Suppression des prestations de santé des 1.400 travailleurs en grève de National Steel Car au Canada

Le Comité de base des travailleurs de National Steel Car (National Steel Car Rank-and-File Committee – NSC-RFC) tiendra une réunion publique le jeudi 6 juillet à 19 h, heure de l’Est. Le Comité encourage tous les travailleurs de National Steel Car et de tout autre secteur de l’industrie et de la fabrication au Canada et aux États-Unis à s’inscrire pour assister à cette réunion. Pour contacter directement le comité, envoyez un courriel à nscrfc@gmail.com.

La grève des 1.400 travailleurs de l’usine National Steel Car située à Hamilton, en Ontario, est entrée mardi dans sa sixième journée. Les travailleurs, qui fabriquent des wagons pour certains des plus grands chemins de fer de classe I, luttent pour obtenir des augmentations de salaire supérieures à l’inflation, l’abolition des divers niveaux de salaires et de pensions et la fin des conditions de travail dangereuses en usine.

Les travailleurs de NSC sont confrontés à l’un des employeurs les plus impitoyables au Canada, dont les pratiques de gestion ont entrainé la mort de trois travailleurs sur les lieux de travail en autant d’années, et à la bureaucratie syndicale du Syndicat des Métallos (United Steelworkers – USW) qui refuse de mener toute lutte véritable contre l’entreprise.

Manifestation de travailleurs devant l’usine National Steel Car de Hamilton, en Ontario, le jeudi 9 juin 2022. L’usine a connu trois décès en tout depuis que Quoc Le, un travailleur de 51 ans, a trouvé la mort dans un horrible accident de travail. [Photo: Hamilton and District Labour Council [Photo: Hamilton and District Labour Council ]


Les grévistes sont en position de force pour l’emporter. Leur lutte s’inscrit dans le cadre d’une recrudescence de la lutte des classes partout en Amérique du Nord, avec notamment la grève de 7.400 débardeurs sur la côte ouest au Canada lancée samedi dans les ports de la Colombie-Britannique. Chez Wabtec à Erie, en Pennsylvanie, où les ouvriers construisent des locomotives, plus de 1.400 d’entre eux sont également en grève à moins de 160 km de l’usine NSC.

La tâche urgente des travailleurs de NSC est d’unifier leur lutte avec ces travailleurs et les autres sections de la classe ouvrière dans une contre-offensive commune contre les demandes incessantes de concessions de l’élite entrepreneuriale et le maintien de conditions de travail dangereuses.

Démontrant le mépris qu’éprouve la direction de NSC à l’égard des grévistes, des travailleurs signalent au World Socialist Web Site (WSWS) que l’entreprise vient de supprimer leurs prestations de santé. Les travailleurs doivent maintenant payer de leur poche des centaines de dollars pour des procédures de base dans des conditions où les maigres 260 dollars par semaine d’indemnités de grève fournis par le fonds de grève gargantuesque de 850 millions de dollars du Syndicat des Métallos n’entreront en vigueur qu’après plusieurs semaines de grève.

Résumant l’indignation qui règne sur les piquets de grève à l’égard de l’entreprise et de ses complices de la bureaucratie syndicale, un travailleur déclare au WSWS: «Les membres en ont assez d’être manipulés à chaque fois qu’ils vont en négociations, comme ils en ont aussi assez des augmentations constantes des chiffres de production pour le travail à la pièce, sans même que l’on pense à leurs temps de pauses ou pour manger, ou encore au temps nécessaire pour tout nettoyer et s’assurer que tout est sécuritaire. En plus, nous sommes intimidés par les cadres supérieurs qui descendent sur la ligne et intimident les travailleurs. Nous sommes également épuisés qu’il n’y ait toujours pas eu de changement après les pertes de vies humaines que nous avons subies au cours des trois dernières années.»

Juste avant le début de la grève, jeudi dernier, la direction de l’entreprise a pris contact avec le comité de négociation des Métallos et a proposé une augmentation salariale supplémentaire insultante de 1 % de plus pour la première année de l’entente de principe, accompagnée d’une prime dérisoire de 500 dollars à la signature. Cela montre clairement que la soi-disant «dernière meilleure offre et finale» de l’entreprise était un mensonge. Même avec l’offre légèrement améliorée, les travailleurs recevraient une augmentation insuffisante de 5 % la première année, suivie de 3 % pour les deux années suivantes.

L’offre initiale, que les travailleurs ont rejetée à 52 %, prévoyait des augmentations salariales annuelles inférieures à l’inflation (4 %, 3 % et 3 %, respectivement), maintenait le système brutal et détesté du travail à la pièce, et conservait le système de salaire et de pension à deux niveaux, accepté par le Syndicat des Métallos lors des contrats précédents.

Les travailleurs de la base chez NSC n’avanceront pas d’un pas tant que cette grève restera entre les mains de la bureaucratie nationaliste et pro-patronale du Syndicat des Métallos, dirigée dans l’usine par le président de la section locale 7135, Frank Crowder. Pour faire progresser leur lutte, les travailleurs doivent rejoindre et construire le Comité de base des travailleurs de National Steel Car (National Steel Car Rank-and-File Committee – NSC-RFC), qui représente les intérêts des travailleurs sur le terrain.

La bureaucratie du Syndicat des Métallos cherche à montrer qu’elle est bien militante auprès des grévistes en feignant se réjouir de leur rejet immédiat de l’offre légèrement améliorée faite par l’entreprise juste avant le début de la grève. Mais cela soulève la question suivante: pourquoi le comité de négociation du Syndicat des Métallos n’a-t-il pas immédiatement rejeté l’offre initiale encore plus mauvaise de l’entreprise? Pourquoi le syndicat a-t-il déclaré, lors de sa séance d’information tenue le 25 juin, qu’il ne pouvait pas recommander de voter pour ou contre?

