d’Halifax. Des pompiers du monde entier ainsi que des membres des Forces armées canadiennes ont été mobilisés pour lutter contre les incendies, notamment ceux qui ont éclaté dans l’Alberta au début du mois de juin, forçant des dizaines de milliers de personnes à fuir leur domicile.

La saison des feux de forêt 2023, qui devrait continuer à faire rage du Québec à la Colombie-Britannique en passant par le Nord, région habituellement clémente, est alimentée par les effets du changement climatique induit par le capitalisme. Il s’agit notamment de températures extrêmement élevées et de conditions plus sèches que la moyenne, qui créent les conditions nécessaires pour que la foudre déclenche davantage d’incendies et que les incendies d’origine humaine se propagent plus facilement de manière incontrôlée.

Les records de chaleur enregistrés dans le nord des Territoires du Nord-Ouest du Canada créent des conditions idéales pour le déclenchement d’incendies dans la région subarctique. Au cours des neuf premiers jours de juillet, 17 records de température ont été battus dans les Territoires. Samedi, la température la plus élevée jamais mesurée dans l’hémisphère occidental au-dessus du 65e parallèle a été enregistrée à Norman Wells, où le mercure a atteint 37,9 degrés Celsius.

D’immenses incendies déclenchés par la foudre dans le centre du Québec ont propagé des fumées toxiques à travers le Canada et jusqu’aux États-Unis, affectant la santé de dizaines de millions de personnes, notamment à Toronto, Montréal, New York, Chicago et dans d’autres grands centres urbains. Alors que les gouvernements ont conseillé aux personnes âgées et aux personnes médicalement vulnérables de rester à l’intérieur les jours les plus difficiles, les travailleurs ont souffert dans les usines enfumées et ont été contraints de respirer un air extrêmement malsain sur les chantiers en plein air.

Une évaluation récente du laboratoire Stanford Environmental Change and Human Outcomes (ECHO) a révélé que 2023 est déjà la pire année jamais enregistrée pour l’exposition cumulée à la fumée de particules fines (PM2,5), l’Américain moyen étant exposé à un cumul de 400 microgrammes par mètre cube d’air. Fait inhabituel, la majeure partie de cette exposition est due aux incendies canadiens, car la saison des incendies aux États-Unis n’a pas encore commencé sérieusement. Le laboratoire ECHO a enregistré une augmentation significative de l’exposition à la fumée depuis 2019, le taux ayant plus que doublé.

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Exposition cumulée à la fumée de particules fines (PM2,5) (moyenne pour la population américaine)

Fin juin, un quart des Canadiens ont déclaré avoir été touchés par les incendies de forêt, soit directement par les flammes, soit indirectement par la fumée.

L’Organisation mondiale de la santé indique que la pollution de l’air intérieur et extérieur est l’une des principales causes de mortalité annuelle dans le monde, contribuant au décès prématuré de 4,2 millions de personnes en 2019.

Le Parlement canadien étant en vacances jusqu’en septembre, l’establishment politique n’a guère réagi ces dernières semaines à la saison des incendies dévastateurs et à l’impact évident du changement climatique sur la vie de millions de personnes. En dehors de la possibilité de créer un service national de lutte contre les incendies, aucune mesure n’a été prise pour s’attaquer aux causes profondes de la saison des incendies qui bat tous les records.

Le Premier ministre Justin Trudeau, qui a fait du changement climatique un thème central de sa campagne électorale, s’est montré nonchalant lorsqu’il a été interrogé sur la réponse de son gouvernement aux incendies au début du mois de juin. «Compte tenu des prévisions, nous devrions disposer de suffisamment de ressources pour couvrir l’été», a déclaré Trudeau à la presse. «Si la situation s’aggrave, nous élaborons des plans d’urgence et nous nous assurerons bien sûr d’être présents (...) pour garantir la protection de tous les Canadiens tout au long de l’été».

Pendant ce temps, le chef des conservateurs de l’opposition, Pierre Poilievre, qualifie les discussions sur les incendies et le changement climatique de distraction. Il a plutôt continué à plaider pour l’élimination de la soi-disant «taxe carbone» afin de permettre aux sociétés pétrolières et aux grandes entreprises de polluer en toute impunité. Mise en œuvre par le gouvernement Trudeau en 2018 avec la promesse de réduire les émissions de carbone à l’origine du changement climatique, la mesure n’a jamais atteint ses objectifs déjà insuffisants.

Alors que le monde connait des records de chaleur cette année, de l’Amérique du Nord à l’Asie et à l’Europe, et que d’autres effets tels que les inondations soudaines deviennent plus fréquents, il est évident que le changement climatique est un problème mondial et qu’il n’y aura donc pas de solution trouvée au niveau national ou dans les limites du système capitaliste de l’État-nation. Seul un mouvement de la classe ouvrière uni à l’échelle internationale et armé des connaissances scientifiques les plus récentes sera en mesure de faire face à la catastrophe grandissante provoquée par le changement climatique au Canada et dans le monde entier.

(Article paru en anglais le 13 juillet 2023)

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