La réponse est simple. Le prétendu «rejet» par le comité de négociation de l’offre de dernière minute de l’entreprise n’est rien d’autre qu’un stratagème destiné à détourner l’attention des travailleurs de la réalité, à savoir que l’entreprise et la bureaucratie syndicale sont du même côté, comme c’est le cas depuis de nombreuses années.

Si le comité de négociation avait fermement soutenu un vote négatif sur l’entente de principe et engagé les ressources du Syndicat des Métallos de façon à mener et gagner la grève, la confiance des travailleurs en aurait été considérablement renforcée et l’entente de principe aurait été rejetée de façon retentissante. En réalité, le refus de la bureaucratie du Syndicat des Métallos de prendre position et de proposer une stratégie de lutte contre l’entreprise a eu pour effet de démoraliser une partie des travailleurs, entraînant un rejet de seulement 52 %.

Le syndicat compte sur les immenses pressions financières engendrées par les paiements de grève de famine pour convaincre les travailleurs d’accepter la prochaine entente syndicale-patronale. L’appareil du Syndicat des Métallos isole intentionnellement les grévistes, ne faisant rien pour mobiliser le soutien des 1.200.000 membres des United Steelworkers (USW). Les travailleurs ont eu droit à une poignée de visites de bureaucrates syndicaux et de politiciens locaux sur leurs piquets de grève, le temps de quelques séances de photos et déclarations de «solidarité». Le Nouveau Parti démocratique (NPD), qui prétend frauduleusement défendre les travailleurs tout en soutenant le gouvernement libéral fédéral favorable à l’austérité et à la guerre, n’a publié aucune déclaration officielle sur la grève.

La trahison du Syndicat des Métallos ne peut pas être expliquée en se contentant de dire que c’est à cause de tel ou tel bureaucrate mauvais. La bureaucratie syndicale est composée de bureaucrates qui sont bien payés ou en devenir, et dont les privilèges reposent sur le système de négociation collective syndical-patronal-gouvernemental. Elle partage les intérêts des capitalistes comme Greg Aziz, propriétaire de NSC, Doug Ford, le premier ministre conservateur de l’Ontario, et Justin Trudeau, le premier ministre libéral, et non pas ceux des travailleurs de la base. L’intégration des syndicats comme le Syndicat des Métallos, dans des alliances corporatistes avec la grande entreprise et les gouvernements, est soulignée par la récente nomination de l’ancien président du Syndicat des Métallos, Leo Gerard, en tant que «Compagnon de l’Ordre du Canada». Gerard a joué un rôle clé dans l’imposition des mesures de guerre commerciale poursuivies par le gouvernement Trudeau et l’administration Trump afin de créer les assises pour permettre aux deux puissances impérialistes d’Amérique du Nord de faire la guerre à la Russie et à la Chine.

Le NSC-RFC, créé par les travailleurs pour enlever des mains le contrôle de leur lutte à la bureaucratie du Syndicat des Métallos, met de l’avant une perspective diamétralement opposée fondée sur la nécessité urgente d’unifier les luttes de tous les travailleurs à l’échelle internationale. Comme le déclarait le NSC-RFC dans sa déclaration fondatrice:

Le Syndicat des Métallos est un fervent défenseur du nationalisme canadien, qui nous divise de nos frères et sœurs de classe d’ailleurs en Amérique du Nord. Il est également un soutien essentiel au gouvernement libéral de Trudeau, qui est en faveur de la guerre et de l’austérité, et qui lui-même s’appuie sur un partenariat étroit avec la bureaucratie syndicale pour imposer des attaques pro-patronales contre les droits et les conditions de travail des travailleurs.

Face à cela, nous proposons d’affilier notre comité de base à l’Alliance ouvrière internationale des comités de base (IWA-RFC). La raison d’être de l’IWA-RFC est d’unifier les luttes de la classe ouvrière à travers le monde dans une contre-offensive contre le programme de guerre de classe de l’élite dirigeante: guerre impérialiste, attaques contre les droits démocratiques et austérité.

La grève à NSC peut et doit servir de point de départ au développement d’un tel mouvement. NSC occupe une position importante dans l’économie nord-américaine, que les grévistes peuvent utiliser pour mettre l’entreprise à genoux. Ses wagons sont utilisés par les principaux chemins de fer de classe I. Tout arrêt de production de ces wagons et refus des cheminots de les déplacer entraîneront des perturbations dans la chaîne d’approvisionnement.

Dans sa dernière déclaration, le NSC-RFC propose précisément un tel élargissement de la lutte:

«Nous savons qu’un Comité de base des cheminots a été créé lors de la récente lutte contractuelle aux États-Unis, lorsque l’administration Biden ET les diverses bureaucraties «syndicales» ont fait avaler aux travailleurs un contrat de vendus, notamment en participant à l’adoption d’une loi criminalisant toute action syndicale des travailleurs. Les wagons de chemins de fer construits ou modifiés par National Steel Car portent la marque NSCX. Nous lançons un appel à tous nos frères et sœurs de classe de partout en Amérique du Nord: si vous travaillez dans une gare de triage et que vous voyez cette marque, mettez le wagon de côté et laissez-le pourrir! Ne laissez pas NSC nous escroquer et gagner de l’argent alors que nous sommes en grève!»

(Article paru en anglais le 4 juillet 2023)

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